Les anémies - Le Moniteur des Pharmacies n° 2459 du 05/10/2002 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2459 du 05/10/2002
 

Cahier formation

l'essentiel : Les anémies et leurs étiologies sont multiples. Cependant, la carence en fer, qui touche surtout les femmes, concerne le plus grand nombre d'anémies. Des paramètres de l'hémogramme sont essentiels pour classer et diagnostiquer une anémie : le taux d'hémoglobine, le volume globulaire moyen et le taux de réticulocytes. La fatigue, la tachycardie, une dyspnée d'effort, des céphalées ou encore des vertiges sont quelques signes généraux d'anémie. Mais à chaque type d'anémie correspond une clinique particulière. Les traitements sont aussi nombreux et dépendent du type d'anémie. Quand il est possible, le traitement étiologique des anémies est associé à la prise en charge des symptômes. Les médicaments sont administrés ponctuellement ou à vie. Les sels de fer, la vitamine B12 et les folates permettent de traiter les anémies par carence ou défaut d'absorption. La chirurgie de la rate est également utilisée.

ORDONNANCE

Une patiente souffrant d'une anémie liée à une carence en fer

Un traitement à base de fer est prescrit à une femme ménopausée souffrant d'une anémie microcytaire. Liée à une carence martiale, celle-ci fait suite à une hémorragie provoquée par un polype bénin. Mme V. est également traitée pour une lésion ulcéreuse d'origine iatrogène.

LE CAS

Martine V., 57 ans, 1 m 62 pour 55 kg, secrétaire de direction, ménopausée, consulte son généraliste pour une fatigue inexpliquée qui évolue depuis deux mois. Cette asthénie, présente au repos, s'accentue à l'effort et s'accompagne de dyspnée. A l'examen clinique, le médecin note une pâleur cutanéomuqueuse, une peau sèche, des ongles fragiles, mous et cassants. Il n'y a pas de splénomégalie. Martine V. n'a pas d'autre antécédent qu'une lésion ulcéreuse gastrique déclenchée par la prise d'AINS pour soulager une lombalgie chronique. Son gastroentérologue la traite par Tagamet. Les examens biologiques mettent en évidence une anémie microcytaire par carence martiale. L'Hémoccult II est positif. L'étiologie de l'anémie est identifiée grâce à une fibroscopie gastrique et une coloscopie qui montre un saignement chronique à partir d'un polype bénin du côlon sigmoïde aussitôt enlevé par voie endoscopique.

LES PRESCRIPTIONS

Ordonnance du généraliste :

-> Tardyferon 80 mg : 2 comprimés matin et 1 comprimé à midi ou le soir qsp 3 mois.

-> Sargenor à la vitamine C : 1 comprimé le matin et à midi qsp 15 jours.

Hémogramme après 3 mois de traitement par Tardyferon 80 mg.

Ordonnance du gastroentérologue :

-> Tagamet 800 mg : 1 comprimé le soir au coucher.

-> Géluprane 500 mg : 2 gélules en cas de lombalgies toutes les 4 à 6 heures sans dépasser 8 gélules/j. qsp 1 mois.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Ces ordonnances n'engendrent pas d'interaction médicamenteuse significative cliniquement.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Les posologies des ordonnances sont correctes sauf celle du Tardyferon 80 mg. En effet, la dose recommandée est de un à deux comprimés par jour avec une dose maximale de 200 mg/24 heures.

AVIS PHARMACEUTIQUE

-> Etant donné la forte dose de fer prescrite, une conversation téléphonique avec le généraliste est recommandée. En effet, lors de la prise en charge d'une anémie par carence martiale, il est préférable de prolonger la durée de traitement plutôt que de majorer la dose.

L'augmentation de la posologie est d'une part inutile car les possibilités d'absorption du fer sont vite saturées, et d'autre part nuisible parce que cela favorise l'apparition d'effets indésirables notamment des troubles digestifs (nausées, diarrhées) qui risquent d'entraîner une moindre observance. Le médecin ramène donc la posologie à deux comprimés par jour en deux prises.

-> La prise de Sargenor à la vitamine C prescrit à cause de l'état asthénique lié à l'anémie apporte 500 mg d'acide ascorbique par comprimé. Il permet une meilleure absorption du fer. Il n'est pas nécessaire que Martine V. ait une prise supplémentaire de vitamine C car cela pourrait raviver ses douleurs gastriques.

INITIATION DU TRAITEMENT

L'hémorragie intestinale due au polype colique a été prolongée et a épuisé les réserves en fer, d'autant que l'apport alimentaire en fer n'a probablement pas été suffisant.

-> Sachant que l'examen gynécologique est normal, les symptômes d'anémie (asthénie, dyspnée d'effort) et ceux spécifiques de la carence martiale ancienne et profonde (troubles des phanères, signes cutanéomuqueux) ainsi que l'absence de splénomégalie à l'examen clinique ont orienté le généraliste vers le diagnostic d'anémie ferriprive.

-> La fibroscopie et la coloscopie ont permis de préciser l'étiologie intestinale (et non digestive due aux lésions ulcéreuses consécutives à la prise d'AINS).

-> Les examens biologiques réalisés chez Martine V. sont les suivants :

- taux d'hémoglobine (Hb) de 91 g/l (N : 120-160 g/l) ;

- hématocrite de 28,5 % (N : 37-46 %) ;

- 3,1 T/l globules rouges (N : 4,0 à 5,3 T/l) ;

- VGM à 76 fl (N : 80-95 fl) ;

- 7,5 G/l globules blancs (N : 4 à 10 G/l) dont 67 % de polynucléaires (N : 40 à 75 %) ;

- 385 000/mm3 plaquettes (N : 150 000 à 350 000) ;

- CCMH de 27 % (N : 32-36 %) ;

- fer sérique à 4,5 µmol/l (N : 11-29 µmol/l) ;

- taux de saturation de la transferrine de 6 % (N : 25 à 50 %).

