La pluralité des rémunérations sous l’œil des banquiers

L’introduction des honoraires de dispensation au 1^er janvier 2015 a changé le modèle économique de l’officine mais également la façon de présenter les comptes des pharmacies auprès des banques. « Nous avons besoin de comprendre où sont enregistrés les ROSP, contrats de coopération, honoraires, prestations diverses ainsi que le CICE, tant au niveau de la comptabilité de la pharmacie cédante que dans les prévisionnels d’activité de l’acquéreur, précise Monique Sylvestre d’Interfimo. Or, dans les analyses, il est parfois compliqué de s’y retrouver, et la manière dont sont comptabilisées les différentes sources de rémunération de l’officine peut avoir une incidence sur le taux de marge. »

Pour Jean-Marc Lefebvre, de la Caisse d’Epargne des Hauts-de-France, l’analyse d’un projet d’installation est toujours menée avec la même minutie, indépendamment du changement de mode de rémunération. « Nous continuons à regarder les mêmes postes sauf qu’ils ont été déplacés », fait-il remarquer.

Gagner en clarté

« Il faut parfois les aider à se repérer dans la présentation des comptes, sachant que les pratiques peuvent varier d’un cabinet d’expertise à l’autre, constate Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet AdequA. A titre d’exemple, l’honoraire à la boîte peut être comptabilisé dans les prestations de services ou dans le chiffre d’affaires. Les coopérations commerciales sur les génériques sont intégrées en prestations de services ou en “autres produits”, ou encore en diminution des achats pour l’analyse de gestion. Il faut donc les aider à faire le lien entre le passé, avec des présentations multiples et évolutives des comptes, et les perspectives présentées. » Aussi, cet expert-comptable recommande aux acquéreurs d’accompagner leur business plan financier d’une note explicative simple et pragmatique précisant la composition du chiffre d’affaires et la manière dont sont comptabilisés les différents éléments de la rémunération de l’officine (marge commerciale, honoraires, coopérations commerciales, ROSP génériques, entretiens pharmaceutiques, gardes, indemnités de télétransmission).

Sur la forme, le business plan gagnera en clarté et donc en compréhension. Mais sur le fond, la nouvelle rémunération ne modifie en rien le raisonnement financier suivi par la banque pour donner son accord de prêt. Son attention reste rivée sur la rentabilité. « L’excédent brut d’exploitation reste le seul critère financier qui compte pour apprécier la capacité d’endettement d’un repreneur », rappelle Monique Sylvestre.

Concernant l’appréciation du risque commercial d’un projet, l’introduction, demain, d’honoraires de dispensation liés à l’âge (plus de 70 ans et moins de 3 ans) et pour des médicaments spécifiques, pourrait conduire les banques à analyser plus finement les typologies de clientèle, ce qui est déjà la tendance actuelle. « Nous nous attachons de plus en plus à l’étude des populations et à leurs flux migratoires. Dans les Hauts-de-France notamment, les jeunes quittent la région et le vieillissement démographique s’accélère, signale Jean-Marc Lefebvre. Afin de suivre ces évolutions, nous travaillons de plus en plus avec l’Insee et des sociétés spécialisées dans l’observation de segments de population. »