- Accueil ›
- Formation ›
- Cahiers Ordonnance ›
- L’herpès ›
- 3/5 – Analyse d’ordonnance : première éruption d’herpès génital chez une jeune femme

© Getty Images
3/5 – Analyse d’ordonnance : première éruption d’herpès génital chez une jeune femme

Quel est le contexte de l’ordonnance ?
Que savez-vous de la patiente ?
Zoé n’a aucun souci de santé particulier. En couple depuis 2 ans, elle vient régulièrement renouveler sa contraception œstroprogestative. La dernière fois, elle vous avait toutefois confié être particulièrement fatiguée et stressée par le nouveau travail qu’elle venait de commencer. Elle vient aujourd’hui de consulter sa gynécologue car elle est gênée depuis hier par une lésion au niveau de la vulve qui la brûle terriblement, notamment au moment des mictions. C’est la première fois que cela lui arrive.
Que lui a dit la médecin ?
La gynécologue a diagnostiqué un herpès génital et a réalisé un prélèvement au niveau des lésions et du vagin afin de confirmer le diagnostic et de rechercher d’autres maladies sexuellement transmissibles (Chlamydia, gonocoque). Des sérologies de dépistage du virus de l’immunodéficience humaine, de la syphilis et des hépatites B et C ont aussi été prescrites.
Zoé n’a aucun souvenir d’un épisode précédent mais la spécialiste a expliqué qu’il s’agissait probablement d’une récurrence d’herpès car les primo-infections sont généralement plus intenses lorsqu’elles sont symptomatiques. Une baisse de l’immunité, la fatigue et le stress lié à son nouvel emploi et à un changement de rythme de vie peuvent expliquer que le virus, présent dans son organisme, se soit réactivé. Des récidives étant possibles, la médecin a mentionné la possibilité de renouveler le traitement en expliquant qu’il fallait le démarrer dès les premiers signes cliniques pour une meilleure efficacité.
Qu’en pensez-vous ?
La gynécologue a expliqué à Zoé qu’elle a pu contracter l’infection par son partenaire actuel ou avoir été infectée par le virus par ses partenaires précédents. Zoé est perdue dans toutes ces explications. Elle se demande si son ami, qui ne présente aucun symptôme, doit être traité également.
1) Oui, car il a certainement un herpès même s’il est asymptomatique.
2) Non, car s’il est asymptomatique, c’est qu’il n’est pas infecté par un virus de l’herpès.
3) Non, s’il est asymptomatique, bien qu’il soit peut-être séropositif pour le virus Herpès simplex.
Réponse : l’ami de Zoé n’est pas forcément porteur du virus de l’herpès. Zoé a effectivement pu contracter l’infection des années auparavant. Il peut aussi être séropositif pour le virus de l’herpès sans avoir de manifestations cliniques. Or, un traitement n’est indiqué qu’en cas de lésions symptomatiques d’herpès. La réponse 3 est donc la bonne. En pratique, son statut sérologique n’étant pas connu, des précautions doivent être prises pour éviter une transmission potentielle de l’infection : les rapports sexuels sont donc à éviter absolument tant que des symptômes sont présents, même avec un préservatif qui ne recouvre pas toujours l’ensemble des lésions.
La prescription est-elle cohérente ?
Que comporte la prescription ?
Le valaciclovir est un antiviral indiqué dans la prévention et le traitement de l’herpès et du zona, et dans la prophylaxie des infections à cytomégalovirus. C’est un analogue nucléosidique qui bloque la réplication virale mais n’agit pas sur les virus à l’état latent.
Le paracétamol, antalgique de première intention, est prescrit pour soulager les brûlures causées par les ulcérations herpétiques.
Cicalfate+ est une crème contenant notamment des sels de cuivre et de zinc, lui conférant des propriétés anti-infectieuses et anti-inflammatoires. Proposée pour apaiser les peaux irritées et accélérer leur réparation, elle convient également aux zones intimes externes.
Est-elle conforme à la stratégie thérapeutique de référence ?
Oui, les récentes recommandations de 2024 de la Haute Autorité de santé (HAS) préconisent la prescription d’un antiviral comme le valaciclovir dans les récurrences d’herpès génital. Un antiviral par voie locale n’est en revanche pas recommandé.
Les posologies sont-elles cohérentes ?
Non, la posologie prescrite correspond aux anciennes recommandations. La HAS préconise un traitement par valaciclovir de 2 000 mg deux fois matin et soir sur un seul jour dans le traitement des récurrences. Elle est portée à 5 jours à une posologie de 500 mg en cas de primo-infection durant laquelle les lésions sont plus sévères et étendues. Il convient donc d’ajuster la posologie du traitement, de l’indiquer sur l’ordonnance et d’informer le prescripteur via une messagerie sécurisée. La modification sera notifiée sur la plateforme Act-IP qui permet de tracer les interventions pharmaceutiques.