Ces valeurs biologiques confirment la carence martiale. Elles permettent aussi d'établir le diagnostic différentiel avec les autres types d'anémie : les thalassémies, les anémies inflammatoires (ferritine élevée mais non disponible pour l'érythropoïèse) et les anémies sidéroblastiques (fer sérique élevé).

Le faible taux d'hémoglobine, la diminution de l'hématocrite, la baisse du nombre d'hématies et de plaquettes, une réduction du VGM et de la CCMH, la faible concentration sanguine en fer et le taux de saturation de la transferrine effondré caractérisent l'anémie microcytaire par carence en fer.

-> Le double objectif du traitement est de remédier à la cause de l'anémie - ici le polype, déjà retiré - et de restaurer les réserves en fer par un apport. La carence martiale répond à l'administration per os d'un sel ferreux à raison de 2 à 6 mg/kg (1 à 2 mg/kg en prophylaxie).

SUIVI DU TRAITEMENT

-> La durée du traitement par Tardyferon 80 mg est déterminée par le prescripteur. Elle doit être suffisante pour corriger l'anémie et restaurer les réserves en fer. La recharge du stock de fer - 600 mg pour la femme et 1 200 mg pour l'homme - nécessite 5 à 6 mois selon la déplétion des réserves.

-> L'efficacité du traitement est évaluée par l'hémogramme après trois mois de traitement au minimum. Ce contrôle porte sur la réparation de l'anémie (Hb, VGM) et sur la restauration des stocks de fer (fer sérique et saturation de la transferrine). Un autre contrôle est effectué à la fin du traitement.

-> A 6 mois et à 1 an après l'arrêt de traitement, un contrôle biologique des paramètres peut être utile pour dépister une éventuelle rechute laissant supposer la persistance de l'hémorragie causale (cette interprétation n'est valable que si les réserves en fer ont été correctement reconstituées).

-> A la fin du traitement par Tagamet, la cicatrisation de la lésion ulcéreuse est appréciée par le gastroentérologue en fonction de l'état clinique de la patiente. Il peut réaliser une fibroscopie de contrôle pour décider de poursuivre ou non le traitement.

-> L'antalgique Géluprane n'est qu'un traitement symptomatique de la lombalgie chronique. Martine V. doit arrêter lorsque les douleurs ont disparu.

CONSEILS À LA PATIENTE

-> La durée du traitement par le fer est de 5 à 6 mois en moyenne, sinon les réserves de fer ne sont pas définitivement reconstituées.

-> La patiente fragilisée à cause d'une lésion ulcéreuse doit contacter son médecin en cas d'apparition de tout symptôme inhabituel notamment d'intolérance digestive.

-> Le fer colore en noir les selles.

-> Eviter les dons de sang.

-> La cimétidine réduit la biotransformation hépatique et la clairance de la caféine. En résulte un risque d'augmentation de la demi-vie et de la concentration plasmatique de caféine donc une majoration de ses effets pharmacologiques ou toxiques.

Veiller à l'absorption du fer

-> Avoir une alimentation équilibrée, riche en fer. Les aliments les plus riches en fer sont les moules, le boudin, le foie, le cacao en poudre, les fèves, les lentilles, les épinards.

-> Le thé (plus de deux à trois tasses par jour) inhibe l'absorption des sels ferreux et ferriques en formant des tannates.

-> La présence de calcium, de magnésium, d'acide phytique, de phosphates en particulier dans les céréales, les oeufs ou les produits lactés peut inhiber la résorption du fer par formation de complexes insolubles.

Protéger l'estomac

-> Les AINS et les salicylés sont proscrits car ils augmentent les risques d'hémorragie digestive en raison de leurs effets ulcérogènes.

-> Eviter les aliments qui provoquent une acidité (aliments épicés, graisses, jus de fruits).

-> Réduire la consommation d'alcool qui stimule la sécrétion acide.

Dorloter son dos

-> Pratiquer des mouvements qui permettent de ménager le rachis.

-> Avec l'avis d'un médecin, pratiquer une activité physique régulière adaptée, de la gymnastique de rééducation avec l'aide d'un kinésithérapeute (renforcement de la musculature de la ceinture abdominale et paravertébrale progressive, de préférence en piscine).

-> Un repos relatif permet de décharger le dos lors des lombalgies. Eviter les stations debout prolongées et le port de charges lourdes.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

-> Tardyferon 80 mg (sulfate ferreux)

- Antianémique par apport de sels ferreux.

- Indiqué dans l'anémie par carence martiale et prévention de la carence martiale chez la femme enceinte.

- En curatif chez l'adulte, avaler un à deux comprimés par jour.

-> Sargenor à la vitamine C (aspartate d'arginine, acide ascorbique)

- Antiasthénique.

- Indiqué, à partir de 15 ans, dans le traitement symptomatique des états de fatigue passagers.

- Prendre un à deux comprimés effervescents par jour en une ou deux prises, le matin et/ou le midi.

-> Tagamet 800 mg (cimétidine)

- Antisécrétoire gastrique, antagoniste des récepteurs H2 à l'histamine.

- Traitement de l'ulcère gastrique et/ou duodénal de l'adulte, de l'oesophagite due au reflux gastro-oesophagien et du syndrome de Zollinger-Ellison.

- En cas de maladie ulcéreuse gastro-intestinale, la dose quotidienne est de 800 mg le soir au coucher pendant 4 à 6 semaines.

-> Géluprane 500 mg (paracétamol)

- Antalgique antipyrétique.

- Traitement symptomatique des douleurs d'intensité légère à modérée et/ou des états fébriles, chez l'adulte et l'enfant de plus de 27 kg.

- La dose usuelle pour un adulte de 50 kg est de une à deux gélules trois fois par jour, toutes les 4 heures au minimum. Jusqu'à 4 g/jour en cas de douleurs intenses.

Par L. Chorfa Bakir-Khodja, C. Michel, B. Sang et le Pr J. Calop, CEEPPPO, CHU de Grenoble

PATHOLOGIE

Quels sont les différents types d' anémie ?

