Diététique Réservé aux abonnés

C’est moi, le boss !

Publié le 1 mars 2019
Par Fabienne Rizos-Vignal
Mettre en favori

De la souplesse et de la rigueur. C’est l’équation nécessaire pour reprendre une équipe, après une cession. Se démarquer de son prédécesseur, instaurer en douceur des changements, sans tout bousculer, au risque de braquer les collaborateurs. Le tout, dans les règles strictes de la législation sociale.

Dans le cadre d’une cession de l’officine et d’un changement d’employeur, les contrats de travail des collaborateurs se poursuivent, comme le prévoit l’article L. 1224-1 du Code du travail. « Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. » A charge pour le nouveau titulaire de respecter l’ensemble des droits et des obligations résultant de chaque contrat. Chaque salarié conserve ainsi sa rémunération, sa qualification, son ancienneté, et les avantages acquis (par exemple, une prime, un 13ème mois, un bonus d’équipe) issus d’un engagement unilatéral de l’ancien titulaire ou d’un usage qui s’est instauré dans l’officine. Si des salaires, des primes, ou des indemnités demeurent impayées au moment de la cession, c’est le nouveau titulaire qui devra s’en acquitter. L’obligation de non-concurrence issue d’une clause contractuelle est également transférée à l’acquéreur. Ce transfert est automatique et n’est soumis à aucun formalisme, même si en pratique, il est courant que l’acquéreur propose aux salariés un avenant afin d’acter le changement d’employeur. Ce cadre légal fige la relation contractuelle, mais n’a cependant pas pour finalité d’entraver le pouvoir de direction du nouvel employeur.

TROUVER un accord.

Le nouveau titulaire a toute latitude pour mettre en place une nouvelle organisation de travail, redistribuer les responsabilités, définir une nouvelle stratégie d’entreprise, etc.D’ailleurs, c’est un bon moyen, pour lui, d’imprimer son style et de se démarquer de son prédécesseur. La limite ? Toute modification d’un élément contractuel ne pourra être mise en œuvre, qu’avec l’accord du salarié. S’il refuse, l’employeur ne pourra lui imposer. Toutefois, il pourra envisager un licenciement. Mais, en aucun cas, le refus du salarié ne peut constituer la cause de la rupture. Seule, la raison qui motive la modification du contrat de travail pourra être invoquée. Il peut s’agir, par exemple, d’une raison économique, dans l’intérêt de l’entreprise. Mais attention ! Si elle n’est pas objectivement étayée, la suppression d’un poste n’est pas un motif suffisant de licenciement économique. Un nouvel acquéreur n’a pas le droit d’alléger les charges salariales en supprimant un (ou plusieurs) poste (s), alors qu’aucune difficulté économique ne justifie une telle coupe dans l’effectif.

SOIGNER la forme et le fond.

Quant à bousculer les habitudes, tout est aussi une question de droit. Si le nouvel employeur souhaite remettre en cause les usages de son prédécesseur, il devra respecter la procédure de dénonciation en informant individuellement et par écrit chaque salarié concerné. Une simple note affichée sur le panneau d’information du personnel n’est pas suffisante. Dont acte ! Le fond et la forme comptent. Et plutôt que de modifier les contrats de travail existants et d’empiler des avenants, le nouvel employeur peut proposer une novation. Mais, dans cette opération, qui consiste à résilier l’ancien contrat au profit d’un nouveau contrat, le salarié doit disposer d’un délai de réflexion et reste libre de refuser.

BIEN gérer la transition.

Pour réussir l’alchimie du changement, il n’y a pas de recettes toutes prêtes à l’emploi. La communication reste l’ingrédient principal. Sans oublier d’ajouter du liant pour un résultat fluide. Tout comme le reste de l’équipe, le nouveau titulaire est dans une situation inconnue, donc de stress, tant qu’il n’est pas installé dans sa place de « patron ». L’acceptation du changement suppose d’enclencher un processus commun à toutes les étapes d’attachement et de séparation de la vie. Michel Lora, dirigeant de Gii (société de formation spécialisée en communication et management), compare cela à un deuil, même s’il ne s’agit que d’une nouvelle situation professionnelle. La durée du processus dépend de la souplesse de chaque personne et de sa capacité à accepter les changements. « Chaque fois que l’on résiste à une situation, cela engendre de la souffrance. Il est donc inutile de lutter contre le changement. Mieux vaut en faire une utilisation positive, en orientant son mental vers les opportunités qui vont se présenter », conclut l’expert.

Publicité

Le B.A.-ba d’un nouveau titulaire pour réussir sa transition…

Le contrat de travail ne peut être modifié qu’avec l’accord du salarié. S’il accepte la modification proposée, un avenant au contrat sera formalisé. S’il refuse, le nouvel employeur ne pourra lui imposer. Toutefois, il pourra envisager un licenciement. Mais en aucun cas, le refus du salarié ne peut constituer la cause du licenciement. Seule la raison qui motive la modification du contrat de travail pourra être légitimement invoquée. Il peut s’agir par exemple d’une raison économique.

Le nouvel employeur a toute latitude de changer les conditions de travail. C’est, par exemple, le cas des horaires de travail. Sauf s’ils ont été formalisés dans le contrat de travail. Dans ce cas, la marge de manœuvre est réduite car l’accord du salarié devient nécessaire.

Si le nouveau titulaire souhaite supprimer certains usages et engagements établis par son prédécesseur (prime de Noël, 13ème mois, produits offerts, tickets restaurant, etc.), il devra respecter la procédure de dénonciation en informant individuellement et par écrit tous les salariés concernés et en respectant un délai de prévenance suffisant. La jurisprudence ne précise pas la durée de ce délai, mieux vaut donc prévoir large, a minima deux mois. Cette précaution écartera tout risque de contentieux devant les Prud’hommes. A éviter pour une reprise sereine !

Comportement

Le changement : un processus par étapes

Savoir conduire le changement est une compétence incontournable du manager. Et pour mener à bien cette conduite du changement, il faut d’abord apprendre à gérer les différents comportements des personnes concernées par le projet. Sachant que tout changement, qu’il soit personnel (un déménagement, un divorce, l’arrivée d’un enfant, etc.) ou professionnel (un changement d’emploi, un changement de patron, etc.), induit un deuil dont le processus se fait en cinq étapes : le déni, la colère, la tristesse, la peur et l’acceptation. Ce sentiment contrasté entre un passé disparu et un avenir imprécis qu’Alfred Musset, dans Confession d’un enfant du siècle, avait résumé par « Tout ce qui était n’est plus, tout ce qui sera n’est pas encore » entraîne un processus plus ou moins long, qui dépend de la souplesse de la personne et de sa capacité à accepter l’incertitude liée aux changements.

Source : Gii, société de formation spécialisée en communication et management.