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Feu de paille ou véritable révolution ? C’est au tour de la nicotine d’être sur toutes les lèvres. A la base de ce nouvel engouement médiatique, des études chinoise, américaine et française constatant un faible nombre de fumeurs chez les patients infectés par le SARS-CoV-2.
Des chercheurs de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et de Sorbonne Université ont calculé, dans une enquête transversale portant sur 482 patients hospitalisés ou non, que le taux de fumeurs quotidien était de 5,3 % seulement, alors que plus d’un quart de la population française fume. Si l’étude ne permet pas de confirmer la causalité de cette association, les auteurs affirment qu’ « il existe cependant suffisamment de données scientifiques pour suggérer que la protection des fumeurs puisse être médiée par la nicotine ». Le coronavirus utilise en effet le récepteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2) pour entrer dans les cellules, et la nicotine module l’expression de l’ACE2.
Une autre publication de l’AP-HP, Sorbonne Université, Académie des sciences, Institut Pasteur et chercheurs du CNRS et de l’Inserm postule quant à elle « un rôle central du récepteur nicotinique de l’acétylcholine dans la propagation et la physiopathologie de Covid-19 ». Les chercheurs s’appuient sur le fait que l’enveloppe du SARS-CoV-2 possède une séquence similaire à un motif présent sur la glycoprotéine du virus de la rage, « connu pour un neurotropisme directement lié à sa fixation sur le récepteur nicotinique de la jonction nerf-muscle ». Le SARS-CoV-2 pourrait ainsi se propager à partir de la muqueuse olfactive jusqu’aux neurones du tronc cérébral et dans certains cas aux centres respiratoires. L’intervention du récepteur nicotinique pourrait aussi expliquer le choc cytokinique observé chez certains patients. Le dérèglement de ce récepteur entraîne une hyperactivation macrophagique avec libération de cytokines pro-inflammatoires. « Cette altération du récepteur nicotinique est à l’origine de l’état résiduel inflammatoire décrit au cours de l’obésité et du diabète, qui pourrait être amplifié en cas d’infection par le SARS-CoV2. Cette hypothèse expliquerait pourquoi ces deux comorbidités sont si fréquemment retrouvées au cours des cas graves de Covid-19 » soulignent les auteurs, qui jugent souhaitable d’évaluer rapidement l’impact thérapeutique d’agents modulateurs du récepteur nicotinique.
Pour l’Alliance contre le tabac, cette hypothèse d’un effet protecteur de la nicotine doit être prise avec grande précaution : « rien ne permet d’affirmer que les fumeurs soient plus protégés que le reste de la population. Le rapport bénéfice-risque plaide largement en faveur de l’arrêt du tabac ». Mieux vaut donc attendre les résultats d’études cliniques, une fois encore.
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