L'anémie est définie par une diminution de la quantité d'hémoglobine totale fonctionn elle circulante dans le sang. Le taux d'hémoglobine varie selon l'âge et le sexe.

ÉPIDÉMIOLOGIE

L'anémie ferriprive est la plus fréquente. Elle touche plus la femme que l'homme. Dans la plupart des cas, elle est liée à des hémorragies chroniques. En Occident, près de 15 % de femmes en âge de procréer et 20 % des bébés sont touchés.

CLASSIFICATION

La classification actuelle des anémies répond à un schéma physiopathologique qui permet d'orienter l'enquête biologique (voir tableau page 7).

PHYSIOPATHOLOGIE

Anémies microcytaires

- Anémie par carence martiale

La perte de fer, principal constituant de l'hème, se fait d'abord au dépens des réserves (moelle, foie, rate). Elle se traduit par la baisse progressive du taux de ferritine plasmatique. Par rétrocontrôle, le taux de transferrine plasmatique augmente. Puis le fer sérique chute. Ce déficit en fer entraîne une diminution de synthèse de l'hémoglobine dans l'érythroblaste, qui est responsable d'une augmentation du nombre de mitoses des érythroblastes, d'où une microcytose, puis une hypochromie et enfin une anémie.

- Anémie inflammatoire

Outre une insuffisance de l'érythropoïèse, elle peut être liée à un trouble du métabolisme du fer : lors du processus inflammatoire, les macrophages séquestrent le fer libéré par l'hémolyse. Cette moindre mobilisation du fer à partir des réserves entraîne une baisse de la synthèse de l'hémoglobine, d'où l'augmentation réactionnelle des mitoses responsables d'une microcytose. Enfin, il peut s'agir d'un raccourcissement modéré de la durée de vie des hématies (par hémolyse).

- Thalassémies

Ce sont des hémoglobinopathies hémolytiques caractérisées par une diminution de synthèse d'une des chaînes de globine (alpha- ou bêta-), liée à une anomalie génétique transmise sur le mode autosomique récessif.

Anémies normo- ou macrocytaires régénératives

- Par hémorragie

Une hémorragie rapide et importante peut entraîner une anémie et une hypovolémie aiguës aboutissant à la stimulation de l'érythropoïèse, d'où une hyperréticulocytose retardée.

- Par hyperhémolyse

Une anémie hémolytique est due à une hyperhémolyse, destruction exagérée des hématies dont la durée de vie diminue.

- Par maladie héréditaire

La sphérocytose héréditaire (dite maladie de Minkowski-Chauffard) est une anémie hémolytique due à différentes anomalies du cytosquelette de la membrane du globule rouge. Ces hématies de forme sphérique sont retenues et détruites dans les capillaires de la rate.

Anémies macrocytaires carentielles arégénératives

Elles découlent d'un trouble du métabolisme folique et/ou de la vitamine B12 (anémie de Biermer...). L'acide folique est indispensable à la synthèse d'ADN qui est vitamine B12-dépendante. La carence en l'un et/ou l'autre provoque un défaut de synthèse d'ADN dont les conséquences sont visibles sur les tissus à renouvellement cellulaire rapide : épithéliaux (buccal, gastrique) et médullaires (les trois lignées et surtout la lignée érythroblastique). Il en résulte la diminution du nombre de mitoses, d'où une mégaloblastose. De plus, une partie des mégaloblastes est détruite dans la moelle.

SIGNES CLINIQUES

LE CYCLE DU FER

Les signes cliniques d'anémie dépendent de la cause. Il peut s'agir d'une urgence médicochirurgicale pour une anémie de constitution rapide ou d'une découverte fortuite pour une anémie de constitution lente.

- Signes communs

Les signes les plus classiques sont : l'asthénie, la faiblesse, une fatigabilité exagérée, une tachycardie, des palpitations, une dyspnée d'effort, une polypnée, une pâleur cutanéomuqueuse, de la fièvre, un souffle cardiaque, des céphalées, une sensation vertigineuse ou de bourdonnement d'oreilles.

Chez le sujet âgé, l'anémie peut causer de l'angor voire encore un infarctus.

- Signes particuliers selon la cause

- L'anémie par carence en fer se manifeste aussi parfois par une fragilité des phanères (ongles mous, cassants et concaves, cheveux secs et cassants) et, dans une forme plus évoluée, par une peau sèche, une fissure des commissures labiales, des signes d'atrophie de la muqueuse digestive.

Chez l'enfant surtout, une tendance aux infections, une fébricule, une discrète splénomégalie existent. Enfin, des troubles du comportement alimentaire (pica) sont dus à cette carence.

- Dans une anémie inflammatoire, un syndrome inflammatoire (fièvre, sueurs, altération de l'état général) peut être au premier plan. D'autres signes propres à la cause sont aussi présents.

- Au cours d'une thalassémie, l'intensité de l'anémie varie selon le type de l'anomalie. Dans les formes graves, on trouve une pâleur anémique importante dès les premiers mois de la vie, un subictère, un retard staturopondéral, des déformations osseuses, un faciès mongoloïde, une hépatosplénomégalie.

- Une anémie hémorragique aiguë se traduit par un syndrome anémique important et brutal et des signes de choc hypovolémique. L'hémorragie est évidente quand elle est extériorisée.

- Dans une anémie hémolytique, le syndrome anémique, dont la tolérance est plus liée à la rapidité de survenue qu'à l'intensité, est associé à un syndrome hémolytique. Il s'agit soit d'une hémolyse aiguë intravasculaire (urgence médicale), soit d'une hémolyse chronique extravasculaire, avec un subictère conjonctival, des urines foncées, une splénomégalie.

- Une sphérocytose héréditaire se révèle plus souvent chez le sujet jeune. Elle est évoquée sur la triade « anémie + ictère + splénomégalie » ou devant les signes d'une déglobulisation aiguë (majoration de la triade, possibilité de fébricule et de douleurs abdominales), ou encore par une lithiase biliaire ou un retard staturopondéral avec déformation du crâne.

