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Aucun « oui mais » qui tienne !

Publié le 30 mai 2023
Par Anne-Gaëlle Harlaut et Christine Julien
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Gérer les objections. Phénomène naturel de la vente, les objections demeurent rares si la recherche des besoins a été bien menée. Méthode et contrôle émotionnel permettent de les contourner efficacement.

Une classique de la vente

Une étape quasi obligée

« Et si je me trompais ? » Chaque décision d’achat et chaque engagement posent problème au client. Accéder à une chose implique de renoncer à une autre option. « 90 % des objections sont le fruit d’étapes incomplètes de la vente », explique Marc Roussel, consultant, directeur de Pro-Trainer, auteur du manuel Le Vendeur éthique. Si chaque étape est respectée, « une objection est plutôt une bonne nouvelle. Le client est en train de se décider. Il appréhende de commettre une erreur. Sous tension, il cherche à échapper à la prise de décision ».

L’objection est naturelle

« Il faut que je réfléchisse », « C’est trop cher finalement » sont plutôt des tentatives d’échappatoire à la peur de décider, de l’ordre de la réticence ou de l’inquiétude. Le client est en train de prendre sa décision, il a besoin d’aide. En revanche, quand il dit, à la fin de votre argumentaire, « Ce n’est pas le moment », « Je ne sais pas si ça va me servir », « Au fond, je n’en ai pas besoin », cela signe les étapes ratées de l’entretien de vente.

Bien le prendre

Face à l’objection, on peut penser être un piètre vendeur et qu’elle est un obstacle majeur à la vente du produit conseil que vous avez présenté au client. Faux ! Une objection n’est pas une agression contre vous. Elle est une opinion sur un produit, son utilisation, voire une question déguisée. Le client qui parle de ce qu’il a lu sur Internet ou dans la presse est en demande d’informations complémentaires auprès d’un professionnel expert. Son ton, parfois jugé inquisiteur, peut exprimer la crainte de ne pas être pris au sérieux. Ne le prenez pas contre vous !

Débusquer la raison

Plusieurs raisons ont pu conduire à l’objection : le client n’a peut-être pas compris vos explications ; il n’est pas convaincu ; il résiste par principe, par esprit de contradiction ; il souhaite en savoir davantage avant de se décider ; il veut vous montrer qu’il sait de quoi il parle ; il veut afficher son expertise ou a simplement besoin d’être rassuré !

Dérouler la vente

→ Écouter. Faire parler son client fait qu’il se convainc avec ses propres raisons !

→ Identifier. Trouver le besoin (existe-t-il au moins ?), les freins, les réticences et les attentes, le moment prévu de l’achat et le budget consacré.

→ Centrer. Argumenter sur les bénéfices pour le client et non sur les caractéristiques techniques. Que veut-il ? Plus de facilité d’emploi ? de sécurité ? de confort ? Un prix bas ? Du prestige ?

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→ Anticiper. Aborder la question du coût lors de la découverte des besoins. « Cette gamme est un peu plus chère, et j’imagine que vous aimeriez savoir pourquoi… »

→ Résumer. Lors de l’argumentaire de vente, les questions de contrôle génèrent des points d’accord sur la partie « technique », puis sur la partie « prix ». Le client a besoin d’être soutenu avant de s’engager. Pour savoir où il en est, dites : « À quel moment pensez-vous appliquer cette crème ? Plutôt le matin, ou le soir après votre toilette ou au coucher ? » Puis se taire pour qu’il prenne sa décision.

Analyser l’obstacle

Avant de riposter, identifiez l’objection.

Objection non sincère et non fondée

→ Résistance floue. « Je vais réfléchir », « Je vais en parler à ma femme »… sont le type même de fausses objections quand le client résiste à acheter mais ne donne aucun élément concret sur ses motivations. Ce refus sans argumentation cache souvent de vraies objections.

→ À faire : « Le faire parler », lui faire exprimer de vraies objections, que l’on lèvera ensuite plus facilement.

Objection sincère et non fondée

→ Un doute subjectif. « L’odeur n’est pas très agréable », « Le format n’est pas très pratique pour ma salle de bains », le client exprime un doute injustifié car subjectif, qui dépend de ses critères et non des caractéristiques du produit.

→ À faire : faire développer les doutes pour contrer les objections, et éventuellement diriger vers un produit plus adapté.

Objection sincère et fondée

→ Un scepticisme justifié. « Cette huile démaquillante paraît grasse », « Appliquer cette lotion tous les jours est contraignant ! », le client remet en cause une caractéristique du produit de façon justifiée. Une huile est forcément grasse, et un traitement quotidien est contraignant !

→ À faire : aller dans son sens mais minimiser ou contourner l’objection. Opposer d’autres avantages pour contrebalancer ses doutes.

Atténuer l’objection

La stratégie de la « cocotte-minute » ôte son pouvoir explosif à l’objection !

Baisser le feu

Évitez de nourrir l’objection en éludant les commentaires du client, en faisant de l’humour, en niant ou en minimisant.

