La porte étroite - Le Moniteur des Pharmacies n° 2514 du 13/12/2003 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2514 du 13/12/2003
 

Actualité

Enquête

Le marché de la santé et du bien-être est encore balbutiant au niveau des comités d'entreprise. L'enjeu est pourtant de taille : le budget des 33 857 comités d'entreprise représente presque 10 milliards d'euros. Mais si les pharmaciens ont le droit de travailler avec les CE, ils ne peuvent pas les démarcher, contrairement aux parapharmacies.

Il suffit d'interroger Exposium, organisateur de tous les salons dédiés aux comités d'entreprise, pour s'en rendre compte : on trouve de tout dans les CE, tourisme, loisirs, des services aux salariés comme la restauration, la billetterie, le logement, de la banque, des assurances, des prestations pour Noël et la rentrée scolaire. Mais il n'existe presque pas d'offre dans le domaine de la santé. « La forme, ça commence avec les cures de thalassothérapie proposées dans le cadre de voyages ou de séjours, explique Josette Rauzy, attachée de presse d'Exposium. Il y a également les massages en entreprise, les clubs de sports, une école d'ostéopathie - qui était présente au salon pour la seconde fois en février -, des week-ends de remise en forme. Côté produits, l'offre est très limitée et artisanale avec des produits provençaux à base d'huile d'olive. »

Seule exception sur les salons : Weekendesk. Cette société propose des coffrets cadeaux de fin d'année pour les particuliers et les entreprises : « coffret aventures » avec une quinzaine d'activités, « coffret week-end » qui référence 26 hôtels en France et, depuis début 2003, un « coffret bien-être » qui propose, pour 75 Euro(s) par personne, des soins dans une douzaine d'instituts de beauté parisiens (Villa Thalgo, Institut Payot, Institut Sothys...). « Les gens se tournent de plus en plus vers ce type de soins. Avec les comités d'entreprise, l'offre est intéressante car ils participent à concurrence d'un certain pourcentage aux cadeaux de fin d'année, explique Charles-Antoine Bodson, directeur commercial. Et les centres offrent des réductions de 40 %. Nous avons déjà vendu 6 000 coffrets, notamment à un grand cabinet de conseil et à l'un des plus importants équipementiers automobiles. » Mais ce package s'apparente uniquement à une offre de soins, ne comprenant pas d'achat de produits cosmétiques.

La santé, un marché alléchant.

Pas de parapharmacie, presque pas de produits de soins, cette absence n'étonne pas vraiment le Club des comités d'entreprise, un prestataire qui sert d'intermédiaire entre sociétés et CE. « Les comités d'entreprise ne sont pas informés de l'offre qui existe et font toujours appel aux mêmes prestataires de services, explique le service commercial. Ils dépensent toujours de la même façon en tourisme, sports, loisirs, gastronomie, réceptions, animations. Il existe un réel besoin des comités d'entreprise mais pour les toucher, il faut leur montrer qu'on a quelque chose pour eux. Les secrétaires de comités d'entreprise n'ont pas beaucoup de temps, 20 heures par mois à consacrer aux aspects juridiques ou comptables, guère pour le reste. » « Rien n'interdit aux pharmaciens de travailler avec des comités d'entreprise. Mais ils ne peuvent pas démarcher », précise Eric Fouassier, juriste à l'Ordre.

Pourtant le marché semble alléchant : il existe plus de 30 000 comités d'entreprise ou comités d'établissement en France, pour une population de 6 à 7 millions de salariés. Ils disposent au total d'un budget de près de 10 milliards d'euros. Une manne ! Or la santé fait florès : l'intérêt des Français est particulièrement marqué, comme le montre le succès des journaux grand public dans ce domaine. Quant au marché de la parfumerie et de la cosmétique, il est en constante augmentation (+ 5,7 % en 2002 pour un CA de 6,25 milliards d'euros hors taxes).