- Le début d'une anémie de Biermer est insidieux. Surviennent ensuite des signes d'anémie souvent bien supportée, des signes digestifs (bouche sèche, brûlures de glossite atrophique, dysphagie, douleurs épigastriques) ou un syndrome neurologique, spécifique de la carence en vitamine B12, le plus souvent discret.

ÉTIOLOGIES

Anémies microcytaires

-> Une carence en fer peut être due à une insuffisance d'apport ; chez le nourrisson ayant une alimentation uniquement lactée ne couvrant pas les besoins en fer ; chez l'enfant de plus d'un an ayant une alimentation pauvre en fer, surtout si sa croissance est rapide ; chez la femme lors de la grossesse ou de la lactation ; chez le vieillard isolé et dénutri.

Elle peut aussi découler d'une malabsorption digestive, d'origine gastrique ou intestinale (résection digestive, Crohn, maladie coeliaque). La géophagie, la perturbation des habitudes alimentaires, les régimes trop riches en phytates (rhubarbe), en phosphates (alimentation lactée) ou en tanins (thé) chélatent le fer.

Sont aussi en cause des pertes de sang excessives, notamment hémorragiques, évidentes ou minimes et chroniques : pertes gynécologiques, digestives ou encore des épistaxis récidivantes.

-> Les états inflammatoires chroniques se compliquent de désordres du métabolisme du fer. L'anémie inflammatoire survient chez un sujet atteint de maladie infectieuse (tuberculose, Osler, suppuration profonde, sida), inflammatoire (lupus, polyarthrite rhumatoïde, Horton, Crohn) ou néoplasique.

Anémies normocytaires ou macrocytaires régénératives

-> Une anémie aiguë hémorragique survient à la suite d'une hémorragie extériorisée ou non extériorisée d'origine digestive (ulcère gastroduodénal, rupture de varices oesophagiennes, prise de médicaments, fibroscopie), un hémothorax, un hémopéritoine (grossesse extra-utérine, rupture traumatique de la rate) ou un hématome profond posttraumatique.

-> Dans une anémie hémolytique, l'hémolyse est d'origine corpusculaire liée à une anomalie constitutionnelle du globule rouge. Il s'agit d'anomalies de membrane (sphérocytose héréditaire), enzymatiques (déficit en G6PD, en pyruvate-kinase) ou d'anomalies génétiques de l'hémoglobine (thalassémie, drépanocytose).

D'origine extracorpusculaire, l'hémolyse résulte de la destruction de l'hématie par un mécanisme extérieur : une hémolyse infectieuse ou parasitaire (septicémies à Clostridium perfringens, à Escherichia coli), toxique (médicaments, toxiques ménagers ou industriels), mécanique (par atteinte du coeur ou des gros vaisseaux) ou immunologique (alloanticorps, autoanticorps, médicaments).

-> Ce peut aussi être une anémie arégénérative en réparation.

Anémies normo- ou macro-cytaires arégénératives

L'alcoolisme, une cirrhose, une hypothyroïdie ou une insuffisance rénale peuvent causer une anémie arégénérative. S'y ajoutent les causes médullaires.

- Etiologies médullaires

-> D'abord les anémies mégaloblastiques, liées à un trouble du métabolisme folique et/ou de la vitamine B12.

La carence en folates survient chez les sujets malnutris ou lors de besoins accrus (croissance, grossesse, cancer, éthylisme chronique), chez les gastrectomisés, dans les résections intestinales au cours de la maladie coeliaque, avec des médicaments antifoliques (méthotrexate, azathioprine...).

La carence en vitamine B12 se voit chez les végétaliens, dans la maladie de Biermer, dans les gastrectomies totales ou subtotales, dans la maladie de Crohn, lors de malabsorptions intestinales et lors d'infections parasitaires (bothriocéphale).

-> Viennent ensuite les érythroblastopénies congénitales ou acquises, les dysérythropoïèses congénitales, l'envahissement médullaire par un processus malin - leucémie aiguë, myélome, atteinte médullaire des lymphomes, métastases osseuses de cancers (sein, prostate, thyroïde, rein) -, les myélodysplasies (anémies réfractaires), les insuffisances médullaires globales, soit génétiques, soit et surtout dues aux irradiations ionisantes, ou encore aux toxiques médicamenteux (barbituriques, sulfamides, chloramphénicol, chimiothérapies, immunosuppresseurs) ou non médicamenteux (benzène, toluène, herbicides...), à des infections virales (hépatites, mononucléose infectieuse, cytomégalovirus) ou bactériennes (tuberculose) ; sans oublier les myélofibroses.

ÉVOLUTION

-> L'anémie par carence en fer répond au traitement martial.

-> Une anémie microcytaire inflammatoire évolue parallèlement à la maladie causale.

-> L'évolution d'une hémorragie aiguë dépend du terrain, de l'abondance, de l'arrêt ou la persistance de l'hémorragie, de la précocité du traitement, de l'étiologie.

-> En cas d'anémie hémolytique corpusculaire, l'efficacité des transfusions est bonne.

-> Le pronostic de la sphérocytose héréditaire après splénectomie est excellent sur le plan hématologique, même si l'anomalie membranaire persiste toute la vie. Cependant, les risques d'infections bactériennes graves subsistent.

-> Sans traitement, l'anémie de Biermer s'aggrave, de même que les signes digestifs et neurologiques. Sous traitement, la macrocytose disparaît. Deux risques demeurent : la rechute après arrêt du traitement, le cancer gastrique.

-> Les insuffisances médullaires peuvent se compliquer de syndromes infectieux pouvant mettre en jeu le pronostic vital, d'hémorragies, de problèmes liés à des transfusions sanguines itératives, d'une hémochromatose secondaire ou d'une allo-immunisation.

Par le Dr Béatrice Paillat

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter les anémies ?

Les traitements des anémies sont multiples car ils dépendent avant tout de l'étiologie de l'anémie. La prise en charge est symptomatique (transfusion sanguine) et/ou étiologique (traitement par le fer, vitamines, splénectomie, greffe médullaire...).

