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Céphalées : quelle prise en charge à l’officine ?
Les maux de tête ou céphalées sont des douleurs ressenties au niveau de la région crânienne. On distingue les céphalées primaires (80 % des céphalées) pour lesquelles aucune affection causale n’est retrouvée, des céphalées secondaires, symptomatiques d’une pathologie sous-jacente parfois grave (méningite, hémorragie…). Les signes d’alerte évoquant une céphalée secondaire sont : l’apparition brutale et intense (« en coup de tonnerre »), la présence de fièvre et/ou raideur de nuque, des troubles neurologiques (visuels, d’équilibre, confusion), ou la survenue après un traumatisme crânien. Face à ces signes, l’orientation vers un médecin ou un service d’urgence est impérative.
Les céphalées de tension et les migraines sont les céphalées primaires les plus fréquentes.
Céphalées de tension. Très courantes, elles se caractérisent par une douleur le plus souvent bilatérale, d’intensité faible à modérée, mais pouvant durer plusieurs jours. Elles ne sont ni aggravées par l’activité quotidienne ni associées à des troubles digestifs. Une gêne à la lumière et au bruit est possible. Elles peuvent être favorisées par le stress ou l’anxiété.
Migraines. Le diagnostic est établi sur des critères bien précis. Les crises durent généralement de 4 à 72 heures, la douleur est le plus souvent unilatérale, pulsatile, d’intensité moyenne à sévère et majorée par l’activité physique (montée des escaliers, par exemple). Elle est associée à des nausées/vomissements ou à une photophobie (gêne à la lumière) et une phonophobie (gêne au bruit). Certaines personnes souffrent de symptômes neurologiques, le plus souvent visuels (aura), avant la crise. Céphalées de tension et migraines peuvent coexister.
Céphalées chroniques quotidiennes. Elles sont définies par la présence de céphalées survenant au moins 15 jours par mois pendant plus de 3 mois. Le principal facteur de risque est l’abus médicamenteux avec consommation excessive d’antalgiques durant au moins 3 mois : à raison de 15 jours par mois au minimum pour le paracétamol ou les AINS (y compris l’aspirine) et même 10 jours par mois lorsqu’ils sont associés à la caféine.
1. Je questionne
« Est-ce habituel / fréquent ? », et si oui, « Avez-vous déjà consulté un médecin ? », vérifie si un diagnostic (éventuellement de migraine) a été posé et/ou si un suivi est réalisé.
« Est-ce la première fois que vous avez ce type de douleur ? » ou « La céphalée est-elle différente, plus intense / brutale que d’habitude ? », permet d’identifier une céphalée secondaire. Une céphalée récente et inhabituelle est en effet considérée comme secondaire jusqu’à preuve du contraire.
« D’autres signes (nausées, vomissements, sensibilité à la lumière, au bruit) sont-ils présents ? » et « Avez-vous mal d’un seul côté ? de façon pulsatile ? », aide à distinguer migraine et céphalées de tension.
« Que prenez-vous habituellement pour vous soulager ? » et/ou « Avez-vous déjà pris quelque chose pour vous soulager », oriente le choix.
« Avez-vous souvent recours à des antalgiques ? Combien de fois par mois ? », évalue un risque de consommation excessive d’antalgiques favorisant la chronicisation des troubles.
2. J’évalue
Le plus souvent bénins, des maux de tête « isolés » (non associés à des signes d’infection ORL) sont généralement déclenchés par la fatigue, le surmenage, le stress ou une consommation importante d’alcool.
Un avis médical est nécessaire en cas de céphalées inhabituelles ou intenses ou ne cédant pas à un traitement bien conduit. Idem en cas de suspicion de migraine si un diagnostic n’a pas été posé, ou en cas de consommation importante d’antalgiques qui expose à un risque de chronicisation des troubles.
3. Je passe en revue
Antalgiques
Paracétamol. Antalgique d’action centrale et périphérique, dénué d’action anti-inflammatoire.
Exemples : Dafalgantabs, DolipraneLiquiz, Efferalgan orodispersible…
C’est l’antalgique de première intention. Les effets indésirables sont des atteintes hépatiques surtout liées à des surdosages (prise trop importante, fréquence trop rapprochée) ou à une pathologie hépatique, un alcoolisme chronique ou une déshydratation. Il est contre-indiqué en cas d’insuffisance hépatique sévère.
La vigilance est requise car des cas d’intoxication volontaire au paracétamol chez des enfants et des adolescents ont été rapportés. Par ailleurs, les signes d’un surdosage (nausées, vomissements, douleurs au ventre, sueurs, perte d’appétit) ne sont pas toujours immédiats, mais peuvent survenir dans les 24 heures1.
AINS. L’ibuprofène (AdvilCaps, Spedifen…), le kétoprofène (Toprec 25 mg) et l’acide acétylsalicylique sont des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Ils ont des propriétés antalgiques, antipyrétiques, anti-inflammatoires et antiagrégantes plaquettaires. Sous la forme d’un sel de lysine, l’absorption gastro-intestinale de l’ibuprofène (NurofenFlash…) ou de l’aspirine (Aspégic…) est plus rapide qu’une formule classique.
Utilisation. L’ibuprofène est l’AINS le mieux évalué. Il est recommandé en deuxième intention en cas d’action insuffisante du paracétamol dans les maux de tête « courants ». Il est indiqué généralement en première intention dans la migraine.
Effets indésirables. Troubles digestifs, dont certains sont potentiellement graves (ulcérations, hémorragies), réactions cutanées parfois sévères. Rétention hydrosodée et atteintes rénales possibles, notamment chez les patients âgés. Augmentation du risque cardiovasculaire au long cours.
