La compression de série - Porphyre n° 527 du 26/10/2016 - Revues
 
Porphyre n° 527 du 26/10/2016
 

Savoir

Le matériel

Auteur(s) : Caroline Bouhala

Les bas de compression de série offrent une palette de choix qui facilite l’observance et permet à ces dispositifs médicaux de favoriser le retour veineux dans de nombreuses pathologies.

Définition

• Les bas de compression médicaux sont des dispositifs médicaux de classe I. Ils exercent une pression active constante et dégressive le long de la jambe afin de favoriser le retour veineux (voir encadré).

• Le terme « bas de compression » englobe :

→ les chaussettes ou bas jarret qui s’arrêtent en dessous du genou ;

→ les bas-cuisses auto-fixants ou non ;

→ les collants : deux bas-cuisses réunis par une culotte ;

→ les collants de maternité avec culotte adaptée aux modifications morphologiques de la grossesse (extensibilité, ceinture réglable) ;

→ les hémi-collants constitués d’un bas-cuisse et d’une fesse, avec ceinture pour le maintenir.

Pression et compression

• La pression est le principe actif de la compression, qui comprime la jambe à l’aide d’un textile élastique. Cette pression s’exprime en millimètres de mercure (mmHg) ou en hectoPascal (hPa) avec 1 mm Hg = 1,33322 hPa.

La pression est la plus élevée au niveau de la cheville pour stimuler le retour veineux.

• Les mesures des pressions de compression exercées par les bas sont basées sur l’enregistrement du diagramme de force-allongement du textile, qui permet de calculer la pression sur un rayon de courbure donné. Ces mesures ont permis de définir des classes en fonction de la pression théorique à la cheville.

→ Classe 1 : entre 10 et 15 mmHg (13-20 hPa).

→ Classe II : entre 15,1 et 20 mmHg (20,1-27 hPa).

→ Classe III : 20,1 et 36 mmHg (27,1-48 hPa).

→ Classe IV : au-delà de 36 mmHg (> 48 hPa).

• Cette compression est dégressive entre la cheville et la cuisse, et variable selon les classes.

→ La dégressivité est, au plus, de 75 % en classe I, 70 % en classe II, 60 % en classe III et 40 % en classe IV, de la pression au niveau de la cheville.

→ Cette dégressivité est assurée grâce au tricotage du bas et à la morphologie de la jambe. La cheville étant plus fine que le mollet, la pression y est alors plus élevée et la vitesse de circulation, plus grande.

Mode d’action(1)

Les bas agissent de façon mécanique, en se basant sur la dynamique veineuse.

• La compression élastique :

→ s’opposerait à l’hyperpression veineuse de la maladie veineuse chronique. Elle diminuerait le reflux veineux, le volume de sang résiduel dans le réseau superficiel et la pression veineuse à la marche ;

→ s’opposerait à la stase veineuse en augmentant les vitesses circulatoires. Porter une compression réduirait de moitié le calibre des veines jumelles, diminuant ainsi le risque de lésions endothéliales à l’origine d’une thrombose.

→ aurait un effet anti-œdémateux et favoriserait l’oxygénation tissulaire en s’opposant à la pression hydrostatique intravasculaire ;

→ augmenterait la pression hydrostatique interstitielle et améliorerait la microcirculation lymphatique.

• Utilisations : prévention et traitement symptomatique des maladies veineuses chroniques, prévention des thromboses veineuses à risque, prise en charge des lymphœdèmes. Des recommandations précisent les pressions cibles pour chaque pathologie(1), mais les indications pour la prise en charge sont limitées (voir plus loin).

Fabrication

Les bas sont tricotés à partir de fibres, naturelles et/ou synthétiques, élastiques et/ou non élastiques. Le choix des matières utilisées est libre, mais les caractéristiques sont imposées à la LPP.

• La technique du tricotage permet de faire varier la tension des fils tout au long du bas.

• La structure. Un bas est tricoté avec des fils de maille et des fils de trame (voir dessin).

→ Les fils de maille, élastiques ou non, constituent la structure de base du bas, avec des boucles entrelacées. Quand on tire longitudinalement sur le tricot, c’est la maille qui se déforme, d’autant plus si elle est élastique. Ces fils sont à l’origine de l’esthétisme et du confort.

→ Les fils de trame, élastiques, horizontaux, assurent l’effet compressif recherché. Ce sont les forces de rappel des fibres élastiques qui vont agir sur le membre. Le fil de trame est guipé, en double couverture inversée, c’est-à-dire recouvert de deux fils enroulés en sens inverse (voir dessin). Le guipage rend le fil de trame plus fort et moins élastique et le protège de l’usure.

→ Pour la dégressivité de la compression, la trame reste la même tout au long de l’article mais l’espacement entre les fils va être de plus en plus grand (voir dessin cuisse en orange), tout en respectant un pourcentage d’allongement qui permet d’enfiler le bas.

→ La confection se fait le plus souvent sur tricoteuse circulaire, les métiers rectilignes étant davantage utilisés pour le sur-mesure.