ANÉMIES FERRIPRIVES

Le traitement de l'anémie par carence martiale repose sur la prise en charge de la cause et la reconstitution des réserves en fer.

Traitement étiologique

-> Il est indispensable sous peine de voir rechuter l'anémie. Il est spécifique de chacune des multiples étiologies. Il s'agit par exemple de corriger un déficit alimentaire lors d'une carence d'apport ou de pratiquer une intervention chirurgicale en cas de lésion digestive hémorragique.

-> Néanmoins, il n'est pas toujours possible (ex. : règles abondantes, stérilet ne pouvant pas être retiré en cas de contre-indication aux oestroprogestatifs, hernie hiatale, rarement opérée chez le sujet âgé sur une seule indication d'anémie).

Le fer est alors prescrit soit en continu, soit en cures répétées plusieurs fois par an.

En cas d'échec du traitement, il faut penser à la persistance d'un saignement dont l'origine n'est pas encore déterminée, à une erreur de diagnostic, à une mauvaise observance du traitement.

Apport en fer

-> L'administration orale de sels de fer se fait préférentiellement sous forme de sels ferreux (fumarate, ascorbate...), mieux absorbés que les sels ferriques.

-> La dose recommandée est de 100 à 200 mg/j de fer élément chez l'adulte, et de 6 à 10 mg/kg/j chez l'enfant et le nourrisson.

-> Il est préférable de prendre le fer à jeun ou une demi-heure avant les repas en fractionnant les prises sur la journée.

L'adjonction de vitamine C dans certaines spécialités vise à améliorer l'absorption intestinale du fer. On conseille alors une prise le matin ou avant le déjeuner en raison de l'effet stimulant de la vitamine C.

En cas de mauvaise tolérance (nausées, dyspepsies, constipation...), le fer est absorbé au cours des repas en évitant toutefois la consommation simultanée de produits laitiers qui diminuent l'absorption du fer de 30 à 50 %.

-> La coloration noire des selles est habituelle. Elle témoigne de l'observance au traitement.

-> Le fer injectable en intramusculaire est réservé aux (rares) cas de malabsorptions, après échec du fer per os. Le traitement se limite à quelques injections, sous strict contrôle médical.

La voie intraveineuse est uniquement indiquée pour traiter l'anémie de l'insuffisant rénal chronique dialysé lorsqu'un traitement par fer oral s'est révélé insuffisant ou mal toléré (Venofer, réservé à l'usage hospitalier).

-> L'anémie se corrige en 1 à 2 mois mais le traitement doit être prolongé en moyenne 5 à 6 mois, jusqu'à normalisation de tous les paramètres (hémoglobine, VGM et ferritine).

ANÉMIES INFLAMMATOIRES

Ce type d'anémie, dû à un défaut d'utilisation du fer, se rencontre au cours de syndromes inflammatoires importants et prolongés. Que l'origine soit infectieuse, auto-immune ou néoplasique, le seul traitement est celui de la maladie causale. L'apport de fer est inutile voire dangereux, en l'absence de carence associée.

ANÉMIES MÉGALOBLASTIQUES

Dues à un trouble du métabolisme de la vitamine B12 et/ou des folates, le traitement vise à compenser la carence.

Par déficit en vitamine B12

Que le déficit soit dû à une carence d'apport alimentaire (régime végétalien strict et prolongé) ou à une carence d'absorption (anémie pernicieuse de Biermer, gastrectomie, affections intestinales...), le traitement repose sur l'administration parentérale de vitamine B12 sous forme de cyanocobalamine ou d'hydroxocobalamine. Cette dernière peut être préférée en raison d'un meilleur stockage hépatique.

-> En cas de malabsorption, les schémas d'administration sont multiples mais tous insistent sur l'utilisation stricte de la voie IM et l'inutilité des fortes doses à cause de la fuite urinaire de la vitamine B12. En général, on administre 1 000 µg/jour pendant 7 jours pour reconstituer les réserves hépatiques et obtenir un taux sanguin normal (120 à 700 pmol/l). Un traitement d'entretien à vie (injections mensuelles puis trimestrielles) est nécessaire si la cause de la carence ne peut être guérie.

-> Un traitement per os est possible dans les carences d'apport. Il doit être maintenu jusqu'à reconstitution des réserves tissulaires et normalisation du taux sanguin en vitamine B12.

Dans les très rares cas où l'administration par voie IM est impossible, de fortes doses de vitamine B12 par voie orale (1 000 à 2 000 µg/j) peuvent vaincre la malabsorption iléale grâce à une absorption par diffusion passive.

-> Les effets indésirables sont une douleur au point d'injection, une coloration brun-rouge habituelle des urines et la survenue d'acné lors des traitements prolongés.

-> L'adjonction de fer au début du traitement à la dose de 200 mg/j est souvent nécessaire car la régénération rapide des globules rouges épuise rapidement les réserves en fer de l'organisme.

-> Dans l'anémie de Biermer, le traitement substitutif est maintenu à vie. Sinon, la rechute survient 3 à 4 ans plus tard, avec des troubles neurologiques qui peuvent être irréversibles.

-> Quand il est possible, le traitement étiologique passe par la correction du régime alimentaire le traitement de la malabsorption (désinfection intestinale par tétracyclines en cas de pullulation bactérienne du grêle).

Par déficit en folates

-> L'acide folique est administré par voie orale à la posologie de 5 à 15 mg/j chez l'adulte. La normalisation hématologique avec une correction de l'anémie apparaît au bout de 2 à 3 mois.

-> Le recours à la voie parentérale est rare même dans les carences dues à une malabsorption.

-> Le traitement de la cause de la carence est indispensable. En cas d'augmentation permanente des besoins (anémie hémolytique), de malabsorption ou de malnutrition chronique, le traitement substitutif est maintenu à raison de 2 à 5 mg d'acide folique par semaine.

