Des hauts et débat sur la prévoyance et les soins de santé - Porphyre n° 517 du 31/10/2015 - Revues
 
Porphyre n° 517 du 31/10/2015
 

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Actus

Auteur(s) : Fabienne Rizos-Vignal

Alors que les partenaires sociaux viennent de conclure des améliorations des garanties, la stabilité du régime de prévoyance en pharmacie reste menacée. Les salariés non-cadres sont les premiers touchés. Explications.

Le régime conventionnel obligatoire de prévoyance et frais de soins de santé des salariés non-cadres de l’officine est sur la sellette. Arrivé à échéance, le contrat collectif des non-cadres – salariés se situant en dessous du coefficient 330 – ne peut plus être d’office confié à Klesia Prévoyance. La raison ? La suppression des clauses de désignation, jugées non conformes à la Constitution en juin 2013.

Un bref retour en arrière permet de mieux comprendre les enjeux et les conséquences de la disparition de ces clauses de désignation.

Acte 1. Le régime de branche dans la tourmente avec la suppression de la désignation

Auparavant autorisées, ces clauses permettaient aux partenaires sociaux d’imposer un organisme assureur à l’ensemble d’une branche. Ce mécanisme était un gage de stabilité puisque la prévoyance (maladies, accidents du travail, etc.) et les frais de soins de santé (consultations, médicaments, soins dentaires, optique, etc.) étaient gérés par un organisme conventionnellement désigné par les partenaires sociaux. Le caractère collectif et obligatoire conférait une grande sécurité grâce à la gestion paritaire et à la mutualisation des risques, qui s’appuyait sur un large volume de cotisants. En remettant en cause ce système, le Conseil constitutionnel libéralise et ouvre la porte à la concurrence. Toute entreprise officinale a ainsi la possibilité, à échéance du contrat avec Klesia, de souscrire auprès d’un assureur de son choix. À condition qu’il s’aligne sur les garanties et les taux prévus dans la convention collective.

Ce libre choix ne changerait donc rien à la couverture de l’assuré. « Ce n’est pas si simple », mettent en garde les syndicats. « Dans le cadre d’une mutualisation limitée aux seules entreprises souscriptrices, il n’est pas exclu que le montant des cotisations ou le niveau des prestations annoncé ne puisse être maintenu par cet assureur », explique Pierre Fernandez, directeur général de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), syndicat de titulaires. En clair, cotisations et prestations seraient sans garantie de stabilité. Principale conséquence ? En cas de défaillance de l’assureur ou de résiliation des contrats à son initiative, c’est l’employeur qui devrait financer le coût des prestations au niveau prévu par la convention. Un risque majeur pouvant mettre économiquement en péril l’entreprise. Pour Olivier Clarhaut, secrétaire fédéral de FO-Pharmacie, « on ouvre une boîte de Pandore préjudiciable aux intérêts des salariés et des entreprises ». Sans exception, cette libéralisation touche également les salariés cadres et assimilés de l’officine. Mais avec un sursis (voir encadré) et jusqu’au 31 décembre 2017, Klesia Prevoyance reste l’unique assureur désigné pour les salariés cadres et assimilés-cadres.

Acte 2. Un comité de pilotage qui divise les partenaires sociaux

« Le contrat collectif des non-cadres est tombé. Pour maintenir l’information des partenaires sociaux sur l’évolution du régime, Klesia Prévoyance a mis en place un comité de pilotage », déclare Bernard Giroud, responsable des branches professionnelles et grands comptes. Créé à l’été 2015, ce comité dépend du conseil d’administration de Klesia et réunit les partenaires sociaux, à l’exception de la CFDT et de la FSPF qui contestent sa légitimité. « Klesia n’a pas été mis en concurrence avec d’autres assureurs comme l’exige la réglementation. Dès lors, les partenaires sociaux ne sont pas habilités à siéger dans un comité interne à cet assureur », fait remarquer Pierre Fernandez. Alors que la suppression de la désignation met fin à l’exclusivité d’un assureur, Klesia ne tenterait-il pas ainsi de prévenir toute action concurrentielle des partenaires sociaux en les instrumentalisant ? « À défaut de désignation, nous souhaitons conclure un accord de branche permettant aux partenaires sociaux de recommander officiellement un ou plusieurs organismes assureurs sur la base d’un cahier des charges et après un appel d’offres, conformément à la loi. Notre préoccupation est de trouver des solutions juridiquement solides pour préserver le régime collectif et mutualisé de prévoyance », indique Philippe Denry, président de la commission relations sociales et formation professionnelle de la FSPF.

Acte 3. De meilleures garanties depuis le 1er octobre

Dans ce condiv d’incertitude, les partenaires sociaux se sont au moins mis d’accord pour améliorer les prestations des salariés cadres et non-cadres. Deux avenants signés le 24 septembre modifient la convention collective, avec notamment un renforcement de la prise en charge des frais d’optique et d’audioprothèses, un forfait annuel de 40 € pour les médicaments non remboursables. Des dispositions entrées en vigueur le 1er octobre, sans hausse des cotisations. Pour Daniel Burlet, en charge des relations sociales à l’Union des syndicats des pharmaciens d’officine (USPO), « il était important d’améliorer les garanties, d’autant que la branche en a les moyens grâce aux réserves engrangées ». Ces dernières – plusieurs dizaines de millions d’euros – appartiennent aux régimes de branche (non-cadres, cadres et assimilés). En améliorant les garanties, les partenaires sociaux tiennent encore un peu les cordons de la bourse. Car le risque majeur qui inquiète la branche est le siphonnage des réserves.

Repères

→ La désignation de Klesia Prévoyance pour le régime de prévoyance des salariés cadres et assimilés résulte d’un accord de branche conclu le 8 décembre 2011, avec effet au 1er janvier 2013. Cet accord désigne Klesia pour cinq ans, soit jusqu’au 31 décembre 2017.

→ La désignation de Klesia Prévoyance pour le régime de prévoyance des non-cadres découle d’un accord de branche conclu le 18 décembre 2000, avec effet au 1er janvier 2001. La CFDT et la FSPF estiment que cette désignation a été tacitement reconduite en 2006, puis en 2011, conformément aux dispositions de la convention collective, ce qui porte son échéance au 31 décembre 2015. Les autres syndicats et Klesia affirment que la désignation est tombée en juin 2013 avec la décision du Conseil constitutionnel (n° 2013-672 DC du 13 juin 2013).

Qu’est-ce qui change pour vous ?

• « Dois-je m’occuper de mon contrat de prévoyance ? »

Non. Votre employeur a l’obligation de souscrire un contrat de prévoyance et de frais de santé pour tous ses collaborateurs, y?compris les apprentis.

• « Mon patron peut-il m’assurer auprès d’un autre organisme que Klesia Prévoyance ? »

Si vous êtes non-cadre, votre employeur peut choisir un autre assureur après résiliation de son contrat avec Klesia. Si vous êtes préparateur assimilé cadre, il pourra le faire dans deux ans.

• « Et si l’employeur ne fait rien ? »

Vous continuez d’être couvert par Klesia par tacite reconduction du contrat souscrit par l’officine.

• « Puis-je demander à mon patron de résilier mon contrat car j’ai de meilleures prestations avec la complémentaire de mon mari ? »

Non, il n’existe pas de dérogation à l’obligation d’affilier les salariés de l’entreprise au contrat de prévoyance.

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


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