Principales contre-indications. Ulcère gastro-intestinal ou antécédent lié à un AINS, grossesse (formellement contre-indiqué à partir du début du sixième mois), insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque sévère.
Principales interactions. Association notamment déconseillée avec les anticoagulants, le lithium, le méthotrexate > 20 mg/semaine.
Associations à la caféine. Ayant une légère action analgésique et vasoconstrictrice (qui est intéressante dans la migraine), la caféine potentialise l’effet de certains antalgiques1.
Exemples : paracétamol + caféine (Céfaline Hauth, Dalféine, Prontadol…) ; ibuprofène + caféine (Ipraféine…) ; acide acétylsalicylique + paracétamol + caféine (Actron…)
Vigilance. Le recours à ces associations ne devrait pas dépasser 8 jours par mois, car elles peuvent favoriser la chronicisation des troubles.

Plantes à action anti-inflammatoire
Saule blanc. Renfermant des dérivés salicylés, le saule est traditionnellement utilisé pour soulager les maux de tête2.
Exemples : Arkogélules Saule… ; en association à des extraits de plantes (dont la grande camomille) dans Cefacalm, Complexe Grande camomille Vit’All+…
Contre-indications. Hypersensibilité aux salicylés, ulcère gastrique en évolution et asthme lié aux salicylés. Pas d’association aux AINS ou à l’aspirine ni d’utilisation au cours de la grossesse. À éviter chez les personnes sous anticoagulants. Réservé à l’adulte.
Grande camomille. Riche en parthénolide qui bloque la libération de médiateurs inflammatoires, elle est traditionnellement utilisée en prophylaxie de la migraine2.
Exemples : Grande camomille Arkopharma, Phytomance, ladrôme… ; en association : Antemig, Inflakin, Migra Pure Comprimés…
Précaution : pas avant 18 ans.
Action locale
Application de froid, menthe poivrée. L’application de froid, à l’effet vasoconstricteur, via des poches chaud/froid (Actipoche, Argicalm, TheraPearl…) ou des bandeaux de cryothérapie (Cryochrono, Frontalgel…) peut contribuer à soulager des céphalées. L’huile essentielle de menthe poivrée en application cutanée, qui provoque un effet froid grâce au menthol, à un usage traditionnel reconnu dans ce cadre également2.
Exemples : macarons ou crayons au menthol (Banquise Benedetti, Salva, Sanipharm…) ; en association à d’autres huiles essentielles dans des roll-on (Migrastick Fort, Migra Pure Stick ou Baume, Olioseptil Roll’On Maux de tête, Phytosun arôms Roll’on Maux de tête…)
Précautions : pour les huiles essentielles, pas avant 7, 10 ou 12 ans selon les formules, ni en cas de grossesse. Les crayons au menthol sont généralement réservés à l’adulte.
Autre. Le spray nasal MigSpray est un dispositif médical à base d’extraits de plantes (dont grande camomille, saule et menthe poivrée) proposé en prévention des crises de migraine.
Précautions : à partir de 12 ans. Non recommandé au cours de la grossesse ni en cas d’allergie aux salicylés.
4. Je choisis
En fonction du contexte
Patient non migraineux. Paracétamol en première intention, ibuprofène en cas d’échec, +/- application de froid ou menthe poivrée.
Patient migraineux. Paracétamol si efficace lors d’une crise précédente ou ibuprofène, +/- application de froid ou menthe poivrée.
En fonction de la fréquence des céphalées
Très occasionnelles. Antalgique + caféine, si échec d’un antalgique seul.
Migraines récidivantes. Un traitement préventif.
5. J’explique
Les céphalées peuvent durer de quelques heures à quelques jours. Dans le cas d’une migraine, le traitement est d’autant plus efficace qu’il est débuté tôt.
Les antalgiques se prennent à la dose minimale efficace et sur la plus courte durée possible.
Un avis médical est nécessaire en l’absence de soulagement après 48 heures.
6. Je conseille
Utilisation
AINS, aspirine. À prendre lors du repas ou avec une collation, pour limiter les troubles digestifs. Attention à ne pas cumuler plusieurs antalgiques.
Menthe poivrée en application locale. Sur les tempes, le front et/ou la nuque. Pas d’application sur une peau lésée ni à proximité des yeux.
Grande camomille. À tester sur 1 à 2 mois.
Hygiène de vie
Identifier si possible les facteurs déclenchant les céphalées (stress, fatigue, excès d’alcool, de sucre rapide, déshydratation…), afin de les limiter.
Des techniques de lâcher prise (sophrologie, méditation de pleine conscience, hypnose…) et une activité physique régulière peuvent aider à mieux gérer des situations de stress.
Avoir une hygiène de vie la plus régulière possible est recommandé pour les patients migraineux : éviter de sauter un repas, se coucher et se lever à heure régulière sans trop se décaler durant le week-end ou les vacances.
1. « Caffeine as an Analgesic Adjuvant for Acute Pain in Adults », Cochrane, 2014.
2. Selon l’Agence européenne du médicament (EMA).
Savoir différencier céphalée de tension et migraine
Le test ID-Migraine est un questionnaire court, rapidement réalisable à l’officine, pour orienter vers le diagnostic de migraine.
– Au cours de l’année écoulée, les maux de tête vous ont-ils obligé à limiter vos activités pendant une journée ou plus ?
– Sont-ils associés à des nausées et/ou des vomissements ?
– S’accompagnent-ils d’une gêne à la lumière ?
Si au moins deux réponses sont positives, la probabilité qu’il s’agisse d’une migraine est estimée à 90 % et un avis médical est nécessaire.
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