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Les lavants se font mousser

Publié le 1 décembre 2023
Par Peggy Cardin-Changizi
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Très dynamique pendant la période du Covid, le marché des lavants corps et cheveux affiche depuis une croissance constante en pharmacie. Boosté par les nouvelles attentes des consommateurs – notamment environnementales – ce rayon est devenu un véritable vivier d’innovations : format solide, vrac, écorecharge, etc.

Jusqu’à il y a peu, le marché des lavants n’était pas considéré comme un secteur innovant, constate Khady Sane, cheffe de marque BeauTerra. Les nouvelles exigences des consommateurs liées aux enjeux environnementaux, mais aussi à leurs soucis économiques, ont changé la donne. » Les nombreuses initiatives green ont boosté le rayon, qui affiche une croissance de 13,2 % en valeur et de 10,8 % en volume*. C’est à la pharmacie que cette tendance profite le plus, principal circuit de distribution avec 73 % de parts de marché en valeur, loin devant les grandes et moyennes surfaces (20 %) et les magasins bio (7 %)*.

Les huiles : LA galénique star

Avec une croissance de 27,8 % les huiles lavantes occupent près de 10 % de parts de marché en valeur* de l’ensemble du rayon lavants. La première référence du marché des lavants est d’ailleurs Atoderm Huile de douche de Bioderma. Également dans le Top 10 : l’Huile lavante d’Uriage, l’huile lavante Topialyse de SVR et l’Huile de douche lavante de La Rosée. « C’est LA galénique star du marché, assure Cédric Weinland, directeur marketing La Roche-Posay. Les consommateurs sont à la recherche de textures agréables, sensorielles et faciles à rincer. » Le best-seller du laboratoire est Lipikar huile lavante AP+, à destination des peaux sèches à tendance atopique. L’huile de douche de La Rosée est aussi un succès. « Elle fait partie de nos cinq meilleures ventes et a largement contribué à notre renommée ! », reconnaît Mahault de Guibert, cofondatrice de la marque. De son côté, en complément de sa crème lavante hydratante, CeraVe a créé il y a un an une huile lavante moussante hydratante, en formats 236 ml et 473 ml. En 2022, Avène a également opté pour une formule plus douce de son huile lavante relipidante XeraCalm A.D. À noter : la gamme XeraCalm Nutrition, qui vient remplacer la gamme Trixera Nutrition, s’enrichit d’un gel nettoyant et d’une crème de douche. De son côté, Uriage s’appuie sur son huile lavante apaisante Xémose, « l’une des meilleures références en hygiène », selon Eléa Cazeaux-Cazalet, cheffe de produit de la marque.

Grands formats : écologiques et économiques

Avec un chiffre d’affaires (CA) de 93,60 M€, les contenants de plus de 500 ml affichent une progression de 14,5 %. Ils occupent ainsi près de 40 % de parts de marché en valeur*. « C’est devenu un point clé pour les consommateurs qui utilisent les produits d’hygiène quotidiennement, en grande quantité et bien souvent partagés par toute la famille », affirme Cédric Weinland (La Roche-Posay), avant de préciser que « les formats de 750 ml tirent notamment la croissance de la marque à + 5,6 % ». Même tendance chez Rogé Cavaillès : « Au-delà de la praticité, c’est aussi un moyen de proposer aux clients un meilleur rapport qualité/prix », ajoute Antoine Troegeler, directeur marketing de la division pharmacie France. La marque, numéro 3 du marché avec 7 % de parts de marché en valeur (+ 11,8 %)*, a d’ailleurs renforcé sa gamme de gels bain douche avec des formats 1 litre, décliné ses deux références de gel bain douche bio en 1 litre et lancé des écorecharges de 1 litre pour trois de ses références phares (l’Original, Macadamia bio et Aloé véra bio). Une offre devenue de plus en plus séduisante dans le contexte inflationniste actuel, selon Lisa Kern, la directrice marketing France de Klorane. « Les grands formats proposent des prix au litre plus avantageux que ceux des petits conditionnements. Les consommateurs ne s’y sont pas trompés et les considèrent comme une solution pour tenter de préserver au mieux leur pouvoir d’achat. » En conséquence, toutes les marques s’engouffrent dans la brèche. BeauTerra a lancé en mars 2023 ses savons de Marseille liquides, fleur de coton, fleur d’oranger et olive, en 1 litre.

