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Brevet professionnel à Mayotte : 15 apprentis-préparateurs privés de leur diplôme ?
À Mayotte, ils sont quinze apprentis-préparateurs en pharmacie à prétendre au brevet professionnel (BP), dernière promotion. Quinze apprentis, en formation depuis plus de deux ans, qui risquent de ne pas pouvoir passer leur examen en raison d’un micmac administratif dont la France a le secret. Après moults échanges entre les parties prenantes au diplôme, un consensus avait pourtant vu le jour, fin avril, entre le rectorat de Mayotte, Akto – l’opérateur de compétences (Opco) financeur, le ministère de la Santé, l’agence régionale de santé (ARS) de Mayotte et le centre de formation des apprentis (CFA) Pasteur de Reims (Marne), auquel les apprentis mahorais sont rattachés.
Les épreuves écrites devaient donc se dérouler en juin à Mayotte, et les travaux pratiques, en septembre, à la Réunion, avec envoi d’examinateurs et prise en charge du voyage par le CFA de Reims. Une solution finalement invalidée par l’inspectrice générale de l’Éducation nationale.
Branle-bas de combat, « à la Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelle de la pharmacie d’officine (CPNEFP), nous nous apprêtons à envoyer un courrier à cette inspectrice, ainsi qu’à sa direction, avec copie au CFA, à l’ARS, au rectorat et aux cabinets ministériels de l’Outre-mer, du Travail et de l’Éducation nationale », assure David Brousseau, secrétaire fédéral chez Force ouvrière (FO) Pharmacie. L’objectif étant de permettre, coûte que coûte, aux quinze apprentis laissés sur le carreau d’accéder à leur diplôme.
Course contre la montre et inscription tardive
Petite remontée dans le temps.
2014. « Nous sommes sollicités par le Conseil départemental pour implanter une formation au BP à Mayotte », raconte Mélanie Pierard, directrice adjointe du CFA Pasteur, à Bétheny (Marne). Sur place, dans les officines, le respect de la législation laisse à désirer. Le besoin est pressant. Deux sessions d’examens seront finalement organisées, « en 2016 et 2020, intégralement sur place, à Mayotte ».
2020. Le Covid-19 passe par là… À la rentrée de septembre, la formation est suspendue.
Juin 2022. « Le CFA est recontacté par Mayotte, car les préparateurs mahorais formés précédemment ont fui l’île pour aller exercer ailleurs, ou à l’hôpital. La profession est en pénurie. Je mets en garde mes interlocuteurs : le BP est en voie d’être supprimé, bientôt remplacé par le Diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques (Deust). Il va falloir aller vite ! », reprend Mélanie Pierard. Seul hic, « une formation préparatoire à l’entrée au BP s’avère nécessaire, car le niveau du bac à Mayotte n’est pas du tout celui du bac français », précise-t-elle.
Rentrée 2022. En métropole, la dernière promotion d’apprentis fait sa rentrée. En parallèle, à Mayotte, une préparation opérationnelle à l’emploi collective (POEC) – visant à permettre aux apprentis locaux d’acquérir les compétences nécessaires à l’entrée en formation au BP – voit le jour, cofinancée par l’ARS, Akto et le Conseil départemental.
Février 2023. À l’issue de la prépa, deux groupes se forment pour suivre le BP. Le premier, composé d’apprentis ne pouvant quitter l’île en raison de responsabilités familiales, suivra ses cours à Mayotte. Le second étudiera à Reims, aux frais du Conseil départemental et de l’Adom (organisme public aidant financièrement les résidents de l’Outre-mer, notamment pour la poursuite d’études loin de leur domicile). Les apprentis sont inscrits au diplôme. Hélas, entre-temps, l’arrêté du 17 octobre 2022 abrogea le BP au profit du Deust. Depuis cette date, le diplôme est caduc. En avril 2025, à deux mois des examens, les quinze apprentis mahorais sont informés qu’ils ne pourront passer l’examen.
Un examen toujours sur la sellette
« Depuis janvier, je me démène avec les acteurs du diplôme pour que les apprentis mahorais puissent accéder au diplôme, confie Mélanie Pierard. J’ai d’abord obtenu l’accord du rectorat pour qu’ils passent les écrits le 16 juin à Mayotte, mais pas les travaux pratiques (TP). La contre-proposition qui m’a été faite était d’organiser les TP à Reims, du 18 au 20 ». Soit deux jours après les écrits, à 10 heures de vol ! « Certains Mahorais ont des titres de séjour qui ne les autorisent pas à sortir du territoire mais le rectorat était prêt à leur accorder un laissez-passer exceptionnel, poursuit-elle. Des pharmaciens employeurs étaient prêts à prendre en charge les frais de déplacement et d’hébergement des apprentis. »
30 avril. À l’issue d’une réunion en visio de plus d’une heure et demi, une alternative est trouvée entre les parties prenantes. Les TP seront réalisés en septembre à La Réunion. Le voyage sera financé par le CFA de Reims, qui enverra aussi ses examinateurs sur place.
Début mai. L’inspectrice générale de l’Éducation nationale invalide cette solution. Et refuse l’organisation des examens. La proposition en retour est un accompagnement vers le Deust pour les 15 étudiants concernés. Une solution toutefois impossible actuellement : absence d’université à Mayotte, cours en visio non proposés par l’université de Reims, voire interdits pour certaines unités d’enseignement (UE), différentiel de niveau, etc.
De leur côté, alors que la branche officine prépare un courrier à l’attention des décideurs, l’Opco Akto et l’ARS de Mayotte continuent de chercher une solution. Affaire à suivre.
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