“Je voudrais du « naturel » pour les bouffées de chaleur” - Porphyre n° 513 du 03/06/2015 - Revues
 
Porphyre n° 513 du 03/06/2015
 

EXERCER

au comptoir

Auteur(s) : Nathalie Belin

1 Je questionne

Préciser la demande

« Que ressentez-vous exactement ? »,

« Avez-vous aussi des troubles du sommeil, une sécheresse vaginale ? » et « Êtes-vous irritable ? » évaluent les symptômes.

Rechercher certains critères

« Êtes-vous ou avez-vous été suivie pour un cancer du sein, de l’utérus ou de l’ovaire ? » repère des contre-indications aux phytohormones. « Avez-vous déjà utilisé des compléments alimentaires pour vous soulager ? » cible le conseil.

2 J’évalue

Les bouffées de chaleur (voir encadré à droite) préoccupent grandement les femmes en période de ménopause. L’instauration d’un traitement hormonal est actuellement proposée quand les symptômes altèrent la qualité de vie de manière importante. Lorsqu’il n’est pas souhaité ou recommandé (crainte des effets indésirables potentiels, symptômes non invalidants) ou s’il est contre-indiqué (antécédent de cancer hormono-dépendant : sein, utérus, ovaire), des compléments alimentaires à base de plantes peuvent être proposés.

Une consultation médicale est nécessaire en cas de troubles invalidants, de signes de dépression (lassitude, désintérêt…) ou d’antécédents familiaux d’ostéoporose car il existe des traitements adaptés.

3 Je passe en revue

Les « phytohormones »

Certaines plantes possèdent des effets « hormone-like » qui aident à limiter les bouffées de chaleur et les troubles de l’humeur. Par prudence, toutes sont contre-indiquées en cas d’antécédent de cancer hormono-dépendant et, dans tous les cas, non utilisées sans l’avis du cancérologue.

• Phyto-progestagènes. Achillée millefeuille, gattilier et alchémille sont employés de longue date dans les règles irrégulières et douloureuses. Ces plantes peuvent être utiles en pré-ménopause, lorsque les estrogènes en excès sont à l’origine d’un syndrome prémenstruel marqué. Elles peuvent aussi limiter les premières bouffées de chaleur.

• Phyto-estrogènes. Molécules végétales de structure chimique proche de l’estradiol naturel, les phyto-estrogènes sont capables de se fixer sur les récepteurs aux estrogènes. Leur action n’est toutefois pas strictement identique à celle de l’estradiol et reste bien moins puissante que celle des estrogènes naturels ou de synthèse. Ils peuvent avoir un effet bénéfique sur les bouffées de chaleur et les troubles de l’humeur mais leur action sur la sécheresse vaginale ou sur l’ostéoporose n’est pas prouvée. On trouve des phyto-estrogènes dans les graines de lin (les lignanes), le trèfle rouge, le fenouil, le kudzu, plante originaire d’Asie du Sud, la luzerne (ou alfalfa). Les phyto-estrogènes les plus connus et les plus puissants sont les isoflavones, présents en grande quantité dans le soja et le houblon.

→ Isoflavones de soja. Ils ont montré leur efficacité pour diminuer les bouffées de chaleur dans de nombreuses études cliniques. La daidzéine notamment a une activité estrogénique relativement puissante par rapport à d’autres phyto-estrogènes.

→ Houblon. Quelques études montrent l’efficacité des cônes de houblon pour soulager les bouffées de chaleur. On y recourt aussi traditionnellement pour lutter contre la nervosité et les troubles du sommeil.

À savoir : l’action des phyto-estrogènes, notamment des isoflavones, est très variable d’une femme à l’autre car ils ne sont actifs qu’après métabolisation dans l’organisme sous forme « aglycone ». Cette transformation dépend d’une enzyme produite par la flore bactérienne intestinale et tout le monde n’a pas la même capacité à réaliser cette mutation.

→ Précaution. Par prudence, ne pas dépasser 1 mg/kg/jour d’isoflavones sous forme aglycone et ne pas cumuler diverses sources de phyto-estrogènes : ne pas associer plusieurs références entre elles, ne pas consommer de manière exagérée des aliments à base de soja ou dérivés (tofu…). Les phyto-estrogènes pourraient diminuer l’absorption de la lévothyroxine ; un contrôle de la TSH peut être nécessaire.

Potentiellement estrogéniques

• Sauge. Elle est utilisée de longue date contre la transpiration excessive et les sueurs nocturnes de la ménopause, mais peu d’études attestent son action. Si elle semble avoir une activité estrogénique, les substances à l’origine de cette action ne sont pas identifiées. Elle est déconseillée en cas d’antécédents de convulsion.

• Actée à grappe noire (Cimicifuga racemosa). L’OMS considère comme « cliniquement prouvé » son usage dans le traitement des bouffées de chaleur, de la transpiration excessive, des troubles du sommeil et de l’irritablité. Ses propriétés estrogéniques sont remises en question mais, par prudence, ne pas l’utiliser en cas d’antécédent de cancer hormono-dépendant.

• Racines d’igname sauvage (ou yam). Elles sont proposées contre les bouffées de chaleur mais aucune étude clinique ne le confirme.

Sans activité hormonale

• Dans les bouffées de chaleur et l’humeur

→ Les oméga 3 ont montré leur efficacité.

