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© Getty Images/iStockphoto
Macron rouvre le chantier explosif du financement social
« Je demande au gouvernement l’ouverture, avec l’ensemble des forces syndicales et patronales, d’une conférence sociale sur le mode de financement de notre modèle social dans les prochaines semaines. » Le 13 mai, Emmanuel Macron a surpris en ranimant un dossier structurel sensible : celui du financement de la protection sociale. Invité du journal télévisé de TF1, il a pointé un déséquilibre majeur : « notre système repose beaucoup trop sur le travail ».
Ce chantier, rarement abordé depuis la création de la CSG en 1991, devrait associer partenaires sociaux, gouvernement et experts économiques. Il fait suite aux tensions apparues lors du conclave sur les retraites organisé en avril, au cours duquel plusieurs syndicats avaient appelé à une remise à plat des logiques de financement.
Moins de charges sur le travail, plus de fiscalité sur la consommation ?
Sans entrer dans les détails, le chef de l’État a exprimé sa préférence pour un rééquilibrage progressif : « Je ne suis pas favorable à une baisse des cotisations, ni à une augmentation de la TVA sur les produits de première nécessité. Mais nous devons réfléchir à une fiscalité plus juste, et moins concentrée sur le travail. » En clair : une hausse ciblée de la fiscalité indirecte pourrait être mise sur la table, comme levier alternatif aux prélèvements sociaux classiques.
Aujourd’hui, les cotisations et contributions assises sur les salaires représentent encore près de 54 % des recettes de la Sécurité sociale (source : Urssaf 2023). Toute évolution de cette répartition aurait des impacts immédiats sur les entreprises, les travailleurs indépendants et les professions de santé libérales. Côté officine, toute modification du taux ou de l’assiette des cotisations sociales pourrait rebattre les cartes, en particulier pour les titulaires employeurs et les structures sociétaires.
« Responsabiliser » les dépenses de santé
Autre point abordé par Emmanuel Macron : la maîtrise des dépenses, et notamment celles de santé. « Il faut réussir à les freiner », a-t-il affirmé, tout en défendant l’idée d’un système plus efficient. « On doit responsabiliser les acteurs », a-t-il ajouté, sans préciser s’il visait les prescripteurs, les patients ou les administrations gestionnaires.
Un signal dans la droite ligne des orientations budgétaires actuelles. Pour 2025, l’Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie) est prévu en hausse de 3,2 %, soit en deçà de sa trajectoire naturelle (+ 4,5 % selon la Cour des comptes). Le déficit de l’Assurance maladie, estimé à 11,6 milliards d’euros en 2024, reste un sujet de préoccupation majeur à Bercy comme au ministère de la Santé.
Dans ce contexte, les pharmaciens pourraient être à nouveau sollicités pour participer à la régulation, qu’il s’agisse de substitution accrue, de déprescription ou de maîtrise des volumes de délivrance.
Méfiance syndicale
Du côté des organisations syndicales, la proposition présidentielle a été fraîchement accueillie. La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, présente sur le plateau de TF1, a déclaré qu’« une concertation sérieuse suppose que les syndicats soient écoutés, et pas simplement convoqués ». FO et la CFDT n’ont pas encore officiellement réagi, mais plusieurs représentants ont exprimé en coulisses leur crainte que cette conférence serve à justifier une fiscalisation accrue des recettes sociales, au détriment des garanties de financement par le travail.
À droite, l’idée d’un transfert partiel vers la fiscalité indirecte séduit, tandis qu’à gauche, elle est dénoncée comme socialement injuste. Le débat s’annonce donc clivant, et sa traduction concrète incertaine.
Un pari politique risqué
En parallèle, Emmanuel Macron a évoqué la possibilité d’un référendum sur la fin de vie, si le débat parlementaire s’enlisait. Mais c’est bien sur le front social que se concentre l’attention de l’exécutif. La relance de la réflexion sur le financement du modèle social constitue une prise de risque assumée : l’équilibre du système de protection sociale est à la fois un pilier de la cohésion nationale et un sujet explosif sur le plan politique.
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