Publicité pour les médicaments : les influenceurs dans le viseur

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Publicité pour les médicaments : les influenceurs dans le viseur

Publié le 4 avril 2023
Par Anne-Hélène Collin
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Les influenceurs « santé » sont dans le collimateur des députés, qui ont examiné une proposition de loi visant à mettre fin à leurs « arnaques » et « dérives » sur les réseaux sociaux. Si elle a envisagé d’interdire la publicité pour les produits de santé, l’Assemblée nationale a finalement fait marche arrière. Voilà pourquoi.

« Faites attention à la loi qui arrive ». Arthur Delaporte, député Nupes (Calvados) et corapporteur de la proposition de loi transpartisane (Renaissance-Nupes) visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, donne le ton à l’ouverture des débats en séance publique à l’Assemblée nationale, ce 30 mars. Les députés préviennent ainsi les influenceurs « santé » qui assurent « la promotion de  » médicaments  » contre le cancer, de produits cosmétiques provoquant des pertes de cheveux ou plaques rouges sur le corps… », citent les rapporteurs en introduction, ou ceux qui vantent l’antidiabétique oral Ozempic (sémaglutide) à des fins de perte de poids et les capteurs de glucose en continu « comme outils lifestyle », rappelait la Fédération française des diabétiques dans un communiqué du 28 mars.

« Droit mou »

A l’origine, l’article 1 de la proposition de loi interdit la promotion sur les réseaux sociaux des produits pharmaceutiques, des dispositifs médicaux et des actes de chirurgie, « à l’exception du relai des campagnes de santé publique du Gouvernement ». Mais en commission, les députés adoptent un amendement du groupe Renaissance qui supprime cette interdiction, parce que « le champ [que l’article] définit nous semble beaucoup trop large : il conduirait à interdire la promotion des compléments alimentaires, des vitamines, des préservatifs ou des tests de grossesse, tous en vente libre », expliquait Violette Spillebout (Nord). « Il s’agit d’éviter que soient empêchées de s’exprimer nombre d’entreprises du secteur, notamment de petites entreprises, qui commercialisent en particulier des compléments alimentaires, souvent recomposés en fonction du profil de la personne », ajoute-t-elle. Et de rappeler que « les influenceurs sont concernés, dans le cadre de la proposition de loi, par l’interdiction de la publicité mensongère ».

En séance publique, étape suivante du circuit législatif, la nouvelle mouture du texte n’a pas manqué de faire réagir certains députés. « Comme à son habitude, en effet, la majorité a laissé son empreinte en transformant en droit mou un cadre à l’origine plus contraignant. L’interdiction de la promotion de médicaments, des produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux, prévue dans le texte initial, est passée à la trappe », résume le député Yannick Monnet (Allier, Nupes).

Le droit d’en reparler

Au final, malgré de longs débats, les députés n’ont pas retenu l’interdiction de la publicité pour les produits de santé par les influenceurs. Ils ont préféré rappeler, par amendement, que les influenceurs « sont soumis aux dispositions du code de la Santé publique concernant la publicité des médicaments, dispositifs médicaux, ainsi qu’aux règles fixées par le règlement européenne du 20 décembre 2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires ».

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Mais la question sera sûrement « approfondie » lors de la navette parlementaire. « Il s’agit d’un sujet majeur : pas d’objection à en reparler ! », conclut Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme.