Le maquillage médical correcteur - Porphyre n° 525 du 30/08/2016 - Revues
 
Porphyre n° 525 du 30/08/2016
 

Savoir

Le point sur…

Auteur(s) : Florence Leandro

Quand des dermatoses inesthétiques se vivent mal, le maquillage médical correcteur s’avère intéressant pour masquer les lésions et retrouver l’estime de soi. Écoute et conseils techniques sont indispensables.

Définition

À la différence du maquillage classique qui vise à mettre en valeur certaines parties du visage et/ou du corps, le maquillage médical correcteur (MMC) est un ensemble de techniques cherchant à atténuer les imperfections cutanées, sans aggraver la dermatose en cause.

Au-delà des apparences

Le caractère affichant d’une maladie de peau n’est pas corrélé à sa gravité mais peut avoir un impact psychologique très négatif dans la vie professionnelle ou affective. La peau devient source de honte, de perte de confiance en soi, voire de dépression. Malgré les traitements – laser, biothérapies… –, certaines dermatoses ne bénéficient pas toujours d’une solution satisfaisante et/ou définitive. « Les patients que nous recevons présentent souvent des lésions sur des zones particulièrement exposées au regard des autres comme le visage, mais il y a aussi une demande pour des atteintes moins visibles entraînant une baisse de l’estime de soi et une gêne au quotidien, face au miroir ou dans l’intimité », explique le Dr Mallet, dermatologue à l’hôpital de la Timone à Marseille (13).

Situations concernées

Elles sont très variées : brûlure, cicatrice après un accident, une opération, une ablation d’un cancer de la peau… ; troubles pigmentaires cutanés avec hyperpigmentations comme le mélasma (voir lexique), dépigmentations comme le vitiligo ; maladies de peau inflammatoires telles qu’acné, rosacée, lupus, sclérodermie… ; pathologies vasculaires avec angiomes (voir lexique), malformations vasculaires…

Ces dermatoses affichantes et discriminantes, en échec de traitement, peuvent même être considérées à tort comme des maladies contagieuses. Dans ces cas, le maquillage médical correcteur apparaît comme une solution palliative efficace pour faire disparaître les lésions, même pour quelques heures. « Le maquillage correcteur doit faire partie de la prescription médicale », soutient le Dr Mallet.

Principe

• Le maquillage médical repose sur le principe de correction par la couleur, modélisé par le cercle chromatique (voir encadré). Superposer deux couleurs complémentaires, diamétralement opposées, permet de les neutraliser :

→ les pigments verts atténuent les marques rouges : couperose, post-laser, cicatrice inflammatoire… ;

→ le jaune neutralise le bleu-violacé : angiomes, ecchymoses, veines apparentes… ;

→ une teinte plutôt orangée traite les imperfections brunes : anciennes cicatrices, mélasma…

• La sécurité des produits correcteurs appliqués sur les peaux pathologiques est maximale : formules souvent hypoallergéniques, sans parfum, sans paraben, voire sans conservateur, testées sous contrôle dermatologique et non comédogènes en limitant la présence et/ou la concentration des substances qui le sont, comme certains émulsionnants, des esters d’acides gras, les huiles, la vaseline, la lanoline, certains pigments et liants… En général, les formules résistent à l’eau, à la transpiration et au transfert.

• Les produits s’utilisent sur tout type de lésion parfaitement cicatrisée, mais il est plus facile de camoufler une pigmentation défaillante que de « lisser » des troubles du relief cutané d’une cicatrice chéloïde.

Produits utilisés

Correcteurs de teint

• Les fonds de teint se différencient des crèmes teintées par leur pouvoir couvrant. Ils se distinguent par leur richesse en pigments, même si les teneurs varient selon les formules : autour de 20 % pour les fluides pour une couvrance modérée, environ 30 % pour les fonds de teint compacts et 40 % pour les sticks, avec une couvrance importante.

