Les dérivés nitrés et apparentés - Porphyre n° 514 du 01/07/2015 - Revues
 
Porphyre n° 514 du 01/07/2015
 

SAVOIR

Le point sur…

Auteur(s) : Nathalie Belin

Leur action vasodilatatrice est utilisée dans le traitement curatif et préventif de l’angor. Limiter le risque d’hypotension orthostatique, respecter l’instauration posologique progressive et éviter tout arrêt brutal sont à conseiller aux patients.

Comment agissent-ils ?

Les dérivés nitrés sont la trinitrine, le mononitrate et le dinitrate d’isosorbide. Leurs apparentés sont la molsidomine et le nicorandil.

Tous sont des prodrogues donneurs de monoxyde d’azote ou oxyde nitrique (NO), médiateur produit de façon physiologique par les cellules endothéliales des vaisseaux notamment. Le NO est à l’origine d’un effet relaxant des muscles lisses.

Vasodilatation

Une fois produit, le monoxyde d’azote active une enzyme, la guanylate-cyclase, ce qui entraîne la fabrication intracellulaire de GMP cyclique (messager intracellulaire) et la diminution du calcium intracellulaire, d’où un relâchement des cellules musculaires lisses, et donc une vasodilatation. Cet effet vasodilatateur s’exerce préférentiellement sur les veines par rapport aux artères, et également au niveau des coronaires et à un degré moindre aux niveaux intestinal et bronchique. À savoir : le NO entraîne une relaxation des fibres vasculaires lisses des corps caverneux lors de l’érection et des vaisseaux cérébraux lors de la migraine. D’où la contre-indication avec les facilitateurs de l’érection (voir Interactions).

Baisse du travail cardiaque

L’action vasodilatatrice diminue la précharge et la postcharge (voir Lexique), donc le travail cardiaque. Le débit sanguin coronaire augmente également par effet vasodilatateur direct.

Quelles sont leurs indications ?

Dérivés nitrés et apparentés sont principalement indiqués dans le traitement curatif et préventif de la crise d’angor. Ils ont aussi une indication dans l’insuffisance cardiaque chronique mais, en pratique, ils s’avèrent peu efficaces.

Ont-ils des particularités ?

Formes galéniques

• Trinitrine : son hydrolyse rapide par les enzymes hépatiques en métabolites inactifs limite sa biodisponibilité. Pour éviter cela, elle est utilisée :

→ par voie sublinguale dans le traitement de la crise d’angor, avec un pic plasmatique survenant dans les quatre minutes après administration ;

→ par voie transdermique dans le traitement de fond de la crise d’angor afin d’assurer une absorption progressive de la trinitrine.

• Isosorbide : le dinitrate d’isosorbide existe en solution sublinguale (Isocard), en comprimés (Risordan) ou en gélules à libération prolongée (Langoran LP). Il subit aussi un effet de premier passage hépatique important mais il est transformé en mononitrate d’isosorbide, un métabolite actif disponible sous forme de gélules à libération prolongée (Monicor LP).

• Molsidomine et nicorandil : ils ont une bonne biodisponibilité en comprimés.

Tolérance et dépendance

• Diminution des effets : en continu, les dérivés nitrés induisent en quelques heures un phénomène de tolérance avec diminution très rapide de leurs effets, quelle que soit la voie d’administration. D’où la nécessité d’arrêter le traitement de huit à douze heures par jour pour « restaurer » la réponse thérapeutique et limiter la perte d’efficacité.

• Ils exposent à un « effet rebond » en cas d’arrêt brutal du traitement.

Les apparentés ne sont pas concernés par ces phénomènes.

Quels effets indésirables ?

Communs

• Les plus fréquents sont liés à la vasodilatation : il s’agit de céphalées, notamment en début, qui diminuent généralement avec le temps ou en baissant les doses, et de bouffées vasomotrices avec rougeur de la face, du cou et du thorax. Nausées et vomissements sont rapportés.

• De fréquence variable : une hypotension orthostatique avec sensations de vertiges, voire malaises, souvent avec tachycardie réflexe.

Nicorandil

De rares ulcérations gastro-intestinales, muqueuses et cutanées peuvent survenir, mais imposent l’arrêt définitif du traitement. Elles sont favorisées par les doses thérapeutiques les plus élevées et pourraient l’être aussi par la prescription concomitante de glucocorticoïdes.

Quelles sont les interactions ?

• Association contre-indiquée : les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (avanafil, sildénafil, tadalafil, vardénafil) car il existe un risque d’hypotension importante (effet synergique) pouvant aggraver l’état d’ischémie myocardique, et causer notamment un infarctus du myocarde.

• Prudence : avec les produits majorant le risque d’hypotension tels qu’alcool, antihypertenseurs, anxiolytiques, hypnotiques, antidépresseurs tricycliques, agonistes dopaminergiques, lévodopa, alpha-bloquant à visée urologique.

Il est illogique d’associer dérivé nitré et apparenté car leur mécanisme d’action est similaire.

Comment les utiliser ?

Dispositifs transdermiques

• Application : sur peau sèche et propre peu pileuse (côté du thorax). Presser dix secondes avec la paume. Changer d’endroit chaque jour pour éviter une irritation. Ne jamais le découper.

• Quand ? Le matin par exemple, et l’ôter le soir pour respecter un intervalle libre de huit heures. Le renouveler chaque jour à peu près à la même heure.

Voie sublinguale

La pulvérisation ou la prise des comprimés et de la solution se fait sous la langue pour que le produit passe plus rapidement dans le sang.

Que dire aux patients ?

À propos du traitement

• Respecter l’instauration progressive de la posologie limite les effets indésirables.

• Pour éviter le risque d’hypotension orthostatique, se lever en deux temps.

• En raison d’un phénomène de dépendance, ne jamais interrompre brutalement le traitement (effet rebond en cas d’arrêt subit).

À propos des patchs

• Éliminer : un patch usagé contient encore du principe actif. Après utilisation, le retirer et le replier sur lui-même, côté adhésif à l’intérieur, et le mettre hors de portée des enfants. Ramener les dispositifs employés à l’officine pour une élimination sécurisée.

• Avertir : prévenir systématiquement du port du dispositif transdermique tout professionnel de santé et lors de la réalisation d’une IRM en raison du risque de brûlures. Certains dispositifs renferment un feuillet métallique comme l’aluminium, conducteur électrique qui peut propager des courants électriques émis par l’IRM.

• Éviter les grosses sources de chaleur qui peuvent modifier la vitesse et la dose délivrée du principe actif à travers la peau : bouillotte sur le patch, bain chaud, exposition solaire longue…

Lexique

→ Précharge : c’est la pression qui s’exerce sur le ventricule en fin de diastole (remplissage). Elle dépend du retour veineux (notamment du tonus veineux) et de la contraction des oreillettes qui expulsent le sang vers le ventricule.

→ Postcharge : c’est la force d’opposition qui s’applique au ventricule lorsqu’il commence à se contracter pour éjecter le sang. Elle est fonction notamment des résistances vasculaires périphériques des artères.

Lexique

→ Crise d’angor : c’est la manifestation clinique d’une ischémie myocardique transitoire liée à un déséquilibre entre les apports et les besoins en oxygène du cœur, généralement au cours d’un effort. La douleur en arrière du sternum (striction, brûlures, pesanteur, blocage respiratoire) peut irradier dans la mâchoire inférieure et les bras.

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