Épisode 25 Infection urinaire et grossesse - Le Moniteur des Pharmacies n° 3173 du 15/04/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3173 du 15/04/2017
 
UNE ANNÉE DANS LA VIE DE MADAME MARTIN

Auteur(s) : ANNE DROUADAINE 

Mylène Martin est enceinte d’un peu plus de 4 mois. Depuis le matin, elle souffre de brûlures lors de la miction. Antibiotiques, paracétamol ou ibuprofène, elle se rend à la pharmacie pour demander conseil.

Chez elle, le 12 avril

Mylène Martin :Zut ! J’ai l’impression que j’ai un début d’infection urinaire. Pourtant, le test était normal au laboratoire la semaine dernière. Je crois qu’il me reste des bandelettes, je vais en faire une. Ah oui, et l’ordonnance pour de la fosfomycine. Ma gynécologue me l’avait prescrite, au cas où. Allez, je suis bonne pour passer à la pharmacie.

A la pharmacie

– Bonjour, je viens chercher de l’ibuprofène et j’ai une ancienne ordonnance de fosfomycine.

– Mr Galien : C’est pour vous l’ibuprofène ?

– Oui, j’ai un début d’infection urinaire.

– Vous êtes enceinte de plusieurs mois il me semble ?

– Oui, un peu plus de 4 mois.

– Vous avez déjà pris un médicament ?

– Il me restait du paracétamol.

– Il faut poursuivre le paracétamol. L’ibuprofène et les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont contre-indiqués à partir du 6e mois de grossesse. Vous n’y êtes pas encore, mais leur usage est également déconseillé avant 6 mois.

– Ah, effectivement, maintenant que vous le dites… J’en ai entendu parler à la télévision. Mais pour quelles raisons sont-ils déconseillés ?

– Ces médicaments peuvent être toxiques pour le fœtus et induire des troubles cardiaques et rénaux également.

– Alors, donnez-moi plutôt du paracétamol !

– D’accord. Pas plus d’un gramme par prise toutes les 4 à 6 heures et pas plus de 4 prises par jour. Pour la fosfomycine, je vais appeler votre gynécologue pour confirmer la conduite à tenir. D’autant que vous devrez réaliser un nouveau prélèvement urinaire pour un ECBU.

– Ah bon ? Elle m’avait dit que ce n’était pas la peine de faire une analyse au labo avant de prendre la fosfomycine…

– Oui, mais là, c’est différent. Vous êtes enceinte, et il faut systématiquement faire un ECBU. Vous en avez déjà fait auparavant ?

– Oui, il me semble.

– C’est comme pour la réalisation d’une bandelette urinaire. Il faut uriner dans un récipient stérile et apporter ensuite l’échantillon au laboratoire.

– C’est bien comme ça que j’ai fait ce matin. En revanche, pour l’ECBU, je suis en déplacement toute la journée et le laboratoire sera fermé lorsque je rentrerai ce soir. Je ferai le test demain matin si ça ne va pas mieux avec la fosfomycine.

– Le prélèvement urinaire doit être effectué avant toute prise d’un antibiotique. Je vous conseille plutôt d’uriner dans le flacon dès ce soir. Vous pourrez ensuite conserver l’échantillon au réfrigérateur, maximum 24 heures, et l’apporter au laboratoire demain matin. Ainsi, après le recueil, vous pourrez prendre dès ce soir le traitement par fosfomycine. Je vais appeler votre médecin, je reviens tout de suite. Asseyez-vous.

– Merci.

Quelques minutes plus tard.

– Votre gynécologue a confirmé. Vous prenez une dose unique de fosfomycine ce soir à deux ou trois heures du repas, au coucher par exemple. Le traitement sera réévalué dans 48 heures avec les résultats de l’antibiogramme. Le Dr Laillet a faxé deux ordonnances pour un ECBU. Vous devrez en effet réaliser un ECBU de contrôle dans 8 à 10 jours, puis tous les mois jusqu’à l’accouchement.

– C’est entendu. Auriez-vous des lingettes intimes pour la toilette avant le prélèvement urinaire ?

– Je vous propose un antiseptique, du Dakin. Avant le recueil des urines, vous réaliserez une toilette intime à l’eau et au savon et appliquerez ensuite l’antiseptique à l’aide d’une compresse, d’un seul geste, d’avant en arrière. Vous pourrez ensuite recueillir les urines du milieu de jet, si possible au moins quatre heures après la précédente miction.

– D’accord. Merci pour vos conseils.

Nous remercions le D r Brice Le Taillandier pour son aimable relecture. Sources : « Grossesse normale », D r Pierre Delorme, D r Elie Azria, La Revue du praticien, vol. 65, octobre 2015 ; « Douleurs abdominales aiguës chez la femme enceinte », D r Charlotte Laplane, P r Claude d’Ercole, La Revue du praticien, vol. 65, décembre 2015 ; Ameli-sante.fr ; Fiche Mémo « Femme enceinte : colonisation urinaire et cystite » de la HAS, novembre 2016 ; Questions-réponses « Jamais d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) à partir du début du 6 e mois de grossesse » de l’ANSM, janvier 2017.

À RETENIR


• L’infection urinaire chez la femme enceinte est une situation très fréquente, favorisée à la fois par des facteurs mécaniques (compression des voies urinaires par l’utérus), hormonaux (diminution du péristaltisme urétéral et hypotonie des voies urinaires dues à l’action de la progestérone, adhérence des germes sur l’épithélium urinaire favorisée par l’hyperhémie vésicale induite par les estrogènes), chimiques (glycosurie, alcalinisation des urines) et des facteurs non spécifiques (antécédents d’infections urinaires, diabète).

• Elle peut avoir de graves conséquences, et est responsable d’une morbidité importante, entraînant des complications infectieuses ou encore une rupture des membranes.

• Le dépistage mensuel par bandelettes urinaires est recommandé : réalisé soit à domicile par la patiente, soit lors de la consultation médicale.

• L’antibiothérapie probabiliste, en cas de cystite chez une femme enceinte, repose en première intention comme en cas de cystite classique, sur la prise de fosfomycine. Le traitement doit être commencé après la réalisation d’un ECBU en vue de la réalisation d’un antibiogramme.

• En cas de cystite durant la grossesse, après guérison, un ECBU de contrôle est réalisé 8 à 10 jours après la fin du traitement antibiotique, puis mensuellement jusqu’à l’accouchement.

• Les anti-inflammatoires sont contre-indiqués à partir du 6e mois de grossesse. Jusqu’au 5e mois de grossesse, les AINS ne doivent être utilisés que lorsqu’ils sont indispensables à la dose efficace la plus faible, et pendant la durée la plus courte possible. Ils ne font pas partie des médicaments du conseil.

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