→ Les bas ont un talon pour le bon positionnement. Il est marqué, fermé et renforcé.

• Fabricants : Bauerfeind, BSN-Radiante, Cizeta Medicali, Gibaud, Innothéra, Julius Zorn, Medi France, Ormihl Danet, Sigvaris, Thuasne…

Matières

• Élastiques : élasthane. À base de polyuréthane, très souvent utilisé pour le fil de trame du fait de sa très grande élasticité. Résiste à l’usure, à la lumière et jusqu’à 150 °C.

• Non élastiques naturelles

→ Bambou : matière quatre fois plus absorbante que le coton.

→ Coton : bonne tolérance cutanée mais pas d’isolation thermique, peu résistant aux érosions mécaniques, donc s’use plus facilement, plus épais que les matières synthétiques. Le fil d’Écosse est plus résistant et brillant ; le coton d’Égypte est plus fin, plus long et plus résistant.

→ Laine : isolation thermique. Épaisse (laine mérinos moins), résiste mal aux frottements.

→ Lin : fibre très résistante qui absorbe bien l’humidité, agréable au porter, mais un peu épaisse.

→ Soie : solide, adaptée aux peaux fragiles, isolation thermique, aspect brillant, prix parfois élevé.

→ Tencel : extraite du bois. Résistante, douce, absorbante (trois fois plus qu’une fibre classique), infroissable, adaptée aux peaux sensibles.

• Non élastiques non naturelles

→ Microfibre : fibres de polyester, polyamide ou acrylique, plus fines que la soie. Absorbe et évacue l’humidité, toucher soyeux, facile à enfiler, à porter. Fragile et peut boulocher.

→ Polyamide (Nylon) : très résistant. Plus fin que le coton, sèche vite. Absorption très faible.

→ Tactel : polyamide de structure trilobée. Toucher lisse, évacuation de l’humidité et échanges thermiques favorisés.

→ Viscose : fibre cellulosique régénérée, donc fibre chimique avec pouvoir absorbant élevé.

Modèles

• Classe de compression : fonction des troubles (classe III si thromboses, classe II si insuffisance veineuse sans antécédent de thrombose…).

• Types de bas : aucune différence d’efficacité entre les différents bas(1). Néanmoins, préférer un bas-cuisse ou un collant pour des varices ou un thrombus au niveau de la cuisse afin de recouvrir la veine. Et respecter le choix du patient, gage d’observance.

• Matières : voir ci-dessus.

• Fixation des bas : une minorité est maintenue par une ceinture + jarretelle. La plupart sont autofixants. Le système de fixation en silicone est intégré sur la partie supérieure sous forme d’une bande unique ou de multiples bandes, de picots, de croisillons, de vagues, de nids d’abeille, etc. Le fil de silicone peut être tissé à l’intérieur du textile (« BasFix » de Radiante). Medi (Technologie Platinum) et Sigvaris (Sensinnov) proposent des bandes en silicone avec catalyseur au platine censé améliorer la tolérance.

• Sexe : les modèles sont unisexes si les mesures conviennent. Tableaux de taillage et matières sont souvent adaptés à chaque sexe.

• Taille : certains proposent des tailles de XS à XXL et la possibilité de faire des adaptations sur les modèles de série, mais avec moins de choix. Radiante, Sigvaris et Cizeta (Varisan) ont des options « mollet + » et/ou « mollet - » pour les mi-bas, des « cuisse + » et « cuisse - » pour les collants. Des gammes ont une option « collant confort » avec tour de hanches élargi.

• Retouches : raccourcissement de la hdiv du bas, réduction de la bande auto-fixante, ouverture à l’avant du collant, allongement du pied pour grandes pointures…

• Pied ouvert ou fermé : ouvert en post-opératoire pour surveiller la coloration des orteils, l’été en cas de chaussures ouvertes, de mycose, en cas d’hallux valgus. Le pied ouvert peut être raccourci pour ne pas comprimer une déformation

• Autres : transparent, fin, opaque, épais, couleurs disponibles, motifs… antitranspirant, ajout de lanoline dans Mediven 20. VeinoTrain micro balance (Bauerfeind) propose des bas avec actifs hydratants rechargeables avec une lotion.

Législation

Prescription

Par un médecin, kiné, sage-femme et, pour les infirmiers, dans le cadre d’un renouvellement à l’identique. Sur ordonnance séparée précisant le type d’article, la pression à la cheville ou la classe, le port, voire la marque.

Inscription LPP

Sous lignes génériques au titre II, chapitre 1, section D : orthèses élastiques de contention des membres. La nomenclature est uniquement disponible en téléchargement sur Ameli.fr.

Prise en charge à la LPP(2)

• Selon un référentiel technique élaboré par l’Association pour la promotion de l’assurance qualité dans la filière textile-habillement (Asqual) : mode de fabrication et matériaux, pression à la cheville, pourcentage de dégressivité et résistance à un test de comportement à l’usage.

• Selon des indications : remboursés dans les jambes lourdes, stases veineuses avec ou sans œdèmes, le lymphœdème et l’éléphantiasis.

