Un système à repenser - Le Moniteur des Pharmacies n° 2549 du 18/09/2004 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2549 du 18/09/2004
 

CYCLAMED

Actualité

L'événement

L'information publiée en juin dans « Le Moniteur » sur les détournements de médicaments Cyclamed a été largement reprise par la presse grand public. Au-delà de la polémique, se pose désormais l'avenir du système.

Faut-il supprimer le circuit Cyclamed ? Si on le conserve, comment le sécuriser ? C'est pour répondre à ces questions que la Direction générale de la santé et l'ordre des pharmaciens se sont retrouvés mardi Avenue de Ségur pour une réunion de crise. Mais la réflexion sur ce circuit de récupération ne date pas d'hier. Un décret encadrant davantage le système est en attente de finalisation et de signature aux ministères de la Santé et de l'Ecologie (lire encadré p. 11).

Le ministère de l'Ecologie s'interroge sur le sujet depuis plusieurs années : « On a maintenu ce système, qui n'a jamais eu qu'une approbation et non un agrément, en raison de son aspect humanitaire. Or le ministère de la Santé nous a précisé qu'il réfléchit à une évolution du système, l'aspect humanitaire n'étant plus prépondérant. Qui plus est, on ne sait pas vraiment ce que fait Cyclamed avec ses déchets. » En substance, le ministère de l'Ecologie estime que l'industrie pharmaceutique a créé sa propre filière, moins chère qu'Eco-Emballages mais aussi « beaucoup moins efficace » (voir ci-dessous). Moins chère notamment parce qu'une partie de la récupération est assurée gratuitement par les pharmaciens et les grossistes. Or « les pharmaciens en ont assez de Cyclamed ! », a assuré Jean-Luc Audhoui, trésorier de l'Ordre, évoquant un « circuit poubelle » auprès de nos confrères de l'APM. « Cyclamed a prouvé ses limites. J'espère pour l'année prochaine un nouveau système qui pourrait être une refonte de Cyclamed ou la création d'un tout nouveau système. »

Du côté de l'association Cyclamed et du Leem, on se fait pour l'instant discret dans l'attente de réunion de travail où elles seront conviées.

« Peur de passer pour des magouilleurs ».

L'hostilité de l'Ordre à l'égard de Cyclamed, fondée entre autres sur les recommandations de l'OMS contestant l'utilité humanitaire des médicaments non utilisés (MNU), rejoint celle de PSF-Comité international qui vient de réitérer son opposition aux dons de MNU. Le son de cloche est évidemment différent du côté d'associations comme l'Ordre de Malte ou Pharmacie humanitaire internationale (PHI, ex-PSF-Union France). « Bien triés, les MNU peuvent être tout à fait conformes pour des destinations comme les pays de l'Est, contrairement à l'Afrique par exemple, assure Jean-Marc Merle, président de PHI. Quant au système, soit on conserve Cyclamed, et la profession élimine ses brebis galeuses, soit on décide de tout détruire et on ne passe plus par le pharmacien. Mais n'oublions pas que Cyclamed a été créé pour que les médicaments ne se retrouvent pas dans les poubelles. »

Bernard Capdeville, président de la FSPF, cofondatrice de Cyclamed, souligne cet aspect : « Certains pharmaciens ont tourné le dos au serment d'Hippocrate en détournant le système. Mais j'entends désormais d'autres confrères dire qu'ils vont arrêter Cyclamed, de peur de passer pour des magouilleurs. Or, si on arrête ce circuit, le risque sanitaire continuera de courir ! » Pour Patrick Martin, président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique, l'arrêt de Cyclamed constituerait aussi « un facteur de risque sanitaire ».

Sécuriser le système.

Préserver Cyclamed donc, mais dans quelles conditions ? En séparant l'emballage du blister, suggère l'APLUS, qui demande aux officinaux de suspendre complètement la collecte le temps de sécuriser le ramassage. « Le détournement de Cyclamed est plus courant que ce que l'on croyait, admet Patrick Zeitoun, vice-président de l'APLUS. Il faut nettoyer tout cela pour retrouver la confiance du consommateur. » L'APLUS souhaite aussi proposer aux Français de jeter la boîte en carton et la notice dans les poubelles de recyclage traditionnelles utilisées dans le cadre du tri sélectif mis en place par les communes. L'USPO évoque un système identique (« faute de mieux pour le moment) : « Aujourd'hui, force est de constater que Cyclamed ne fait pas de recyclage des cartons, mais les brûle et que sa fonction humanitaire est contestée par l'OMS, explique Gilles Bonnefond, secrétaire général de l'USPO. Nous devons éviter à la profession le supplice de Tantale. »

