La rectocolite hémorragique - Le Moniteur des Pharmacies n° 2483 du 29/03/2003 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2483 du 29/03/2003
 

Cahier formation

l'essentiel La rectocolite hémorragique est une maladie inflammatoire chronique de l'intestin évoluant par poussées. Les lésions débutent par le rectum et remontent vers le côlon, sans jamais atteindre l'iléon. Les poussées de la maladie se traduisent par des émissions glairosanglantes impérieuses et fréquentes. Des signes extradigestifs peuvent accompagner les poussées : atteintes articulaires, cutanées, hématologiques et hépatobiliaires. Le risque de cancer colorectal augmente avec l'ancienneté des lésions. Le traitement repose sur les dérivés salicylés, les corticoïdes et les immunosuppresseurs. Salicylés et corticoïdes peuvent s'administrer par voie rectale sous forme de suppositoires, mousses ou lavements en cas de lésions distales. Les formes plus étendues nécessitent un traitement oral. L'exérèse chirurgicale du côlon et du rectum assure la guérison, tout en conservant l'anus naturel en cas d'anastomose iléo-anale.

ORDONNANCE

Une patiente déprimée souffrant de rectocolite hémorragique

Une rectocolite hémorragique (RCH) a été diagnostiquée il y a cinq ans chez cette pati ente de 29 ans. Elle est traitée par ailleurs pour une dépression depuis trois mois. Une nouvelle poussée de RCH nécessite l'adjonction d'un corticoïde à effet local au traitement d'entretien.

LE CAS

Madame R., 29 ans, 59 kg, non fumeuse, souffre d'une rectocolite hémorragique distale, diagnostiquée cinq ans auparavant. Une fois la poussée initiale maîtrisée, un traitement d'entretien par Fivasa 400 mg (4 comprimés par jour), avait été mis en place.

Par ailleurs, madame R. est suivie depuis trois mois par un psychiatre pour un épisode dépressif, associé à une insomnie d'endormissement.

Aujourd'hui, Mme R. consulte son gastroentérologue pour une nouvelle poussée de rectocolite hémorragique, caractérisée par 6 selles impérieuses par jour accompagnées de rectorragies.

Mme R. se plaint également d'asthénie. L'état général est conservé. Il n'y a pas de fièvre.

A l'examen, le toucher rectal ramène du sang. Les examens complémentaires radiologiques et biologiques (VS, NFS, recherche d'agents pathogènes dans les selles, ionogramme, albuminémie) ne montrent pas de complications particulières.

LES PRESCRIPTIONS

Ordonnance du gastroentérologue

-#gt; Fivasa : 1 comprimé matin, midi et soir qsp 2 mois

-#gt; Proctocort mousse rectale : 1 dose par jour pendant 2 semaines puis 1 jour sur 2 pendant 4 semaines

Ordonnance du psychiatre

-#gt; Deroxat 20 mg : 1 comprimé le matin

-#gt; Stilnox : 1/2 comprimé au coucher si nécessaire qsp 1 mois

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Cette ordonnance ne comporte pas d'interaction médicamenteuse.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Le dosage de Fivasa n'est pas précisé alors qu'il existe deux dosages différents : Fivasa 400 mg et Fivasa 800 mg. La posologie indiquée de trois comprimés par jour est compatible avec l'une ou l'autre de ces deux spécialités. Une imprécision demeure sur le dosage à délivrer.

Toutes les autres posologies sont correctes.

AVIS PHARMACEUTIQUE

Il est d'usage de délivrer le plus petit dosage d'un médicament en l'absence de précision de la part du prescripteur. Toutefois il serait ici illogique de délivrer le plus petit dosage de Fivasa. En effet, l'historique de délivrance des prescriptions, confirmé par madame R., montre une prescription habituelle en période de rémission de 4 comprimés par jour de Fivasa 400 mg, soit 1,6 g de mésalazine par jour. En période de crise aiguë, cette posologie est généralement augmentée pendant quelques semaines jusqu'à 3,2 g de mésalazine par jour. Après appel du médecin, celui-ci confirme la prescription de Fivasa 800 mg à raison de trois comprimés par jour, soit 2,4 g de mésalazine.

INITIATION DU TRAITEMENT

Traitement d'entretien de la RCH

La rectocolite hémorragique est une maladie chronique inflammatoire du tube digestif qui alterne des phases de rémission et des poussées aiguës. Une fois la poussée initiale de RCH jugulée, un traitement d'entretien par un dérivé salicylé (en général mésalazine) est instauré en fonction de la gravité de la poussée et de l'aspect endoscopique des lésions.

Plusieurs spécialités à base de mésalazine existent, chacune ayant adopté une formulation pour ne libérer le principe actif qu'in situ dans le côlon, ce qui est indispensable à son efficacité. Fivasa est une formulation gastrorésistante de mésalazine qui satisfait à cet impératif.

En période de poussée

Le diagnostic de nouvelle poussée de RCH est essentiellement clinique. Les examens biologiques aident à apprécier la gravité de la poussée en précisant le degré d'anémie, d'hyperleucocytose (polynucléose neutrophile), d'hypoprotidémie, d'hypoalbuminémie (en rapport avec une dénutrition) et les éventuelles perturbations de l'ionogramme sanguin (hypokaliémie, hyponatrémie, acidose métabolique). Les résultats biologiques de madame R. ont confirmé le syndrome inflammatoire (VS augmentée, hyperleucocytose), mais la NFS et l'ionogramme ne sont pas perturbés. La coproculture et l'examen parasitologique des selles sont négatifs.

Pour juguler cette crise aiguë, la posologie de mésalazine per os est augmentée et un corticoïde est adjoint au traitement.

Le choix d'une forme locale (Proctocort) plutôt que systémique est possible car madame R. souffre d'une forme distale de RCH, accessible au traitement par voie basse. La forme locale limite les effets secondaires de la corticothérapie, même si elle ne les élimine pas totalement.

Traitement de la dépression

Le choix d'un antidépresseur ne nécessitant qu'une prise journalière assure une meilleure observance. Les symptômes d'insomnie ponctuelle sont pris en charge par Stilnox, à la demande.

Contacter le médecin

Ne pas délivrer systématiquement le dosage le plus faible en l'absence de précision. Faire confirmer le dosage de Fivasa.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

-#gt; Fivasa (mésalazine ou acide 5-aminosalicylique)

- Anti-inflammatoire intestinal (salicylé).

- Indiqué notamment dans le traitement d'attaque des poussées légères à modérées de rectocolite hémorragique (RCH) et son traitement d'entretien.

- La posologie usuelle est de 1,6 à 3,2 g par jour dans le traitement d'attaque et de 0,6 à 1,6 g dans le traitement d'entretien.

-#gt; Proctocort (hydrocortisone)

- Anti-inflammatoire stéroïdien.

- Indiqué dans le traitement de la RCH, de la rectite et de la maladie de Crohn.

- La posologie usuelle est de 1 dose par jour pendant 2 semaines puis une dose tous les 2 ou 3 jours, les 4 semaines suivantes.

-#gt; Stilnox (zolpidem)

- Imidazopyridine hypnotique apparentée aux benzodiazépines.

- Indiqué dans le traitement des insomnies occasionnelles, transitoires ou chroniques.

- Pour l'adulte de moins de 65 ans, la posologie est de 1 comprimé par jour à prendre immédiatement avant le coucher. Le traitement doit être aussi bref que possible, de quelques jours à 4 semaines au maximum.

-#gt; Deroxat (paroxétine)

- Inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS), antidépresseur.

- Indiqué notamment dans les épisodes dépressifs majeurs, la prévention des attaques de panique et les troubles obsessionnels compulsifs.

- La dose initiale est de 20 mg/jour. Elle peut être réévaluée par paliers de 10 mg après trois semaines de traitement, jusqu'à une posologie maximale de 50 mg/jour chez l'adulte de moins de 65 ans.

SUIVI DU TRAITEMENT

- Fivasa

Le traitement par mésalazine implique une surveillance biologique de la fonction rénale. Le traitement prolongé par Fivasa nécessite une recherche de protéinurie et une évaluation de la fonction rénale (clairance à la créatinine) deux fois par an.

- Proctocort

Après instillation rectale, le corticoïde a une action mixte : locale et systémique. Comme pour une forme orale, il peut donner lieu à des effets indésirables et nécessiter un sevrage par paliers pour éviter une rechute rapide de la maladie.

A la fin des six semaines de traitement par Proctocort, le gastro-entérologue prescripteur jugera de la nécessité ou non de poursuivre le traitement en fonction de l'état clinique de la patiente. Si besoin, il effectuera une coloscopie de contrôle.

- Deroxat

Le retentissement de la RCH sur la qualité de vie et la psychologie de la malade n'est pas à négliger. Le traitement d'un épisode dépressif est en général de l'ordre de 6 mois au minimum afin de prévenir une éventuelle rechute. Pour éviter la récidive de l'état dépressif, l'arrêt du traitement ne sera pas brutal mais s'étalera sur plusieurs semaines avec une augmentation du rythme des consultations durant la phase de sevrage. La surveillance du traitement est essentiellement clinique. Une psychothérapie associée au traitement médicamenteux peut permettre une optimisation de la prise en charge de la patiente.

- Stilnox

La prise de Stilnox doit être aussi brève que possible et son indication doit être réévaluée régulièrement. Le traitement prolongé peut entraîner une pharmacodépendance psychologique ou physique. A la fin d'une utilisation prolongée, la posologie doit être réduite graduellement pour ne pas induire de symptômes de sevrage.

CONSEILS À LA PATIENTE

PLAN DE PRISE CONSEILLÉ -#gt; Fivasa 800 mg : prendre les comprimés au cours des repas. -#gt; Proctocort : bien secouer le flacon au moins 20 secondes avant l'administration. Se coucher sur le côté et introduire l'embout dans le rectum. Ne pas introduire le poussoir du flacon dans l'anus (risque de perforation). Il n'y a pas d'obligation à rester allongé après application. La mousse est habituellement bien tolérée et gardée par le patient. -#gt; Deroxat 20 mg : prendre le comprimé au cours du petit déjeuner. Eviter la conduite de véhicules ou de machines pendant toute la durée du traitement. -#gt; Stilnox : la prise se fera immédiatement avant le coucher et uniquement en cas d'insomnie.

Eviter l'automédication

- Le lopéramide est contre-indiqué pendant les poussées de RCH par risque de colectasie.

- Éviter les antitussifs codéinés qui renforcent l'effet sédatif du traitement psychotrope.

- Les AINS et les salicylés peuvent provoquer une poussée de la maladie. Ils augmentent les effets ulcérogènes, les risques d'hémorragie digestive...

Pendant l'épisode de diarrhée

- Suivre un régime pauvre en résidus et en lactose. Supprimer les fibres (fruits, crudités, légumes, céréales) et les légumes secs.

- Augmenter les apports en sel et en eau. Alterner boissons sucrées (y compris celles à base de cola) et boissons salées (potages).

- Arrêter le régime dès que l'état clinique s'améliore.

Revenir à un régime normal en dehors des poussées

En dehors des poussées, l'alimentation doit être absolument normale. Il faut surtout veiller à un apport suffisant en calories et en protéines pour éviter l'amaigrissement.

Interdire tout régime restrictif, souvent responsable de dénutrition. En revanche, fractionner les repas.

Consulter le médecin traitant en cas de perte de poids.

Eviter l'alcool

La prise d'alcool (contenu dans des boissons ou des médicaments) doit être évitée pendant le traitement par Deroxat et Stilnox. Il existe un risque de baisse de la vigilance (lors de la conduite automobile ou de l'utilisation de machines) car les effets dépresseurs du SNC sont majorés, entraînant une élévation des effets sédatifs.

