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Enjeux
Auteur(s) : FRANÇOIS POUZAUD AVEC LOAN TRANTHIMY
Huit ans après leur création, les structures de regroupement à l’achat (SRA) sont-elles en train de remporter une bataille décisive contre les laboratoires pharmaceutiques qui rendent leur fonctionnement difficile, en pratiquant une politique commerciale discriminante ? Dans l’affaire opposant le laboratoire Cooper à la SRA Pyxis Pharma (voir l’article « Cooper gagne contre une SRA », publié le 20 avril 2013 dans le N° 2980) la Cour de cassation a rappelé dans une décision datée du 29 mars dernier, et rendue publique le 12 juin, que la pratique de la rétrocession est illégale, y compris dans le cadre d’une SRA (voir Repères p. 16). Elle a également réaffirmé que les fournisseurs doivent établir les conditions catégorielles de vente (CCV) sur la base de critères objectifs. Cela concerne tous les types de clients d’un laboratoire, « La Cour de cassation a censuré la Cour d’appel de Paris sur ce point au motif qu’elle n’a pas précisé les critères appliqués par le fournisseur pour définir ses catégories de clients », commente Caroline Cazaux, avocat associé du cabinet Fourgoux Djavadi et associés. Jusqu’ici, certains laboratoires réfractaires aux SRA ont tendance en effet à les assimiler à des grossistes-répartiteurs. Une assimilation qui permet ainsi aux laboratoires de limiter les remises aux 14,75 % auxquelles sont assujettis les acteurs de la distribution de gros. Avec le jugement de la Cour de cassation, les laboratoires vont devoir établir des conditions de vente différenciées pour les SRA et donc revoir leur barème de remises. Mais, de la même façon, les SRA ne pourront plus se prévaloir de la catégorie « Pharmacies » pour bénéficier de remises jusqu’à 50 %, accordées via le direct aux officinaux. La solution sera certainement à mi-chemin entre les conditions équivalentes à celles des grossistes et les conditions du direct. « Il faut que le ratio soit équilibré », souhaite Nicolas Hardiville, président de la SRA Lab’Officine et président de la Fédération des SRA, créée il y a tout juste trois mois, et qui compte déjà une dizaine de structures parmi ses adhérents.
Pour les patrons de SRA, ce jugement est un tournant en faveur de la reconnaissance de leur activité d’achats groupés, et une ouverture vers un assainissement du secteur et des relations plus équilibrées avec les laboratoires. Fabrice Guigonnat, responsable de la SRA Altapharm, estime que cette cassation est de nature à redorer le blason des SRA : « Notre rôle va en sortir renforcé. » Et « les pions sont en train de bouger, la Cooper a été sommée de créer des contrats spécifiques pour les SRA », se félicite aussi Nicolas Hardiville. Du côté des groupements, on se réjouit également que ce jugement pose les bases de nouvelles règles de conduite. « Les laboratoires sont au milieu du gué, ils vont devoir revoir leurs contrats et leurs modalités de fonctionnement avec les SRA, mais aussi avec les centrales d’achat pharmaceutiques », livre Christian Grenier, président de Federgy (syndicat des groupements). Les groupements veulent aussi peser de tout leur poids lors des négociations avec les fournisseurs. Six d’entre eux (Giropharm, Apsara, Népenthès, Optipharm, Objectif Pharma et Evolupharm) viennent de créer le C6, une structure transverse pour négocier au mieux des achats pour leurs 6 000 adhérents.
L’objectif affiché des structures est maintenant de convaincre les poids lourds du marché OTC, les plus réticents à travailler avec les structures. « Ce sont les plus durs à bouger », reconnaît Nicolas Hardiville. Très souvent en raison de positions dogmatiques. « Les laboratoires qui ne travaillent pas avec nous craignent que les SRA shuntent leurs réseaux de commerciaux et que, sans pression sur les stocks des officines, leurs produits sortent beaucoup moins », explique Fabien Guigonnat. Le nœud du problème, c’est la centrale d’achat pharmaceutique (CAP) adossée à la SRA qui assure le stockage et la distribution des produits. « Ces laboratoires veulent garder la main sur la logistique. S’il n’y avait pas les CAP, ils seraient tous d’accord pour signer des contrats avec les SRA », ajoute Nicolas Hardiville. Alors pour les convaincre, les SRA devront démontrer qu’elles se professionnalisent. « Aujourd’hui, nos SRA s’équipent d’outils tout à fait pertinents pour assurer aux fournisseurs de la visibilité, de l’assortiment, de la synergie avec leurs plans médias. Les flux tendus via la CAP améliorent notre stock, notre trésorerie et optimisent notre espace », énumère le président de la Fédération des SRA. La promesse affichée par les SRA étant de faire gagner des parts de marchés à leurs partenaires. « Les remises ne se justifient pas par le nombre d’adhérents, mais par la valeur ajoutée qu’ils apportent au laboratoire, les CAP des groupements et les SRA qui prennent des engagements et qui les tiennent ont de très bonnes remises », assure Yves Damblemont, directeur commercial et marketing de Gifrer. Pour Nicolas Hardiville, « l’avenir se traduira sûrement par une modification de la tâche du représentant du laboratoire qui aura un travail de formation, de présentation des nouveautés à l’équipe officinale, de merchandising. Bref, de sell-out (vente), à la place d’un boulot de sell-in (achat) ».Cette volonté affichée suffira-t-elle à convaincre les laboratoires ?
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À RETENIR
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