L’officine peut faire baisser le thermomètre - Pharmacien Manager n° 151 du 30/09/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Pharmacien Manager n° 151 du 30/09/2015
 

NEWS

Auteur(s) : Fabienne Colin

La canicule a surpris la France dès le début de l’été… Ça chauffe pour la planète. Dans ce contexte, le sommet climat prévu fin novembre à Paris est très attendu. Mais comment agir quand on dirige une officine ? Eléments de réponse.

Le réchauffement climatique bouleverse tout. Y compris la santé des gens et des entreprises. Avant de se réunir au sommet climat COP21 cet automne à Paris, les Etats industrialisés multiplient les discussions pour parvenir à un accord. L’objectif : limiter la hausse du thermomètre à deux degrés d’ici à la fin du siècle. Aux côtés des Etats, les simples citoyens et les sociétés peuvent aussi contribuer à cet enjeu majeur. Mais que faire dans une pharmacie ?

De nombreuses entreprises ont déjà entamé le chemin d’une réduction des gaz à effet de serre à l’origine de l’actuel réchauffement climatique. Et quand cette stratégie ne relève pas du gadget marketing, elle prend du temps à mettre en place. Par exemple, dès 2008, la chaîne Monoprix établissait son premier bilan carbone. Cette année, 60?% de ses marchandises à destination de la capitale sont transportées par voies fluviales et 30 % par le train… C’est toute la logistique qui a été revue ! « On peut lancer des tas d’initiatives : des plus simples, comme le passage à des lampes basse tension, aux plus engagées », estime Sandrine Raffin, fondatrice de Link-Up, agence conseil en stratégies d’adhésion en santé, bien-être et environnement.

Ainsi, dans le domaine médical, le nouveau CHU de Nantes, dont l’ouverture est prévue en 2023, prévoit un niveau de consommation inférieur de 40 % à l’exigence réglementaire (RT2012) dans la plupart de ses bâtiments. Signe des temps, les laboratoires pharmaceutiques encouragent à la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Leur fédération, le Leem, a organisé pour la première fois, cette année, les Trophées RSE des entreprises du médicament.

ENGAGEMENT durable.

En pharmacie, on agit depuis longtemps sur certains leviers logistiques contre la pollution, par exemple via l’association Cyclamed qui récupère les médicaments non utilisés pour les recycler correctement. A l’opposé, on s’accroche aux livraisons pluriquotidiennes par les répartiteurs en camion. Toutefois, des titulaires prennent des initiatives « vertes ». Au sein du groupement PHR, 126 pharmacies sont labellisées « Pharmacie durable ». Octroyé par l’organisme certificateur SGS il atteste de trois engagements : social (pour faire en sorte que l’employé se sente bien), sociétal (pour répondre au mieux au patient) et environnemental. La Pharmacie du Pontreau à Niort a décroché ce label dès 2011. Après avoir fait des efforts sur ses consommations d’eau et d’électricité de façon informelle, tout a été normé. Et, depuis les travaux de 2014, le point de vente s’est doté de rideaux et volets pour limiter les écarts de température.

Une pharmacie peut également choisir de livrer en voiture électrique, comme à celle du centre commercial E.Leclerc de Rambouillet, ou encore à vélo !

HORAIRES revisités.

Au-delà de la logistique, une officine a la possibilité de modifier son management pour diminuer son empreinte carbone. Ainsi, à la Pharmacie de Mailloles, à Perpignan, les titulaires Delphine et Arnaud Comaills ont aménagé certains horaires pour éviter au personnel des allers et retours inutiles au moment de la fermeture à la mi-journée. Certains salariés ont leur pause réduite de 1 heures 30 à 1 heure. Ils peuvent déjeuner sur place dans la cuisine. Et profiter de la demi-heure de travail sans les clients pour effectuer des tâches comme le rangement. Egalement dans le but de limiter les trajets, le webmaster, embauché ici à plein temps pour gérer la présence de l’officine sur ses sites web et les réseaux sociaux, travaille deux jours par semaine depuis son domicile. L’équipe est sensibilisée aux conséquences de ses actes sur la Terre.

