Substitution : les génériques résistent, les biosimilaires patientent

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Substitution : les génériques résistent, les biosimilaires patientent

Publié le 26 décembre 2024
Par Annabelle Alix
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Malgré les manquants et les baisses de remises, les génériques se maintiennent à la première place des médicaments contribuant à la marge des officines. Du côté des biosimilaires, la clé de la substitution résidera dans l’accompagnement du patient et la rémunération du pharmacien, selon David Syr, du Gers Data.

Constat récurrent, « année après année, le taux de pénétration des médicaments génériques en ville ne dépasse jamais les 86 %, observe David Syr, directeur exécutif chez Cegedim Pharma et directeur général adjoint de Gers Data. L’enjeu est désormais d’aller chercher les 14 % manquants pour maximiser la marge du réseau officinal ». Selon le Gers Data, le taux de pénétration atteint les 85,8 % en 2024, contre 83,9 % en 2023 et 84,8 % en 2022. Une progression légère par rapport aux années précédentes, « années très chahutées par les ruptures », rappelle l’expert. Depuis 2023, 11 nouvelles molécules sont tombées dans le domaine public, générant 458 millions d’euros supplémentaires sur le marché des génériques. Si « le taux de pénétration des molécules nouvellement génériquées est variable, David Syr pointe, cette année, un record à 60 % atteint, dès le premier mois, par le rivaroxaban ». Selon les statistiques AdéquA, les génériques occupaient encore le premier rang parmi les médicaments contribuant à la marge brute globale des officines en 2023, générant 29,52 % de celle-ci. « Les compléments de marge provenant des remises, ristournes et coopérations commerciales sont obtenus principalement par les remises sur les génériques et pèsent de façon très significative sur les finances de l’officine, ce qui la rend très générico-dépendante », admet le cabinet KPMG. Son confrère CGP & expertise relève, à ce titre, « un niveau similaire des conditions commerciales sur le générique, en 2023, quelle que soit la taille de l’officine, grâce à l’aide des groupements, mais aussi une baisse des remises accordées par les génériqueurs, les manquants nuisant essentiellement au niveau des remises versées par le génériqueur principal ».

Biosimilaires : une transition patient-dépendante

Tous biosimilaires confondus, le taux de pénétration plafonne à 34,1 % en 2024, malgré une légère augmentation continue depuis deux ans (32,3 % en 2023, 29,2 % en 2022). Pour rappel, trois groupes de biosimilaires sont actuellement substituables en pharmacie. Ceux du filgastrim et du pegfilgrastim – substituables depuis avril 2022 –, détiennent, en 2024, respectivement 97,7 % et 89,3 % des parts de marché face aux bioréférents, selon le réseau Iqvia-Pharmastat. Dans les faits, l’effort de substitution sur ces deux produits émane toutefois, dans une très large mesure, des prescripteurs. Lucentis – dont le marché représente 246 millions d’euros de chiffre d’affaires sur 12 mois – s’est ajouté en novembre à la liste des médicaments substituables. Toujours selon les données Iqvia, les biosimilaires du groupe ranibizumab détiennent actuellement 5 % des parts de marché. « La transition vers le biosimilaire repose désormais sur le bon accompagnement du patient pour s’assurer de la continuité de l’observance, estime David Syr. La substitution du ranibizumab est un premier test. « La présentation du produit n’étant pas la même, le geste diffère, tout comme le confort d’injection, et cette problématique concerne la plupart des biosimilaires », ajoute l’expert. Le défi de la substitution par les biosimilaires est d’accéder à des économies de Sécurité sociale tout en optimisant la qualité de vie des patients.

Le poids de l’incertitude

Accompagner le patient, oui, mais avec quelle rémunération à la clé ? La question reste encore en suspens. Certes, l’article 54 du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 autorise le pharmacien à « substituer un médicament biologique de référence prescrit par un médecin par son biosimilaire deux ans après la commercialisation du premier biosimilaire du même groupe, sauf avis contraire de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ». D’ici au 31 décembre, l’ANSM devrait publier son avis sur l’ouverture de nouveaux groupes biosimilaires à la substitution, et les arrêtés d’application devraient suivre, début 2025. Certes, lors de la généralisation de la substitution générique en pharmacie, « nous avions observé une accélération massive des taux de pénétration et le même phénomène devrait se produire pour les biosimilaires dès 2025 », déclarait, en octobre dernier, dans les colonnes du Moniteur des pharmacies, Sébastien Trinquard, directeur général du syndicat de génériqueurs et fabricants de biosimilaires (Gemme). Seul hic, rien n’est encore acté en ce qui concerne la rémunération du pharmacien. Or, « le manque de temps et la faiblesse des rémunérations sont les deux premiers facteurs de non-engagement dans les nouvelles missions évoqués par les pharmaciens », pointe Bertrand Cadillon, expert-comptable chargé du marché de la pharmacie chez Fiducial. Deux variables qui pourraient bien freiner le développement du marché.

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