« Modifier le système ou l'abandonner serait un aveu pour la profession, affirme Alain Morin, président du Syndicat des pharmaciens inspecteurs de santé publique, qui prône la peur du gendarme : une campagne ciblée d'inspections et des sanctions lourdes. Claude Japhet, président de l'UNPF, estime que c'est à l'Ordre de faire le ménage. « Il est garant de la moralité de la profession. Dans cette affaire, ce n'est pas Cyclamed qui en cause mais des pharmaciens. On n'interdit pas le football parce qu'il y a des hooligans. On sanctionne les hooligans. » A cet égard, la FSPF et PHI demandent à l'Ordre de les tenir au courant des affaires qui sont mises au jour afin de pouvoir s'y porter partie civile.

A noter

DES PISTES

Mettre fin à Cyclamed, inclure le médicament dans le circuit classique de récupération des déchets ménagers, créer un circuit spécifique à l'extérieur de l'officine (conteneurs inviolables), ramener le blister seul à l'officine, apposer le cachet de l'officine sur les cartons Cyclamed (traçabilité), multiplier contrôles et sanctions, apposer une étiquette d'inviolabilité sur chaque boîte pour éliminer le risque de santé publique...

Cyclamed versus Eco-Emballages

- Dans le cadre de la société Eco-Emballages*, les industriels paient en fonction de deux barèmes : d'une part le poids (sachant que la contribution est plafonnée à 1 kg quel que soit le poids de l'emballage au-delà), d'autre part le nombre d'éléments d'emballage et la qualité du conditionnement en termes d'impact environnemental. « Un système qui aurait coûté cher à l'industrie pharmaceutique », précise un expert du recyclage. Il lui faudrait payer pour l'emballage lui-même, la notice, le blister, avec d'un côté le PVC, de l'autre l'aluminium...

Si Eco-Emballages semble bien plus efficace que Cyclamed en termes de recyclage des emballages, ce système n'est pas non plus la panacée. Il fait proportionnellement payer beaucoup plus cher pour les petits emballages et le taux de couverture des coûts ne dépasserait pas 30 à 45 %, personne ne contrôlant réellement si ce qui est payé par l'industrie est en rapport avec le volume d'emballages mis sur le marché. Eco-Emballages n'est semble-t-il pas épargné par ses propres « affaires ».

* Plus de 9 600 entreprises adhérentes, 240 actionnaires représentatifs des principaux secteurs industriels utilisateurs d'emballages, de la grande distribution et des cinq grandes familles de matériaux d'emballages (acier, aluminium, papiers carton, plastiques et verre).

Un projet de décret dans les ministères

- Ayant reçu à l'origine une « approbation » interministérielle, Cyclamed doit faire l'objet d'un décret lui donnant un agrément. De source ministérielle, le projet de décret élaboré par les ministères de l'Ecologie et de la Santé prévoit aussi une évolution du système, jugé « relativement bon » pour la récupération des médicaments, mais « pas du tout efficace » au niveau des emballages (seuls 5 % des emballages de médicaments seraient récupérés via Cyclamed). C'est pourquoi la mouture actuelle, en attente d'accord du ministère de la Santé, prévoit le remboursement par l'industrie pharmaceutique aux collectivités locales des coûts liés à « tout le travail qu'elles réalisent pour son compte ». A savoir la récupération et la destruction des 95 % restants. Une piste évoquée serait de continuer à solliciter les officinaux pour le tri initial (dans l'hypothèse où le volet humanitaire perdurerait), la séparation des éléments d'emballage et des produits pouvant être réalisée par les grossistes.

Sur ce dossier, l'aspect médicamenteux est du ressort du ministère de la Santé, et le reste de celui de l'Ecologie. Ce dernier semble pencher pour une séparation en deux filières de recyclage après la collecte, l'une pour le médicament, l'autre pour les emballages. Soit dans le cadre de Cyclamed, soit via un autre circuit à définir. Les deux entités n'étant visiblement pas d'accord sur tout, ce sera aux services du Premier ministre de trancher en vue du div final.

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