Comment traiter l'hypothyroïdie ? - Le Moniteur des Pharmacies n° 2421 du 24/11/2001 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2421 du 24/11/2001
 

Cahier formation continue

Quelle qu'en soit l'origine, le traitement des hypothyroïdies repose sur la mise en route d'une thérapie substitutive.

La mise en place du traitement dépend de l'origine de l'hypothyroïdie et des caractéristiques du patient.

Hormones thyroïdiennes

Le traitement de l'hypothyroïdie fait le plus souvent appel à la thyroxine T4, de façon à supprimer les signes cliniques de l'hypothyroïdie, en remplaçant les hormones thyroïdiennes insuffisamment produites. L'utilisation de liothyronine T3 est d'un maniement plus délicat (action rapide mais brève).

L-thyroxine (T4)

- Seuls les dérivés lévogyres de la thyroxine (L-thyroxine et Lévothyrox) sont utilisés ; les dérivés dextrogyres ont surtout été utilisés comme agents hypocholestérolémiants.

Le traitement est théoriquement prescrit à vie, bien qu'une rémission spontanée puisse survenir dans 20 % des thyroïdites auto-immunes dites de Hashimoto.

- La dose moyenne de lévothyroxine nécessaire pour traiter une hypothyroïdie symptomatique est de 75 à 100 mg/j pour une femme et de 100 à 150 mg/j pour un homme. La demi-vie plasmatique longue (une semaine) autorise une prise unique quotidienne, de préférence à jeun, l'absorption étant diminuée par la prise alimentaire. Les besoins tendent à diminuer avec l'âge, par contre ils s'élèvent d'environ 25 % durant la grossesse.

Triiodothyronine ou liothyronine (T3)

- L'administration d'hormone T3 (Cynomel), si elle paraît logique de prime abord, la thyroxine n'étant qu'une prohormone de la T3, est beaucoup plus difficile à manier car la triiodothyronine possède une demi-vie courte (24 heures), imposant au moins 3 prises par jour.

De plus, elle expose à des pics plasmatiques. Les patients recevant de la T3 sont biologiquement hyperthyroïdiens plusieurs heures par jour, ce qui augmente le risque cardiaque.

Dans le traitement substitutif au long cours, la liothyronine n'est utile que de façon transitoire, en attendant l'effet d'un traitement par lévothyroxine. Elle ne doit pas être utilisée seule.

- L'association de T3 et T4 (Euthyral) ne présente pas d'avantages sur la lévothyroxine. La présence de T3 la contre-indique chez le sujet âgé et le sujet coronarien.

Mise en place du traitement

- Chez le patient de moins de 65 ans

Chez le patient jeune, sans pathologie coronarienne, le traitement peut être débuté d'emblée à pleine dose (environ 100 mg/j).

- Chez le patient âgé ou coronarien

-> Chez les personnes de plus de 65 ans et chez les patients coronariens quel que soit leur âge, la mise en route du traitement est plus délicate car l'apport d'hormones thyroïdiennes augmente le travail myocardique et peut provoquer un accident ischémique aigu.

-> La mise en place du traitement est alors initiée le plus souvent en milieu hospitalier. Il est proposé de débuter par la dose de 25 mg/j, progressivement augmentée de 25 mg/j toutes les 3 semaines. En l'absence de contre-indication, il peut être instauré une prémédication par bêtabloquant (le plus souvent par acébutolol à la posologie de 100 mg/j) afin de minimiser le risque d'accident ischémique. La fréquence cardiaque doit être étroitement surveillée et la posologie de l'acébutolol adaptée si nécessaire, car il est important de ne pas majorer la bradycardie liée à l'hypothyroïdie.

-> En cas de survenue d'une crise angineuse, il est nécessaire d'évaluer la sévérité de l'atteinte coronarienne, après avoir diminué la dose de thyroxine ou suspendu le traitement, et de prendre en charge la crise par de la trinitrine en sublingual.

- En cas d'hypothyroïdie centrale

-> L'insuffisance thyroïdienne centrale, d'origine hypophysaire, s'accompagne souvent d'autres déficits hypophysaires dont le seul à prendre en compte avant de débuter un traitement substitutif par lévothyroxine est le déficit corticotrope.

Ce déficit est le plus souvent asymptomatique et ne s'exprime que lorsque les besoins en cortisol augmentent (stress, infection ou accélération du métabolisme par apport thérapeutique d'hormones thyroïdiennes). La survenue d'une insuffisance surrénale aiguë, grave urgence métabolique, est toujours à redouter lors de la mise en route du traitement par lévothyroxine d'une hypothyroïdie d'origine centrale.

-> Une insuffisance surrénale asymptomatique doit donc être recherchée et traitée avant de débuter le traitement substitutif. Il est recommandé de débuter le traitement par thyroxine après 3 mois de traitement de l'insuffisance surrénale, et selon le même protocole que lors d'une hypothyroïdie basse.

