Sauvée par les plantes - Pharmacien Manager n° 151 du 30/09/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 151 du 30/09/2015
 

REPORTAGE

Auteur(s) : Fabienne Colin

En plein cœur d’une région d’élevage, dans le bourg aux maisons de granit de la commune Luitré, la Pharmacie Lesueur flambant neuve tranche par son architecture moderne et son bardage en bois. Pourtant, ce village d’Ille-et-Vilaine a bien failli perdre sa croix verte. Placée en liquidation judiciaire en 2008, l’officine affiche aujourd’hui un bilan comptable sain. En découvrant les médecines douces au moment de son installation, la titulaire Alexandra Lesueur ne pouvait guère se douter que cette spécialisation allait devenir un véritable atout pour l’entreprise. Il faut dire que dix jours après son arrivée en avril 2009 dans ce point de vente repris à la barre du tribunal (lire page 32), le médecin généraliste de la commune lui annonce son départ. Cet accident de parcours s’est finalement avéré un mal pour un bien.

En reprenant une officine et son minuscule stock de 5 000 €, la jeune pharmacienne a son assortiment à construire, comme lors d’une création. Quelques personnes sont décisives dans cette mise en place. « J’ai rencontré un délégué Nutergia qui m’a présenté la micronutrition et la nutrition cellulaire active, le concept m’a intéressée, je me suis lancée. Puis une remplaçante m’a fait découvrir l’aromathérapie, j’ai commencé à me former et me suis passionnée », se souvient Alexandra Lesueur, un grand sourire rivé aux lèvres.

Ces produits apportent une réponse aux patients qui, faute de médecin dans le village, consultent souvent la pharmacienne sans ordonnance. Finalement, dès septembre 2009, un nouveau généraliste ouvre son cabinet près de l’église. L’absence de médecin pendant quelques mois a permis de générer quelques réflexes au sein de la patientèle. A fin 2014, la part du médicament remboursé ne représente plus que 61 %.

AGENCEMENT lisible

Par conviction, Alexandra Lesueur continue à développer la phytothérapie et la micronutrition. Et quand, en 2013, l’officine quitte son étroit local pour un bâtiment neuf mitoyen, passant de 20 à 80 m2 de surface de vente, la titulaire en profite pour valoriser sa différence. La signalétique ornée de plantes et papillons stylisés rose et vert présente les types de produits. « Une vraie pharmacie de fille », sourit une des amies de la titulaire, qui trouve l’endroit particulièrement coquet. Pour ne pas perturber la clientèle, l’entrée présente à sa gauche les produits classiques : hygiène, bébé… Le MAD disposé le long de la vitrine côté rue est bien visible lui aussi. Dans son prolongement, le rayon baptisé « Les Plantes » s’étale sur quatre descentes. Il s’impose juste avant les caisses. Sur les muraux de droite, côté parking, on trouve l’offre bébé. Seules trois petites gondoles animent le milieu du point de vente, laissant une impression générale d’espace. Largement mise en avant, l’activité au taux de TVA à 20 % (parapharmacie et matériel médical) est passée de 54 000 € sur l’exercice fiscal 2013, à 103 000 € en 2014. A elle seule, la location de MAD grimpait dans le même temps de 28 000 à 45 000 €. « Je n’hésite pas à prêter un déambulateur pour un week-end, et les gens reviennent convaincus », remarque la titulaire.

FORMATION continue

Pour mieux accompagner les patients, Alexandra Lesueur investit largement dans la formation. Dès 2009, elle envoie Dominique, salariée ici depuis 1993, passer son diplôme de préparatrice. Surtout, depuis son installation, chaque membre de l’équipe suit au moins une formation par an en aromathérapie et en micronutrition, souvent chez Gayet Métois et parfois avec le nutritionniste Régis Grosdidier. La titulaire organise des déjeuners à thème pour réviser. Fidèle à sa vocation de coaching santé, l’officine s’est mise aux entretiens pharmaceutiques. Sont également organisés des rendez-vous nutrition, gratuits, dont le panier moyen s’élève à environ 40/45 €. « La micronutrition, c’est compliqué. Mais plus nous avançons et plus nous sommes performants. Nous sommes de plus en plus à l’aise pour conseiller », remarque Alexandra Lesueur. Dans son nouvel écrin, elle valorise également davantage son préparatoire moderne et multiplie les mélanges maison : infusions, sirops pour les maux de gorge, le sommeil des enfants, le stress, les douleurs au ventre… « Certains me demandent ma potion ! », sourit la titulaire.

L’équipe, formée et sensibilisée en permanence aux médecines alternatives, a pris l’habitude de les conseiller et a gagné l’écoute de ses patients. « Nous avons élargi notre patientèle », estime la titulaire, qui reçoit environ 85 clients par jour en drainant un bassin de population de 3 500 habitants.

ALTERNATIVE au médecin

Dans cette officine, on connaît chacun des patients. Au-delà de répondre aux demandes formulées, on s’enquiert sincèrement de l’évolution de santé de tel parent malade, des projets de chacun, quitte à discuter quelques minutes s’il n’y pas d’attente. Ainsi, cette maman venue pour soigner un champignon au pied de son fils en profitera aussi pour acheter deux huiles essentielles, contre les brûlures du soleil et contre les moustiques, en prévision des futures vacances à la mer. La relation sincère établie avec les clients et la formation pointue en continue sur les médecines douces portent ses fruits : fin 2014, la part du 5,5 % et du 10 % progressait de + 5,83 %.

