L’hépatite B - Porphyre n° 505 du 02/09/2014 - Revues
 
Porphyre n° 505 du 02/09/2014
 

Savoir

La patho

Auteur(s) : Nathalie Belin

Inflammation des cellules du foie avec destruction des hépatocytes, causée par le virus de l’hépatite B (VHB), cette hépatite se transmet principalement par le sang, par voie sexuelle et de la mère à l’enfant lors de la naissance. Elle peut être aiguë ou devenir chronique dans 2 à 10 % des cas. Chronique, elle est plus ou moins active et, même si le malade est en rémission, la maladie peut se réactiver. La gravité de l’hépatite B, souvent asymptomatique, est liée à sa chronicité, avec le développement d’une fibrose, sorte de cicatrice fibreuse des hépatocytes atteints. Elle peut alors évoluer vers la cirrhose et ses complications, vers un cancer et le décès.

La maladie

PHYSIOPATHOLOGIE

Virus

Le virus de l’hépatite B (VHB) est un virus enveloppé à ADN comprenant huit génotypes. Il est constitué notamment de trois systèmes antigéniques :

→ l’antigène de surface HBs (Ag HBs) porté par l’enveloppe virale. Sa présence affirme l’infection par le VHB ; à l’inverse, l’apparition des anticorps anti-HBs signe la « guérison » de la maladie, ou plutôt le contrôle par le système immunitaire de l’infection avec absence de multiplication virale (voir Évolution) ;

→ l’antigène HBe (Ag HBe) de la capside virale ou core est un marqueur indirect de la multiplication virale ;

→ l’antigène HBc n’est pas détectable dans le sérum, mais le système immunitaire est capable de synthétiser des anticorps anti-HBc (Ac anti-HBc). Contrairement aux Ac anti-HBs, ils ne sont pas protecteurs.

Tropisme hépatique

Après contamination, le virus se réplique dans les hépatocytes. La réaction immunitaire qui en découle induit une nécrose cellulaire par reconnaissance des antigènes du virus exprimés sur la membrane des hépatocytes, et une lyse cellulaire. Cette dernière entraîne une libération massive des transaminases, enzymes présentes essentiellement dans le foie, mais également muscles, rein et cœur. Il s’agit de l’ASAT (alanine aminotransférase) et de l’ALAT (aspartate aminotransférase), dont le taux augmente particulièrement en cas d’hépatite virale (valeurs normales : 10 à 40 UI/L).

Hépatite aiguë

À la phase aiguë de l’infection, la réaction immune de l’hôte aboutit à l’élimination des virus et des hépatocytes infectés. Dans 95 % des cas, l’hépatite aiguë évolue vers la guérison.

Parfois, la réaction immunitaire est suraiguë (1 % des formes symptomatiques), aboutissant à une hépatite fulminante avec nécrose hépatocytaire massive.

Sous l’influence de facteurs immunogénétiques ou du fait d’une immunodépression, une hépatite aiguë peut passer à la chronicité.

Hépatite chronique

→ Dans moins de 10 % des cas, l’hépatite B passe à la chronicité après l’épisode aigu, symptomatique ou non. C’est la persistance de l’Ag HBs - et l’absence d’Ac anti-HBs - six mois après l’hépatite aiguë qui signe la chronicité.

→ Le risque de chronicité est de 5 à 10 % chez l’adulte immunocompétent?; il peut atteindre 90 % des cas chez le nouveau-né d’une mère porteuse de l’Ag HBs et 30 à 100 % des sujets immunodéprimés.

→ La maladie chronique peut rester inactive dans environ un tiers des cas, mais un risque de réaction du virus est possible, notamment en cas de défenses immunitaires affaiblies.

Transmission

Le virus est présent dans la plupart des liquides biologiques : sang, sperme, sécrétions vaginales, et à des concentrations plus faibles dans la salive. La maladie est très contagieuse lors de l’infection aiguë. Tous les porteurs chroniques sont susceptibles de transmettre l’infection, même quand ils sont asymptomatiques.

