Infraction au volant avec le véhicule de l’entreprise : un salarié condamné
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Infraction au volant avec le véhicule de l’entreprise : un salarié condamné

Publié le 13 avril 2025
Par Anne-Charlotte Navarro
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Lorsqu’un salarié commet une infraction ayant causé un préjudice à son employeur, ce dernier peut-il obtenir réparation ? Le 14 janvier 2025, la Cour de cassation a confirmé qu’une entreprise pouvait être indemnisée même si le salarié n’avait pas l’intention de lui nuire.

Les faits

Condamné pour conduite sous l’emprise de stupéfiants en récidive et excès de vitesse, M. X., ouvrier agricole, a causé un accident au volant du tracteur de son employeur. Ce dernier, s’étant constitué partie civile, réclame 119 000 € pour couvrir les frais de réparation du véhicule. 

Le débat

Pour condamner un salarié à verser des dommages-intérêts à son employeur, le juge doit constater l’intention de nuire du salarié. Si l’employeur ne peut pas démontrer une intention de nuire, il ne pourra pas obtenir la réparation de son préjudice.

Lorsqu’un salarié commet une infraction, le prévenu peut être poursuivi devant une juridiction pénale, tandis que la victime, y compris son employeur, a la possibilité de se constituer partie civile pour réclamer une indemnisation. Cependant, la Cour de cassation adopte une approche stricte lorsque le litige concerne une relation de travail. En effet, le Code du travail interdit les sanctions financières à l’encontre des salariés, car ces derniers ne doivent pas assumer les risques liés à l’activité de l’entreprise. Ainsi, sauf en cas de faute lourde caractérisant une intention de nuire, un employeur ne peut pas obtenir réparation du préjudice causé par son salarié.

Dans cette affaire, la cour d’appel d’Orléans (Loiret) condamne, le 23 janvier 2024, M. X. à indemniser son employeur à hauteur de 119 000 € pour les préjudices financiers causés par un accident survenu alors qu’il conduisait en excès de vitesse et sous l’emprise de stupéfiants. Contestant cette décision, M. X. se pourvoit en cassation, car il considère que les juges n’ont pas démontré son intention de nuire, élément essentiel pour engager sa responsabilité financière envers son employeur.

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La décision  

Le 14 janvier 2025, la Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle estime que, si la preuve d’une faute lourde est requise pour qu’un employeur obtienne des dommages et intérêts devant les juridictions civiles, cette exigence ne s’applique pas dans le cadre d’une action civile devant les juridictions répressives. Par conséquent, même sans intention de nuire, un salarié peut être condamné à indemniser son employeur. Ce dernier peut engager deux types de procédures :

– devant le conseil de prud’hommes, où il devra prouver l’intention de nuire du salarié pour obtenir des dommages et intérêts ;

– devant les juridictions pénales, en se constituant partie civile. Dans ce cas, la condamnation pénale du salarié suffit pour obtenir réparation, sans qu’il soit nécessaire de prouver une faute lourde.

Ce principe s’applique non seulement aux infractions routières, mais aussi à toutes les autres prévues par le Code pénal.

Source : Cass. soc., le 14 janvier 2025, n°24-81.365

À retenir 

  • Lorsqu’un salarié commet une infraction, le Code du travail interdit les sanctions financières à son encontre, sauf en cas de fautes lourdes.
  • Un employeur peut obtenir un dédommagement du salarié en prouvant son intention de nuire devant les tribunaux civils.
  • Une condamnation pénale du salarié permet à un employeur de se porter partie civile au procès et d’obtenir une indemnisation, sans qu’il soit nécessaire de prouver une faute lourde.