De plus l'alcool est un fort stimulateur de la sécrétion gastro-intestinale acide et doit être évité en cas de rectocolite hémorragique.

Ne pas systématiser la prise de Stilnox

Rappeler à la patiente de prendre Stilnox seulement en cas de difficultés à l'endormissement et/ou d'insomnie, en évitant une prise régulière au-delà d'un mois pour ne pas subir les effets d'une pharmacodépendance.

Par L. Chorfa-Bakir-Khodja, M. Farines et le Pr J. Calop, CEEPPPO, CHU de Grenoble

PATHOLOGIE

Qu'est-ce qu'une rectocolite hémorragique ?

La rectocolite hémorragique est une maladie inflammatoire chronique de l'intestin tou chant le rectum et/ou le côlon dont l'évolution est faite d'une succession de périodes de poussées aiguës entrecoupées de phases de rémission durant lesquelles la maladie reste totalement silencieuse.

ÉPIDÉMIOLOGIE

L'incidence de la RCH est estimée à 3 à 6 nouveaux cas par an pour 100 000 habitants. La prévalence est de 30 à 100 cas pour 100 000 habitants, en progression durant ces dernières décennies. Il existerait une discrète prédominance féminine. De plus, la prévalence est plus élevée en Europe du Nord-Ouest et aux Etats-Unis. La RCH est plus rare chez les patients de race noire mais est en progression ces dernières années, ce qui fait suggérer un facteur environnemental dans le déclenchement de la maladie.

L'âge moyen de début de la maladie se situe entre 15 et 30 ans. Une atteinte d'un autre membre de la famille est retrouvée dans 10 à 15 % des cas.

Le tabac semble être un élément protecteur pour la RCH, contrairement à son impact dans la maladie de Crohn.

PHYSIO-PATHOLOGIE

Aucun facteur étiologique n'a encore été démontré. Le schéma physiopathologique actuellement accepté fait intervenir : un terrain génétiquement déterminé facilitant et un probable cofacteur exogène qui induit une activation du système immunitaire intestinal. La participation d'un mécanisme auto-immun est probable dans la RCH. En effet, la présence d'anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) est constatée chez 23 % à 88 %, selon les séries, des malades atteints de RCH. La présence d'ANCA ne serait pas liée à la localisation ou à l'activité de la RCH.

Des théories infectieuses ont été proposées mais jamais confirmées. Le concept psychosomatique n'a jamais été prouvé. Dans les modèles animaux, et maintenant chez l'homme, la flore intestinale semble jouer un rôle important dans l'entretien et très probablement dans l'induction de la maladie.

SIGNES CLINIQUES

Les lésions inflammatoires au cours de la RCH débutent constamment au niveau du rectum et peuvent remonter vers le côlon en réalisant au maximum une pancolite. L'iléon est toujours normal. Les lésions sont continues sans intervalle de muqueuse saine.

Le pronostic des poussées dépend de la profondeur des ulcérations coliques et de l'extension de la maladie sur le côlon.

Signes digestifs

Les signes dépendent pour partie de le topographie des lésions. Cette dernière est schématiquement la suivante : rectite : 40 %, rectosigmoïdite : 30 %, atteinte dépassant l'angle gauche : 15 %, pancolite : 15 %.

- Rectosigmoïdite de faible et moyenne intensité

Il s'agit le plus souvent d'un patient jeune qui se plaint d'émissions glairosanglantes, impérieuses et le plus souvent afécales. Il peut y avoir des selles moulées avec présence de glaire et de sang mais, en cas d'atteinte étendue du sigmoïde, il existe en général une diarrhée glairosanglante constituée d'un nombre variable de selles ou d'émissions afécales. Le nombre de selles quotidiennes est très important puisqu'il constitue un des critères de gravité de la poussée. Il existe des faux besoins et des épreintes : il s'agit de douleurs siégeant dans le bas-ventre à type de spasme et qui précèdent le selle qui est impérieuse.

Dans cette forme modérée, il n'y a pas de retentissement biologique.

- Rectite isolée

Dans ce cas, le patient présente des émissions glairosanglantes et des faux besoins. Il n'existe en général pas de douleur ni de véritable diarrhée. La rectite isolée se caractérise parfois par sa médiocre réponse au traitement. Un des diagnostics différentiels en cas de rectorragie isolée est la maladie hémorroïdaire : dans ce cas, les saignements sont non mélangés aux selles contrairement à la RCH.

- Forme sévère et colite grave

Le tableau clinique comporte le plus souvent des émissions glairosanglantes, des douleurs abdominales incessantes, de la fièvre. Il existe une altération de l'état général avec un amaigrissement. Une tachycardie et des manifestations extradigestives sont souvent présentes.

A l'examen, on doit rechercher une défense ou une contracture généralisée qui pourrait témoigner d'une perforation intestinale. Le toucher rectal peut provoquer une douleur au cul-de-sac de Douglas traduisant une irritation péritonéale et parfois des ulcérations rectales profondes. Cela signifie qu'il existe des ulcérations très profondes se traduisant par des suffusions inflammatoires irritant le péritoine. Ceci doit faire craindre la survenue prochaine d'une péritonite en l'absence d'un traitement adapté.

Biologiquement, il existe en général un syndrome inflammatoire sévère avec une augmentation de la vitesse de sédimentation, une hyperleucocytose et une anémie. Une hypoalbuminémie, témoin d'une exsudation protéique, peut également être constatée.

Ce tableau dit de colite grave est une urgence qui nécessite une hospitalisation dans un milieu spécialisé. On réalise en urgence une radio d'abdomen sans préparation afin de rechercher une colectasie qui justifierait une colectomie en urgence. On effectue également avec beaucoup de prudence une coloscopie qui confirme habituellement la présence d'ulcérations étendues profondes avec décollement muqueux. Un traitement médical associant nutrition parentérale et corticothérapie doit être débuté rapidement et en cas d'échec, une colectomie est réalisée.

