Bruno Lemaire : « La filière officinale doit rester rentable et attractive pour les plus jeunes »

Quel regard portez-vous sur le pharmacien ?

Le pharmacien est au cœur de notre système de santé et participe à l'accès aux soins au même titre que les autres professions de santé. C’est pour moi un professionnel de santé dont la mission de conseil, d’orientation mais également de suivi des patients est essentielle.

J’ai souhaité accorder dans mon projet santé une réflexion poussée sur la pharmacie car c’est pour moi un maillon central pour l’évolution de notre système. Vous le savez, bien que le nombre de pharmacies reste stable, ce métier est en pleine évolution. J'ai compris chez ceux que j'ai pu rencontrer les principales difficultés et les aspirations nouvelles pour le futur. Nous devons relever le défi de maintenir le réseau des officines et d’améliorer encore la qualité d'accueil des Français : la filière officinale doit rester attractive pour les plus jeunes et rentable car le pharmacien est aussi à la tête d'une entreprise, tout en assumant de nouvelles missions de santé publique.

La volonté des pharmaciens les plus jeunes à voir évoluer leur métier est, à mon sens, l'atout majeur de cette profession pour s'adapter au mieux aux mutations du métier que je souhaite accompagner.

Que proposez-vous pour faire évoluer cette profession ?

Je propose d’accompagner les pharmaciens dans l’évolution de leur métier, notamment en leur reconnaissant un rôle dans la délivrance de services de santé comme par exemple réaliser un bilan de médication, établir des plans de prise des médicaments, accompagner individuellement l’observance en modifiant la loi HPST de 2009.

Je souhaite en outre que nous puissions lancer une réflexion entre les médecins et les pharmaciens sur des sujets aussi importants que ceux de la vaccination, sans a priori, avec le seul objectif commun d’améliorer notre couverture maximale et de regagner la confiance de tous les Français. Dans le cadre du regroupement de pharmacie dans des maisons de santé pluridisciplinaires organisées autour d’un projet, la délégation de la vaccination me paraît en effet envisageable.

Souhaiteriez-vous accélérer la dispensation à l’unité des médicaments ?

La dispensation à l’unité des médicaments est également une évolution sur laquelle j’aimerais d’abord m’assurer de l’adhésion de la majorité des pharmaciens.

Que pensez-vous de la politique de santé menée depuis cinq ans ?

Elle est catastrophique, clivante et en dessous des enjeux que notre système doit relever. Nous avons en effet le devoir de préparer l’avenir de notre système de santé, de répondre à la question centrale des déserts médicaux, de la soutenabilité financière de notre système et de la pérennité de notre système solidaire. Depuis 5 ans, aucun chantier majeur n’a été engagé si ce n’est des mesures qui ont eu pour conséquence d’augmenter les restes à charge et d’alourdir la bureaucratie de notre système.

Ma vision est totalement différente : elle est basée sur la volonté de sauvegarder notre système solidaire et d’engager une reconquête de l’assurance maladie, en remboursant mieux les soins dentaires et les lunettes. Ma politique vise également à redonner leur fierté aux professionnels de santé et à responsabiliser davantage patients comme acteurs de santé. Notre système est trop complexe. Nous devons donner davantage de liberté aux acteurs, leur faire enfin confiance. L’enjeu est de regagner des marges de manœuvre pour investir dans l’innovation, dans la prise en charge du handicap et de la dépendance.

Lire aussi :

- L'article « Présidentielle : les candidats vous passent la pommade » publié dans le Moniteur des pharmacies N° 3148 du 29 octobre.

- L'interview de Jean-François Copé « La fixation d'un taux unique de remboursement serait plus simple et plus lisible », publiée le 7 novembre.

- L'interview de François Fillon « Les médicaments dont le service médical rendu est insuffisant ne doivent pas être remboursés », publiée le 8 novembre.

- L’interview d'Alain Juppé « Avec les pharmaciens, je veux établir un véritable pacte de confiance », publiée le 9 novembre.