Des shampoings renforcés en actifs

Derrière les gels douche, les shampoings s’octroient la deuxième place du marché des lavants avec 6,1 millions d’unités vendues en 2022 et un CA de 62 M€*. Et là encore, l’évolution du rayon est prometteuse : + 12,3 % en valeur et + 7,3 % en volume, en 2022*. « Le marché du shampoing obéit à une forte dynamique d’innovation. Que ce soit sur l’offre produit ou sur de nouvelles gestuelles, de nouveaux rituels avec une grosse tendance sur les soins du cuir chevelu », détaille Aude Cahuc, directrice marketing France de René Furterer (quatrième marque du marché des lavants avec 6,5 % de parts de marché en valeur*). Dans cette optique, la marque du groupe Pierre Fabre relance son shampoing iconique Forticea aux biosphères d’huiles essentielles, enrichi de nouveaux actifs stimulants et fortifiants – la provitamine B5 et la niacinamide (vitamine B3) – et avec 97 % d’ingrédients d’origine naturelle. « Un shampoing aux biosphères est vendu toutes les onze secondes dans le monde ! », se réjouit Aude Cahuc. Même démarche chez Ducray (autre marque du groupe Pierre Fabre), qui classe ses deux produits stars – Kelual DS et Extra-doux – dans le Top 10 des produits lavants corps et cheveux. « Kelual DS s’appuie sur une formulation unique et efficace avec une synergie d’actifs brevetée à très haute concentration (ciclopirox olamine et piroctone olamine) », confirme Florence Grasser, directrice marketing France chez Ducray. Effectivement, Kelual DS est le premier shampoing antipelliculaire hors autorisation de mise sur le marché (AMM) sur les lavants qui affiche une croissance de 12,5 % en valeur*. Quant à Extra-doux (+ 500 % de croissance en valeur*), il s’appuie sur une formule biodégradable, sans colorant ni silicone, retravaillée en 2021 et qui ne comprend que onze ingrédients. En 2019, Uriage a également investi le rayon capillaire avec une gamme courte, baptisée DS Hair, qui regroupe trois shampoings (dont un doux pour un usage quotidien) et une lotion pour une prise en charge complète des pellicules. « Nous nous appuyons sur la technologie brevetée TLR2-Regul, combinée à l’eau thermale et à l’edelweiss pour apaiser et protéger le cuir chevelu », complète Eléa Cazeaux-Cazalet.

Les initiatives green se multiplient

« Les attentes des consommateurs sont fortes autour de l’efficacité, mais aussi de la naturalité et de l’écoresponsabilité, poursuit Aude Cahuc (René Furterer). Nos shampoings et soins sont tous à base d’huiles essentielles et d’actifs naturels et tous sont fabriqués dans une démarche d’écoconception avec une volonté de limiter l’impact sur l’environnement. » À l’image du shampoing micellaire douceur qui s’offre une écorecharge de 400 ml, « permettant une réduction du plastique de 77 % ». Chez Ducray, l’Extra-doux s’affiche désormais dans un flacon en 100 % PET recyclé et recyclable. « Notre objectif est de proposer un shampoing respectant les cheveux mais aussi l’environnement en prônant de forts engagements RSE [responsabilité sociétale des entreprises, ndlr], assure Florence Grasser (Ducray). Il est d’ailleurs fabriqué dans notre usine située dans le Tarn. » Un virage green que Klorane a pris également en 2022, avec le lancement d’un shampoing solide au cédrat pour les cheveux normaux à gras. « Cette année, nous continuons à soutenir nos capillaires en proposant de nouveaux gestes innovants, qui allient efficacité, naturalité et engagement autour de la réduction d’eau et de packaging », confie Lisa Kern, la directrice marketing France. En attendant, la marque (numéro un du Top 10 avec 13 % de parts de marché en valeur*) peut s’appuyer sur ses shampoings secs, qui évoluent à + 7 % en valeur (source fabricant). « Ce geste s’inscrit dans une tendance d’économie d’eau », justifie Lisa Kern.

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Enfin, Respire, qui figure parmi les pionniers sur le segment des solides, a enrichi sa gamme capillaire en 2022 de deux shampoings solides : l’un pour les cheveux gras et le second pour les cheveux secs. « Nous avons également lancé une gamme de shampoings liquides naturels en flacon aluminium de 250 ml (avec 99 % d’ingrédients d’origine naturelle, certifiés bio, végan, made in France et 100 % recyclable) avec une écorecharge de 500 ml », précise Pauline Raillard, responsable des ventes au sein de l’équipe commerciale.