LOCALISATIONS DE LA RCH L'extension des lésions peut exister d'emblée ou se constituer progressivement, au fil des poussées. Elle se fait alors toujours à partir du rectum et remonte vers le côlon droit. Lorsque les lésions régressent, l'amélioration commence toujours par la région la plus éloignée du rectum.

Signes extradigestifs

Outre les symptômes purement digestifs, les malades atteints de RCH peuvent présenter des signes extradigestifs touchant différents organes. Dans la majorité des cas, ces symptômes se voient au cours d'une poussée.

- Atteintes articulaires

Quel que soit leur type, les manifestations rhumatismales sont de 20 à 50 fois plus fréquentes chez les malades atteints de RCH que dans la population générale. Le mécanisme pathogénique n'est pas connu. Deux grands aspects peuvent être décrits.

-#gt; Polyarthrites subaiguës : leur fréquence est de 10 à 20 %. Elles réalisent une inflammation asymétrique touchant les grosses articulations (genoux, chevilles, coudes). Ces poussées sont souvent brèves et ne laissent habituellement aucune séquelle. Elles sont contemporaines des poussées. Une spondylarthrite peut précéder la RCH de plusieurs années.

-#gt; Rhumatisme axial : il s'agit d'une atteinte de l'articulation sacro-iliaque le plus souvent bilatérale. Elle est fréquente (20 % des cas) mais n'est pas toujours symptomatique.

Le rhumatisme axial n'est pas en relation avec l'évolution de la maladie intestinale.

- Atteintes vasculaire et hématologique

Il existe un risque accru d'accidents thromboemboliques. Leur incidence globale varie de 1,3 % à 6,4 %. Ils sont parfois graves avec un taux de mortalité élevé. Le rôle d'anomalies constitutionnelles ou acquises (microthrombi capillaires) reste discuté.

- Atteintes cutanée et muqueuse

Leur fréquence est variable et peut atteindre 40 % des malades.

-#gt; Aphtose : les aphtes buccaux sont souvent satellites des poussées aiguës de la maladie. On les retrouve dans 10 % des cas.

-#gt; Erythème noueux : dans 2 à 5 % des cas. Il s'associe aux poussées de la maladie d'autant plus qu'il existe des manifestations d'arthrite périphérique.

- Atteinte hépatobiliaire

-#gt; Cholangite sclérosante primitive : elle doit être recherchée systématiquement par un bilan biologique. La cholestase se traduit par une augmentation des phosphatases alcalines, des gammaGT et de la bilirubine. Le diagnostic est affirmé par les explorations radiologiques (échographie abdominale, scanner, IRM) et par la biopsie du foie.

-#gt; Cholangiocarcinome : il survient sur des lésions de cholangite sclérosante. Le diagnostic est assuré par les examens radiologiques. Le traitement est chirurgical. Le pronostic est médiocre dans la plupart des cas.

- Atteintes diverses

Il peut s'agir d'atteintes de l'oeil (uvéite antérieure), du pancréas ou d'amylose.

DIAGNOSTIC

Il n'existe pas de signe spécifique de la RCH. Le diagnostic est porté sur un faisceau d'arguments cliniques, endoscopiques, histologiques et évolutifs. Il repose sur :

-#gt; des signes cliniques évocateurs ;

-#gt; un syndrome inflammatoire biologique (hyperleucocytose, augmentation de la vitesse de sédimentation) ;

-#gt; l'élimination d'une colite bactérienne ou parasitaire par une coproculture et un examen parasitologique des selles ;

-#gt; une coloscopie avec iléoscopie : elle montre des lésions rectosigmoïdiennes à limite supérieure nette : la muqueuse est rouge et oedématisée, granitée, fragile, saignant spontanément ou au contact de l'endoscope avec parfois des ulcérations superficielles. Le reste du côlon et l'iléon apparaissent normaux ;

-#gt; des biopsies : les lésions histologiques de la RCH sont limitées à la muqueuse et à la sous-muqueuse. Elles sont homogènes, sans intervalle de muqueuse saine. Il existe un infiltrat lymphoplasmocytaire du chorion, des abcès cryptiques, une perte de la mucosécrétion. Contrairement à la maladie de Crohn, il n'existe jamais de granulome épithélioïde.

La radio d'abdomen sans préparation a pour seule utilité de dépister une colectasie (dilatation aiguë du côlon ou perforation). Le lavement baryté, autrefois pratiqué, n'a quasiment plus aucune utilité.

ÉVOLUTION ET COMPLICATIONS

L'évolution est marquée par la survenue de poussées entrecoupées de périodes de rémission. Le profil évolutif est très variable selon les malades : il peut y avoir de nombreuses années entre deux poussées. A l'inverse, une poussée peut être résistante au traitement médical usuel et faire appel à des traitements lourds voire le recours à une colectomie. Plus rarement, la RCH évolue sur un mode subintrant avec des manifestations cliniques peu intenses mais qui persistent et qui peuvent altérer la qualité de vie des patients.

- Colectasie ou mégacôlon toxique

Il s'agit d'une complication redoutable, survenant le plus souvent au cours des poussées sévères de la maladie et définie par une dilatation colique dont le diamètre dépasse 6 cm au niveau du transverse. C'est la conséquence d'une sidération de l'activité musculaire colique. Elle peut être spontanée ou provoquée par l'usage de frénateurs du transit (type lopéramide) qui doivent être proscrits. Il existe un risque de perforation se traduisant par une péritonite. C'est une urgence médicochirurgicale.

- Hémorragie digestive

Elle est rare au cours de la RCH mais constitue une urgence si elle n'est pas contrôlée.

