Devenir secouriste en santé mentale

© Getty Images/iStockphoto

Premiers soins Réservé aux abonnés

Devenir secouriste en santé mentale

Publié le 18 septembre 2024 | modifié le 22 novembre 2024
Par Christine Julien
Mettre en favori

La formation aux premiers secours en santé mentale permet d’aider une personne en crise ou en souffrance psychique, et de changer notre regard sur les personnes touchées. Plus de 100 000 secouristes ont déjà été formés en France, pourquoi pas vous ?

Qu’est-ce que la santé mentale ?

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé mentale est un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté ». En fonction de ce qu’il vit, « l’individu a parfois des hauts et des bas, mais un trouble psychique, c’est autre chose, explique Émilie Sauvaget, docteur en psychologie clinique chargée d’enseignement à l’université de Poitiers, et c’est ce qu’enseigne la formation aux premiers secours en santé mentale (PSSM). »

En quoi consistent ces premiers secours ?

Comme les gestes qu’un secouriste physique prodigue à une personne qui fait une crise cardiaque ou qui suffoque, les premiers secours en santé mentale (PSSM) consistent à aider quelqu’un en souffrance psychique. Repérer, adopter le bon comportement, informer sur les ressources, encourager à aller vers les professionnels adéquats et, en cas de crise, orienter vers un service d’urgence, un centre médico-psychologique, etc.

Qui peut devenir secouriste ?

« Tout citoyen qui le souhaite doit être capable d’apporter cette première aide pour que la personne en souffrance psychique puisse aller vers le soin ou contacter ceux qui pourront l’aider. Faire en sorte de ne pas la laisser seule face à son trouble », pointe Dominique Leconte, secrétaire adjointe à l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam). Cette aide « est ce très peu qui quelquefois met la main sous le ventre pour que la personne ne se noie pas ».

De quels troubles s’agit-il ?

Les troubles anxieux, dépressifs, psychotiques ou liés à l’usage de substances (addictions) sont évoqués dans la formation PSSM.

Publicité

Origine et originalité de la formation

PSSM est issue du programme australien Mental Health First Aid (MHFA) créé en 2000 et reconnu à l’international avec plus de 6 millions de secouristes formés. MHFA a été adapté en France par l’Association PSSM France créée en 2018 par l’Infipp (organisme de formation en santé mentale), l’Unafam et Santé mentale France(1). L’association a formé des instructeurs qui, à leur tour, ont formé près de 1 300 formateurs. Ces derniers, accrédités PSSM, ont formé 100 000 secouristes pour le compte de dizaines d’organismes. Elle utilise la méthode AÉRER :

  • Approcher la personne, évaluer et assister en cas de crise ;
  • ​​Écouter activement et sans jugement ;
  • Réconforter et informer ;
  • Encourager à aller vers des professionnels ;
  • Renseigner sur les autres ressources disponibles.

La méthode s’adapte au trouble. « Assister est la priorité si la personne est en crise, un état aigu qui nécessite une intervention immédiate, comme une crise suicidaire, explique Émilie Sauvaget. En appelant le numéro national de prévention suicide 3114, vous aurez des professionnels capables d’évaluer le potentiel suicidaire, et de faire intervenir le Samu si nécessaire. »

Comment se passe la formation PSSM ?

Vidéos, jeux de rôle, témoignages, mises en situation, il s’agit d’acquérir en 14 heures les bases sur les troubles psychiques et leurs manifestations, les types de crises, de développer des compétences relationnelles et de mieux faire face aux comportements agressifs. « À avoir de l’attention pour l’autre, résume Émilie. Comme dire à ce collègue toujours ponctuel et poli qui arrive en retard depuis des semaines et envoie “bouler” tout le monde, “Je m’inquiète pour toi car j’ai remarqué que…” On part des faits, on écoute sans projeter ses solutions, on permet à l’autre de verbaliser, puis on transmet de l’espoir en évoquant l’existence de solutions et de ressources. » Les secouristes apprennent aussi à prendre soin d’eux-mêmes et à mieux s’informer sur ces maladies qui représentent 14 % des dépenses de l’Assurance maladie(2). « On leur remet un manuel de 153 pages où l’intégralité de la formation est détaillée avec le AÉRER pour chaque trouble psychique. »

Quel intérêt les officinaux ont-ils à se former ?

« Ils sont au contact de personnes qui ne vont pas forcément bien. Une pharmacienne en formation m’a dit : “Quand le médecin n’est pas là et qu’ils ne vont pas bien, je ne sais pas quoi leur dire”, observe Émilie Sauvaget. Et quand on augmente le niveau de connaissances de la population, cela participe à la déstigmatisation, et à améliorer les niveaux de santé mentale. »

(1) La fédération Santé mentale France lutte pour les droits des personnes concernées par les troubles psychiques. Elle regroupe plus de 200 structures sur tout le territoire

(2) Selon Santé publique France