• Les pigments colorés sont surtout des oxydes de fer, mais d’autres pigments non colorés et opacifiants, tel le dioxyde de titane, participent au fort pouvoir couvrant.

• Ils ne contiennent aucun actif traitant sauf exceptions : acide salicylique dans fonds de teint Dermablend 3D Correction de Vichy, acide hyaluronique dans la crème d’eau hydratante de Toleriane Teint de La Roche-Posay…

• Pour les peaux grasses, des formules fluides ou compactes avec un minimum de corps gras, voire « oil free », sont adaptées. Non comédogènes, elles sont aussi enrichies en poudres absorbantes et matifiantes : perlite, kaolin…

• Pour neutraliser des imperfections locales, certaines gammes (cf. tableau p. 40) proposent des pinceaux et des sticks de couleur jaune, verte, beige… à choisir en fonction de la teinte dominante à camoufler.

• Une protection solaire est nécessaire pour les dermatoses s’aggravant au soleil comme le lupus. Les nombreux pigments minéraux responsables de la couvrance constituent un premier écran face au soleil, complétés par des agents antioxydants (vitamine E ou pré-tocophéryl dans certains produits Couvrance d’Avène…) et des filtres chimiques tels les cinnamates.

Poudre

Elle est souvent nécessaire pour fixer le fond de teint et prolonger sa tenue. Elle est soit libre à base de poudres et de pigments, ou compacte avec ajout de corps gras servant de liant.

Autres produits

Mascaras, rouges à lèvres et blushs complètent la correction du teint en attirant le regard vers les yeux, la bouche et/ou en donnant un effet « bonne mine ». Des crayons adaptés aident à redessiner certains contours, par exemple en cas de sourcils clairsemés ou inexistants suite à une chimiothérapie alopéciante.

Matériel

Les éponges s’utilisent avec les fonds de teint compacts et créent un effet flouteur. Choisir des pinceaux fins pour des corrections localisées et des gros pour appliquer les poudres. Le matériel s’entretient en le lavant à l’eau et au savon, puis en le changeant régulièrement.

Application

Préparer la peau

« Le maquillage ne peut se faire que sur une peau parfaitement nettoyée et hydratée », insiste Camille Joubert, préparatrice spécialisée en dermo-cosmétique à Marseille (13). Le démaquillage quotidien, qui doit être doux et soigneux, avec produits adaptés au type de peau et aux préférences (mousses, lotions, laits…), limite la superposition des produits et l’effet occlusif. L’hydratation s’avère souvent indispensable sur les peaux lésées ; elle permet d’éviter que les pigments n’« accrochent » sur les lésions et de prolonger la tenue du maquillage.

Neutraliser

Procéder à la manière d’un peintre : sur chaque lésion à camoufler, appliquer la couleur complémentaire correspondante, de façon à obtenir une teinte neutre grisée.

Teinter

• Le choix de la couleur : la même que celle de la peau. Faire un essai à la lumière du jour sur la mâchoire ou à la base du pouce, le dos de la main étant souvent plus pigmenté que le visage. Il faut parfois effectuer des mélanges ou jongler avec plusieurs teintes, notamment en cas de peaux foncées ou de troubles pigmentaires.

• Pour camoufler des marques inflammatoires (rougeurs de psoriasis), préférer une teinte dorée plutôt que rosée, la correction sera plus efficace et l’aspect « bronzé » plus flatteur. En cas de teint terne ou de marques de fatigue (oncologie…), privilégier les teintes rosées.

• En raison de la richesse en pigments, chauffer le produit entre les doigts avant de l’appliquer, ou le diluer dans un peu de base hydratante. Ne pas oublier la racine des cheveux et le cou pour un résultat plus naturel. L’application des correcteurs de teint peut se faire simplement au doigt, en tapotant légèrement.

• Fixer le tout à l’aide d’une poudre et d’un gros pinceau.

Sourcils

Préférer les teintes douces (pas de crayon noir) et appliquer par petits traits ; poudrer la zone avant et après pour fixer les pigments.

