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« J’essaie de recruter un pharmacien étranger »

Publié le 1 avril 2023
Par Favienne Colin
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Engagée auprès d’Emmaüs, Nethnary Quillet est parvenue à intégrer à son équipe un pharmacien guinéen, jusque-là compagnon de la communauté des chiffonniers. Mais seulement comme employé polyvalent.

 

Depuis le 20 février, la pharmacie Descartes à Cholet (Maine-et-Loire) accueille dans son équipe un pharmacien guinéen. Abdourahamane Diallo y travaille en contrat à durée déterminée jusqu’à fin juin. Et seulement en tant qu’employé polyvalent. La titulaire de l’officine, Nethnary Quillet, voulait le recruter comme adjoint mais les embûches se sont accumulées sur son chemin. « Je disposais d’un adjoint jusqu’en septembre 2021 […] et depuis j’essaie de recruter. Un jour, alors que je livrais un patient chez Emmaüs, avec qui la pharmacie collabore depuis des années, il m’explique qu’il est inutile d’écrire des indications sur les boîtes car il est lui-même pharmacien. J’ai écarquillé les yeux et lui ai lancé : “C’est chez moi qu’il faut venir travailler” », se souvient-elle. Le compagnon lui apprend alors qu’il attend d’obtenir son titre de séjour et que son diplôme n’est par ailleurs pas reconnu en France.

Un parcours long

« J’ai pris le problème en pleine figure », confie Nethnary Quillet qui essaie alors de comprendre comment faire en sorte de trouver une équivalence. Un soir de garde, le compagnon revient la voir pour lui annoncer qu’il a essuyé un premier refus de titre de séjour faute de perspectives professionnelles. Nethnary Quillet a sous les yeux quelqu’un qui a l’envie et les capacités d’être adjoint… Elle n’en revient pas. Aidée par Emmaüs et l’avocat du pharmacien, elle rédige une promesse d’embauche, sésame pour un titre de séjour.

Reste que le diplôme n’est toujours pas reconnu. Qu’à cela ne tienne, Abdourahamane Diallo, en France depuis cinq ans, est recruté comme employé polyvalent, au Smic. Depuis, en observateur, il s’imprègne du système français. « Une 3e année fait son stage parmi nous, une fille de médecin car la pharmacie a bonne réputation à l’hôpital en matière d’accompagnement. Aux deux, je montre tout en même temps », explique Nethnary Quillet. Toute la journée, celui qui porte la blouse blanche range les commandes, gère l’accueil téléphonique, les télétransmissions… mais renvoie les patients et leurs questions vers le reste de l’équipe. « Cela nous soulage car nous ne sommes que deux pour une centaine de clients par jour. De plus, il sort les boîtes quand arrive une ordonnance et, bien sûr, c’est moi qui revérifie et facture. Il effectue aussi un double contrôle des ordonnances. Il n’a pas exercé depuis 2016, mais je vois que tout lui revient vite », se félicite la titulaire.

Abdourahamane Diallo est si motivé qu’il n’hésite pas à faire environ une heure de covoiturage le matin pour venir de Nantes (Loire-Atlantique) où il habite. Si déterminé qu’il compte même reprendre le chemin de la fac et des études. Au cas où il ne pourrait obtenir le diplôme de pharmacien en France, il se dit partant pour apprendre le métier de préparateur. « Il faut être patient, mais on avance », conclut Nethnary Quillet, ex-pharmacienne dans l’humanitaire, toujours positive et solidaire.

 

BIO Nethnary Quillet

Diplômée de la faculté de pharmacie d’Angers (Maine-et-Loire)

Parcours dans l’humanitaire, remplacements et responsable d’une parapharmacie E.Leclerc

Installation à Cholet (Maine-et-Loire)

PUBLIÉ DANS PHARMACIEN MANAGER N° 210 DU 01/06/2021

« La solidarité par le service »