OFFRE sélectionnée.

L’offre peut devenir un levier pour limiter son empreinte carbone. A la Pharmacie de Mailloles, on a référencé des laboratoires implantés aux alentours comme Nutergia, NHCO, Centella et Funline. « Je préfère un produit naturel fabriqué dans la région à du bio venu de l’autre bout de la planète », explique le titulaire. En toute logique, le premier point de vente Anton & Willem, enseigne d’officine spécialisée dans les médecines naturelles et alternatives, fait attention à son offre. Ainsi, la Pharmacie de la Mauve à Grenoble référence les marques Hamac pour ses couches et ses « chips » – sortes de lingettes – lavables. Autre produit particulièrement durable : la brosse à dents Monte Bianco (Frisetta) dont on conserve le manche et ne renouvelle que les poils. « Nous privilégions les fournisseurs français, et mêmes régionaux. La plupart d’entre eux ont déjà réfléchi au tri du carton, au choix des encres, etc. Nous sommes dans la même dynamique », relève la cotitulaire Maud Joffre, qui, comme son associée, effectue chaque jour son trajet domicile-travail en tramway. Toutes deux décrochent régulièrement leur téléphone pour aborder le sujet de l’empreinte carbone avec leurs prestataires. « Nous leur demandons de ne pas mettre dans leurs colis les leaflets. Nous les sollicitons aussi pour éviter qu’ils nous envoient une facture et un bon de livraison [qui font doublon]. Les réactions sont partagées. La marque d’élixirs floraux Deva, du laboratoire Les Emotions, s’est adaptée malgré le surcroît de travail occasionnée.  »

Pour les marques propres, il ne tient qu’au groupement de décider si la fabrication durable est une priorité. Et devient un argument de vente. Carrefour réduit l’épaisseur du plastique de ses emballages et le fait savoir. Monoprix communique sur ses actions durables. Idem chez Expanscience, où l’on veut réduire de 20 %, entre 2010 et 2015, les consommations de gaz, électricité, eau et la production de déchets sur le site d’Epernon. Chacun peut agir à son niveau.

A savoir

Amortissement

Changer de pratiques peut faire grimper les factures, dont certaines seulement s’amortissent. Ainsi des sacs biodégradables coûtent plus cher que des sacs plastique, de même les gobelets en plastique sont plus onéreux que les cartonnés.

En revanche, se doter de panneaux solaires peut s’avérer judicieux dans certaines régions. L’investissement s’amortit et fait diminuer les charges.

L’ESSENTIEL

Agir sur les émissions de gaz à effet de serre, c’est agir :

→ Sur l’aménagement du point de vente pour limiter les pertes d’énergie et en utilisant des matériaux recyclés.

→ Sur le management des équipes pour faire changer de comportement concernant la relation à l’autre, aux déchets, à la consommation d’énergie…

→ Sur l’offre, qui pourra être choisie parmi des marques « durables ».

ÉCONOMIE

Passer de 20 °C à 19 °C permet d’économiser 7 % de la consommation de chauffage, selon l’ADEME. Bon à savoir pour faire baisser sa note d’électricité en chauffage et climatisation.

Stratégie

Créer la préférence

Si, par exemple, une officine encourage la marche à pied comme alternative à la voiture, en rappelant que c’est bon pour la santé et la planète, elle amène les gens à être plus actifs. « Après y avoir réfléchi en interne, établi une stratégie, il faut idéalement donner un nom à la démarche durable et en parler aux clients. Cela peut également passer par un affichage d’une phrase comme « Votre pharmacie s’engage pour diminuer ses émissions de gaz à effet de serre » suivie de la liste des actions : « Ici, la clim’ est passée de 22 à 24 degrés ». Cela crée de la préférence », estime Sandrine Raffin, dirigeante de Link Up Conseil. Selon elle, les groupements auraient là un rôle à jouer pour épauler les titulaires.

RATIONALISATION

Chaque feuille de papier non utilisée fait économiser 1 litre d’eau, 2,5 watts d’électricité et 15 grammes de bois.

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