Il existe quatre modes principaux de transmission du VHB :

→ les relations sexuelles non protégées. Le VHB est une infection sexuellement transmissible ;

→ le contact direct ou indirect par le biais d’objets contaminés avec du sang infecté : piqûres, soin chez une personne contaminée ; échange de seringues chez les usagers de drogues par voie intraveineuse ; effractions cutanées en l’absence de règles strictes d’hygiène (piercing, tatouage, acupuncture…) ;

→ la transmission de la mère à l’enfant, essentiellement au moment de l’accouchement si la mère est porteuse chronique du VHB ;

→ les contacts intra-familiaux le plus souvent lors du partage d’objets : rasoirs, brosses à dents…

SIGNES CLINIQUES

Les symptômes sont associés à des anomalies biologiques nécessaires au diagnostic.

Hépatite B aiguë

La durée d’incubation varie d’un à trois mois. L’infection est généralement asymptomatique dans l’enfance et symptomatique dans 30 à 50 % des cas adultes. Elle se manifeste par :

→ une phase pré-ictérique de trois à sept jours, avec nausées, anorexie, parfois fièvre, arthralgies, urticaire ;

→ une phase ictérique de deux à trois semaines, caractérisée par un ictère (voir Dico+) cutané et conjonctival, et parfois une décoloration des selles et une coloration foncée des urines.

L’hépatite B aiguë symptomatique est une infection à déclaration obligatoire en France.

Hépatite B chronique

La maladie évolue en quatre phases :

→ une phase d’immunotolérance avec forte réplication virale, mais qui n’induit pas de symptômes ni de lésions hépatiques car la réponse immune de l’organisme est faible ;

→ une phase de rupture de tolérance ou d’immuno-élimination de plusieurs mois ou années lorsque le système immunitaire s’active : elle est marquée par une réplication virale fluctuante, associée à une élévation des transaminases et à l’apparition de lésions hépatiques chez un patient toujours asymptomatique ;

→ une phase d’inactivation ou portage inactif marquée par la diminution ou l’arrêt de la réplication virale, avec normalisation des transaminases et disparition du processus inflammatoire hépatique. Chez certains patients, un traitement est nécessaire pour atteindre ce stade. La guérison peut alors parfois survenir ou l’infection peut passer en phase de réactivation ;

→ une phase de réactivation caractérisée par des épisodes de réactivation virale, spontanés ou favorisés par un état d’immunosuppression, asymptomatiques ou sous la forme d’une hépatite aiguë, avec ou sans ictère.

ÉVOLUTION

Hépatite aiguë

Plus de 90 % des adultes infectés en bonne santé guérissent. Dans moins de 1 % des cas, une hépatite B aiguë symptomatique peut se compliquer par une hépatite fulminante ; mortelle dans 80 % des cas en l’absence de transplantation hépatique. Elle correspond à une nécrose massive du foie et se manifeste par une encéphalopathie hépatique avec astérixis (voir Dico+) aboutissant au coma et à un syndrome hémorragique.

Hépatite chronique

La gravité et l’évolution de l’hépatite B chronique dépendent du stade de la maladie au moment de sa découverte, de l’importance de la réplication virale, et de la réaction immunitaire de l’organisme vis-à-vis du virus.

→ Chez certains patients, la maladie est peu active, voire inactive : « Il est difficile d’identifier ces porteurs inactifs, précise le Dr Stéphane Chevaliez (voir interview p. 31). Plusieurs consultations chez l’hépatologue sont souvent nécessaires pour vérifier la normalité des transaminases, l’absence d’ADN du VHB, l’absence d’atteinte hépatique… La surveillance des porteurs inactifs est importante en raison du risque de réactivation spontanée de la réplication virale, avec apparition d’une cytolyse et d’une activité nécrotico-inflammatoire à la biopsie hépatique ».

→ Quand la maladie progresse : la destruction des cellules hépatiques infectées entraîne la formation d’un tissu cicatriciel hépatique (fibrose hépatique). Le stade sévère de cette atteinte est la cirrhose.

La cirrhose est une maladie irréversible du foie caractérisée par une inflammation chronique qui entraîne la destruction des cellules hépatiques et leur régénération anarchique, sous forme de nodules. Le foie perd également sa souplesse, ce qui provoque une augmentation du volume sanguin dans la veine qui l’alimente. C’est l’hypertension portale. Elle génère la formation de voies de dérivation et l’apparition de varices œsophagiennes. La mauvaise vascularisation des cellules du foie et la diminution de la quantité d’hépatocytes fonctionnels finissent par provoquer une insuffisance hépatocellulaire. Elle conduit à la perte des fonctions de l’organe et s’accompagne de multiples complications (voir Info+ p. 27) ; la cirrhose concerne 20 % des patients après vingt ans d’évolution de la maladie. Une fois installée, elle est irréversible et évolue, même en l’absence de réplication virale.