Quels conseils de prise donner ?
C’est la première fois que Zoé a recours à un traitement antiherpétique. Il convient d’en expliquer les modalités et les précautions d’emploi, y compris en cas d’éventuelles récidives.
Utilisation
Le valaciclovir se prend matin et soir avec un grand verre d’eau, pendant ou en dehors des repas.
Le paracétamol est à utiliser à la demande pour limiter la gêne.
La crème Cicalfate+ peut être appliquée aussi souvent que nécessaire. Protectrice et offrant une certaine résistance à l’eau, elle peut contribuer à apaiser les brûlures, notamment lors des mictions.
Quand commencer l’antiviral ?
Il doit être commencé le plus vite possible en respectant environ 12 heures entre deux prises.
Que faire en cas d’oubli ?
Le comprimé peut être rattrapé jusqu’à 1 heure avant la prise suivante. Il ne faut pas doubler une dose.
La patiente pourra-t-elle juger de l’efficacité du traitement ?
L’antiviral n’agit pas sur les douleurs, d’où la prescription de paracétamol et d’un soin apaisant, mais il diminue d’environ 1 à 2 jours le délai de guérison d’une récurrence. Il est inutile de poursuivre le traitement plus de 5 jours, toutefois la guérison complète des lésions peut être plus longue.
Quels sont les principaux effets indésirables ?
Essentiellement des céphalées et parfois des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées notamment) et des réactions cutanées (prurit, photosensibilité). Plus rarement, une atteinte rénale (à type d’insuffisance rénale aiguë) et/ou des troubles neurologiques (par exemple confusion mentale, agitation, confusion) peuvent être observés, particulièrement chez les patients de plus de 65 ans et les insuffisants rénaux.
Quels sont ceux gérables à l’officine ?
Les céphalées peuvent être soulagées par le paracétamol si besoin. La prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) doit être évitée par précaution pour limiter le risque d’aggravation de l’infection. Les troubles digestifs, légers et passagers, ne requièrent généralement pas un traitement symptomatique. Une hydratation régulière est recommandée pour limiter le risque d’altération de la fonction rénale et d’atteinte neurologique liée à l’accumulation de l’antiviral.
Le port de vêtements couvrants ou l’application d’un produit de protection solaire doit être conseillé en cas d’exposition au soleil durant le traitement.
Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?
Toute suspicion d’atteinte rénale et/ou neurologique, exceptionnelles chez une femme jeune, requerrait d’appeler le médecin.
Quels conseils complémentaires donner ?
Un gel lavant doux type syndet, sans parfum, est préférable pour la toilette intime pour éviter toute irritation supplémentaire. Sécher, sans frotter, par tamponnement.
Il est impossible de prédire si Zoé aura d’autres poussées d’herpès et quelle sera leur fréquence. Généralement, celles-ci sont précédées par des picotements ou des envies fréquentes d’uriner. Reconnaître ces signes permet de démarrer au plus vite l’antiviral, qui sera d’autant plus efficace pour limiter la durée et l’intensité de la poussée.
Six mois plus tard
Zoé a consulté à nouveau sa gynécologue, fatiguée et découragée, suite à une nouvelle récurrence d’herpès génital, la 4e en 6 mois. La gynécologue a prescrit un traitement antiviral au long cours : valaciclovir 500 mg, un comprimé par jour pendant 6 mois.
La prescription est-elle cohérente ?
L’instauration d’un traitement antiviral prophylactique est recommandée chez les patients présentant au moins 6 récurrences annuelles d’herpès génital. La fréquence des épisodes survenus chez cette patiente a incité la gynécologue à proposer plus rapidement un traitement préventif. La posologie prescrite est conforme à l’autorisation de mise sur le marché.
Quand la patiente pourra-t-elle juger de l’efficacité du traitement ?
L’antiviral devrait prévenir immédiatement la survenue de nouvelles poussées ou au moins diminuer la fréquence et l’intensité de celles-ci. Il permet aussi de limiter le risque de transmission de l’infection, via notamment des épisodes d’excrétion virale asymptomatique.
Avec l’aimable relecture de la Dre Odile Bagot, gynécologue à Strasbourg (Bas-Rhin).
Article issu du cahier Formation du n°3534, paru le 2 novembre 2024, mis à jour le 20 décembre 2024.
- Vaccination antigrippale des plus de 65 ans : Efluelda aurait-il tout changé cette année ?
- Miorel et génériques : contraception obligatoire pour tous
- Enquête de l’Anepf : la vie des étudiants en pharmacie, pas si rose
- Analogues du GLP-1 : période d’essai jusqu’au 1er mai
- Économie officinale : faut-il ressortir les gilets jaunes et les peindre en vert ?