- Cancer colorectal

Le risque de survenue d'un cancer colique est multiplié par 10 à 15 par rapport à la population générale. Le risque est d'autant plus grand que la maladie a débuté à un âge précoce, que la maladie dure depuis plus de 10 ans et qu'il s'agit de pancolite.

Le risque de cancer colorectal est du à l'apparition de dysplasie susceptible de se transformer en cancer d'abord in situ puis invasif. Une surveillance endoscopique doit être systématique, tous les deux ans après la dixième année d'évolution de la RCH.

Par le Dr Laurent Fayemendy, gastroentérologue à l'Hôpital suisse de Paris

THÉRAPEUTIQUE

Quels sont les traitements de la rectocolite hémorragique ?

Le traitement de la rectocolite hémorragique repose sur la prescription de salicylés, de corticoïdes ou d'immunosuppresseurs. L'exérèse chirurgicale du côlon et du rectum, avec confection d'une anastomose iléo-anale, éradique la maladie.

LES MÉDICAMENTS

Le traitement médicamenteux de la rectocolite hémorragique repose sur trois classes thérapeutiques : les salicylés, les corticoïdes et les immunosuppresseurs.

Les salicylés

Les aminosalicylés forment une famille de composés dont le principal principe actif est le 5-aminosalicylate (5-ASA, mésalazine), qui exerce son action de façon topique et doit donc être amené au contact de la muqueuse atteinte.

- Administration rectale

L'administration rectale remplit cette condition pour les formes distales de la maladie. Les formes rectales de mésalazine comportent lavements et suppositoires. Les lavements peuvent traiter des lésions étendues jusqu'au côlon gauche, et les suppositoires des lésions limitées au rectum. Le 5-ASA administré par voie rectale est peu absorbé (10 à 20 % sont retrouvés acétylés dans les urines). Il existe un autre dérivé salicylé très proche administré par voie rectale : le 4-ASA (Quadrasa).

- Administration orale

Lorsqu'il est administré per os, le 5-ASA libre est absorbé par le jéjunum, donc inefficace. Pour parvenir jusqu'aux lésions, situées le plus souvent à la partie terminale de l'intestin grêle ou dans le côlon, le 5-ASA doit alors traverser l'intestin en étant « protégé » de l'absorption.

Pour assurer cette protection, on peut coupler le 5-ASA à une autre molécule : il ne sera alors délivré qu'à son arrivée dans le côlon car celui-ci contient des bactéries capables de couper la liaison avec la molécule qui sert de transporteur.

-#gt; La sulfasalazine est ainsi le premier dérivé 5-ASA à avoir été utilisé, il y a plus de 50 ans : elle comporte l'association de 5-ASA à un sulfamide. Ce dernier étant responsable d'effets secondaires assez fréquents, la Salazopyrine est aujourd'hui moins utilisée.

-#gt; L'olsalazine (Dipentum) a été conçue selon le même principe, mais en associant deux molécules de 5-ASA ; son inconvénient est qu'elle entraîne parfois de la diarrhée.

-#gt; La mésalazine ne comporte qu'une seule molécule de 5-ASA, protégée de l'absorption grâce à une enveloppe qui se dissous peu à peu dans l'intestin. Il existe plusieurs variétés d'enveloppes, à l'origine de trois médicaments disponibles en France : Fivasa, Pentasa et Rowasa.

Le choix entre ces différents médicaments et leur forme d'administration est déterminé par le siège des lésions, le confort d'utilisation (préférence pour les formes orales) et la tolérance (meilleure pour la mésalazine).

- Résultats des principaux essais thérapeutiques

-#gt; Dans la RCH distale en poussée, la mésalazine rectale donne, en 4 à 6 semaines, 70 % de rémission clinique, 50 % de rémission endoscopique et 30 % de rémission histologique, taux très supérieurs à ceux observés sous placebo. Elle est aussi efficace, voire plus, que les corticoïdes rectaux. La prise prolongée de lavements quotidiens étant parfois mal acceptée, on peut proposer une thérapeutique intermittente (un lavement tous les 3 à 7 jours ou un suppositoire à 1 g trois fois par semaine. L'association 5-ASA rectal et oral est plus efficace que chacun des deux pris séparément. Le 4-aminosalicylate (Quadrasa, 4-ASA) est aussi très efficace en lavement dans les RCH distales.

-#gt; Dans la RCH distale quiescente, la mésalazine rectale donne des taux de maintien en rémission de 70 à 80 % versus 15 à 20 % sous placebo. Elle est supérieure à la mésalazine orale. Il n'y a pas de relation dose-effet. Une thérapeutique intermittente (un lavement tous les 3 à 7 jours) ou des suppositoires peuvent être proposés si les lavements quotidiens sont mal acceptés.

-#gt; Dans la RCH plus étendue en poussée légère à modérée, les salicylés oraux donnent 40 à 60 % de rémissions cliniques en 4 à 8 semaines (significativement plus qu'avec un placebo). La dose minimale efficace de 5-ASA est de 2 g/j. II est possible qu'il existe une relation dose-réponse.

-#gt; Dans la RCH plus étendue quiescente, les salicylés oraux donnent des taux de maintien en rémission à 1 an de 60 à 70 %, soit deux fois plus que le placebo. L'effet dose-réponse est incertain, mais il paraît justifié d'augmenter la dose en cas de rechutes.

- Tolérance

-#gt; Les effets secondaires de la sulfasalazine sont de nature allergique et rares, ou dose-dépendants et plus fréquents (15-20 %). La majorité (80 %) d'entre eux sont le fait de la sulfapyridine.

-#gt; La mésalazine a des effets secondaires 2 à 3 fois moins fréquents que ceux de la sulfasalazine, et est bien tolérée par 80 à 90 % des malades intolérants à la sulfasalazine. On a rapporté des exacerbations de la RCH par hypersensibilité à la mésalazine.

-#gt; Une diarrhée se voit chez environ 5 % des malades sous olsalazine (plus dans les pancolites).

-#gt; D'autres effets secondaires des salicylés de seconde génération sont rares mais graves : pancréatite, péricardite, myocardite, hépatotoxicité sévère, alvéolite pulmonaire fibrosante, anémie aplasique, syndrome néphrotique et néphropathie tubulo-interstitielle souvent irréversibles justifiant une surveillance périodique de la créatinine plasmatique chez les malades sous mésalazine au long cours.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE - Le traitement initial de la RCH distale comporte de la mésalazine ou du 4-ASA rectal complété par un salicylé oral en l'absence d'efficacité rapide. - En cas d'échec, on adjoint des stéroïdes rectaux, de préférence topiques. Si lavements et suppositoires sont rapidement expulsés, une mousse d'hydrocortisone est prescrite, associée à un salicylé oral. - Les RCH distales s'accompagnent souvent d'une constipation fonctionnelle gênante à soigner par des mucilages ou des laxatifs osmotiques. A l'exception de certaines rectites bénignes, un traitement de prévention des rechutes doit être systématique. - Le traitement d'entretien est maintenu indéfiniment.

Les glucocorticoïdes

Les glucocorticoïdes à action anti-inflammatoire sont des dérivés de synthèse de l'hydrocortisone.

Les corticoïdes classiques ont une affinité pour les récepteurs et un pouvoir anti-inflammatoire respectivement 13 et 14 fois plus élevé que ceux de l'hydrocortisone. Leur biodisponibilité orale est d'environ 80 %, avec une forte absorption intestinale et une faible dégradation hépatique. Ils agissent sur les lésions intestinales par voie systémique.

Les glucocorticoïdes sont les plus puissants anti-inflammatoires disponibles pour le traitement de la RCH active. Les composés à administration rectale disponibles (mousse ou lavement) sont absorbés pour partie et peuvent induire des effets secondaires systémiques.

- Résultats des principaux essais thérapeutiques

-#gt; Dans la RCH distale en poussée, les corticoïdes rectaux donnent des résultats similaires à ceux de la mésalazine rectale ; ils peuvent être efficaces après échec de la mésalazine et vice versa. L'association par voie rectale stéroïde-mésalazine est plus efficace que chacun d'entre eux pris séparément. Le métasulfobenzoate de prednisolone (Solupred) est peu absorbé par voie rectale et peut être prescrit en lavements (hors AMM) à une dose de 40 à 80 mg/j dans un volume de 40 à 100 ml de sérum physiologique.

-#gt; Dans les formes actives plus étendues de la maladie, la prednisone orale (40-60 mg/j ou 1 mg/kg/j) donne 70 à 90 % de rémission clinique. On prescrit la corticothérapie en une prise matinale afin de moins freiner la sécrétion endogène de cortisol, et d'éviter les symptômes nocturnes. La corticothérapie parentérale est réservée aux poussées sévères de la maladie.

-#gt; Dans la RCH distale ou étendue en rémission, les corticoïdes en topiques ou oraux n'ont aucune efficacité dans la prévention des rechutes et sont dangereux au long cours.

- Tolérance

Les effets indésirables des corticoïdes sont bien connus. Sont difficilement ou non réversibles l'ostéonécrose aseptique, la cataracte sous-capsulaire postérieure, les vergetures, le retard de croissance, certaines myopathies et les tassements vertébraux. Une ostéoporose s'observe chez environ 30 % des malades souffrant de RCH ; la corticothérapie en est un des mécanismes importants. Il faut assurer à ces malades un apport oral de 1 à 2 g de calcium/j. L'efficacité de la vitamine D pour prévenir l'ostéopénie cortisonique est incertaine. Les biphosphonates, en revanche, sont efficaces et doivent être utilisés s'il existe d'autres facteurs de risque associés (âge, ménopause, faible activité physique, tabac) ou si une ostéopénie sévère (ou une ostéoporose) est décelée par absorptiométrie biphotonique. Il faut être particulièrement économe en stéroïdes chez l'enfant et l'adolescent en raison de leur effet de frein sur la croissance.

Les immunosuppresseurs

Ce sont des analogues des purines : azathioprine et 6-mercaptopurine (6-MP, hors AMM). Leur mécanisme d'action n'est pas connu, mais ils interfèrent avec le système immunitaire.

L'efficacité de l'azathioprine et de la 6-mercaptopurine (à la dose de 2 à 2,5 mg/kg/j) dans la RCH est de 60 à 70 %. Ces médicaments sont efficaces dans les formes chroniques actives de RCH, permettant souvent de sevrer les malades de stéroïdes. Compte tenu de leur long délai d'action, il faut 3 à 6 mois de traitement avant de conclure à un échec. Quand le traitement est efficace, il doit être poursuivi pour une durée indéterminée.

Entre 10 et 15 % des malades développent des effets secondaires.

Les réactions allergiques, précoces (pancréatite notamment), contraignent à l'interruption définitive du médicament. Des pancytopénies précoces et sévères ont été décrites en cas de déficit constitutif en thiopurine-méthyltransférase, enzyme produisant des métabolites inactifs à partir de la 6-MP, ce qui justifie une surveillance rapprochée de la numération-formule sanguine le premier mois, puis plus espacée par la suite. Une cytopénie (imposant de réduire la posologie du traitement) s'observe dans 5 à 10 % des cas et peut survenir plusieurs années après le début du traitement immunosuppresseur.

Les complications hépatiques sont rares (#lt; 1 %), parfois tardives et justifient une surveillance. De rares observations d'infections opportunistes sévères ont été rapportées avec ces traitements.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

QUELLES SONT LES INTERACTIONS AVEC LES CORTICOÏDES ?

