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Le point sur les anticoagulants oraux directs
Les anticoagulants oraux directs (AOD) s’administrent par voie orale, à l’instar des antivitamines K (AVK).
Leur nom est lié à leur mode d’action : une inhibition directe de certains facteurs de coagulation.
À ce jour, trois AOD sont commercialisés en France : l’apixaban, le rivaroxaban et le dabigatran.
Comment agissent les les anticoagulants oraux directs ?
Si les AVK agissent au niveau du foie, en empêchant la synthèse hépatique de certains facteurs de coagulation, les AOD agissent au niveau du sang, en inactivant certains facteurs de coagulation. Ceci a pour effet de bloquer la cascade de coagulation et d’éviter la synthèse de fibrine, d’où leur effet anticoagulant.
Les xabans (apixaban et rivaroxaban) inactivent directement et spécifiquement le facteur Stuart activé (ou facteur Xa) et le dabigatran, la thrombine (ou facteur IIa).
Leur délai d’action est court (environ 2 heures). Ils peuvent donc être utilisés dans des situations aiguës et ne nécessitent généralement pas un traitement par héparine en attendant leur pleine efficacité. Et ce, contrairement aux AVK, dont le délai d’action est de 2 à 3 jours et pour lesquels la pleine efficacité s’observe en 5 jours.
Quelles indications ?
D’abord utilisés en prévention des événements thromboemboliques veineux (ETEV) après la pose d’une prothèse totale de hanche ou de genou, les AOD ont vu leurs indications élargies, d’une part, à la prévention de l’accident vasculaire cérébral (AVC) et de l’embolie systémique (ES) dans la fibrillation auriculaire non valvulaire (FANV) ; d’autre part, au traitement de la thrombose veineuse profonde (TVP) et de l’embolie pulmonaire (EP) ainsi qu’à la prévention de leurs récidives. Le rivaroxaban est prescrit en association avec l’aspirine à faible dose dans la prévention des accidents thrombotiques liés à un syndrome coronarien aigu (SCA) ou à une maladie coronarienne.
À noter : les AOD ont des indications chez l’enfant. Les posologies sont adaptées en fonction de l’âge.
Anticoagulants oraux directs : quels effets indésirables ?
Comme pour les autres anticoagulants, l’utilisation des AOD est liée à un risque hémorragique. Celui-ci est majoré par l’âge (> 75 ans), le faible poids corporel (< 60 kg), l’insuffisance rénale, la présence d’une inflammation digestive ou d’un reflux gastro-œsophagien et l’association avec certains médicaments inhibiteurs du métabolisme des AOD ou de la P-glycoprotéine (ou P-gp), une protéine d’efflux s’opposant à l’absorption intestinale de nombreux médicaments et contribuant à leur excrétion rénale.
Les AOD peuvent également être responsables de troubles digestifs, du type nausées le plus fréquemment, de diarrhées (en particulier le dabigatran) ou de douleurs abdominales. Ils peuvent induire une anémie.
Des atteintes hépatiques sont également fréquemment observées, notamment avec le rivaroxaban. Ce dernier expose en outre au risque fréquent de vertiges (en alerter les conducteurs d’engins ou de véhicules) et de céphalées.
Plus rarement, des cas d’éruptions cutanées et de prurit, d’angio-œdème et d’hypersensibilité ont été rapportés.
Quelles contre-indications et précautions ?
Comme les autres anticoagulants, les AOD sont contre-indiqués en cas de saignements évolutifs ou de maladie à risque de saignements majeurs. Ils le sont également en cas d’insuffisance hépatique ou d’atteinte hépatique associée à une coagulopathie.
Médicament à élimination rénale majoritaire, le dabigatran est contre-indiqué en cas d’insuffisance rénale terminale ou sévère (clairance de la créatinine < 30 ml/min)1. Les xabans ne sont pas recommandés chez l’insuffisant rénal terminal (clairance < 15 ml/min) et doivent être utilisés avec prudence et à faible dose chez l’insuffisant rénal sévère.
Les AOD ne doivent pas être utilisés chez la femme enceinte ni chez la mère allaitante1.
Y a-t-il des interactions ?
Associations contre-indiquées. Tous les AOD sont contre-indiqués avec l’aspirine aux doses anti-inflammatoires (≥ 1 g par prise et/ou ≥ 3 g par jour) ou, en cas d’antécédent d’ulcère gastroduodénal, aux doses antalgiques et antipyrétiques (≥ 500 mg par prise et/ou < 3 g par jour). Le dabigatran est contre-indiqué avec la ciclosporine et la dronédarone, ainsi qu’avec certains antirétroviraux et antifongiques imidazolés qui inhibent son métabolisme.
Associations déconseillées. Les AOD sont déconseillés avec les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et l’aspirine utilisée aux doses antalgiques/antipyrétiques. Ils le sont également avec certains antiépileptiques, le millepertuis et la rifampicine, qui réduisent leur efficacité. Inversement, les puissants inhibiteurs enzymatiques (antifongiques imidazolés, clarithromycine…) diminuent le métabolisme des xabans et augmentent le risque hémorragique. Pour la même raison, le tacrolimus est déconseillé avec le dabigatran.
Autres interactions. L’association du dabigatran à l’amiodarone ou au vérapamil (inhibiteurs de la P-gp) impose, dans certaines indications, une adaptation posologique de l’AOD.
Quelle surveillance ?
La Haute Autorité de santé (HAS) recommande d’évaluer les fonctions rénale et hépatique ainsi que le taux d’hémoglobine avant la mise sous traitement, puis a minima annuellement. La surveillance rénale est renforcée en cas d’altération de la fonction rénale ou d’épisode de canicule ou de diarrhée susceptible d’induire une déshydratation et d’altérer la fonction rénale2.
Contrairement aux antivitamines K (AVK), l’utilisation des AOD ne nécessite pas de surveillance de l’activité anticoagulante en routine.
Anticoagulants oraux directs : quels conseils au comptoir ?
Inciter le patient à porter sur lui la « carte de surveillance » incluse dans les boîtes de médicament et à la présenter systématiquement à chaque nouveau professionnel de santé consulté3.
Déconseiller l’automédication, en particulier par AINS et millepertuis, et rappeler au patient que l’antalgique/antipyrétique de 1re intention est le paracétamol.
Rappeler les signes d’hémorragie à surveiller : saignements visibles, hématomes, mais aussi fatigue, pâleur et essoufflements, qui sont des signes d’anémie devant faire craindre un saignement même s’il n’est pas visible3. La survenue de tels signes impose une consultation médicale. En cas d’hémorragie importante, appeler le 15 (ou composer le 114 pour les personnes malentendantes). Si besoin, un traitement peut-être administré à l’hôpital : le Praxbind, antidote du dabigatran, ou des facteurs de coagulation.
Insister auprès des patients sous dabigatran sur l’importance de ne jamais ouvrir les gélules, car cela majore le risque hémorragique par augmentation de la biodisponibilité de 75 %.
Un accompagnement spécifique peut être proposé à l’officine, aux patients ayant un traitement AOD pour une durée d’au moins 6 mois, sous forme d’entretiens réalisés par un pharmacien.
1. « Fiche de bon usage des anticoagulants oraux », HAS, juin 2018.
2. « L’accompagnement pharmaceutique des patients sous AOD », Assurance maladie, février 2025.
3. « Bien vivre son traitement anticoagulant ou antiagrégant », brochure de la Fédération française de cardiologie (FFC), 2020.

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