Le risque d’hépatocarcinome (cancer du foie) est lié à la fois aux effets oncogènes directs du virus et à la cirrhose elle-même. L’incidence annuelle des hépatocarcinomes est de 2 % chez les patients atteints d’une hépatite B chronique et ayant une cirrhose.

→ Réactivation possible. Enfin, précise le Dr Chevaliez, « il faut garder en mémoire que l’on ne guérit jamais sur le plan virologique d’une hépatite B chronique, même après apparition des anticorps anti-HBs car il y aura toujours des hépatocytes comportant de l’ADN du VHB. Une réactivation de la maladie est donc toujours possible, en particulier lors d’un traitement immunosuppresseur. Il faut donc toujours signaler que l’on a été atteint d’une hépatite B, même si l’on a des anticorps anti-HBs ».

DIAGNOSTIC

Outre la clinique plus ou moins silencieuse, les premières analyses sanguines recherchent en particulier certains marqueurs. Il s’agit de :

→ l’antigène HBs situé à la surface du virus qui signe la présence du virus et les anticorps correspondants Ac anti-HBs, protecteurs qui indiquent la « guérison » ou la vaccination ;

→ l’antigène HBe de la capside virale ou core et ses anticorps anti-HBe pour déterminer si le virus est sauvage et si l’hépatite est active (voir Hépatite chronique) ;

→ les anticorps anti-HBc signent un contact viral, récent en présence d’IgM, et ancien en présence d’IgG.

Hépatite aiguë

Les signes cliniques conduisent à la réalisation d’examens biologiques qui affirment le diagnostic. Les transaminases, dosées dans le sang, sont augmentées de dix à trente fois la normale.

L’Ag HBs est présent, et détectable avant l’apparition des signes cliniques.

Les Ac anti-HBc, de type IgM au début de la symptomatologie, signent une infection récente, puis de type IgG (ils persistent après la guérison). Les Ac anti-HBs apparaissent en dernier (voir infographie p. 27).

Hépatite chronique

Le plus souvent, sa découverte est fortuite ou liée à un dépistage (voir ci-après). Si l’Ag HBs est présent et les Ac anti-HBs absents, le bilan est complété par :

→ la recherche de l’Ag HBe et des anticorps anti-HBe. Certains patients (un tiers) sont infectés par un virus B sauvage associé à une positivité de l’Ag HBe et à la négativité de l’anticorps anti-HBe ; dans ce cas, on parle d’hépatite B chronique à antigène HBe positif.

En France, la plupart des patients sont porteurs d’un virus B mutant précore, qui se caractérise par la négativité de l’AgHBe et la positivité de l’anticorps anti-HBe ; on parle d’hépatite B chronique à antigène HBe négatif dont la forme est plus sévère que la précédente ;

→ la détection et le dosage (nombre de copies/ ml) de l’ADN viral, témoins de la réplication virale, par Polymerase chain reaction (technique de biologie moléculaire). Une hépatite B chronique active se caractérise par une charge virale élevée (plus de 100 000 copies/ml) ; une réplication virale faible (moins de 2 000 UI/ml) est en faveur d’un portage inactif (voir Info+ p. 26).

→ une ponction-biopsie hépatique ou PBH : elle évalue le degré de fibrose du foie, et donc la sévérité de l’atteinte hépatique. La PBH établit le score Métavir, allant de 0 (absence de fibrose) à 5 (cirrhose). Elle est de plus en plus souvent remplacée par des méthodes non invasives sous forme de tests biologiques, qui consistent à doser plusieurs marqueurs sanguins (Fibromètre…), ou de l’élastométrie impulsionnelle (Fibroscan), qui mesure le degré d’élasticité du foie à l’aide d’ultrasons.

→ d’autres examens : bilan hépatique complet (bilirubinémie, phosphatases alcalines…), hémogramme, taux de prothrombine ; sérologies hépatites A, C et VIH systématiques ; recherche d’une surinfection ou d’une co-infection par le virus de l’hépatite?D (voir Info+, p. 28).

