Comment traiter les troubles de la croissance ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2432 du 16/02/2002 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2432 du 16/02/2002
 

Cahier formation continue

L'hormone de croissance est produite à partir d'ADN recombinant. Elle donne des résultats identiques à ceux obtenus avec l'hormone hautement purifiée provenant d'hypophyses humaines. Utilisée depuis 1960, cette dernière a été interdite en 1988 car à l'origine de la transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dont les premiers cas sont apparus en mai 1985 aux Etats-Unis. Les procédés de purification ne comprenaient pas les étapes nécessaires pour éliminer et inactiver les agents responsables des encéphalopathies spongiformes.

Mécanisme d'action

L'hormone de croissance (growth hormone ou GH) est sécrétée par l'hypophyse sous l'influence de la GH-RH. Elle stimule la sécrétion d'hormones appelées somatomédines, que sont l'IGF 1 et 2 (insulin-like growth factor 1 et 2), à partir des hépatocytes et chondrocytes. L'IGF 1 va pouvoir alors exercer son action au niveau des cellules osseuses et des cartilages (voir schéma page 7).

Indications

Il existe six spécialités à base de somatropine recombinante : Genotonorm, Maxomat, Norditropine, Saizen, Umatrope et Zomacton. Granditropine (Novartis) est en cours de développement. Les indications ne sont pas identiques d'une spécialité à l'autre. Pour chacune, les indications donnant lieu à remboursement reprennent les indications pédiatriques de l'AMM :

- le retard de croissance lié à un déficit somatotrope ;

- le retard de croissance lié à un syndrome de Turner (anomalie de nombre et/ou de structure sur le chromosome X) ;

- le retard de croissance lié à une insuffisance rénale chronique chez l'enfant prépubère ;

- le retard de croissance intra-utérin chez les enfants ayant une taille inférieure ou égale à - 2,5 déviations standard (chez les filles âgées de 3 à 8 ans et les garçons âgés de 3 à 10 ans).

Les profils d'impureté différents entraînent des risques immunogènes variables. Ce risque faible augmenterait lors d'un changement d'hormone, avec apparition éventuelle d'anticorps neutralisants. Une substitution trop fréquente aggraverait ce risque.

Sur une longue durée, le changement de spécialité compliquerait notablement l'imputabilité et la traçabilité en cas d'effets indésirables.

Les hormones sont équivalentes sur le plan de l'efficacité. Il existe des différences de posologies selon les produits pour une même indication (études spécifiques de chaque laboratoire).

Les présentations (stylo, cartouche, flacon) diffèrent selon les spécialités, ce qui complique la manipulation par le patient ou par son entourage familial, lors d'un éventuel changement.

Le changement d'hormone de croissance en cours de traitement n'est pas recommandé mais est envisageable si le prescripteur le souhaite.

Posologies

La posologie de somatropine doit être adaptée à chaque patient en fonction du poids ou de la surface corporelle.

Doses recommandées chez l'enfant

Pour Genotonorm, Norditropine, Saizen et Umatrope :

- déficit somatotrope : 0,025 à 0,035 mg/kg/jour soit 0,7 à 1 mg/m2/jour ;

- syndrome de Turner et insuffisance rénale chronique : 0,045 à 0,05 mg/kg/jour soit 1,4 mg/m2/jour.

Pour Maxomat et Zomacton :

- déficit somatotrope : 0,17 à 0,23 mg/kg/semaine.

Pour Zomacton :

- syndrome de Turner : 0,33 mg/kg/semaine.

Pour Maxomat :

- syndrome de Turner : 0,23 à 0,29 mg/kg/semaine ;

- retard de croissance intra-utérin : 0,39 mg/kg/semaine.

Doses recommandées chez l'adulte

Pour Genotonorm et Umatrope :

- de 0,006 mg/kg/jour à 0,012 mg/kg/jour.

Pour Norditropine et Saizen :

- de 0,15 à 0,3 mg/jour au début avec adaptation progressive, sans dépasser 1 mg/jour.

Modalités de prise

L'administration de somatropine se pratique de préférence par voie sous-cutanée, le soir afin de reproduire le profil physiologique de l'hormone naturelle et d'obtenir une concentration maximale la nuit. Les sites d'administration (cuisses, ventre, biceps, fesses) doivent varier afin d'éviter l'apparition d'une lipoatrophie. Les aiguilles doivent être changées à chaque injection.

Effets indésirables

- La somatropine peut engendrer un déficit du capital osseux au niveau fémoral. Les parents doivent particulièrement surveiller l'apparition d'une claudication ou d'une douleur au niveau de la hanche ou du genou.

- En cas de céphalées sévères ou répétées, de troubles visuels, ou de nausées et vomissements, il est recommandé d'effectuer un fond d'oeil à la recherche d'un éventuel oedème papillaire.