-> L'acide folinique (ou folinate de calcium) s'utilise dans la prévention ou la correction des anémies mégaloblastiques iatrogènes au cours des traitements par un inhibiteur de la dihydrofolate-réductase (pyriméthamine, triméthoprime, méthotrexate), mais aussi la sulfasalazine, le triamtérène, la phénytoïne et les barbituriques.

ANÉMIES PAR INSUFFISANCE MÉDULLAIRE

-> Dans le cas d'une toxicité médicamenteuse, le traitement repose avant tout sur l'éviction temporaire ou définitive du médicament incriminé (ex. : chimiothérapie).

-> Dans les autres cas, les traitements sont plus spécifiques et sont prescrits au cas par cas en fonction de l'âge, de l'étiologie de l'aplasie et de sa gravité. Ainsi l'androgénothérapie vise à stimuler la synthèse de l'érythropoïétine et la différenciation des globules rouges. Une greffe médullaire allogénique est aussi possible.

-> Vu l'atteinte simultanée des lignées leucocytaire et plaquettaire, le traitement passe aussi par la prévention des infections (antibiothérapie, environnement stérile) et des hémorragies (injections IM et anticoagulants proscrits).

ANÉMIES HÉMOLYTIQUES

Liées à une malformation des hématies, les anémies hémolytiques peuvent nécessiter des transfusions sanguines ou une chirurgie de la rate.

Drépanocytose

La prise en charge de cette maladie chronique repose sur la prévention et le traitement de l'anémie aiguë et des complications infectieuses.

L'anémie aiguë est compensée par des transfusions de concentrés érythrocytaires.

L'éducation du patient sur sa maladie et sur la conduite à tenir en cas d'accident aigu est fondamentale. En l'absence de prise en charge préventive et curative correcte, la drépanocytose est souvent mortelle.

-> Des mesures préventives sont nécessaires. La couverture vaccinale doit impérativement être à jour. Les apports hydriques doivent être importants et réguliers. L'apparition d'une infection (rhino-pharyngite, otite) doit entraîner une consultation médicale.

-> Une crise drépanocytaire peu sévère (fièvre modérée, douleurs peu intenses) peut être prise en charge à domicile sous le contrôle du médecin traitant. Un traitement antalgique simple (paracétamol, acide acétylsalicylique) est combiné à du repos et une hydratation abondante.

-> En cas de crise plus sévère, l'hospitalisation s'impose. Le traitement repose sur l'hyperhydratation par voie veineuse et/ou buccale, un traitement antalgique adapté (AINS, morphiniques) et du repos.

Quand elle est connue, la cause déclenchante (hypoxémie, infection...) doit également être traitée.

Thalassémies

Trois mesures sont utilisées pour traiter les thalassémies symptomatiques.

-> D'abord, les transfusions sanguines sur un rythme mensuel afin de maintenir un taux d'hémoglobine supérieur à 100 g/l.

-> Ensuite, la chélation du fer grâce à l'administration parentérale de déféroxamine (Desféral), indispensable à toute thérapeutique transfusionnelle au long cours.

-> Enfin, la splénectomie en cas d'hypersplénisme.

Le « trait thalassémique » (thalassémie mineure) ne nécessite aucun traitement.

Sphérocytose héréditaire

-> La prise en charge est essentiellement chirurgicale. La splénectomie est totale dans les cas les plus graves. Si elle améliore sensiblement l'anémie, le risque de complications infectieuses qui en découle n'est pas négligeable.

-> Chez l'enfant, elle est retardée le plus possible et est précédée des vaccinations antipneumococcique et anti-Hæmophilus influenzæ.

-> Si des crises hémolytiques sévères surviennent, des transfusions sanguines peuvent être nécessaires.

-> Les formes asymptomatiques n'impliquent pas de traitement.

Déficit en glucose-6-phosphate-déshydrogénase

Le traitement, à vie, est essentiellement préventif. Les médicaments susceptibles de déclencher une poussée hémolytique (certains antipaludéens, sulfamides, antibiotiques, antalgiques...) sont évincés. L'ingestion de fèves (favisme) est également proscrite.

En cas de poussée hémolytique, la guérison est normalement rapide.

Si l'anémie est sévère, la transfusion de globules rouges dont l'enzyme est normale peut être nécessaire. La splénectomie n'a pas d'intérêt.

Anémies auto-immunes

-> Leur traitement passe par celui de la maladie causale et l'éviction des facteurs déclenchants.

-> La corticothérapie à raison de 1 à 1,5 mg/kg/j de prednisone est indiquée en première intention. Elle est maintenue jusqu'à obtenir un taux d'hémoglobine normal.

Les doses sont ensuite diminuées progressivement jusqu'à l'arrêt.

-> En cas de corticorésistance ou de cortico-intolérance, le recours est la splénectomie.

-> Les immunosuppresseurs (azathioprine, cyclophosphamide et chlorambucil) sont la dernière alternative pour les patients réfractaires.

-> Un traitement par gammaglobulines intraveineuses peut aussi être prescrit.

ANÉMIES DE L'INSUFFISANT RÉNAL CHRONIQUE

L'objectif d'un traitement substitutif par érythropoïétine (EPO) humaine recombinante chez l'insuffisant rénal chronique est double : réduire les besoins transfusionnels et améliorer la qualité de vie du malade en limitant les manifestations cliniques de l'anémie.

-> Trois médicaments, réservés aux hôpitaux et aux services de dialyse à domicile, sont commercialisés : Eprex (époétine alfa), NeoRecormon (époétine bêta) et Aranesp (darbepoétine alfa).

-> L'administration se fait préférentiellement en sous-cutané. L'intérêt principal est la possibilité pour le patient de faire l'injection lui-même à domicile (stylo RecoPen à délivrance hospitalière, compatible avec les cartouches d'époétine bêta).

-> La posologie initiale est de 20 à 50 UI/kg 3 fois par semaine, pour Eprex et NeoRecormon, en augmentant ensuite progressivement par palier de 20 à 25 UI/kg. Aranesp, dont la durée d'action est prolongée, s'injecte une seule fois par semaine.

