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Les promesses de la vaccination anti-HPV dans les collèges 

Publié le 3 juin 2023
Par Yves Rivoal
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Pour augmenter la couverture vaccinale contre le HPV, une campagne de vaccination sera lancée à la rentrée prochaine auprès des élèves de 5e. Ailleurs, des mesures similaires se sont montrées efficaces. Reste à savoir si la France, qui part de loin, suivra la tendance.

 

Le 28 février, Emmanuel Macron annonçait le lancement d’une campagne de vaccination gratuite et généralisée contre les HPV (papillomavirus humains) dans les collèges, sur la base du volontariat, auprès des 800 000 élèves de 5e – garçons et filles – à la rentrée prochaine. Pour justifier cette décision, l’Elysée s’est appuyé sur les résultats d’une expérimentation menée pendant deux ans dans le Grand-Est. Conduite sur cinq territoires dans cinq départements de cette région, l’expérimentation ciblait les adolescents et leurs parents. Des interventions au sein des collèges ont été organisées afin de consulter les carnets de vaccination, et de mettre à jour les statuts vaccinaux identifiés. Les familles de collégiens non vaccinés contre les HPV étaient dirigés vers un médecin traitant ou se voyaient proposer la vaccination au sein de l’établissement. Un courrier a par ailleurs été adressé aux parents d’adolescents de 11 à 14 ans non vaccinés pour leur rappeler l’intérêt du vaccin et la possibilité de l’obtenir gratuitement dans le cadre de cette expérimentation.

 

Résultat : 24 % des non-vaccinés ont pu bénéficier d’une protection vaccinale en milieu scolaire lors de la première année d’expérimentation en 2020-2021, et 21 % en 2021-2022. 19 % des familles ayant uniquement été informés par courrier ont engagé leur enfant dans un parcours vaccinal. Finalement, le taux de jeunes de 5e affichant un schéma vaccinal anti-HPV à jour ou commencé est passé de 9 à 27 % entre 2020-2021, la part de ceux qui ont reçu une dose ayant bondi de 14 à 31 % en 2021-2022. 

Retours d’expérience à l’étranger

 

Pour Emmanuel Ricard, délégué à la prévention et à la promotion du dépistage de la Ligue contre le cancer, cette annonce va dans le bon sens. « D’abord parce que c’est ce qui est recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ensuite parce que c’est ce qui a fonctionné dans les pays anglo-saxons et scandinaves qui ont adopté très tôt de grands programmes nationaux de vaccination obligatoire. » Le cas de l’Australie est emblématique. « Les jeunes filles ont commencé à y être vaccinées dès 2007, les jeunes garçons à partir de 2013, rappelle Emmanuel Ricard. Résultat : 78 % des adolescentes de 15 ans et 67 % des adolescents ont reçu leurs trois doses. A titre de comparaison, en France, nous ne sommes qu’à 45,6 % chez les filles et à 6 % chez les garçons. »

 

Ce taux de couverture vaccinale a permis au pays de quasiment éradiquer la circulation du virus. « Le taux d’infection sur la souche HPV 16, que l’on retrouve dans 60 à 90 % des cancers de l’utérus, et dans presque tous les cancers de l’oropharynx, est passé de 21 % à 1,5 %, confirme Emmanuel Ricard. Il s’est aussi traduit par une diminution importante du nombre de cancers. « Une étude réalisée en Suède sur plus de 440 000 femmes vaccinées avant l’âge de 17 ans a permis de démontrer que 19 avaient développé un cancer du col de l’utérus, contre 538 dans le bras des femmes non vaccinées. Le vaccin a donc permis de réduire de 49 % le risque de cancer », assure Emmanuel Ricard. Même constat au Royaume-Uni où des programmes de vaccination obligatoire ont été mis en place dès 2008 pour les filles, et en 2018 pour les garçons. « Le taux de cancer du col de l’utérus a été réduit de 34 % chez les jeunes femmes vaccinées entre 16 et 18 ans, et de 62 % chez celles qui avaient été vaccinées plus tôt. La réduction montait même jusqu’à 87 % en cas de vaccination à 12 ou 13 ans », souligne Emmanuel Ricard.

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Cependant, « les campagnes de vaccination dans les collèges se feront sur la base du volontariat. Or, dans les pays anglo-saxons et scandinaves, la vaccination était obligatoire, rappelle le déléguée de la Ligue. Quand on sait que 20 % des Français pensent encore que ce vaccin génère des effets secondaires importants, que 10 % des médecins ne le proposent toujours pas, et que 6 % le déconseillent, ce n’est probablement pas comme cela que l’on arrivera à 80 % de taux de couverture. Il faudra alors se poser la question de l’obligation vaccinale. »