→ Le safran a lui aussi démontré son intérêt en tant qu’antidépresseur léger et pour réduire les troubles de l’humeur et potentiellement les bouffées de chaleur. Les deux agiraient via la sérotonine, neuromédiateur de l’équilibre psychique et qui aide à réguler la température corporelle.

• Autres actions

→ Vitamine B6 : régule l’activité hormonale (allégation reconnue).

→ Vitamine D : contribue au maintien du capital osseux.

→ Zinc, sélénium, huiles d’onagre et de bourrache : effet au niveau de la peau et sur la sécheresse vaginale.

→ Canneberge : aide à limiter le risque d’infections urinaires.

→ Prébiotiques (inuline de chicorée…) et probiotiques visent à équilibrer la flore microbienne et à booster l’action des phyto-estrogènes.

→ La reine-des-prés améliore le confort articulaire. En raison de la présence de dérivés salicylés, ne pas employer en cas d’allergie ou d’ulcère gastroduodénal.

→ Mélisse, valériane, passiflore et L-tryptophane sont utilisés pour leur action relaxante et calmante et pour favoriser le sommeil.

→ Bioflavonoïdes (extraits de citrus ou d’orange amère), cassis, polyphénols de raisin sont actifs sur la circulation sanguine (et potentiellement les bouffées de chaleur) et veineuse.

4 Je choisis

Selon les troubles décrits

Si les bouffées de chaleur sont la plainte principale, opter pour un complément alimentaire à base d’isoflavones de soja. Sinon, pour une association d’actifs selon les autres troubles, irritabilité et sommeil.

J’adapte

• Selon les antécédents médicaux. Pas de plantes à activité hormonale en cas de cancer ou d’antécédent de cancer du sein, de l’ovaire ou de l’utérus sans avis préalable du médecin oncologue.

• En cas d’échec : s’il s’agit d’isoflavones de soja, proposer un dosage plus fort. Sinon, opter pour d’autres composants.

5 J’explique

Ces produits peuvent atténuer certains symptômes, mais il ne faut pas s’attendre à leur disparition. Ils peuvent aider à passer un cap le temps que l’organisme retrouve de lui-même un équilibre. Ils sont moins efficaces qu’un traitement hormonal. Leur action variant d’une personne à l’autre, en tester plusieurs.

6 Je conseille

Utilisation

• Des cures de trois à quatre mois, renouvelables, avec des pauses, lors de périodes d’accalmie des symptômes.

• Trois à quatre semaines de prise peuvent être nécessaires avant une amélioration. En l’absence d’efficacité après deux à trois mois, essayer une autre référence.

Mesures hygiéno-diététiques

• Mieux gérer les bouffées de chaleur : éviter alcool, épices ou boissons chaudes qui les favorisent. Préférer les vêtements en fibres naturelles (coton…) qui laissent la peau respirer. Boire de l’eau fraîche pour réguler la température corporelle et garder à portée de main un brumisateur d’eau ou un éventail.

• Gérer l’irritabilité et le sommeil avec une activité physique régulière couplée à des exercices relaxants, tai-chi, yoga, qi gong…

• Adopter dès 45/50 ans de bons réflexes alimentaires pour limiter la prise de poids et le risque cardio-vasculaire et préserver son capital osseux.

Le condiv

La ménopause, étymologiquement « arrêt des règles », survient vers 50 ans, suite à l’arrêt progressif de la production des hormones ovariennes, estrogènes et progestérone. On est ménopausée quand on n’a pas eu de règles depuis un an.

→ En préménopause : la progestérone est produite en plus faible quantité, puis plus du tout, d’où une hyperestrogénie relative avec des cycles irréguliers, des règles parfois abondantes, un syndrome prémenstruel marqué (tension mammaire, douleurs pelviennes, sensation de gonflement…). Des bouffées de chaleur peuvent être présentes. La préménopause peut durer plusieurs mois ou années.

→ À la ménopause : la sécrétion des estrogènes finit par s’arrêter, d’où les bouffées de chaleur et d’autres symptômes liés à la carence estrogénique : troubles du sommeil et de l’humeur, irritabilité ; peau plus mince et sèche ; sécheresse vaginale, augmentation de la fréquence des infections génitales et urinaires par modification de la flore microbienne locale, qui dépend du climat hormonal ; prise de poids avec répartition des graisses au niveau du ventre et non plus des hanches et des cuisses ; perte osseuse accélérée (risque d’ostéoporose).

→ En post-ménopause : après quelques mois ou années, l’organisme s’adapte à ce climat hormonal. Les bouffées de chaleur et les troubles de l’humeur cessent.

Bouffées de chaleur

→ Chaque femme vit la ménopause de manière unique. Certaines ont peu ou pas de troubles, d’autres sont gênées en particulier par des bouffées de chaleur. Imprévisibles ou parfois favorisées par le stress ou les émotions, elles peuvent devenir un handicap social et constituent souvent la principale préoccupation des femmes en période de ménopause. Parfois très fréquentes (jusqu’à 20 à 30 par jour), elles sont volontiers nocturnes et se traduisent par une sensation de chaleur intense au niveau du visage, du cou et du thorax. Elles durent de quelques secondes à quelques minutes et s’achèvent par des sueurs froides. La nuit, elles s’accompagnent de réveils, et donc d’insomnie épuisante.

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