SUIVI

Au cours d’une hépatite B aiguë

Un contrôle mensuel de l’Ag HBs est réalisé. S’il reste positif au-delà de trois mois, les autres marqueurs, dont l’ADN viral, sont dosés pour dépister le risque de passage à la chronicité.

Au cours d’une hépatite B chronique active

L’évolution de l’infection est surveillée, même en l’absence de traitement : dosages réguliers des transaminases, de l’ADN viral et de l’Ag HBe chez les patients Ag HBe positif.

L’échographie hépatique et le dosage annuel de l’alpha-fœtoprotéine, marqueur tumoral de certains cancers dont celui du foie, dépistent le risque de cancérisation.

Pour les porteurs inactifs de l’Ag HBs

Il persiste un risque, même s’il est faible, de développement d’une cirrhose ou d’un carcinome hépatocellulaire, ainsi qu’un risque de réactivation spontanée de la maladie. Il est donc recommandé une surveillance une à deux fois par an des transaminases et de l’ADN viral, ainsi qu’une échographie hépatique annuelle et l’évaluation de la fibrose (tests sanguins, Fibroscan).

PRÉVENTION

Elle passe par le dépistage des personnes à risque et la vaccination, ainsi que par l’information du public sur les modes de transmission de la maladie (voir « Transmission »).

Dépistage de l’hépatite B

→ Dépistage obligatoire : au sixième mois de grossesse. Il repose sur la recherche de l’Ag HBs.

→ Dépistage recommandé : aux partenaires sexuels et à l’entourage proche (vivant sous le même toit) d’un sujet atteint d’une hépatite B aiguë ou chronique, aux personnes infectées par le VIH ou le VHC, aux personnes à risque élevé d’infection (voir « Vaccination »). Ag HBs, Ac anti-HBc, Ac anti-HBS peuvent être dosés d’emblée.

Vaccination

Obligatoire

La vaccination contre l’hépatite B est obligatoire pour les professionnels de santé exerçant dans un établissement public ou privé.

Recommandée

→ Chez les nourrissons et en rattrapage chez les enfants et adolescents jusqu’à 15 ans révolus. L’enjeu est un contrôle à long terme de la maladie.

→ Chez les personnes à risque élevé d’exposition au virus : comportement sexuel à risque (partenaires multiples), partenaires sexuels ou entourage proche d’un patient atteint d’hépatite B (y compris porteur inactif), migrants originaires de zones d’endémie, voyage en zone d’endémie, usagers de drogues par voie parentérale, personnes en institutions psychiatrique et carcérale, patients susceptibles de recevoir des transfusions et/ou des médicaments dérivés du sang ou candidats à une greffe, et toute personne susceptible d’être en contact avec des patients ou des produits biologiques (professionnels de santé, secouristes, gardiens de prison, éboueurs, policiers…).

En pratique : aucune injection de rappel n’est recommandée systématiquement, sous réserve du suivi du schéma vaccinal recommandé (voir tableau ci-dessous), mais chez les immunodéprimés et les insuffisants rénaux dialysés, il est préconisé de contrôler une fois par an le statut post-vaccinal en dosant le taux d’Ac anti-HBs et de réaliser un rappel si le taux descend en dessous du seuil protecteur de 10 mUI/ml.

Son traitement

OBJECTIF

Hépatite aiguë

Aucun antiviral n’est recommandé. Le traitement est symptomatique : repos au lit et « épargne » du foie avec suppression de l’alcool, régime pauvre en graisses…

En cas d’hépatite fulminante, une transplantation hépatique peut s’avérer nécessaire.

Hépatite chronique

Idéalement, le traitement a pour but la perte de l’Ag HBs et la séroconversion HBs (apparition des anticorps anti-HBs), mais ceci est très rare. Dans tous les cas, l’objectif est la suppression prolongée de la réplication virale, définie par l’absence de détection de l’ADN du VHB. Cette « réponse virologique » est associée à la normalisation des transaminases et à un ralentissement de la progression de la fibrose.

Chez les patients Ag HBe positifs, la négativité de l’Ag HBe et la séroconversion HBe (apparition des Ac anti-HBe) est un bon élément de réponse au traitement.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Toute hépatite B chronique ne justifie pas un traitement médicamenteux. Les indications d’un traitement antiviral répondent à des critères complexes et précis.

