“Je suis épuisé” - Porphyre n° 508 du 29/11/2014 - Revues
 
Porphyre n° 508 du 29/11/2014
 

Exercer

Au comptoir

Auteur(s) : Nathalie Belin

1 Je questionne

Précisez la demande

« Depuis quand vous sentez-vous fatigué ? », « Êtes-vous surmené en ce moment ? » ou « Vos habitudes de vie ont-elles changé ? » « Avez-vous des douleurs articulaires, une perte de poids non expliquée, des malaises ? »… Selon le cas, « Êtes-vous enceinte ? » ou « Quel âge a l’enfant ? »

Recherchez certains critères

« Avez-vous été enrhumé/grippé récemment ? », « Suivez-vous un régime alimentaire particulier ? », « Prenez-vous des médicaments ? » et, si oui, « Votre traitement a-t-il été modifié ? »

2 J’évalue

Une fatigue récente, quelques jours à quelques semaines, tant qu’elle reste isolée (sans signes d’alerte associés), est du ressort de l’officine. La discussion avec le patient permet le plus souvent de trouver une explication : surmenage physique ou psychologique (stress…), cause infectieuse, convalescence, régime restrictif…

Un avis médical est impératif si d’autres symptômes sont présents (douleurs, fièvre modérée mais constante, amaigrissement inexpliqué, perte d’appétit, déprime ou idées noires…) ou si la fatigue survient sur un terrain particulier (cancer, maladie auto-immune…).

3 Je passe en revue

Vitamines et minéraux

S’il n’existe pas dans notre société de véritables carences en vitamines et minéraux (hors certaines pathologies particulières), il peut y avoir à certains moments des déficits d’apport qui favorisent et entretiennent la fatigue (voir Condiv). Les complexes multivitamines apportent tout ou une bonne partie des doses journalières recommandées (valeurs arbitraires moyennes correspondant aux besoins d’une population), voire sont supérieurs à ces doses pour certains composants. Ils visent à compléter ponctuellement une alimentation par ailleurs équilibrée.

→ Vitamines. Celles du groupe B, présentes systématiquement dans tous les complexes multivitamines, jouent un rôle essentiel dans la production de l’énergie et la transmission de l’influx nerveux.

La vitamine C, en quantité importante dans les fruits de l’acérola, de l’églantier, du cynorrhodon, est antioxydante ; elle participe notamment au bon fonctionnement du système immunitaire. En revanche, elle n’a pas d’activité stimulante proprement dite.

La vitamine D est nécessaire au métabolisme du calcium et du phosphore, qui interviennent dans la croissance osseuse.

→ Oligo-éléments. Le fer entre dans la composition de l’hémoglobine des globules rouges qui transportent l’oxygène, indispensable à la production d’énergie. Un manque de fer est à l’origine d’une anémie, dont les premiers signes sont la fatigue, une pâleur et une diminution des performances intellectuelles. Une insuffisance d’apport peut concerner notamment les femmes enceintes ou celles ayant des règles abondantes et les enfants en période de croissance, jusqu’à l’âge de 4 ans notamment.

Le sélénium et le zinc stimulent les défenses immunitaires de l’organisme.

→ Minéraux. Le calcium est indispensable à la minéralisation des os et des dents et à la transmission neuromusculaire. Les déficits d’apport touchent principalement les enfants et adolescents.

Le magnésium est indispensable à la production d’énergie, à la transmission de l’influx nerveux et à la relaxation musculaire. Une fatigue accompagnée de nervosité, troubles du sommeil, crampes ou fourmillements dans les doigts ou les pieds évoque un déficit en magnésium. Une insuffisance d’apport est relativement fréquente chez les personnes faisant attention à leur ligne car les aliments riches en magnésium sont jugés trop caloriques : fruits et légumes secs, amandes, noisettes, noix, chocolat noir, céréales complètes…

Précautions : certaines vitamines et certains minéraux (vitamine C, magnésium…) sont à éviter en cas de problèmes rénaux (calculs, insuffisance rénale). À condition de ne pas cumuler les références et de respecter les durées préconisées de traitement, il n’y a pas de risque d’excès d’apport en nutriments.

Plantes adaptogènes

Elles facilitent l’adaptation de l’organisme aux situations de stress intellectuel ou physique et favorisent la récupération.