Pas de raison, a priori, d'ignorer cet important canal de distribution que représentent les CE. « L'activité la plus répandue aujourd'hui est la billetterie pour les spectacles, soit environ 75 %, précise Nicolas Dubost, gérant de Forma-CE. Mais rien n'interdit au comité d'entreprise d'être le centralisateur d'achats groupés de produits de pharmacie. Si on peut acheter de la parapharmacie, j'observe que peu de prestataires y ont pensé. » Mais attention aux miroirs aux alouettes !, tient-il à ajouter : « C'est d'abord un marché de petites structures. » 90 % des entreprises comptent en effet moins de 500 salariés. Autre condition : « Il ne faut pas que le produit soit cher car le prestataire perd son temps. Par nature, le coeur de cible est populaire. »

Le marché reste à donc défricher, le Club des comités d'entreprises l'a bien compris. La société démarche les entreprises via le site Internet, son traditionnel catalogue d'achats, les salons pour l'aspect relationnel, des CD-ROM. L'offre est pour le moins variée : à côté des voyages ou de la billetterie, se succèdent cures de thalassothérapie, séances de balnéothérapie, séances de pédicure ou de bronzage, massages, « toucher thaï », kinésithérapie, nutrition et une seule parapharmacie. « Le comité d'entreprise est un bon vecteur d'image pour le prestataire de services, mais nous ne proposons que quelques prestataires dans le même domaine par région pour éviter que les comités d'entreprise se retrouvent devant trop de choix à faire », souligne-t-on au Club des comités d'entreprise.

Parapharmacie, voyages, prêt-à-porter...

La parapharmacie Paraclaudie a décidé de se consacrer à ce nouveau marché et prospecte les CE d'Ile-de-France via le Club, les sites Internet dédiés aux CE et l'envoi direct de catalogues et CD-ROM de produits. Son credo ? Proposer, depuis 1994, date de sa création, des produits de parapharmacie à des prix très attractifs. Des prix obtenus grâce à des commandes groupées passées auprès des laboratoires avec d'autres parapharmacies et dont elle compte aujourd'hui faire bénéficier directement les salariés des entreprises.

Doreen Rutmann, la responsable de Paraclaudie, n'a pas répondu à nos questions mais présente de manière complète ses offres sur le web. On peut donc y retrouver tous les produits du type cosmétiques, soins pour le visage et le corps, dentifrices, crèmes solaires et des marques comme Lutsine, Onagrine, Klorane, etc., en obtenant des prix de 30 à 35 % inférieurs par rapport aux prix publics ou avec des remises allant jusqu'à 50 % lors des promotions exceptionnelles. « Pour commander, c'est très simple, il n'y a pas de volumes minimaux, nous tâchons toutefois de demander aux comités d'entreprise de regrouper les commandes des salariés en une seule fois pour une livraison unique », précise la responsable sur le site du Club des comités d'entreprise. Intérêt de l'offre : faire connaître la parapharmacie, toucher un grand nombre de clients à la fois et, pour les salariés, possibilité d'obtenir des produits à prix réduit sur son lieu de travail. Encore faut-il convaincre les CE. Tout dépend de la politique que chacun entend mener.

A la Régie des transports de Marseille, le budget est principalement dédié aux voyages et aux cadeaux de fin d'année : « Nous comptons 80 % de personnel masculin, nous leur proposons donc plutôt des colis de nourriture et des boissons. » A la MGEN, le CE ne propose pas de produits mais des prestations dans le cadre de programmes de centres de vacances et de thalassothérapie. L'essentiel du budget est consacré au tourisme, aux crèches et aux frais scolaires.

« Nous essayons de cibler les offres qui vont toucher beaucoup de monde, comme les chèques vacances, les bons de rentrée des classes, les parcs d'attraction, les week-ends, le sport et les vacances, explique Patricia Coestier, membre du CE du Crédit agricole du Nord-Pas-de-Calais (budget : 1,5 MEuro(s) pour 2 500 salariés). Quel est l'intérêt de vendre ce type de produits ? Il faudrait des tarifs suffisamment intéressants, alors que la métropole lilloise propose des officines et des parapharmacies à portée de main tout comme les grandes surfaces. C'est la même chose pour le vin, pour lequel nous avons fait durant des années des commandes groupées. Mais depuis que les gens disposent de grandes surfaces avec des tarifs attractifs, nous n'en faisons plus. »

On se dit en revanche intéressé au comité d'entreprise d'Air France Roissy-Charles-de-Gaulle, où travaillent 1 500 salariés : « Nous n'avons pas été démarchés pour ce type d'offre, sinon nous nous y serions penchés. Notre plus gros budget aujourd'hui est le restaurant d'entreprise, la médiathèque, la billetterie et, en moindre proportion, les voyages. »