L'augmentation du taux d'hémoglobine doit être très progressive (environ 10 g/l/mois) jusqu'à 100 à 120 g/l.

-> Les principaux effets indésirables sont une hypertension artérielle dose-dépendante, un syndrome pseudo-grippal transitoire et de rares cas de thromboses.

-> Les réserves en fer sont évaluées avant et pendant le traitement pour éventuellement instaurer une supplémentation car il existe une résistance de l'EPO en cas de carence martiale. La surveillance tensionnelle est régulière.

-> L'augmentation récente du nombre de cas d'érythroblastopénies chez des insuffisants rénaux chroniques substitués par EPO s'avère préoccupante. En effet, l'apparition d'anticorps anti-EPO entraîne une résistance au traitement. La seule alternative est le recours à la transfusion sanguine.

Par Chrystelle Rey

CONSEILS AUX PATIENTS

Trouver le coupable

La cause d'anémie la plus fréquente est la carence en fer. Mais figurent également au banc des accusés l'hémorragie, les parasitoses intestinales, les déficits enzymatiques, les carences en vitamines B9 et B12 et certaines maladies génétiques héréditaires. Face à la multiplicité des étiologies, il est important de ne pas se lancer dans une supplémentation anarchique en fer sans que l'anémie soit identifiée par un médecin.

Identifier les symptômes

Pâleur, manque d'enthousiasme ou d'énergie, maux de tête, perte de libido, incapacité à se concentrer sont autant de signes traduisant une anémie. Lorsque celle-ci est installée depuis longtemps, d'autres troubles apparaissent : essoufflement à l'effort, vertiges. S'y ajoutent des signes spécifiques. Des ongles mous, fragiles, striés, des cheveux secs et cassants voire une chute de cheveux sont typiques d'une carence en fer. L'atrophie de la muqueuse qui recouvre la langue est fréquente lors de carence en vitamine B12 ou B9. La présence de sang rouge ou noir dans les selles peut traduire une hémorragie digestive.

Les femmes, les enfants et les seniors d'abord

-> Les menstruations - plus importantes sous stérilet, moindres sous contraception orale - sont la cause la plus fréquente des anémies hypochromes ferriprives. La vigilance s'impose aussi pendant la grossesse. La qualité des apports alimentaires est importante surtout pendant la seconde moitié de la grossesse et à la puberté.

-> Il faut se méfier des petits saignements réguliers du nez, des gencives après brossage des dents. -> Attention également aux enfants vivant dans des conditions précaires ! En léchant de vieilles peintures, des canalisations anciennes, ils sont parfois victimes d'une intoxication au plomb (saturnisme) attaquant la fabrication des globules rouges.

-> Les hémorragies digestives, les oesophagites ou simples érosions liées à la prise de médicaments (anti-inflammatoires, aspirine, anticoagulants) sont parmi les causes d'anémie les plus fréquentes chez les seniors. Leurs apports alimentaires parfois insuffisants sont responsables de carences en fer, en vitamine B12 et B9. A signaler également, le traitement au long cours par des antiulcéreux qui peut expliquer une carence en vitamine B12.

Un traitement optimisé

-> L'absorption du fer est limitée par l'alimentation, et plus particulièrement par le thé. Elle est favorisée par l'acide ascorbique. Avaler le fer avec un verre de jus d'orange ou de pamplemousse. Différer et limiter la consommation de thé (2 à 3 tasses par jour).

-> Le fer doit être pris à distance d'au moins trois heures des cyclines, des fluoroquinolones, de la pénicillamine, des topiques gastro-intestinaux, de la thyroxine et des biphosphonates.

-> Le fer améliore rapidement l'état de fatigue en 1 ou 2 mois. Mais, l'absorption du fer étant quotidiennement limitée, 5 à 6 mois sont nécessaires pour reconstituer les stocks. L'efficacité du traitement est contrôlé après 3 mois.

-> La prise de fer colore les selles en noir. A cela s'ajoutent parfois des symptômes d'intolérance passagers : nausées, diarrhées ou constipation. Un fractionnement des prises quotidiennes limite ces effets indésirables.

-> Les folates pourraient réduire l'activité des antiépileptiques.

-> L'absorption de vitamine B12 peut colorer les urines en rouge et provoquer une réaction allergique (prurit, urticaire...).

Par Nathalie Hervé

L'AVIS DU SPÉCIALISTE

La carence martiale touche l'enfant

Quelles anémies touchent l'enfant ?

L'anémie par carence en fer est la plus fréquente des anémies de l'enfant. Chez le nourrisson, elle est corrélée à une carence maternelle en fer pendant la grossesse. Elle apparaît aussi naturellement et de façon temporaire vers 3 mois. Chez le petit enfant, il s'agit le plus souvent d'erreur de régime : dans la population noire, les enfants sont allaités jusque vers deux ans. Des cas de pica et de saturnisme touchent des enfants peu stimulés.

Des premières règles abondantes, un régime draconien sont en cause chez l'adolescent.

Quels conseils donner aux parents ?

L'administration de fer doit être fractionnée en 3 prises à distance des repas. Le traitement doit être régulier pendant 3 mois. La surveillance de l'enfant est importante : il faut le ramener à son médecin dès qu'apparaissent un essoufflement, des troubles du comportement, une hypotonie ou une hémorragie extériorisée (épistaxis). Une NFS est réalisée à 1 mois de traitement puis un bilan martial complet (fer sérique, ferritine, coefficient de saturation de la transferrine) après 3 mois.

Le Dr Albert Faye interrogé par Véronique Pungier

POUR EN SAVOIR PLUS

INTERNET

Cours de nutrition

http://cri-cirs-wnts.univ-lyon1.fr/Polycopies/Nutrition2/Nutrition-4.html

Le serveur de l'université de Lyon-I propose différents cours parmi lesquels un est consacré à la nutrition. Le module sur les anémies par carence martiale et les autres anémies nutritionnelles se focalise sur les pathologies liées à une carence en fer, en vitamine B12 et en folates. Didactique et complet, il aborde toutes les caractéristiques de ces anémies, notamment leur physiopathologie, de même que leurs diagnostics, leurs traitements et leur prévention.