En pleine campagne, la pharmacie de Luitré a su gagner la confiance des patients en proposant des alternatives naturelles à l’allopathie. L’officine s’est construit une place centrale dans le parcours de soin des alentours, quitte à devenir malgré elle une alternative au médecin. Malgré cette réussite, il est impossible de se reposer sur ses lauriers en ces temps où l’économie de l’officine est en pleine mutation. D’autant que, depuis le printemps dernier, l’histoire se répète et le généraliste du village est parti. L’équipe doit se mobiliser pour maintenir la rentabilité de l’entreprise. La titulaire fourmille d’idées pour mieux conseiller ses clients : elle voudrait consacrer un rayon entier aux préparations maison, systématiser les réunions d’équipe, proposer des animations régulières… Toutefois, cette chef d’entreprise, par ailleurs mère de quatre enfants, ressent le manque de temps et de méthode de management. Dès la rentrée 2015, elle compte entamer une démarche qualité avec son groupement Aelia. Elle peut déjà être fière de son bébé professionnel. La « pharmacie de fille » a des arguments : reprise alors qu’elle réalisait 450 000 € de chiffre d’affaires en 2008, elle dépassait les 830 000 € en 2014.

Pharmacie Lesueur

→ Equipe 1 titulaire, 1 préparatrice, 1 adjointe, 1 femme de ménage

→ CA 2014 (12 mois clos le 31.10) 833 000 € HT

→ CA 2015 (10 mois du 01/11/2014 au 31/08/2015) 664 000 € HT

→ Taux de marge 2013 30,54 %

→ Taux de marge 2014 31,97 %

→ Coûts des travaux (transfert en 2013) 142 000 € HT

→ Surface de vente avant/après 20 m2/75 m2

→ Fréquentation 85 clients/jour

→ Panier moyen 2014 36,10 €

• Tiers payant 49,10 €

• Ordonnance 21,50 €

• Hors ordonnance 17,40 €

→ Répartition du CA

• 61,20 % de médicaments remboursés

• 18,21 % de médication familiale

• 20,59 % de parapharmacie dont la location de MAD

→ Site non

→ Groupement Réseau Santé et Aelia

→ Enseigne Non

Situation

Bourg rural de 1 300 habitants situé à une heure de Rennes, à la frontière de l’Ille-et-Vilaine, Luitré comprend plusieurs commerces dont une boulangerie, un café, un coiffeur et un magasin de cycles. Installée sur la place où se trouve la mairie, face au cabinet d’infirmières et un local conçu pour un médecin, son unique pharmacie dessert un bassin d’environ 3 500 habitants. Les pharmacies voisines sont installées à une distance de 10 kilomètres.

Audit marketing EN PARTENARIAT AVEC ACTES D’ACHATS

L’EXPERT Philippe Farge SPÉCIALISTE EN STRATÉGIE DE COMMERCIALISATION POUR ACTES D’ACHATS

→ Bravo à madame Lesueur pour son positionnement « médecines naturelles » distinctif. Le choix audacieux de la marque de niche Garancia permet de recruter et/ou fidéliser la clientèle jeune. La sélection de marques pointues liées aux spécialisations (les plantes, le MAD…) apparaît comme engagement et donne de la valeur au conseil de l’équipe officinale.

→ Toutefois, le positionnement peut davantage s’affirmer. En façade, les mots retenus (« écoute », « conseil ») ne sont pas différenciants. A l’intérieur, le positionnement « médecines naturelles » ne ressort pas assez. Il faut faire savoir que l’officine propose des offres exclusives et des solutions naturelles soigneusement sélectionnées depuis la vitrine jusqu’au comptoir.

Conseil 1

Optimiser la vitrine

Réduire la vitrophanie de moitié car elle masque le matériel médical côté rue.

Communiquer sur les spécialisations avec une phrase différenciante comme « La Pharmacie Lesueur réalise des préparations à base de plantes adaptées à vos besoins ».

Conseil 2

Valoriser les plantes

Consacrer une étagère de ce rayon au « conseil du moment » et/ou à des explications sur les préparations maison à base d’extrait de plantes standardisés. Exposer un présentoir avec les produits et services maison.

Faire un rappel au comptoir, en plaçant une sélection de solutions naturelles en double implantation derrière le comptoir en complément des références classiques de la médication familiale.

Conseil 3

Miser sur le pôle de santé

A terme, il serait intéressant d’exploiter la proximité avec le pôle de santé en développer par exemple un suivi de l’observance en lien avec les professionnels de santé du pôle.

BAROMÈTRE

Méthodologie

L’index d’efficacité et de positionnement du baromètre exclusif Actes d’Achats-Pharmacien Manager mesure trois critères. Le score de la vitrine évalue la cohérence avec le positionnement de l’officine, celui du parcours client l’efficacité marchande, et celui de l’offre la pertinence de l’ensemble des dispositifs merchandising.

RÉSULTATS

La base 100 reflète une adéquation minimale avec la stratégie souhaitée.

112 Vitrine

C’est plutôt bien, la vitrine est claire et épurée, mais elle doit afficher plus explicitement le positionnement « médecine naturelle ».

117 Parcours client

C’est bien, le zonage est fonctionnel et classique mais il ne distingue pas assez les spécialisations.

133 L’offre

Bravo, l’assortiment est cohérent avec le positionnement. Toutefois, la présentation de l’offre différenciante est trop timide.

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