Est-ce que tu viens pour les vacances ? - Porphyre n° 528 du 06/12/2016 - Revues
 
Porphyre n° 528 du 06/12/2016
 

Exercer

Les mots pour…

Auteur(s) : Catherine Piraud-Rouet

Poser ses congés. Caler ses absences requiert souvent une concertation avec ses collègues et son employeur pour obtenir satisfaction, assurer la continuité de service et ménager les susceptibilités.

Envisager les possibles

Connaître ses droits

Avant de demander des congés, assurez-vous d’être « dans les clous ».

→ Coutumes et obligations « maison ». « Le salarié doit d’abord anticiper les périodes de fermeture obligatoire », conseille Olivier Clarhaut, secrétaire FO-Pharmacie. Fermeture annuelle, inventaire… les coutumes « maison » doivent être prises en compte, notamment pour les nouvelles embau-ches. Le sujet s’aborde après les autres points du contrat : « Y a-t-il des périodes où les départs en congé gênent moins le fonctionnement de l’officine ? »

→  Mon compte congés. Vérifiez le nombre de jours restant sur votre dernière fiche de paie, voire demandez-le au titulaire ou au responsable des ressources humaines.

→ Ce que dit la loi. Quand les prendre ? Comment les fractionner ? Les « coutumes maison » se croisent avec la législation du travail et la convention collective (voir encadré). Plongez-vous aussi dans les archives Porphyre et le n° 523 de juin 2016.

Dépasser les blocages psychologiques

« Si je pars en août, ça va bloquer les autres », « L’équipe est déjà en effectif réduit », etc. « Les freins psychologiques sont souvent puissants dans un condiv professionnel parfois tendu. Les salariés hésitent à se lancer et se retrouvent parfois au pied du mur en y mettant les autres aussi », souligne Christophe Jaouen, consultant en relations au travail(1). Pour déjouer ses scrupules, se persuader que les congés payés sont un droit. Et on ne demande rien de plus que ce qui est dû.

Penser stratégique

→ Pour la famille. Prenez en compte les contraintes (vacances scolaires, du conjoint, familles recomposées…) et les envies (voyage lointain…). Planifier à l’avance limite les déconvenues.

→ Pour un « rendement » optimal. Gardez la règle suivante en mémoire : le premier jour décompté est le premier jour que le salarié aurait dû travailler. Ainsi, vous visez un break de trois jours et l’officine est fermée le lundi ? En posant le samedi, le lundi – qui reste un jour ouvrable même s’il n’est pas travaillé - sera aussi décompté. En posant le mardi, vous bénéficiez du dimanche, lundi, mardi et un seul jour est retenu.

Jouer la concertation

S’y prendre avant

L’idéal pour avoir le temps de s’organiser est de s’y prendre environ six mois en amont pour les congés d’été.

Établir un projet collectif

L’important est de négocier, c’est-à-dire effectuer des efforts réciproques pour parvenir à un accord.

→ La manière. Selon les habitudes et les relations dans l’équipe, on peut organiser une réunion, avec pourquoi pas un resto pour une ambiance propice à la négociation, ou procéder de façon informelle. Conseil : proposez à l’équipe soit à l’oral, soit par un petit mot affiché de discuter des congés et fixez plusieurs dates. Puis, proposez un lieu. Éviter : faire ça entre deux clients, deux commandes…

→ Les règles. Pour limiter les arbitrages douloureux, « proposez un schéma qui ne grève pas le fonctionnement de l’officine et qui correspond au mieux aux souhaits de chacun, estime Olivier Clarhaut. L’employeur validera d’autant plus facilement des congés qui ne pénalisent pas l’organisation ». À l’hôpital, « si l’on fonctionne par binôme, l’acolyte est à consulter au premier chef, par considération humaine et pour la continuité de service », précise Pascal Vuattoux, préparateur au CHU de Montpellier (34) et délégué du personnel.

Désamorcer tout conflit

Chacun fait valoir à tour de rôle ses désirs. Laissez l’autre parler sans l’interrompre, ni finir ses phrases. Ne pas banaliser ses préoccupations, ce qui pourrait traduire un manque de considération de votre part. Évitez « Ils sont grands tes enfants, non ? » Bannissez par exemple toute supériorité du fait de votre ancienneté ou de vos responsabilités car il est plus facile de s’entendre quand la discussion se fait sur un pied d’égalité.

Si ça coince

Malgré leurs efforts de conciliation, Claire et Romain veulent tous deux les mêmes semaines de congés. Voici trois solutions pour trancher et ne pas laisser la situation s’envenimer.

→ La contrepartie. C’est la solution à privilégier pour garantir l’ambiance. Dans la négociation, le « donnant-donnant » est maître : « OK, je te laisse prendre tes vacances d’hiver à telle date, mais tu me laisses la main sur celles de printemps », « D’accord pour te céder Noël cette année, mais l’an prochain, on inverse ».

→ Les ordres de priorité. Quand la négociation échoue, on fait appel aux ordres de priorité édictés par la convention collective. Primo, la situation de famille. En cas d’enfants scolarisés, les congés sont fixés, dans la mesure du possible, au cours des vacances scolaires. Secundo, l’ancienneté : « On imagine mal quelqu’un qui est là depuis six mois passer devant un salarié ayant vingt ans d’ancienneté », pointe Olivier Clarhaut. Tertio : si le conjoint marié ou pacsé travaille dans la même officine, les deux ont droit à un congé simultané.