→ Le ginseng et l’éleuthérocoque sont des toniques généraux qui améliorent les performances physiques et intellectuelles et dont l’usage est reconnu par l’OMS « dans les états de fatigue physique et mentale et chez les personnes convalescentes ». Des études cliniques ont montré que le ginseng permettait une meilleure résistance aux affections respiratoires hivernales.

→ L’éleuthérocoque, la rhodiole et le schisandra sont traditionnellement utilisés en médecine chinoise pour lutter contre le stress et la fatigue.

Précautions : le ginseng et l’éleuthérocoque sont habituellement déconseillés en cas de pathologies cardiaques ou sous anticoagulants. Des troubles du sommeil sont possibles à doses élevées. Ils ne sont pas recommandées au cours de la grossesse et chez les enfants ou adolescents (moins de 15 ans, voire 18 ans pour le ginseng).

Toniques et psychostimulants

Ils procurent un effet « coup de fouet » immédiat qui permet de tenir le coup dans les états de fatigue importante.

→ Les plantes riches en caféine (café, thé, kola, guarana, maté…) ont des effets stimulants et excitants connus et employés de longe date.

→ Les psychostimulants comme la sulbutiamine (Arcalion) ou l’acide acétylaminosuccinique (Cogitum) visent à activer le métabolisme neuronal, mais n’ont pas réellement fait la preuve de leur efficacité.

Précautions : l’excès de caféine peut provoquer nervosité, agitation, palpitations, anxiété, troubles du sommeil. La sulbutiamine peut induire agitation, tremblements et céphalées. Ces composés s’utilisent avec prudence chez les personnes souffrant d’insomnie et de troubles anxieux. Caféine et psychostimulants ne traitent en aucun cas la cause de la fatigue.

Acides aminés

Dynamisan, Revitalose, Sargenor, Stimol… sont à la base de la synthèse des protéines qui participent au renouvellement et au fonctionnement de nombreux tissus (musculaires, osseux…). Ils sont proposés chez les adolescents pour pallier des déficits d’apport ou dans les états de fatigue suite à un amaigrissement important ou à un traumatisme physique (intervention chirurgicale…).

Précautions : ils s’emploient en cure courte (hors recommandation médicale particulière).

Autres

→ Coenzyme Q10 (CoQ10 ou ubiquinone) : substance naturellement présente dans l’organisme et nécessaire à la production d’énergie, mais aucune allégation santé n’a été reconnue pour le CoQ10.

→ Taurine : acide aminé ayant des propriétés stimulantes. Pas d’allégations retenues non plus.

→ Oméga 3 des huiles de poissons (EPA et DHA) : constituants essentiels des membranes cellulaires, celles du cerveau et des globules rouges qui transportent l’oxygène indispensable à la production d’énergie. Parmi les allégations retenues : « Contribue au maintien des fonctions normales du cerveau ».

→ Gelée royale et propolis : traditionnellement utilisées pour renforcer les défenses immunitaires. La gelée royale est riche en vitamines B, minéraux, acides aminés et acides gras essentiels.

→ Probiotiques (ferments lactiques) : certaines souches sont proposées pour renforcer les défenses immunitaires, sans preuve réelle d’efficacité.

4 Je choisis

Selon l’origine de la fatigue

→ Régime ou alimentation déséquilibrée (étudiants…) : vitamines et minéraux.

→ Stress, fatigue physique et intellectuelle, convalescence (grippe, mononucléose infectieuse…) : vitamines et minéraux, associés au ginseng notamment lorsque la fatigue est grande ou se prolonge (surmenage…).

→ Amaigrissement important, fatigue faisant suite à un traumatisme physique (intervention chirurgicale, fracture…) : acides aminés durant quatre semaines maximum en automédication.

→ Liée aux pathologies hivernales : gelée royale, propolis, probiotiques.

Selon le condiv

→ Besoin d’un effet « coup de fouet » : caféine ou psychostimulant sur une courte durée. Attention aux « boosteurs » combinant caféine et ginseng qui augmentent le risque d’insomnie, d’irritabilité et de palpitations.

→ Fatigue avec troubles du sommeil, anxiété, crampes : orienter vers un apport suffisant en magnésium (environ 300 mg par jour ; AJR : 375 mg par jour). La vitamine B6 associée au magnésium permet de favoriser son assimilation. Le magnésium d’origine marine mêle différents sels (oxyde, hydroxyde, chlorure, carbonate…), ce qui permettrait d’optimiser sa tolérance digestive.