- L'apparition d'anticorps antisomatropine survient dans 7 à 40 % des cas, sans répercussion clinique.

- Des hypothyroïdies peuvent apparaître.

- La somatropine peut induire une insulinorésistance ainsi qu'une hyperglycémie.

- En cas de réactions cutanées transitoires au point d'injection, l'application de glaçons dans un gant est recommandée.

- Réaction positive lors de contrôles antidopage.

Efficacité

- Déficit somatotrope

La majorité des enfants répond favorablement au traitement par cette hormone. Les réponses les plus importantes sont obtenues durant la première année de traitement. Le taux de croissance peut doubler dans les premières années. L'administration de stéroïdes sexuels peut venir compléter le traitement à l'âge de la puberté afin d'obtenir un développement sexuel normal. Près de 10 % des enfants ayant un déficit en GH ne répondent pas au traitement.

- Syndrome de Turner

Certaines études rapportent un gain de 6 cm à la suite de six années de traitement. Les études les plus récentes associent la somatropine à l'éthinylestradiol, ce qui permettrait à l'enfant d'avoir une taille définitive de 150 voire 160 cm au lieu des 142 cm de moyenne observés au cours de ce syndrome.

- Retard de croissance lié à une insuffisance rénale chronique chez l'enfant prépubère

Les essais comparatifs versus placebo permettent d'observer une accélération de la croissance sans pour autant avoir la certitude que la taille adulte sera supérieure.

- Retard de croissance intra-utérin (RCIU)

Entre 50 et 70 % des enfants présentant un RCIU rattrapent ce retard durant les premiers mois de la vie, sans que les facteurs de ce rattrapage soient connus. Il est nécessaire de patienter quelques années avant la mise sous traitement afin d'évaluer la nécessité de celui-ci.

Suivi thérapeutique

- Suivi de la vitesse de croissance à l'aide de courbes poids/taille tous les trois mois. Pour les enfants revenus dans la zone normale avec une taille au-delà de 2 déviations standard, le traitement est interrompu un an avec réévaluation à 6 mois. Il est éventuellement repris au bout de l'année d'interruption, en cas de ralentissement, à la dose continue moyenne ou à dose double discontinue 6 mois sur 12. Pour les enfants dont la taille reste inférieure à - 2 DS, la poursuite du traitement s'effectue à la dose moyenne. Une évaluation de la maturation osseuse et du stade pubertaire complètent le suivi.

- Contrôle régulier de la fonction thyroïdienne et mise en place d'un traitement substitutif si besoin.

- Surveillance des signes éventuels de reprise d'un processus tumoral.

- Chez les enfants atteints d'insuffisance rénale chronique, le traitement est interrompu en cas de transplantation rénale.

Changement d'unité

Dans le cadre d'une harmonisation internationale de l'unité de mesure de l'hormone de croissance humaine recombinante, depuis le 30 juin 2001, les dosages d'hormone de croissance sont exprimés en mg et non plus en unité internationale. Les posologies sont donc désormais elles aussi exprimées en mg. Il suffit de faire la conversion en mg/UI.

Comment délivrer une hormone de croissance ?

Les hormones de croissance ont le double statut de médicament à prescription restreinte et de médicament d'exception. Elles sont inscrites sur la liste I des substances vénéneuses et remboursables uniquement pour l'enfant.

- Côté prescription, la prescription initiale sur ordonnance pour médicament d'exception à 4 volets est obligatoirement hospitalière. Valable un an, elle est réservée aux spécialistes en pédiatrie et/ou endocrinologie et maladies métaboliques. Le renouvellement à l'identique sur ordonnance pour médicament d'exception est possible par tout médecin.

- Côté délivrance, la qualification ou le titre du médecin hospitalier div de l'ordonnance initiale doivent être vérifiés. La délivrance se fait soit sur présentation d'une ordonnance initiale hospitalière valide, soit de l'ordonnance de renouvellement et de la PIH datant de moins de un an.

Le pharmacien doit reporter les mentions obligatoires habituelles (numéro d'inscription à l'ordonnancier, quantités délivrées et date de délivrance) et conserver le volet 4.

Reporter sur l'ordonnancier les informations suivantes : nom et qualification du médecin hospitalier div de la prescription initiale, nom de l'établissement dans lequel il exerce.

- En cas de renouvellement, des photocopies du volet 1 doivent être effectuées. Dans le cas d'une ALD, l'ordonnance de médicament d'exception remplace l'ordonnance bi-zone.

Contre-indications

- Processus tumoral évolutif connu.

- Patients dont les épiphyses sont soudées.

- Patient présentant un état critique aigu, souffrant de complications secondaires à l'intervention chirurgicale, à un polytraumatisme.

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