Socioprofessionnel Réservé aux abonnés

Une seule santé… et une urgence à agir

Publié le 23 avril 2022
Par Magali Clausener
Mettre en favori

« Santé humaine, santé animale, santé de l’environnement : l’équation de notre avenir » est un bon résumé du concept One Health (« une seule santé ») mis en avant depuis la pandémie de Covid-19. Quelles actions mener pour préserver la planète actuellement et pour le futur ? Bref exposé.

L’origine du Covid-19 est probablement une zoonose due à l’introduction d’un coronavirus à partir d’un réservoir animal », a conclu le conseil scientifique français. L’apparition du Sars-CoV-2 a donc mis en exergue le lien entre le monde humain et le monde animal avec le franchissement de la barrière d’espèce, mais également le rôle qu’auraient pu jouer les vétérinaires dans la gestion de cette crise sanitaire. Ainsi que la nécessité de prévenir les futures épidémies en ayant une vision globale de la santé des espèces vivantes et végétales. Des enjeux expliqués par les intervenants du colloque « une seule santé », organisé par le magazine L’Obs et le groupe 1Health1 à Bordeaux (Gironde), le 31 mars, sur le thème « Santé humaine, santé animale, santé de l’environnement : l’équation de notre avenir ».

Les épidémies en forte augmentation

« Depuis les années 1960, nous assistons à une augmentation du nombre d’épidémies de maladies zoonotiques, à une hausse des maladies vectorielles, de celles touchant que ce soit les animaux d’élevage ou la faune sauvage, et également des maladies, notamment fongiques, affectant la végétation sur l’ensemble de la planète », déclare Serge Morand, écologue du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), à l’occasion de ce rendez-vous qui met en avant le concept One Health, qui s’est développé aux débuts des années 2000. Plusieurs phénomènes expliquent cette situation. Le changement climatique, mais aussi l’empreinte croissante de l’élevage sur notre environnement : entre 1960 et 2020, nous sommes passés au niveau mondial de moins de 1 milliard de têtes de bétail à plus de 1,6 milliard, de 500 millions de porcs à 1,5 milliard et de 4 milliards de poulets à 40 milliards. « Le poids de la biomasse des vaches sur la planète est plus important que celui de la biomasse des humains », commente-t-il. Pire encore, selon l’écologue, « le nombre de poulets va bientôt dépasser celui des oiseaux sauvages qui, lui, a chuté de 300 milliards en 1997 à 50 milliards aujourd’hui ». L’extension et l’intensification de l’agriculture jouent également un rôle important dans les pertes de biodiversité avec une hausse de 9 % des terres agricoles depuis 2003, ainsi que la déforestation et la croissance des surfaces de plantations commerciales. Enfin, les échanges commerciaux et le tourisme contribuent à la circulation des maladies.

De nouvelles approches

Pour Serge Morand, la prévention des épidémies est essentielle et doit intégrer de nouvelles approches territoriales. De nombreuses actions sont déjà engagées en France. Par exemple, le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine va élaborer une feuille de route sur la santé, en organisant des concertations en association avec des médecins, des vétérinaires et plus largement des professionnels de santé, notamment sur l’accès aux soins tant pour les résidents que pour les éleveurs. Un véritable enjeu sachant que la région fait face à une troisième épidémie de grippe aviaire en quatre ans, qui a conduit à l’abattage de 14 000 volailles. Le conseil régional a aussi lancé il y a cinq ans le projet VitiREV afin d’aider les viticulteurs à ne plus utiliser de pesticides d’ici 2030. L’université de Limoges (Haute-Vienne) a en outre créé un master One Health ouvert aux professionnels de santé et aux vétérinaires. Autre exemple d’action internationale : le projet Prezode (Preventing Zoonotic Disease Emergence), lancé en 2021, dont le but est de comprendre les risques d’émergence de maladies infectieuses zoonotiques, d’améliorer la prévention et la détection précoce, et d’assurer une réponse rapide face à une épidémie. L’Institut de recherche pour le développement (IRD) est ainsi présent au Yucatán (Mexique) pour participer à cette initiative qui regroupe à ce jour 130 partenaires et 10 pays dont la France.

1 Avec le soutien de Boehringer Ingelheim, Ceva, MSD Santé animale, Viatris et la région Nouvelle-Aquitaine.

Publicité