→ Adolescentes ou femmes avec règles abondantes : privilégier des complexes vitaminiques bien dosés en fer (14 mg par jour soit 100 % des AJR).

→ Femmes enceintes ou projet de grossesse : ne préconiser que des produits spécifiquement adaptés après recommandation médicale (Oligobs, Gestarelle G, Elevit B9…), ayant notamment un dosage suffisant en certains nutriments (vitamines B9, D, fer, iode, calcium).

Selon l’âge

→ Enfants : orienter vers des gammes dédiées et vérifier les indications d’âge (Alvityl, Pédiakid…).

→ Adolescents, jeunes adultes : vitamines et minéraux et occasionnellement cure courte d’acides aminés (> 15 ans).

→ Personnes âgées : vitamines et minéraux. Acides aminés en cure courte occasionnelle.

5 J’explique

La fatigue est un phénomène normal qui joue le rôle de signal d’alarme. Stress, surmenage, infections hivernales ou convalescence sont des périodes où les besoins énergétiques de notre organisme augmentent. Le plus souvent, un sommeil suffisant, une activité physique régulière et une alimentation équilibrée permettent à l’organisme de faire face et de surmonter la fatigue en quelques jours.

Les « anti-fatigue » sont utiles pour passer un cap, mais ils ne se substituent en aucun cas à une alimentation équilibrée et à une bonne hygiène de vie.

L’absence d’amélioration de la fatigue après deux à trois semaines de « cure vitaminique » impose un avis médical.

6 Je conseille

Modalités de prise

→ Les « anti-fatigue » s’utilisent sur des périodes allant de quelques jours, pour les psychostimulants et ceux à base de caféine, à un à deux mois maximum pour les autres.

→ Attention à l’effet contrecoup des toniques et psychostimulants ; ils peuvent laisser une impression de fatigue à l’arrêt du traitement. Mieux vaut y recourir de façon ponctuelle ou par périodes de quatre ou cinq jours.

→ Les sels de zinc et de magnésium doivent être pris à distance de certains traitements : cyclines, quinolones…

→ Ne pas cumuler plusieurs compléments alimentaires pour éviter tout surdosage.

Hygiène de vie

→ L’arrêt de toute activité physique n’est pas la solution pour combattre la fatigue. Marcher, bouger un peu chaque jour ou trois quarts d’heure trois fois par semaine permet au contraire d’évacuer le stress et l’anxiété et d’améliorer le sommeil.

→ Se coucher à heure régulière et veiller à dormir suffisamment.

→ L’équilibre alimentaire ne se joue pas sur une journée. On peut manger sur le pouce (sandwich…) un ou deux jours de suite à condition de veiller ensuite à faire le plein de fruits et de légumes pour leurs vitamines et minéraux.

Attention aux régimes trop restrictifs, ne pas faire l’impasse sur les féculents (pain, riz, pâtes, légumineuses…), les carburants de l’énergie, ni sur les protéines (viande, poisson), les constituants des muscles. Penser aussi à bien s’hydrater. 

Le condiv

La fatigue est une sensation subjective qui nous indique que notre organisme a besoin de repos pour s’adapter à une situation ou à un mode de vie modifié.

Causes : elle est la plus souvent d’origine réactionnelle (liée au stress et au surmenage physique et/ou intellectuel) ou organique, deux situations au cours desquelles notre organisme doit fournir plus d’énergie et a donc des besoins accrus, notamment en vitamines, oligo-éléments et minéraux. La fatigue organique survient dans le cadre d’un état particulier (grossesse, période de croissance) ou fait suite à une pathologie infectieuse ou autre (cancer, maladies chroniques endocriniennes ou inflammatoires…). La fatigue peut être l’un des signes révélateurs de la maladie et/ou la conséquence de celle-ci (convalescence).

Autres causes : alimentation déséquilibrée ou insuffisante (régime, alimentation peu diversifiée des adolescents…), manque ou perturbation du sommeil (apnée du sommeil), médicaments (anti-H1, benzodiazépines, certains bêta-bloquants, opiacés, interférons…), dépression.

Conséquences : la fatigue limite les activités quotidiennes, ainsi que nos performances physiques et intellectuelles. Répétée et prolongée, elle peut être à l’origine d’un épuisement psychique et physique.

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