De la douceur pour les enfants

Galéniques et textures agréables restent une attente forte des parents concernant les lavants destinés à leur bébé. « C’est un vrai défi de proposer des formules les plus écologiques possible tout en conservant un bon niveau de plaisir à l’usage, confie Camille Routier, cheffe de marque Biolane. La sensorialité des formules (application, parfum agréable, mousse, etc.), reste importante pour vivre le moment du bain comme un instant de détente ». La marque s’appuie ainsi sur son gel lavant corps et cheveux (97 % d’origine naturelle et seulement douze ingrédients, également disponible en écorecharges. De la douceur également chez La Rosée, avec le gel lavant ultra-doux bébé, à la glycérine végétale bio. Chez Mustela (+ 16,1 % de CA en cumul annuel fixe*), le produit iconique est le gel lavant doux, numéro trois du Top 10 des produits du marché, qui affiche une progression de 27,8 % en valeur*. « C’est l’un des boosters du segment des lavants, reconnaît Morgane Bonnefoy, responsable portefeuille des produits Mustela. Il bénéficie notamment d’une forte présence dans les maternités. »

Des produits en vrac pour les bébés

De nombreuses marques positionnées sur les lavants bébés développent, en parallèle, des packagings plus responsables. « Nous observons une tendance autour de la réduction de l’utilisation de plastique ou de la préservation de l’eau, enjeu majeur des décennies à venir, avec notamment le développement de l’offre vrac qui continue de séduire de nouveaux consommateurs, tout comme les recharges ou l’offre solide », détaille Khady Sane de BeauTerra. Pour y répondre, la marque a lancé en 2021, six références en vrac. « C’est une offre qui connaît un véritable boom. Tout comme le lancement, en 2022, d’un après-shampoing solide qui rejoint notre gamme de shampoings solides. » Chez Mustela, le distributeur de vrac – testé depuis 2020 en pharmacie et parapharmacie avec le gel lavant doux, le gel lavant et le gel lavant certifié bio – va s’enrichir cette année d’une eau nettoyante. « C’est toujours un dispositif en expérimentation, précise Morgane Bonnefoy. Il faut laisser le temps aux consommateurs de comprendre cette nouvelle démarche. » Quarante points de vente sont annoncés en 2023, tout comme la sortie d’une bouteille en plastique, « moins fragile que celle en verre utilisée actuellement ». Parmi les autres initiatives de la marque, l’arrivée en septembre dernier d’une écorecharge de 400 ml sur le gel lavant certifié bio et d’un shampoing douche solide « ultra-moussant et utilisable dès 3 ans ». Des recharges sont également disponibles chez Biolane, tandis que La Rosée travaille sur un projet de produit en vrac. « C’est un nouveau geste, un nouveau mode de consommation qui implique un investissement de toutes les parties : les marques, les pharmaciens et les clients, conclut Mahault de Guibert (La Rosée). Une approche tripartite qui devrait permettre de répondre, de façon intelligente, aux enjeux environnementaux mais également économiques du secteur. »

* Source : Gers data, en cumul annuel mobile à janvier 2023.

+ 2,8 %

28 M d’unités vendues

Soutenu par les huiles lavantes, le marché des lavants joue l a carte de la praticité mais aussi du plaisir.

+ 13,3 %

238,8 M€ de CA

Depuis ces dernières années, les acteurs du marché ont multiplié les lancements en matière de produits plus naturels et écoresponsables.

Source : Gers data, en cumul annuel mobile à janvier 2023.

L’hygiène-beauté recule en GMS

Depuis 2013, les grandes et moyennes surfaces (GMS) affichent un recul structurel de leur rayon hygiène-beauté de 12 %, selon NielsenIQ, malgré les bonnes tendances de la grande distribution en général. En 2021, le chiffre d’affaires de ce rayon en hyper et supermarché a diminué de 4,9 %. Parmi les divers produits d’hygiène-beauté en déclin, les savons accusent une baisse de 15,8 %. Par ailleurs, la fréquentation du rayon hygiène-beauté dans son ensemble a vu sa clientèle réduire en 2021 par rapport à 2020. En cause, les bonnes performances de l’e-commerce, notamment des sites de vente en ligne spécialisés, et des hard-discounters (Lidl, Action ou Aldi). Le contexte inflationniste et l’évolution des attentes des consommateurs (forme solide, moins d’emballages, naturalité, etc.) ont poussé certains acteurs du secteur à innover, à l’image du Petit Marseillais et de Briochin qui se sont lancés sur le vrac. D’autres ont misé sur les formats solides comme Garnier, Nature Box, Nivea, Sanex ou encore Corine de Farme.

Actifs renforcés. Les shampoings progressent, soutenus par une forte dynamique d’innovation : nouveaux actifs, formules composées d’ingrédients plus naturels ou biodégradables.

Actifs renforcés. Les shampoings progressent, soutenus par une forte dynamique d’innovation : nouveaux actifs, formules composées d’ingrédients plus naturels ou biodégradables.

Zéro déchet. Pour répondre aux consommateurs soucieux de l’écoresponsabilité, les marques proposent des produits lavants en formats solides, en vrac ou en écorecharges.

De l’écoresponsable efficace ! Sur le segment des shampoings, les attentes sont fortes autour de l’efficacité des produits, mais aussi de la naturalité et de l’écoresponsabilité.