« Organiser des achats de produits, que ce soit en parapharmacie ou dans d'autres domaines, n'est pas toujours évident, souligne par ailleurs Jean-François Frère, membre du CE du cabinet de conseil KPMG. Il est difficile d'organiser des achats, de passer des commandes car les 6 000 salariés sont dispersés sur différents sites. Ce ne serait pas gérable. Notre budget est limité, nous consacrons l'essentiel des prestations aux enfants des salariés, avec des colonies, des centres aérés. »

Un souci de logistique évoqué également par Jean-Pierre Beauvais, secrétaire du CE de Camaïeu Femmes, une chaîne de prêt-à-porter : « Les 2 500 salariés, 80 % de femmes, sont dispersés sur 350 magasins en France, et il est difficile de les contacter. On fonctionne surtout avec un service de billetterie, sous-traité à un prestataire qui dispose d'outils pour prendre les commandes, et d'un centre d'appels. Pour l'instant, nous cherchons surtout des enseignes de coiffure, de chaussures pour les bons d'achat de fin d'année. »

La chèque cadeau de plus en plus répandu.

Pour résoudre ce problème de logistique, la chaîne de parfumerie Nocibé propose des chèques cadeaux utilisables pendant un an sur tous les produits et soins d'instituts de ses 300 points de vente. Autre solution : des remises sont faites directement aux salariés qui disposent d'un comité d'entreprise. Il suffit que ce dernier passe pour inscrire sa société et tous les salariés bénéficient d'une carte Nocibé avec une remise de 5 % sur tous les produits.

Les laboratoires Yves Rocher, qui ont décidé de travailler en direct avec les comités d'entreprise, ont également opté pour le système des chèques cadeaux, ce qui résout les problèmes d'approvisionnement. Via son service « chèques cadeaux », le laboratoire de cosmétique végétale propose - via 600 centres de beauté, la vente par correspondance et l'Internet - deux types de chèques. Les chèques cadeaux pour la beauté représentent des bons d'achats de 10 ou 15 Euro(s) valables sur les 700 produits (hors soins instituts), même sur les promotions et les offres spéciales. Ils sont acceptés dans les 600 centres de France métropolitaine et en vente par correspondance. Ils sont valables au minimum durant un an sans montant minimal de commande et livrables sous 48 heures. Le comité d'entreprise bénéficie de 5 à 15 % de remise qui sont automatiquement accordés selon le barème suivant : 5 % pour une commande inférieure à 1 999 Euro(s), 10 % à partir de 7 500 Euro(s) et 15 % pour une commande supérieure à 45 500 Euro(s).

Les chèques cadeaux pour le bien-être sont des bons d'achats de 10 ou 15 Euro(s) valables sur tous les produits Yves Rocher mais également sur les soins esthétiques, dans tous ses magasins mais pas par correspondance.

A l'exception d'Yves Rocher, les laboratoires ne semblent donc guère intéressés par la vente directe aux comités d'entreprise. « Nous privilégions la prescription du dermatologue et le conseil du pharmacien », explique-t-on chez La Roche-Posay. Caudalie préfère passer par ses clients directs, essentiellement les pharmacies, tandis que Bioscreen, qui ne se dit pas favorable à ce mode de diffusion, développe prioritairement ses produits pour les pharmacies et les parapharmacies de la grande distribution. Le terrain reste donc à défricher.

Même réponse du côté des marques sélectives : Clarins se consacre au circuit sélectif et aux grands magasins. Mais rien n'empêche de s'approvisionner directement à la parfumerie du quartier. C'est le cas cité par Nicolas Dubost : « Une salariée élue d'un comité d'entreprise a acheté près de 1 800 euros de produits pour elle-même et plusieurs des salariés de son entreprise, sans avoir été déléguée. Le comité d'entreprise est un sésame qui lui a permis de se faire écouter et d'obtenir une remise de 30 %. »

Comment fonctionnent les comités d'entreprise

- Seuls les établissements de plus de 50 salariés ont l'obligation d'avoir un comité d'entreprise. On parle de comité d'établissement pour les entreprises qui disposent de plusieurs établissements distincts. Dans ce cas, les différents comités d'établissement désignent des représentants au comité central d'entreprise.

