Médicaments non utilisés : une enquête en Normandie fait polémique

© Getty Images - Health themes: Background of a large group of assorted capsules, pills and blisters. Drug abuse.

Interpro Réservé aux abonnés

Médicaments non utilisés : une enquête en Normandie fait polémique

Publié le 22 avril 2025
Par Matthieu Vandendriessche
Une enquête initiée en Normandie vise à quantifier et qualifier les médicaments non utilisés (MNU) rapportés dans les pharmacies. Avant même son lancement, cette initiative suscite l’hostilité de pharmaciens.

Les officines normandes vont pouvoir quantifier et qualifier les médicaments non utilisés (MNU) rapportés par les patients dans le cadre d’une enquête lancée par l’agence régionale de santé (ARS) et l’Omédit de Normandie en lien avec l’Union régionale des médecins libéraux de Normandie et l’Union régionale de professionnels de santé (URPS) Pharmaciens. Le projet est géré par une étudiante en pharmacie de Rouen (Seine-Maritime) dans le cadre de sa thèse d’exercice. Pendant une semaine qu’ils choisiront eux-mêmes d’ici à fin mai, les pharmaciens volontaires vont mentionner dans un tableau Excel le libellé du médicament collecté (s’il est identifiable), le nombre d’unités correspondant, une éventuelle péremption et l’état de l’emballage. Ils vont également peser les MNU avant qu’ils ne rejoignent le carton de collecte Cyclamed. « Toutes les formes de médicaments à usage humain doivent être répertoriées : gélules, comprimés, sachets, sirops, collyres, bains de bouche, crèmes et pommades, ovules et suppositoires, etc. », précise l’étudiante en pharmacie. Chaque officine participante est indemnisée à hauteur de 400 € TTC. « Les données récoltées permettront de proposer des solutions pour réduire le volume des médicaments jetés chaque année », souligne l’Omédit Normandie.

Des confrères hostiles

Cette initiative vient en complément d’une enquête nationale sur le gaspillage des médicaments en cours dans les hôpitaux. Depuis son annonce, elle suscite la réprobation de pharmaciens qui se sont sentis pointés du doigt par l’opération de dénonciation du gaspillage de médicaments de deux syndicats d’infirmiers début avril et alors que l’Assurance maladie s’interroge sur la possibilité de réutiliser des MNU. Le président de l’URPS Pharmaciens de Normandie est accusé de tendre le bâton pour se faire battre. « C’est en étant acteur du sujet qu’on pourra s’exprimer dessus, justifie Sébastien Ledunois, titulaire à Saint-Lô (Manche) et également président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) de la Manche. Je veux rester autour de la table. Si la chaise du pharmacien est vide, d’autres pourraient prendre des décisions graves à notre place. » Il s’agit selon lui d’un état des lieux qui répond aux aspirations écoresponsables de la population et dont on ne peut aujourd’hui rien présager des résultats. « Si on fait fausse route, cela nous donnera la possibilité de le prouver », affirme-t-il, évoquant la dispensation de médicaments à l’unité et la possibilité de réutiliser des MNU. Sébastien Ledunois indique toutefois que face à l’hostilité de ses confrères, cette initiative pourrait être reconsidérée. Une réunion est prévue fin avril avec les instances nationales du syndicat. À ce jour, l’appel à candidatures a été lancé auprès des officines. Pour le président de l’URPS, l’enquête pourrait être prise en main par des pharmaciens maîtres de stage et leurs étudiants. En parallèle de cette démarche, un questionnaire en ligne destiné aux patients doit permettre d’identifier les raisons de la non-utilisation des médicaments. Les cabinets de médecins de ville et les associations de patients se font le relais de ce second volet de l’opération.

Publicité