Les indications de la chirurgie sont :

-#gt; les complications aiguës (perforation, hémorragie profuse ou colectasie ayant résisté à un traitement médical bref et intensif) ;

-#gt; les poussées sévères résistantes au traitement médical ;

-#gt; les formes compliquées de dysplasie ou de cancer ;

-#gt; les formes chroniques actives, d'emblée ou après échec de l'azathioprine, indication la plus fréquente.

En urgence, la colectomie subtotale avec iléostomie et sigmoïdostomie est la première étape du traitement. En dehors de l'urgence, on a le choix entre trois interventions.

Coloproctectomie avec iléostomie définitive

Elle assure la guérison en retirant la totalité de la muqueuse malade et supprime le risque de cancer colorectal au prix d'une iléostomie définitive.

Elle peut souvent être faite en un seul temps.

Elle n'a plus comme indications que l'incontinence anale, les échecs irréparables de l'anastomose iléo-anale (voir ci-dessous) et le cancer du rectum.

Coloproctectomie avec anastomose iléo-anale

Elle est devenue l'intervention de référence car elle est censée guérir la RCH tout en conservant l'anus naturel. Elle consiste à anastomoser l'intestin grêle directement à l'anus, en réalisant un réservoir avec l'iléon terminal. Ce réservoir ou poche remplace le rectum. Sa réalisation demande la mise en place d'une stomie provisoire. Dans l'ensemble, résultats fonctionnels et qualité de vie sont bons (moyenne de 5 à 6 selles/24 h dont une la nuit). Toutefois, 5 % des malades ont de fréquents épisodes d'incontinence diurnes et 10 % nocturnes. Des épisodes d'inflammation de la poche (pochite) surviennent avec un taux cumulé de l'ordre de 50 % à 5 ans de l'intervention. Une métaplasie colique est fréquente et une dysplasie de bas grade peut se développer sur la muqueuse du réservoir. A ce jour, les rares cas de cancers sur réservoir se sont développés sur des îlots de muqueuse rectale laissés en place. Au total, on est contraint d'exciser ou d'exclure le réservoir dans 10 % des cas.

Colectomie avec anastomose iléorectale

Très pratiquée dans les années soixante pour éviter l'iléostomie définitive, elle est tombée en disgrâce depuis l'avènement de l'anastomose iléo-anale. La conservation rectale expose aux risques de rectite et de cancer impliquant une surveillance prolongée. Cependant, cette intervention revient au goût du jour, car son résultat fonctionnel est meilleur que celui de l'anastomose iléo-anale. Le taux de proctectomies secondaires semble de l'ordre de 50 % à 10 ans. La transformation en anastomose iléo-anale est possible.

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Très récemment, des essais thérapeutiques (méthodologiquement corrects) avec les probiotiques ont été entrepris chez l'homme. Les résultats sont assez encourageants.

Les probiotiques sont des micro-organismes ingérés vivants capables d'exercer des effets bénéfiques sur l'hôte par action sur l'écosystème intestinal.

Les plus connus sont les bactéries lactiques et les bifidobactéries, largement utilisées dans les yaourts et autres produits laitiers fermentés.

Ces organismes restent vivants pendant leur conservation et survivent au passage à travers le tractus gastro-intestinal. De nombreux arguments expérimentaux et cliniques suggèrent fortement que la flore intestinale pourrait exercer un rôle majeur dans le déclenchement d'une maladie inflammatoire chronique de l'intestin, et également dans la survenue des rechutes de la maladie.

Ainsi, une équipe italienne a montré qu'en cas d'allergie ou d'intolérance à la mésalazine, l'administration d'un probiotique comportant un mélange de bactéries sélectionnées permettait de maintenir la rectocolite hémorragique en rémission chez quinze malades sur vingt à un an. Il apparaît donc possible de modifier la composition de la flore colique humaine par l'administration de probiotiques.

Il reste à comprendre les mécanismes d'action de ces agents, et de déterminer scientifiquement plutôt qu'empiriquement la nature des probiotiques à utiliser, ainsi que leurs modalités optimales d'administration.

Par le Pr Yoram Bouhnik, hépatogastroentérologue à l'hôpital Lariboisière de Paris

CONSEILS AUX PATIENTS

Chasser les idées fausses !

Elles sont nombreuses et inquiètent souvent le patient ou son entourage inutilement.

-#gt; La RCH est une maladie psychosomatique.

Faux : contrairement à ce qu'on a laissé entendre pendant longtemps. L'histoire naturelle de la RCH montre en effet que les lésions intestinales précèdent de plusieurs mois, voire de plusieurs années la survenue des symptômes.

-#gt; La RCH est une maladie héréditaire.

Faux : même s'il existe peut-être une susceptibilité génétique à la maladie, elle ne suffit pas à son éclosion.

-#gt; La grossesse est dangereuse.

Faux : on déconseille simplement la grossesse en période d'activité de la maladie.

-#gt; La RCH est une maladie mortelle.

Faux : même si une petite augmentation du risque de cancer rectocolique est notée, la mortalité n'est pas supérieure à celle d'une population équivalente.

-#gt; Les immunosuppresseurs sont dangereux.

Faux : moyennant une surveillance régulière, l'innocuité au long cours est bien établie ; seul un risque de lymphome est démontré, mais il est minime.

Manger normalement

Aucun aliment n'est responsable de la survenue de la maladie ou de ses poussées. Aucun régime n'est indiqué pour prévenir ces poussées. L'alimentation doit être aussi proche que possible de la normale, sauf en cas de diarrhée et sténose intestinale où un régime sans résidus est préconisé pour diminuer le nombre des exonérations et le risque d'occlusion. En revanche, des suppléments caloriques et protéiques doivent être proposés en cas de dénutrition. En cas de traitement prolongé par Salazopyrine, une supplémentation en acide folique est nécessaire.