Un traitement est notamment instauré chez les patients ayant un ADN du VHB supérieur ou égal à 2 000 UI/ml, quel que soit le statut HBe, et/ou un taux de transaminases ALAT élevé associé à une fibrose significative supérieure ou égale à 2 selon la classification Métavir.

Traitement de première intention

Deux stratégies sont discutées :

→ un traitement de durée limitée, en général un an, avec l’interféron alfa pégylé. C’est le traitement de première intention et chez les patients Ag HBe positif (virus sauvage). L’interféron alfa pégylé (fixation d’une molécule de polyéthylène glycol sur l’interféron, d’où une plus longue demi-vie) a remplacé l’interféron standard en raison d’une meilleure efficacité et d’une administration plus simple. Les principaux inconvénients sont ses effets indésirables fréquents ;

→ un analogue (voir Info+), mieux toléré que l’interféron, sur une durée prolongée, voire à vie. Soit un nucléosidique (lamivudine, entécavir, telbivudine), soit nucléotidique (adéfovir, ténofovir), à l’effet antiviral supérieur à celui de l’interféron. Ce type de traitement est indiqué chez les patients atteints de cirrhose, et, généralement, chez ceux AgHBe négatif (virus mutant).

L’entécavir et le ténofovir sont indiqués en première intention car ils possèdent une action puissante et une barrière génétique à la résistance élevée (faible risque d’apparition de virus résistants). Les autres analogues sont associés à un risque plus important de résistance liée à des mutations du virus.

Cas particuliers

→ Co-infection par le VHD : interféron alfa, seul médicament actif sur le VHD.

→ Co-infection par le VIH chez un sujet traité : association ténofovir-emtricitabine car active à la fois sur VIH et VHB, combinée à un troisième antirétroviral anti-VIH.

→ Grossesse : ténofovir, lamivudine et telbivudine.

Réponses au traitement

Sont contrôlés tous les trois à six mois les critères de réponse au traitement : négativation de l’ADN viral, normalisation des transaminases, négativation de l’AgHBe s’il est présent, diminution du taux d’AgHBs, apparition d’Acs anti-HBe.

En cas d’échec

→ Échappement virologique chez un patient observant sous analogue : suspecter une résistance.

→ Si traitement par un analogue nucléosidique : ajouter un analogue nucléotidique.

→ Si traitement initié par l’entécavir : ajouter ou lui substituer le ténofovir. Pour l’instant, aucune résistance n’est décrite avec le ténofovir.

→ Échec sous interféron : employer un analogue.

Transplantation hépatique

Elle s’adresse aux patients ayant une cirrhose hépatique décompensée (avec complications).

MÉDICAMENTS

Interféron alfa

→ Produits : interféron alfa-2a (Roferon-A), interféron alfa-2b (Introna), peginterféron alfa-2a (Pegasys).

→ Mode d’action : l’interferon exerce une action antivirale en induisant la synthèse d’enzymes qui inhibent la réplication virale, antiproliférative en inhibant la réplication de l’ADN des cellules normales et tumorales, et immunomodulatrice en stimulant l’activité des macrophages et des cellules Natural Killer.

→ Effets indésirables. Ils sont fréquents et souvent mal supportés : syndrome pseudo-grippal, fatigue, anorexie, perte de poids, troubles digestifs, rash cutanés, alopécie, infections respiratoires hautes, candidose orale, inflammation au point d’injection. Des troubles hématologiques (neutropénie, thrombopénie), thyroïdiens, psychiatriques (de la simple irritabilité au syndrome dépressif), cardiaques (palpitations…) et oculaires (vision floue…), des dyslipidémies, des pneumopathies interstitielles, des perturbations de la glycémie chez le patient diabétique sont fréquents.

→ Surveillance : de manière mensuelle, numération formule sanguine (NFS) et bilan hépatique, ainsi qu’une surveillance régulière des yeux et de la thyroïde.

→ Législation : prescription initiale semestrielle réservée aux spécialistes en gastro-entérologie, hépatologie, médecine interne ou infectiologie. Renouvellement non restreint.

→ Conservation : entre + 2 °C et + 8 °C.

Analogues nucléos(t)idiques

Nucléosidiques : entécavir, lamivudine, telbivudine. Nucléotidiques : adéfovir, ténofovir.