LIVRES

Hématologie

Ouvrage collectif sous la direction du Dr Michel Vaubourdolle, collection « Le Moniteur Internat », tome 3, 2e édition, éd. Groupe Liaisons

Conçu pour les étudiants en pharmacie et les pharmaciens, cet ouvrage permet de se plonger dans la biologie et de réactualiser ses connaissances en hématologie. En commençant par l'hémoglobine, les différentes lignées sanguines et l'hémostase. Quatre chapitres sont dédiés aux anémies, le premier étant réservé au diagnostic biologique d'une anémie au quotidien.

PLAN DE PRISE CONSEILLÉ

-> Tardyferon 80 mg : la résorption optimale est obtenue par une prise du fer à distance des repas. La prise lors du repas est ici utile pour une meilleure tolérance digestive. Prendre les comprimés avec un grand verre d'eau. Exclure la prise avec du lait ou du thé.

-> Sargenor à la vitamine C : dissoudre le comprimé effervescent dans un grand verre d'eau. Compte tenu de sa teneur en vitamine C, éviter de le prendre le soir.

-> Tagamet 800 mg effervescent : dissoudre le comprimé dans un verre d'eau.

-> Géluprane 500 mg : respecter un intervalle de 4 à 6 heures entre chaque prise. Ne pas dépasser la dose quotidienne de 4 g, préconisée en cas de douleurs intenses.

Examens complémentaires

- L'hémogramme constitue l'examen biologique primordial pour poser le diagnostic d'anémie. Cinq constantes sont analysées :

-> le taux d'hémoglobine, essentiel puisqu'il définit l'anémie ;

-> le volume globulaire moyen, indispensable pour savoir si une anémie est normo-, micro- ou macrocytaire ;

-> le taux de réticulocytes, autre élément majeur qui permet de définir si une anémie est régénérative ou non ;

-> le nombre d'érythrocytes ;

-> la teneur et la concentration corpusculaire en hémoglobine déterminent si une anémie est normo- ou hypochrome.

- La morphologie des globules rouges est observée au microscope.

- D'autres examens complémentaires sont réalisés selon les résultats de l'hémogramme et les signes cliniques :

-> devant une anémie microcytaire, l'orientation du diagnostic se fait à partir des marqueurs du métabolisme du fer (ferritinémie, fer sérique, coefficient de saturation de la transférine) ;

-> s'il s'agit d'une anémie normo- ou macrocytaire régénérative, il faut rechercher les signes d'hémolyse en plus d'une étude de l'hémoglobine ;

-> pour une anémie normo- ou macrocytaire non régénérative, l'analyse du myélogramme est primordiale éventuellement complétée par les dosages des folates et de vitamine B12 sérique.

Indications transfusionnelles exceptionnelles

Face à une anémie chronique d'installation progressive, bien tolérée et facilement curable, les transfusions sont rares. Elles sont réservées à deux cas.

- Les patients présentant une anémie sévère avec des signes d'intolérance clinique et un état cardiovasculaire précaire. L'utilisation de la transfusion doit alors être prudente car il existe un risque de décompensation cardiaque.

- La spoliation sanguine aiguë (hémorragie importante).

Deux profils particuliers

- Immédiatement après la naissance, on observe chez le nouveau-né une diminution du taux d'hémoglobine par ralentissement de l'érythropoïèse. Ce phénomène qui dure jusqu'à l'âge d'environ 8 à 12 semaines est normal. En général, l'anémie est asymptomatique et ne nécessite aucun traitement. Le taux d'hémoglobine augmente ensuite progressivement au cours des années pour atteindre les normales adultes.

- Pendant la grossesse, les volumes plasmatiques sont physiologiquement augmentés, d'où des besoins accrus en fer, en folates et en vitamine B12. A titre prophylactique, l'alimentation quotidienne de la femme enceinte est supplémentée par un apport oral de fer et de folates (Tardyferon B9) à raison de un comprimé par jour dès la 24e semaine jusqu'au terme de la grossesse. Les apports préconisés en vitamine B12 (3 mg/j) sont assurés par un régime contenant des produits d'origine animale. Seules les femmes végétariennes sont

supplémentées.

Contre-indications absolues

- Fer : surcharge martiale notamment lors d'anémie normo- ou hypersidérémique (thalassémie, anémie réfractaire, anémie par insuffisance médullaire).

- Vitamine B12 : tumeur maligne en raison de ses effets sur la croissance des tissus à taux élevé de multiplication cellulaire.

- Folates : utilisation isolée dans les carences en vitamine B12 (aggravation des signes neurologiques).

- Déféroxamine : insuffisance rénale sévère non dialysée, infection bactérienne évolutive.

- Erythropoïétine humaine recombinante : grossesse, hypertension non contrôlée, patient ne pouvant pas recevoir une prophylaxie antithrombotique appropriée.

La prévention dans l'assiette

- Le fer d'origine animale, mieux absorbé, est présent dans la viande rouge, les abats, la volaille et le poisson.

Le fer des végétaux, des oeufs et des produits laitiers est peu biodisponible.

Il faut associer aux céréales, pois, haricots secs et légumes à feuilles vertes (salade, épinards, blettes) des aliments riches en vitamine C (kiwi, orange, fraise, citron, pamplemousse) qui favorisent l'absorption du fer.

Et, contrairement aux idées reçues, les épinards contiennent peu de fer !

- Les aliments riches en vitamine B12 sont le foie de veau, le poisson (maquereau, hareng), la viande, le lait et le jaune d'oeuf.

- Les folates sont surtout présents dans la betterave, le chou, les épinards, les haricots verts, la laitue et les petits pois, mais aussi dans les carottes, le concombre, le navet, la pomme de terre, le foie de veau, la viande et le poisson.

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