Lèvres

En cas de sécheresse labiale, voire de chéilite (voir lexique page précédente), hydrater les lèvres dans un premier temps. En plus des crayons, les pinceaux correcteurs beiges redessinent les contours et masquent les éventuelles imperfections autour de la bouche.

Comment se former ?

Outre des formations en esthétique ou dermocosmétique (Botticelli…), le certificat de qualification professionnelle (CQP) de dermo-cosmétique pharmaceutique (voir Porphyre n° 483, juin 2012) permet de « développer des compétences dans tous les domaines de la dermo-cosmétique, dont le maquillage », explique Camille Joubert. Une valeur ajoutée pour les patients et les officines souhaitant développer le maquillage médical. Sinon, compter sur des personnes motivées prêtes à se former aux gammes. Les laboratoires proposent de la documentation, voire de courtes formations, les solliciter.

Comment aborder le sujet ?

La demande peut être spontanée mais cela reste rare : « C’est à nous de repérer le mal-être du patient et de lui montrer que des solutions existent », suggère Camille Joubert. Ce repérage se fait surtout lors de la délivrance des ordonnances dédiées à la pathologie disgracieuse.

Le MMC est peu sollicité par les hommes, alors que « le regard des autres peut être difficile à soutenir chez certains messieurs, notamment en milieu professionnel », explique le Dr Mallet. Préférer alors le terme « camouflage », plus neutre. Orienter les clients gênés ou pressés vers les sites des laboratoires (voir tableau), qui proposent vidéos et conseils : www.eau-thermale-avene.fr, www.laroche-posay.fr, www.vichy.fr, http://covermarkfrance.com, www.eyecare.fr

Avec l’aimable participation du Dr Stéphanie Mallet, dermatologue, et de Francine Scannapieco, aide-soignante spécialisée à l’hôpital de la Timone à Marseille (13) ; Camille Joubert, préparatrice spécialisée en dermo-cosmétique à Marseille ; Joëlle Nonni, responsable des ateliers maquillage de la station thermale Avène (34).

Le cercle chromatique

est une roue (voir dessin ci-dessus) où se positionnent des couleurs correspondant aux trois degrés de base de l’univers chromatique : les couleurs primaires avec lesquelles on obtient les couleurs de la nature, le cyan (bleu), le magenta (rouge) et le jaune ; les secondaires (vert, violet et orangé) ; les tertiaires, qui sont un mariage entre une couleur primaire et sa complémentaire (couleurs opposées sur le cercle, tels le jaune et le violet).

Source : www.cercle-chromatique.com

Des professionnels formés

→ À l’hôpital. Des services de dermatologie proposent des ateliers de MMC. « Le patient apprend à camoufler ses lésions et à mieux gérer son image, explique Francine Scannapieco, aide-soignante spécialisée à Marseille (13). Trois séances d’éducation thérapeutiques sont prévues, avec l’intervention d’une psychologue pour, une fois l’image réparée, aider le patient à s’accepter et à mieux vivre au quotidien ».

→ En station thermale. Depuis dix-huit ans, Joëlle Nonni s’occupe de patients atteints de dermatoses affichantes à Avène (34) : « Les patients retrouvent confiance en eux ». À l’issue des séances, « le recours à des photos avant/après est très utile pour motiver la personne et la valoriser » (voir photos). L’eau thermale, utilisée pour traiter la dermatose, « fixe le maquillage avec une fine brumisation à 20 cm du visage ».

Lexique

Mélasma : hyperpigmentation bénigne sous forme de taches au niveau des zones exposées au soleil. Chez la femme enceinte, on parle plus spécifiquement de masque de grossesse.

→ Angiome : terme générique regroupant l’ensemble des anomalies localisées des vaisseaux.

→ Chéilite : inflammation des lèvres et/ou zone vermillon de la peau autour de la muqueuse labiale.

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