→ Mode d’action : ils entrent en compétition avec les nucléosides et les nucléotides naturels et inhibent ainsi la transcriptase inverse (une ADN polymérase), l’enzyme nécessaire à la réplication. Les analogues nucléosidiques requièrent trois phosphorylations pour être actifs ; les analogues nucléotidiques en ont déjà une.

→ Effets indésirables. Communs : nausées, diarrhées, fatigue, céphalées, pancréatites, troubles musculaires, acidose lactique rare. Adéfovir : néphrotoxique. Entécavir : sensations vertigineuses, insomnies. Telbivudine : arthralgies, myalgies, rhabdomyolyse, neuropathies périphériques. Ténofovir : risque d’insuffisance rénale.

→ Surveillance : régulière de la fonction rénale au long cours.

→ Législation : Ténofovir : prescription initiale hospitalière annuelle, renouvellement non restreint. Autres : prescription initiale semestrielle réservée aux spécialistes en gastro-entérologie, hépatologie, médecine interne ou infectiologie. Renouvellement non restreint.

Conseils aux patients

OBSERVANCE

Du traitement

Elle est essentielle pour éviter le risque d’échappement thérapeutique, notamment sous analogue, et prévenir l’apparition de résistance.

Du suivi

L’efficacité et la tolérance du traitement sont évaluées de façon mensuelle sous interféron, trimestrielle sous analogues. Même sans traitement, il faut respecter les consultations de suivi, en général deux fois par an, pour surveiller l’évolution de la maladie.

Gérer les effets indésirables

Sous interféron

→ Syndrome pseudo-grippal : il peut être prévenu par la prise de 1 g de paracétamol une heure avant l’injection. Recommander de ne pas dépasser 3 g par jour afin de limiter l’hépatotoxicité de la molécule. En cas de fièvre persistante, une consultation médicale est nécessaire pour éliminer une complication infectieuse favorisée par une neutropénie.

→ Fatigue : une injection le week-end permet de mieux gérer la fatigue, qui survient généralement au lendemain de l’injection et se pourdurant suit quelques jours. Garder un rythme de sommeil régulier, faire de petites siestes (de 15 à 30 minutes) pour récupérer, et déléguer les tâches ménagères.

→ Troubles de l’humeur : sensibiliser l’entourage à leur survenue (irritabilité, déprime, insomnie…) car il faut les signaler au médecin.

→ Injection : recommander de changer à chaque fois le site d’injection (abdomen ou cuisse) et vérifier que la première injection est réalisée avec une infirmière. Celle-ci expliquera comment procéder : sortir le stylo ou la seringue du réfrigérateur 20 minutes avant l’injection, se laver les mains et désinfecter la zone d’injection à l’alcool, faire un pli avec la peau et piquer à 45° avec la seringue, ou perpendiculairement au site d’injection avec le stylo. Après l’injection, ne pas masser mais appliquer un pansement si besoin. Jeter le matériel de l’injection dans un collecteur de déchets réservé à cet effet.

Sous analogues

Fatigue et troubles digestifs surviennent en général les premiers jours, puis s’améliorent.

Automédication

Éviter toute automédication car de nombreux médicaments ont un métabolisme hépatique et peuvent « fatiguer » le foie, y compris le paracétamol au cours d’une hépatite aiguë.

VIE QUOTIDIENNE

Alimentation

L’alcool est à proscrire, y compris dans les médicaments (sirop, teinture mère…), car il accélère l’évolution de la fibrose et accroît le risque de développement d’un cancer. Aucun régime alimentaire particulier n’est recommandé, mais il faut éviter le surpoids ou l’obésité, favorisant l’évolution vers la cirrhose. En cas de perte d’appétit sous interféron, recommandez plusieurs petits repas par jour. En cas de dégoût, privilégier des aliments froids ou tièdes.

Tabagisme

Il est préférable d’arrêter de fumer car le tabac augmente le risque de progression de la fibrose.

Activité physique

Elle aide à contrôler la fatigue, le poids, les douleurs musculaires et articulaires et a un effet bénéfique sur le moral.

Protéger l’entourage

Tous les patients atteints d’hépatite chronique B peuvent transmettre l’infection, mais le risque est plus élevé pour les malades avec du virus circulant dans le sang, dont la maladie « active ».

→ Prendre des précautions car le risque de contamination existe même sous antiviral. Il faut impérativement l’inciter à se faire dépister et vacciner.

→ Les objets susceptibles d’être souillés par du sang peuvent être contaminés. Prévoir des objets de toilette et de manucurie personnels : rasoir, ciseaux, coupe-ongles, brosse à dents…

→ En cas d’objet souillé par du sang infecté, le tremper dans de l’eau de Javel diluée au 1/10e pendant dix minutes.

→ Recouvrir toutes lésions ou plaies du patient par un pansement.

→ Le risque de transmission par la salive, discuté, paraît très faible, sauf lors d’une hépatite aiguë, où des précautions sont à prendre : ne pas partager les ustensiles de cuisine, les aliments… Aucun risque de transmission par la toux ou les éternuements, les accolades ou les baisers, sauf peut-être un baiser « profond » lors d’une hépatite aiguë lorsque la charge virale est élevée.

Relations sexuelles

L’hépatite B se transmet par des relations sexuelles non protégées : cunnilingus, fellation, pénétration. Protéger systématiquement les relations sexuelles avec un préservatif sauf si le(s) partenaire(s) du patient est/sont vacciné(s).

Désir de grossesse

Rassurer sur la transmission au nouveau-né chez une mère HBs positif. Dès la naissance, la sérovaccination associant immunoglobulines anti-hépatite B et première injection vaccinale contre l’hépatite B (schéma en trois injections, quatre pour les prématurés) réduisent le risque pour l’enfant d’être atteint. Selon le cas, un traitement antiviral (lamivudine, telbivudine ou ténofovir) administré lors de la grossesse est également entrepris.

L’allaitement maternel est possible en cas d’hépatite B, sauf en cas de crevasses ou saignement au niveau des mamelons. Sous analogues, il est discuté au cas par cas selon les molécules.

Avec la collaboration du Dr Stéphane Chevaliez, du Centre national de référence des hépatites B, C et delta, hôpital Henri-Mondor, Créteil (94).

Info+

L’homme est le seul réservoir du virus de l’hépatite B (VHB), 50 à 100 fois plus contagieux que le virus de l’immunodéficience humaine (VIH).

Info+

Le risque de contamination par le VHB lors d’un accident d’exposition au sang (AES) d’une personne infectée est de 30 %. À titre de comparaison, il est de 0,3 % pour le VIH.

Info+

Facteurs de risque significativement associés au VHB : usage de drogues par voie intraveineuse, pays de naissance à endémicité forte ou moyenne, homosexualité, précarité.

Info+

Le portage chronique inactif est défini par la positivité de l’antigène HBs associé à des anticorps anti-HBe, une réplication virale faible (moins de 2 000 UI/ml), des transa normales et l’absence de lésions inflammatoires hépatiques.

Une hépatite B chronique active se traduit par une charge virale élevée (plus de 100 000 copies/ml) et des transaminases deux à cinq fois supérieures à la normale.

Sérologie hépatite B

La sérologie hépatite B consiste à détecter dans le sang des antigènes constitutifs du virus de l’hépatite B (VHB) et des anticorps dirigés contre ces différents antigènes. Les antigènes témoignent de la présence du virus. Les anticorps, de la réaction immunitaire de l’organisme à un contact avec le VHB.

Ag HBe : témoin d’une forte réplication virale. Sujet très contagieux.

Ac anti-HBe : apparition en général associée à la suppression de la réplication virale.

ADN VHB : mesure la virémie (présence de virus dans le sang), il est le témoin de la multiplication virale dans l’organisme.

Ag HBs : c’est l’antigène de surface marqueur clé du diagnostic ; il apparaît pendant la phase d’incubation et disparaît au bout de quelques semaines en cas d’infection aiguë. IgG anti-HBc : présent en cas d’infection actuelle, puis à vie.

IgM anti-HBc : sa présence indique une infection actuelle aiguë.

Ac anti-HBs : signent la guérison (plus d’atteinte du foie, v oir entretien p. 31) ou une protection vaccinale. Ils ne peuvent coexister avec les Ag HBs.

Info+

Complications de la cirrhose : les hémorragies digestives en cas de rupture de varice œsophagienne (urgence extrême) ; l’ascite, accumulation de liquide dans le péritoine (chez 30 % des patients cirrhotiques) ; l’encéphalopathie hépatique, due à l’incapacité du foie à éliminer l’ammoniac produit par les bactéries ; l’insuffisance rénale induite par une complication (hémorragie digestive, infection sévère) ou par la sévérité de l’insuffisance hépatique ; un carcinome hépatocellulaire.

Info+

Facteurs aggravant la fibrose hépatique : alcool, tabac, excès de poids, âge avancé lors du diagnostic, co-infection par le virus de l’hépatite C ou D ou par le VIH. Ils favorisent l’évolution vers la cirrhose et le cancer du foie.

Info+

Virus de l’hépatite D (ou delta) : ce virus ne possède pas d’enveloppe ; il doit utiliser celle du virus de l’hépatite B. Il n’existe pas d’hépatite D autre qu’une co-infection ou une surinfection de l’hépatite B.

Info+

Un analogue nucléosidique est constitué d’une base azotée et d’un sucre (ribose, désoxyribose). Il est nucléotidique si un groupement phosphate se rajoute.

Info+

Chez les patients immunocompétents vaccinés depuis de nombreuses années contre l’hépatite B, il est habituel que le taux d’anticorps anti-HBs chute sous le seuil de 10 mUI/ml alors que la protection vaccinale est toujours assurée.

Info+

Tout patient Ag HBs positif nécessitant une chimiothérapie anticancéreuse ou un immunosuppresseur doit être mis sous analogues (entécavir ou ténofovir en général) jusqu’à douze mois après l’arrêt de la chimio- ou immunothérapie pour prévenir une réactivation du VHB.

Info+

Chez les porteurs d’un virus mutant pré-core (pré-C) qui ne produit pas d’Ag HBe alors que la maladie est active (réplication virale), seul le dosage de l’ADN viral témoigne de l’activité de la maladie.

Contre-indications médicales aux médicaments

Interféron alfa : affection cardiaque sévère préexistante, insuffisance rénale ou hépatique sévère, épilepsie, état psychiatrique sévère préexistant, cirrhose hépatique décompensée, antécédents de maladie auto-immune, troubles thyroïdiens préexistants. Analogues nucléos(t)idiques : aucune en particulier.

Interview

“Aujourd’hui, on ne sait pas « guérir » une hépatite B chronique”

Dr Stéphane Chevaliez, Centre national de référence des hépatites B, C et delta, hôpital Henri-Mondor à Créteil (94)

Peut-on guérir d’une hépatite B chronique ?

Non. On ne sait pas guérir aujourd’hui une hépatite B chronique. En revanche, les thérapies actuelles permettent de bien contrôler l’infection, d’obtenir des rémissions, voire, pour certains patients, de développer des anticorps anti-HBs. À condition de traiter tôt, pour enrayer l’évolution de la maladie. D’où l’intérêt de renforcer le dépistage ciblé, comme le préconise le récent rapport sur les hépatites B et C(1). Un tiers des patients ignorent leur statut sérologique, ce qui est une perte de chance pour certains d’entre eux qui nécessiteraient un traitement afin de contrôler la maladie.

Que préconise ce rapport en matière de dépistage ?

De renforcer le dépistage ciblé existant, c’est-à-dire encourager les populations migrantes d’Asie et d’Afrique, ceux qui ont des tatouages, des piercings, des partenaires sexuels multiples à se faire dépister, et de l’élargir à tous les hommes de 18 à 60 ans, en leur recommandant d’effectuer au moins une fois dans leur vie un dépistage VHB, VHC et VIH.

Où en est la vaccination ?

La couverture vaccinale des nourrissons est devenue très satisfaisante puisqu’elle est aujourd’hui de 80 %, grâce notamment au remboursement du vaccin hexavalent (Infanrix Hexa). En revanche, moins de la moitié des adolescents le sont. Cette tranche d’âge correspond à une période pendant laquelle le lobby antivaccination était très présent. Il l’est encore mais moins, heureusement. Il faut rappeler qu’aucune étude épidémiologique n’a mis en évidence un lien entre la vaccination contre l’hépatite B et le risque d’apparition d’une maladie auto-immune ou d’une affection neurologique grave (sclérose en plaques, syndrome de Guillain-Barré…). Il faut donc absolument encourager les adolescents à se faire vacciner, d’autant plus que tatouages, piercings et usage de drogues en font une population à risque pour l’hépatite B. C’est également l’une des priorités du rapport.

(1) Prise en charge des personnes infectées par les virus des hépatites B, recommandations 2014, disponible sur www.sante.gouv.fr.

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