• Tarif LPP : il dépend des spécifications techniques, de la classe de pression et du produit, sachant que les tarifs correspondent à une partie du dispositif. Ainsi, le tarif d’un collant = 2 x tarif d’un bas + tarif d’une culotte.

→ Paire de chaussettes : 2 x 1 chaussette = 201D01.2 (11,2 €) x 2 = 22,40 €.

→ Paire de bas auto-fixants : 2 x 1 bas = 201D01.8 (14,89 €) x 2 = 29,78 €.

→ Paire de bas sans bande auto-fixante : 2 bas + jarretelle + ceinture de taille élastique = 201D01.8 (14.89 €) x 2 + 201D06.3 (1,32 €) + 201D06.2 (1.66 €) = 32,76 €.

→ Collant : 1 bas + 1 culotte = 201D01.8 (14,89 €) x 2 + 201D04.1 (12,25 €) = 42,03 €.

→ Hémi-collant : 1 bas + 1 culotte = 201D01.8 (14,89 €) + 201D04.1 (12,25 €) = 27,14 €.

→ Pour la classe 4, il existe un supplément : 201D05.1, ajoutant une majoration de 5 %.

• Pas de prix limite de vente, donc dépassement possible.

• Nombre d’unités prises en charge : pas limité, première prescription de deux paires et autres prescriptions possibles si la taille ne convient plus ou si les paires se sont abîmées dans un délai de six mois, période de garantie des bas(3).

En pratique

• Prise de mesures correcte : garante de l’efficacité et de l’observance.

→ Le matin afin d’éviter le risque d’erreur liée au gonflement des jambes dans la journée, notamment l’été et/ou en cas d’œdèmes.

→ À même la peau, debout et chaussures retirées, sur les deux jambes.

→ Chaussettes : tour de la cheville à l’endroit le plus fin au-dessus de la malléole, tour du mollet au niveau le plus large et la hdiv sol-pli du genou (creux poplité derrière le genou).

→ Bas-cuisse et collant : tour de cheville, tour de cuisse au plus large, hdiv sol/entrejambe, soit à l’intérieur de la jambe (Sigvaris), soit sous le pli fessier. Pour les bas, parfois mesure du tour de hanche (Radiante, Sigvaris) ou de la taille au niveau ombilical (Cizeta Medicali) pour une culotte pas trop serrée.

→ Respect du tableau de taillage des fabricants car les prises de mesures peuvent diverger.

→ Remesurer à chaque renouvellement.

• Enfilage : de préférence le matin sur une peau propre et sèche, retourner le bas sur l’envers jusqu’au talon, enfiler le pied puis le talon, puis dérouler sans tirer. Masser ensuite la jambe pour bien répartir la pression et éviter les plis.

• Lavage idéalement quotidien car les bas perdent de 5 à 10 % de leur force de compression dans la journée, que le lavage restitue. À 30° voire 40° (Medi et Innothera), pas d’adoucissant et essorer sans tordre. Laver les bas-cuisses à l’envers pour éviter que les bandes antiglisse se collent l’une sur l’autre. Pas de sèche-linge sauf exceptions (Medi). Étendre à plat loin d’une source de chaleur et pas au soleil.

• Prévenir les effets indésirables. Les intolérances sont surtout le fait d’une mauvaise taille et/ou de problèmes de macération. Revérifier les mesures. En cas de persistance, orienter vers une autre marque ou vers des bas avec jarretelle ou collant. Si besoin de superposer deux bas pour faire une classe II avec deux classes I, prévenir les risques de garrot en choisissant deux bas de hdivs différentes, l’un avec le pied ouvert, et l’autre, fermé.

Avec l’aimable participation du Dr Marlène Coupé, médecin vasculaire spécialisé en lymphologie et consultante au centre hospitalier de Saint-Éloi à Montpellier (34).

(1) Dispositifs de compression médicale à usage individuel, utilisation en pathologies vasculaires, CNEDiMTS, Haute Autorité de santé, septembre 2010.

(2) Le contrôle technique de conformité est réalisé par un laboratoire compétent et indépendant, l’Institut français du textile et de l’habillement (IFTH), sous l’encadrement de l’Asqual. Les résultats de ces contrôles sont ensuite validés par l’Asqual en tant qu’organisme certificateur qui délivre un certificat de qualité pour une durée de cinq ans.

(3) Circulaire 86/2003 de l’Assurance maladie.

Compression, pas contention

→ La compression est réalisée par un dispositif élastique qui exerce une pression active, permanente, que les muscles du mollet soient ou non en activité. Elle agit au repos comme à l’effort, de jour comme de nuit.

→ La contention est exercée par un dispositif non élastique qui est efficace seulement quand on marche par contraction du muscle du mollet. C’est le cas des bandes inélastiques ou à allongement court.

Mémento de la délivrance

→ Prescription sur une ordonnance séparée d’un médecin, kiné, sage-femme et infirmière (uniquement si renouvellement à l’identique).

→ Une bonne prise de mesures est capitale car garante de l’efficacité.

→ Expliquer les modalités d’enfilage et de lavage.

→ Pas de prix limite de vente.

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