→ L’arbitrage : si aucun accord n’est trouvé, le titulaire tranchera en prenant en compte la continuité de service d’abord, puis les ordres de priorité de la convention. À noter : ne pas hausser le ton, ni ruminer (lire plus loin).

Savoir demander

En début d’année

La période des congés doit être notifiée au moins deux mois avant l’ouverture de la période de vacances, soit avant le 1er mars. « Pendant les trois premiers mois de l’année, il faut prévoir les neuf mois qui suivent, décrypte Pascal Vuattoux. Ce qui inclut la période estivale, la Toussaint et les vacances de Noël, février se prévoyant l’année d’avant. »

Privilégier l’écrit

Pour les congés annuels, il n’y a pas d’obligation formelle mais l’écrit est fortement recommandé. « Un formalisme minimum est préférable afin d’éviter l’arbitraire de l’employeur, et jouer la transparence vis-à-vis des autres salariés », estime Camille Rousset, avocate en droit du travail à Lyon (69). Côté pratique, c’est au choix : positionnement individuel par mail ou lettre à l’employeur ou collectif, tableau Excel, agenda électronique partagé, affichage manuel… Notre conseil : soyez d’accord avant de formaliser par écrit à l’employeur.

Oups je veux changer de dates

→ Le timing. Plus c’est tôt, mieux c’est ! Pour reconsulter l’équipe et s’enquérir de l’accord de principe de l’employeur. « La modification est impossible moins d’un mois en amont, pour des raisons d’organisation du service. Et que l’employeur ait ou non une solution de repli, il peut très bien refuser », précise Camille Rousset.

→ Argumenter. Si c’est un cas de force majeure, mettez-le en avant  : « Les congés de mon conjoint ont été refusés », « Son père est malade »… Évitez les arguments futiles qui vous desserviront : « Ils annoncent du mauvais temps en Bretagne ».

Quand c’est non…

C’est son droit

« Sauf usage ou accord d’entreprise plus favorable, c’est l’employeur qui fixe la date des congés payés », précise Camille Rousset. Celui-ci peut donc valablement s’opposer à une prise de congés gênant l’organisation du service. « La seule obligation qui lui incombe, c’est de ne pas modifier l’ordre des départs moins d’un mois avant la date prévue ».

Objectif « no litige »

→ Éviter le rapport de force. On a le droit d’être déçu mais se braquer sur le mode « Puisque c’est ainsi, on va voir ce que l’on va voir » est contre-productif. « La stratégie de représailles, type grève du zèle, risque de faire entrer salarié et employeur dans un phénomène d’escalade, où il y aura deux perdants », prévient Hubert Landier, consultant indépendant(2). Avec, à la clé, aucune chance de se faire entendre et une dégradation du climat de travail.

→ Chercher l’alternative. Face à un refus, le bon réflexe est d’essayer d’en comprendre les raisons. Demandez un rendez-vous et dites : « Pourriez-vous m’indiquer les motifs de votre refus ? » Si le titulaire n’a pas su dire non à une collègue, dites : « Vous avez privilégié la demande de Laura cette fois-ci, j’imagine que la prochaine fois, ce sera celle d’un autre ». Le plus souvent, la cause d’un refus est organisationnelle. Difficile alors d’aller à son encontre. Néanmoins, si la raison ne semble pas objective, proposez une alternative : « Je vous propose d’aménager les dates », « Serait-il possible de prendre tout ou partie du congé sans solde ? »

Qu*and le blocage persiste…

En l’absence de raison objectivée et si vous vous sentez lésé(e), vous pouvez solliciter l’aide d’un intermédiaire : l’inspection du travail, un délégué du personnel dans les entreprises de plus de dix salariés, l’union départementale du syndicat de votre choix même sans être syndiqué, mais c’est mieux si vous l’êtes… Si la requête lui semble justifiée, il pourra tenter de débloquer la négociation. Gardez toutefois cette solution pour des cas extrêmes, tel « un abus clairement caractérisé et de grande ampleur, par exemple quelqu’un qui aurait été lésé deux ou trois ans de suite sans raison manifeste », prévient Pascal Vuattoux.

(1) www.passerelles-humaines.fr, www.terrainsdevolutions.fr

(2) www.regard-hubertlandier.fr

Ce que dit la convention collective

• Durée des congés : 30 jours ouvrables pour un temps complet.

• Congés pouvant être pris en une seule fois : 24 jours ouvrables au maximum, dont 18 en continu, impérativement du 1er mai au 31 octobre.

• Jours supplémentaires pour les cadres (pharmaciens seulement) : 2 après six ans d’ancienneté, sous déduction des arrêts maladie non professionnels.

• Fractionnement des congés : le congé principal peut être fractionné sur accord de l’employeur et du salarié, l’une des fractions devant être au moins égale à 18 jours ouvrables en continu. 2 jours supplémentaires sont attribués pour un nombre de jours de congés pris en dehors de la période légale au moins égal à 6, et 1 seul lorsque ce nombre est compris entre 3 et 5.

• Indemnité de congés payés : elle doit être égale à 1/10e de la rémunération totale perçue au cours de la période de référence.

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