Laisser la vapeur s’échapper

Laissez le client exprimer son ressenti. N’essayez pas d’argumenter !

Dévisser le couvercle au bon moment

Ne présentez aucune solution avant l’expression d’une tension intérieure. Montrez votre considération : « Je crois comprendre que vous n’êtes pas convaincu ».

Transformer l’objection

Pour contourner une objection, vous pouvez suivre ces huit étapes.

→ Prendre conscience du moment où se traite l’objection. Adoptez une attitude positive quand l’objection se pointe. Si elle est tue, il faut la détecter, au risque de ne plus revoir le client.

→ Accepter la première objection. Écoutez, puis accusez réception : « Oui, effectivement, ce facteur est à prendre en compte ».

→ Demander s’il en existe d’autres. « Mis à part le prix/le conditionnement/l’odeur…, voyez-vous d’autres points qui freinent votre décision ? »

→ Sélectionner la plus importante. « Si je comprends bien, c’est surtout ce point qui vous préoccupe ». Attendez une confirmation.

→ Demander, si cela l’intéresse, de trouver une réponse à cette objection. « Vous êtes intéressé, mais vous voulez être absolument sûr de ceci ou cela ? » Demandez une confirmation, au risque de maintenir une objection cachée.

→ L’interroger sur les raisons qui le poussent à dire ceci ou cela. Faites parler le client pour qu’il exprime ses souhaits, ses craintes. Puis dire : « Merci de vos explications, je comprends mieux vos réticences ». Tant que le soulagement n’est pas exprimé, vous ne pouvez pas traiter efficacement l’objection, ni résoudre le problème. Sans cette compréhension, la vente serait perçue comme une manipulation !

→ Trouver une solution et argumenter. La compréhension du problème entraîne naturellement sa résolution. Demandez ce qu’il souhaite et la solution qu’il propose. L’objection se traite alors comme une formalité.

→ Revenir à l’engagement. Les objections sont un tremplin à la conclusion. Le bon moment s’exprime par une attitude ou un commentaire du client. On peut alors dire « Lequel prenez-vous ? »

Se faire la main

Voici quelques techniques selon le type d’objection et votre ressenti.

Faire préciser

→ L’approfondissement. C’est la technique en cas d’objection non sincère et non fondée. Elle consiste à faire préciser l’objection quand elle n’est pas clairement formulée et réoriente le dialogue : « Qu’est-ce qui vous gêne dans ce produit ? » Et si la personne finit par donner une vraie raison, vous la traiterez par un autre procédé.

→ Le boomerang. Cette technique redonne la parole au client en répétant ce qu’il vient de formuler sur un ton humoristique : « Ah bon, vous trouvez l’odeur de cette crème désagréable ? » Cela le pousse à développer son objection (« Je n’aime pas cette odeur fleurie »). Il sera alors aisé de l’orienter vers une crème équivalente avec une odeur différente.

→ L’effritement. Faites justifier l’objection par le client. Il se plaint que la brosse à dents qu’on lui conseille est trop chère ? Dites : « Trop chère par rapport à quoi ? » Il parlera alors des brosses qu’il utilise et vous rebondirez sur des argumentaires comparatifs.

Contourner

Pour diminuer l’impact d’une objection justifiée, recourez à ces techniques.

→ L’affaiblissement. Cette pratique diminue l’importance de l’objection en en reformulant une seule partie. « Cette protection solaire est difficile à appliquer et laisse des traces blanches ». Votre réponse : « Bien sûr, ces traces ne sont pas très esthétiques mais elles permettent de vérifier que vous en avez bien mis partout ».

→ L’écran. Contournez l’objection pour y répondre plus tard. Exemple : « Mais combien de temps je vais devoir appliquer ce produit avant de voir une amélioration ? » Vous : « Si ça ne vous dérange pas, je vais vous en parler un peu plus tard », ou « Je vais y venir ». Employez cette méthode quand vous voulez faire un bon argumentaire avant de répondre à des objections réelles, comme le prix, la durée de traitement…

Contrer

Utilisez ces techniques pour appuyer la « riposte » sur les qualités du produit.

→ L’appui. Il transforme l’objection en argument positif. À « C’est étrange un savon sans odeur, non ? », répondez : « L’absence de parfum limite les risques d’allergie à vous qui avez de l’eczéma ».

→ Le « oui mais… ». Cela consiste à approuver ce que dit le client, tout en appuyant sur une qualité supérieure du produit qui vient minimiser l’objection exprimée : « Bien sûr, cette crème est un peu plus grasse que celle que vous utilisiez, mais une application le matin vous assurera un confort parfait pour toute la journée ».

→ Le témoignage. Les « Je l’utilise moi-même » ou « J’ai une cliente qui a eu le même problème et ce produit a donné de très bons résultats » s’emploient avec parcimonie car chaque client est unique. Qui dit que ça fonctionnera pour lui ?

Avec le concours de Carine Didier, formatrice en vente et marketing, et de Marc Roussel, consultant et directeur de Pro-Trainer.