Suivi thérapeutique

- Hypothyroïdie périphérique

-> Le suivi s'effectue de manière clinique tout d'abord, avec la recherche des signes de surdosage (nervosité, tremblements, palpitations, insomnie, amaigrissement, diarrhée).

-> Sur un versant biologique, l'objectif est la normalisation de la TSH (valeur proche de 1 mU/l). Le dosage des hormones thyroïdiennes libres (T3, T4) n'est pas nécessaire dans le suivi du traitement. La demi-vie de la L-thyroxine étant d'environ une semaine, l'équilibre n'est atteint qu'au bout de plusieurs semaines. Il est donc recommandé de doser la TSH tous les 2 mois, puis quatre mois après la mise en route du traitement. Si la TSH est toujours élevée au terme des 4 mois, il est proposé d'augmenter la dose de 25 mg/j et de réaliser un dosage de la TSH 6 à 8 semaines plus tard, la posologie moyenne d'entretien par Lévothyrox étant de 1 à 2 mg/kg/j. Lorsque la dose quotidienne est adaptée, un dosage de la TSH 6 mois plus tard puis de façon annuelle est suffisant.

Un dosage complémentaire de T4 ou de T3 libre peut être nécessaire, en cas de doute sur l'observance du patient, d'instabilité inexpliquée de l'hypothyroïdie.

Il est en outre indispensable de surveiller l'évolution de l'ostéoporose chez les sujets âgés ayant une atteinte ostéoporotique sévère, celle-ci pouvant s'aggraver en cas de frénation importante de la sécrétion de TSH.

- Hypothyroïdie centrale

Dans le cas de l'hypothyroïdie centrale, la surveillance biologique doit être réalisée par le dosage de la fraction libre de T4. Le dosage de la TSH n'a pas d'intérêt dans ce cas.

Cas particuliers

- Hypothyroïdie du post-partum

Généralement, son évolution est plutôt favorable et ne nécessite pas de traitement. Parfois, la grossesse ou le post-partum dévoilent une hypothyroïdie frustre qui peut ensuite évoluer en thyroïdite de Hashimoto.

- Grossesse et hypothyroïdie

Tout traitement substitutif doit être rigoureusement poursuivi durant la grossesse avec dosage et adaptation posologique à l'appui. Les besoins en hormones thyroïdiennes augmentent dès le premier trimestre de la grossesse.

Les doses antérieures doivent être reprises dès l'accouchement, et poursuivies durant l'allaitement.

- Hypothyroïdie du nourrisson et de l'enfant

-> Chez le nouveau-né, le traitement rapide par des hormones thyroïdiennes exogènes, au plus tard dans les 7 à 10 premiers jours de la période postnatale, permet de prévenir les défauts du développement mental (crétinisme) et de normaliser la croissance osseuse. La posologie appropriée d'hormone thyroïdienne au cours de la première année de vie se situe entre 25 et 90 mg/j de L-thyroxine sodique per os. Il faut veiller à éviter un surdosage pouvant mener à une hyperthyroïdie.

-> La sévérité initiale de l'hypothyroïdie, l'âge avancé de l'enfant lors du diagnostic, la mauvaise observance du traitement peuvent toutefois entraîner l'apparition de troubles neuropsychologiques chez certains.

-> La liothyronine n'est pas indiquée chez l'enfant de moins de 6 ans.

- Coma myxoedémateux

Son traitement consiste en l'administration de doses élevées de T4 (500 mg IV) car la TBG doit être saturée pour que l'hormone libre puisse agir.

La dose d'entretien est de 50 mg/j en IV pour T4, jusqu'à ce que la L-thyroxine puisse être administrée per os. L'hypoxémie est fréquente, et on doit mesurer la PaO2 à la fin du traitement. En cas de trouble de la ventilation, une assistance respiratoire mécanique est immédiatement mise en oeuvre.

Indications du tiratricol

Le tiratricol (Téatrois, Triacana), métabolite de la liothyronine T3, n'est pas indiqué dans la prise en charge thérapeutique de l'hypothyroïdie. Il est utilisé dans les situations nécessitant la frénation de la TSH : syndromes de résistance aux hormones thyroïdiennes, cancers thyroïdiens.

Téatrois et Triacana sont prescrits en 3 à 4 prises par jour, en supplément du traitement par lévothyroxine lorsque l'effet frénateur de ce dernier est insuffisant.

Le tiratricol ne doit pas être prescrit chez les patients obèses sans dysthyroïdie.

Contre-indications et effets indésirables

- Les hormones thyroïdiennes sont contre-indiquées en cas d'hyperthyroïdie et d'insuffisance coronarienne grave non traitée par les bêtabloquants.

- Les effets indésirables observés le plus fréquemment sont une aggravation des troubles cardiaques préexistants ou des signes d'hyperthyroïdie. Il est judicieux de suspendre le traitement substitutif durant quelques jours en cas de tachycardie, d'insomnie, d'excitabilité importante, de fièvre, sueurs, amaigrissement rapide ou diarrhées.

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