Les Français ont peur

Ce sont exactement 837 consommateurs qui ont donné leur avis sur les e-pharmacies, dans l’enquête menée dans le cadre du master « marketing de la santé » (UMPC). Premier constat, 16,1 % - c’est peu - des répondants se sont déjà rendus sur le site d’une pharmacie en ligne. Et au total, seuls 1,9 % des personnes interrogées sont déjà passées à l’acte d’achat de médicaments sur le Net. « Comme pour tout nouveau secteur de e-commerce, le démarrage est lent », constate Déborah Wallet Wodka, maître de conférences en marketing. C’est peu dire. Sur 129 si­tes autorisés par les ARS en janvier 2014, un quart n’étaient pas opérationnels. « Le cadre réglementaire très strict ne permet pas de prévoir un réel essor », avance l’enseignante. Mais le frein vient aussi du consommateur lui-même. Il a peur. Peur des contrefaçons, de l’absence de conseils et des délais trop longs de livraison. Les avantages cités concernant l’achat de médicaments sur la Toile sont les mêmes que pour tout achat sur le Net : gain de temps, absence de déplacement et prix plus bas. Compte tenu du maillage officinal français, seul l’attrait du prix semble donc être la principale motivation à passer par un ordinateur pour se faire livrer des traitements. A moins que ce ne soit la confidentialité qu’offre Internet qui prime « Nos premières ventes sont des produits pour l’hygiène intime », confie Pierjean Bisiau, titulaire et fondateur du site pharma-médicaments.com. Mais, paradoxalement, c’est un homme qui est identifié par l’étude comme profil type de l’acheteur régulier de médicaments en ligne ! Il s’agit plus exactement d’un homme vivant en milieu rural, quadra, au revenu confortable. Le hic ? « Il ne s’intéresse pas à la santé », avancent les étudiants qui ont mené l’enquête. Inutile donc de compter sur ce « gentleman farmer » pour promouvoir les e-pharmacies. « C’est en capitalisant sur la confiance des Français vis-à-vis des pharmaciens que les sites pourront se développer », estime Déborah Wallet-Wodka. Encore faut-il rassurer sur le sérieux des e-pharmacies (voir encadré). Reste que la part du gateau est limitée. En Allemagne, l’automédication en ligne ne représente que 7 % du marché global de l’auto­médication. Un pays où la vente de médicaments sur le Net est autorisée depuis plus de dix ans.