Indépendants jusqu'à quand ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2463 du 02/11/2002 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2463 du 02/11/2002
 

CONCENTRATION DES SSII

Actualité

Enquête

Les concentrations et autres fusions vont bon train dans le domaine de l'informatique officinale. Rares sont les sociétés qui ne soient liées ni à la répartition, ni au grand capital. Mais pour les indépendants, la tentation est grande de se laisser séduire par un rachat

Hors des capitaux industriels et des répartiteurs, point de salut pour les SSII du secteur officinal. C'est en tout cas ce que tendent à démontrer les récentes acquisitions de LHE-Tiermatic par Isipharm, de Data Conseil par Alliadis et tout récemment de Caduciel par la CERP Rhin-Rhône-Méditerranée. De fait, les indépendants ayant une taille significative ne se comptent plus que sur les doigts d'une main.

Parmi eux, on trouve notamment Every's, fort de ses 1 300 points de vente, et LSI (La Source Informatique) avec ses 280 clients. Charles Baranès, gérant et fondateur de LSI, reconnaît un manque de visibilité sur le devenir de sa société : « Appartenir à une grande structure est un atout financier, politique et de communication, mais ce n'est pas notre logique de progression. Nous sommes une PME qui entretient des relations amicales avec ses clients. La concurrence est sévère. Certes, nous ne remportons qu'un marché sur quatre face à des prestataires capables de marchander à la baisse jusqu'à - 60 %, mais nous préparons une riposte. »

Résister aux sirènes. Alexandre Karpov, gérant et fondateur d'Every's, considère que pour s'imposer et survivre en tant qu'indépendant, une société informatique a besoin d'être novatrice et pionnière. « J'observe de très près les logiciels de la concurrence : ils ont peu évolué en termes de système d'exploitation et de présentation. Il y a aujourd'hui 5 000 pharmaciens qui possèdent une informatique sous Prologue alors que Prologue Software a décidé de ne plus produire de supports techniques ! Ces produits sont en fin de vie. La période Bull est révolue... Le soutien financier des répartiteurs ou des industriels n'est pas une garantie d'évolution pour les logiciels. »

Alexandre Karpov estime également que peu de pharmaciens ont pris conscience des véritables enjeux de la concentration des sociétés informatiques. « Comme cela se passe déjà chez les médecins, je pense que sous peu un prestataire proposera une installation quasi gratuite en échange des données officinales statistiquement exploitables (prescripteurs, ventes directes) ». Il se montre quant à lui farouchement attaché à son indépendance, rappelant qu'il a déjà conquis sa liberté personnelle en quittant Moscou où il bénéficiait d'un poste de chercheur à l'Académie des sciences.

Mais on peut se demander si les derniers Mohicans du monde informatique officinal résisteront longtemps au chant des sirènes du capitalisme... Chez Every's, comme chez LSI, on reconnaît être régulièrement approché. Alexandre Karpov avoue même qu'une société qui lui proposerait un prix de rachat satisfaisant en maintenant l'exploitation du logiciel Winpharma ne serait pas forcément écartée. « Nous avons nous aussi besoin de maintenir notre croissance, d'accroître notre personnel... Il arrive toujours un moment où l'on atteint un palier, où l'on dépense plus que l'on ne gagne... »

Gourmands de vos données. Ils sont pratiquement trois acteurs à se partager le marché : Pharmagest Interactive, Alliadis-Cegedim et CIP. Les rumeurs vont bon train concernant une éventuelle acquisition d'Every's par Cegedim ou encore de CIP par Pharmagest ou Isipharm. Le grand mouvement de concentration du secteur, en marche depuis quelques années, semble s'accélérer au fur et à mesure que les intervenants se raréfient et que les nécessités de croissance externe se font plus pressantes.

« J'estime que la stratégie de certains groupes frise l'abus de position dominante, affirme Patrick Gaillat, pharmacien à Thiers (63), équipé par la CIP, qu'il estime faire partie des indépendants. Contrairement à ce que tout le monde pense, l'OCP n'a aucune influence stratégique dans le développement de SILMM, le prestataire informatique de la CIP, au sein de laquelle elle ne détient qu'une minorité de blocage. »

Pour Patrick Gaillat, l'ambition des grands groupes vise un positionnement européen qui pourrait aboutir à la création de chaînes de pharmacies par exemple. « Nous sommes passés d'une logique de santé publique à une logique de profit. Je m'inquiète qu'une structure devenue majoritaire sur un parc clientèle puisse un jour proposer - voire imposer - aux pharmaciens l'utilisation de ses extracteurs de données. Or on sait fort bien l'importance stratégique et financière de ces informations pour les laboratoires. Cette source de profit échappera totalement au producteur de données : le pharmacien. J'espère que certaines de ces concentrations ne rendront pas le pharmacien entièrement dépendant de ses sociétés de services. En revanche, je veux rester optimiste quant aux objectifs de certains répartiteurs. »

Attention danger ! De son côté, Pascal Chassin, le nouveau président du Collectif national des utilisateurs d'informatique médicale (Conuim), stigmatise la menace de se voir imposer à terme des packages « répartiteur + prestataire informatique ». Jean Genge, directeur délégué de la CERP Rhin-Rhône-Méditerranée et nouveau président de Caduciel depuis juin dernier, défend au contraire des positions qui se veulent favorables au pharmacien : « La CERP souhaite que Caduciel joue son rôle de prestataire auprès du pharmacien en toute liberté et indépendance. Pour nous, il est stratégiquement important d'avoir une vision claire de l'évolution de ce marché en en étant partie prenante de façon multiple. Nous voulons comprendre comment l'évolution de l'informatique officinale peut influer sur le métier de répartiteur. »

Le répartiteur a fixé pour Caduciel un objectif de chiffre d'affaires de 2 millions d'euros d'ici 2004 (approximativement 1,5 MEuro(s) à ce jour) et un objectif d'extension du parc clientèle (430 points de vente aujourd'hui) de 20 à 25 % par an. « Nous voulons devenir un des acteurs forts de ce marché » poursuit Jean Genge. Et pour cela, la CERP Rhin-Rhône-Méditerranée va donner à Caduciel les moyens de jouer dans la cour des grands : développement de logiciels, augmentation d'effectifs, nouvelle plate-forme financière... Sur le problème des données, Jean Genge se veut affirmatif : « Nous nous refuserons à toute exploitation des statistiques officinales qui font partie du patrimoine de l'officine. »

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