Surveiller les effets secondaires

Les effets secondaires des corticoïdes sont relativement fréquents surtout si le traitement est maintenu longtemps, à des posologies élevées. Certains effets secondaires, comme les modifications du visage ou de la silhouette, sont plus gênants que graves ; d'autres, comme les atteintes osseuses ou la cataracte, peuvent être plus sévères et justifient une surveillance particulière et une modification du traitement en cas d'apparition.

Fuir le stress

Des événements de vie dits « stressants » sont fréquemment invoqués et retrouvés dans la période précédant la survenue d'une poussée de rectocolite hémorragique, comme de beaucoup d'autres maladies. Pour autant, il n'est pas toujours possible d'établir un lien de cause à effet entre ces événements et l'évolution de la maladie. Les études évaluant l'impact de facteurs psychologiques sur la récidive et sur la gravité de la maladie ont donné des résultats contradictoires. Cependant, des données récentes chez l'animal suggèrent un rôle favorisant du stress dans les colites inflammatoires.

Eviter certains médicaments

Il faut éviter la prise d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (classiques et anti-cox-2) car ils peuvent favoriser la survenue de poussées. Attention aux AINS en vente libre (ibuprofène, kétoprofène...) ! La trétinoïne (Roaccutane...) est également à éviter dans les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin.

Adapter la contraception

La RCH ne constitue pas une contre-indication à la contraception orale. En cas de poussée grave et/ou d'intervention chirurgicale, il est bien connu qu'il existe un risque accru de phlébite. L'interruption transitoire de la contraception orale peut alors être conseillée afin de limiter ce risque. De façon générale, on préfère choisir une pilule faiblement dosée en estrogènes afin de limiter ce risque vasculaire. La contraception par stérilet est possible.

Adhérer à une association

L'adhésion à une association de patients doit être conseillée. Elle permet d'échanger avec d'autres patients, de s'informer, de bénéficier de conseils appropriés et d'éviter l'isolement.

Par le Pr Yoram Bouhnik

L'AVIS DU SPÉCIALISTE

« Conserver une alimentation normale »

Pr Yves Le Quintrec, gastroentérologue, président d'honneur du comité scientifique de l'AFA (Association François-Aupetit).

Quel message faire passer aux patients atteints de RCH pour améliorer leur qualité de vie ?

Tout d'abord, il faut insister pour que, en dehors des poussées de la maladie, les patients aient une alimentation équilibrée la plus normale possible, sans éviter les fruits et les légumes. Bien sûr, il peut exister des intolérances ponctuelles à certains aliments, mais c'est à l'image de ce qui se passe dans la population générale. Donc, éviter à tout prix les restrictions et les régimes.

Ensuite, pour certains patients, la carte « Urgences Toilettes », sorte de laissez-passer officieux réalisé par l'AFA, peut être une aide en permettant d'accéder en urgence aux toilettes des restaurants ou des lieux publics. Il faut aussi rassurer les patients : dans la plupart des cas, la RCH ne modifie pas l'espérance de vie, et les jeunes femmes peuvent envisager une grossesse en dehors des poussées évolutives de la maladie.

Dernier point pour lequel il ne faut d'ailleurs pas hésiter à contacter l'AFA : il est tout à fait possible de prendre une assurance vie pour acheter un logement même si l'on souffre de RCH ! L'AFA a négocié avec un assureur pour obtenir des taux plus corrects. Cela ne peut que conforter l'idée que les patients atteints de RCH ne doivent pas être marginalisés.

Pr Yves Le Quintrec, interrogé par Florence Bontemps

POUR EN SAVOIR PLUS

ASSOCIATIONS

Association François-Aupetit (AFA)

Hôpital Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75571 Paris Cedex 12. Tél. : 01 43 07 00 49. http://www.afa.asso.fr

Créée voici 20 ans, l'AFA assure un soutien et une information aux malades atteints de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique) avec des publications, des conférences-débats et de nombreuses brochures d'information du public. L'AFA remplit également une mission d'aide au développement de la recherche fondamentale, biologique et thérapeutique sur les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, à travers l'attribution de bourses pour la recherche.

On retrouve ce même dynamisme sur le site de l'AFA : tous les aspects de la maladie sont détaillés de façon simple mais précise : étiologie, traitement médical ou chirurgical, conseils pratiques sur l'alimentation...

INTERNET

Club de réflexion des gastroentérologues

http://www.cregg.org

Le CREGG, club de réflexion des cabinets de groupe d'hépatogastroentérologie est depuis 20 ans un espace d'échanges et de réflexion sur l'exercice libéral de la gastroentérologie en particulier au sein des cabinets de groupe. Le CREGG est structuré autour de commissions centrées sur un pôle d'intérêt. Celle dédiée aux maladies inflammatoires chroniques de l'intestin a mis en ligne un livret d'information destiné aux patients. Outre l'épidémiologie, les facteurs génétiques et environnementaux et les traitements des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, beaucoup de points pratiques sont abordés : voyages, vacances, vaccinations, diététique, sport, grossesse, droits sociaux des malades...

RCH et cancer colorectal

http://www.hepatoweb.com

Pour en savoir plus sur le risque de cancer colorectal survenant avec une rectocolite hémorragique : chiffres épidémiologiques, caractéristiques du cancer colorectal, difficultés pratiques de la surveillance coloscopique... Sont également abordées la place du traitement chirurgical et les différentes techniques de la chirurgie. L'ensemble permet de mieux comprendre à quel moment doit intervenir la chirurgie dans l'arsenal thérapeutique de la RCH.

Contre indications absolues

- Mésalazine

Hypersensibilité aux salicylés, grossesse à des doses #gt; 2 g/jour

- Salazopyrine

Hypersensibilité aux sulfamides et aux salicylés, déficit en G6PD (risque d'hémolyse), grossesse.

- Corticoïdes oraux

Ulcère gastroduodénal évolutif, infection évolutive, psychose décompensée.

- Azathioprine

Exposition solaire, infection évolutive, grossesse (par prudence car pas d'effet tératogène démontré).

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