Dans le secteur public, on parle de structures assimilées : comités d'oeuvres sociales, comités d'action sociale, amicales du personnel...

- Le comité d'entreprise a droit également d'organiser des achats groupés auprès de prestataires. Dans ce cas, il ne peut pas revendre plus cher les produits aux salariés ni les vendre à perte car ce serait assimilé à du commerce. Le CE fait un chèque global et chaque salarié intéressé reverse ensuite un chèque au CE.

- Le comité d'entreprise gère librement les différentes activités sociales et culturelles de l'entreprise (bibliothèque et, dans certains cas, restaurant d'entreprise) et participe à la gestion des associations culturelles et sportives. Pour ce faire, il perçoit une contribution patronale. Il dispose d'un budget pour son fonctionnement égal à 0,2 % de la masse des salaires bruts.

- Le budget du CE est très variable selon la taille et le statut, privé ou public, de l'entreprise : le budget par salarié et par an est de 2 020 Euro(s) chez Dassault Aviation, 1 786 Euro(s) chez Eurocopter, 1 523 Euro(s)à la BNP, 1 452 Euro(s)chez Airbus, 1 354 Euro(s)chez EDF-GDF, 1 319 Euro(s)chez France Télécom, 1 123 Euro(s)à la Banque de France, 938 Euro(s)à La Poste, 882 Euro(s)à la RATP, mais 103 Euro(s) chez Décathlon, 52 Euro(s) chez Carrefour. -

(Source : « L'Expansion », mai 2003.)

A retenir

Au niveau des CE, il n'existe pratiquement pas d'offre concernant le domaine de la santé.

Les CE ne s'y intéressent pas, faute d'être démarchés...

Si les pharmacies ont le droit de travailler avec les CE, ils ne peuvent pas les démarcher.

Certaines parapharmacies essayent de pénétrer ce marché. Paraclaudie propose ainsi aux CE des marques comme Lutsine, Onagrine, Klorane... à des prix 30 à 35 % inférieurs aux prix publics, ou avec des remises allant jusqu'à 50 % lors de promotions exceptionnelles.

Les armoires à pharmacie des entreprises

« La plupart des entreprises disposent d'armoires à pharmacie qui contiennent des pansements, de l'aspirine, du Mercurochrome, précise la secrétaire du CE d'Adidas. Il y en une à chaque étage. Nous avons nommé à chacun des étages des personnes responsables de leur contenu, mais c'est moi qui en conserve les clés. »

Dans d'autres sociétés, de plus petite taille, c'est parfois tout simplement le service de gestion du personnel qui dispose d'une trousse de premiers soins. La responsabilité des achats n'incombe pas au CE mais aux services généraux ou à la direction des ressources humaines. « Nous avons besoin d'un nombre limité de médicaments, précise-t-on chez Adidas. Il n'y pas de budget fixé pour cet achat. Nous nous fournissons au fur et à mesure des besoins dans les pharmacies. »

La mise à disposition du vaccin antigrippal, que de plus en plus de sociétés proposent gratuitement à leurs salariés, est également à la charge de l'entreprise.

Chiffres

Il existe 33 857 CE en France qui disposent d'un budget total de 9,668 milliards d'euros. 13 000 CE sont présents dans des entreprises inférieures à 100 salariés, 9 800 dans des entreprises entre 100-199 salariés ; 6 500 entre 200 et 500 salariés ; 2 300 entre 500 et 1 000 salariés et 1 600 au-delà.

La région Ile-de-France compte à elle seule 23 % des CE pour 2,57 millions de salariés, et un tiers du poids économique total (3,02 MdEuro(s)).

Rhône-Alpes est la deuxième région française en nombre de CE (12 % du total soit 3 789 CE) et leur budget se monte à 980 millions d'euros, soit 10 % du poids économique total. Suit Provence-Alpes-Côte d'Azur avec 1 940 CE pour 720 00 salariés et un budget de 700 millions d'euros.

C'est l'Ile-de-France qui concentre les plus gros CE : 17 % font partie d'entreprises de plus de 500 salariés contre 10 % en PACA et 9 % en Rhône-Alpes.

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !