Relever le challenge de la RSE

En France, les lois Grenelle 1 et 2 imposent aux sociétés cotées en bourse la publication d’informations non-financières en rapport avec leurs pratiques sociales et environnementales. Depuis 2006, les entreprises au chiffre d’affaires supérieur à 100 M€ et de plus de 500 employés sont également concernées par cette obligation. Pour les petites structures, rien d’obligatoire en ce qui concerne la responsabilité sociétale. Pourtant, la mise en place d’une stratégie de RSE présente de nombreux avantages. « Cela permet de faire des économies d’énergie et des économies au sens propre, d’améliorer son image et son impact social. Autrement dit, il s’agit in fine de gagner en compétitivité et en productivité », souligne Timothée Elkihel, manager conseil de Greenflex, une société dont la mission est d’aider les entreprises à accélérer – et surtout à structurer – leur transition, en termes de développement durable. Beaucoup de PME pratiquent déjà la RSE sans le savoir. En effet, toutes les actions qui consistent à réduire les déchets, améliorer l’efficacité des processus, limiter les transports, réduire les factures énergétiques ou améliorer le bien-être au travail font partie intégrante de la démarche. Mais il ne suffit pas de ne plus distribuer de sacs en plastique pour revendiquer une vraie politique de RSE. « Bien souvent, les petites entreprises ne valorisent pas leurs actions », regrette Timothée Elkihel. Pour réussir une véritable stratégie de RSE, Greenflex a mis en place une formule d’accompagnement adapté aux affaires de petites tailles (y compris les officines). Soit un programme semi-collectif (groupe de 7 à 9 entreprises) de 5,5 jours dont le coût est compris entre 5 000 et 6 000 euros par entreprise. Et Greenflex réfléchit actuellement avec L’Oréal Cosmétique active sur un programme de formation RSE à destination des pharmacies…

RÉDUIRE la facture environnementale

« Tout repose sur l’employeur, poursuit Timothée Elkihel. En se lançant dans la mise en place du RSE, le titulaire peut faire passer ses propres valeurs, saisir l’opportunité de se différencier ou rechercher de nouveaux marchés en répondant aux attentes de ses clients. » La première étape consiste donc à définir les enjeux prioritaires et à identifier les pistes de progrès. Objectif : élaborer une feuille de route qui facilitera la communication auprès des équipes et des clients. Pour ce faire, Greenflex réalise en quelques heures, un audit de l’officine. « Cela nous permet de quantifier de manière précise le coût énergétique de chaque poste analysé – éclairage, robot, climatisation, frigo… – et les économies envisageables. » Le deuxième point concerne la gestion des PLV, souvent stockées ou mises en benne. « Le pharmacien doit travailler son discours avec les laboratoires pour ne commander que celles dont il a besoin. » Un principe adopté par Mathilde Six, titulaire de la Pharmacie de la Charentonne à Bernay (dans l’Eure), engagée dans une démarche éco-responsable depuis un an. « Nous avons établi des plans de communication au trimestre afin de limiter la manutention et la quantité des PLV. De plus, nous limitons les précommandes à quatre par an pour réduire le stockage. » Pour les déchets (cartons d’emballage en particulier), Greenflex invite à s’équiper d’un compacteur. Moins consommer est un travail quotidien. « Tout le monde doit jouer le jeu, poursuit Mathilde Six. Du coup, nous avons demandé aux laboratoires d’optimiser leur cartonnage (fini trois petits produits dans un grand carton !) et de nous envoyer des factures dématérialisées. Moins de papier, c’est aussi moins de temps passé à gérer le courrier. Les factures sont conservées dans des dossiers, sur la boîte e-mail. »

RENFORCER son ancrage local

Au-delà des volets énergétique et économique, la RSE implique – comme son nom l’indique – un engagement sociétal. « D’autant que le pharmacien bénéficie d’un ancrage important dans sa zone de chalandise et de liens forts avec les habitants du quartier », souligne Timothée Elkihel. Fort de ce « statut », l’officinal se doit de connaître son écosystème et de se rapprocher des différents acteurs qui le compose. Autrement dit, il doit être en lien avec les autres professionnels de santé (kinés, infirmières, aidessoignants…) ou avec des associations qui aident les personnes dépendantes. Mathilde Six confirme. « Nous hébergeons dans la pharmacie un collecteur de bouchons en plastique en soutien à l’association Bouchons 276 (pour les départements hauts-normands 27 et 76). À chaque tonne de bouchons recyclée, 250 € sont reversés à l’association ; qui elle-même les reversent à des patients handicapés en Normandie. Nous encourageons nos patients à déposer leurs bouchons et nous expliquons la filière de recyclage de proximité ». Autre initiative : depuis l’interdiction des sacs plastiques, la Pharmacie de la Charentonne propose des sacs réutilisables « Mon sac à pharmacie » (vendus 3 €). Dessus, deux logos : celui de la pharmacie et celui d’une association Bernayenne de lutte contre la mucoviscidose. Un euro lui est reversé à chaque vente de sac. Depuis son lancement en septembre dernier, 219 € ont déjà été remis. « Se démarquer par ses projets RSE est un enjeu pour une entreprise aujourd’hui, affirme Mathide Six. La démarche est adaptable et ajustable à chacun. Elle est engageante pour l’équipe et valorisante pour les clients. La pharmacie a tout à y gagner ». CQFD.