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Enjeux
Auteur(s) : MAGALI CLAUSENER
Chaque jour, les pharmacies enregistrent de multiples données sur les médicaments et les dispositifs médicaux délivrés, ainsi que sur les produits de parapharmacie vendus. Mais à qui appartiennent ces données ? Qui peut les exploiter et comment ? Des questions soulevées le 14 février lors d’une réunion entre le ministère de la Santé, les syndicats de pharmaciens, les groupements, l’Ordre et la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés). « Les données appartiennent aux pharmaciens et pas aux éditeurs. Or, certains récupèrent ces données sans le dire aux pharmaciens ou font figurer dans leurs conditions générales la possibilité pour les pharmaciens de déléguer à l’éditeur toute la maîtrise des données. Des éditeurs exploitent eux-mêmes les données et les revendent aux laboratoires, relate Gilles Bonnefond, président de l’USPO, qui a assisté à la réunion. Ces situations inquiètent le ministère. L’Ordre est saisi. Notre constat est que tout cela doit être clarifié et remis entre les mains du pharmacien, qui s’engage auprès des patients afin de garantir que l’exploitation de ces informations est conforme à la protection des données de santé. »
Les données de santé et leur utilisation, ce n’est pas un sujet nouveau pour les pharmaciens. Il est toutefois devenu source de tensions depuis l’essor de l’open data : les syndicats pointent du doigt les pratiques des éditeurs de logiciel, considérant qu’elles sont peu transparentes, voire bloquantes pour les pharmaciens (voir Le Moniteur des pharmacies N° 3151 du 17/11/2016). En décembre dernier, l’UDGPO (Union des groupements de pharmaciens d’officine) a mis le feu aux poudres en annonçant qu’elle allait assigner en justice l’éditeur Winpharma. « Nous n’acceptons pas que les éditeurs de logiciel s’arrogent le droit d’utiliser les données de santé qui appartiennent aux pharmaciens sans les en informer. Que font-ils avec ces données ? A qui les revendent-ils ? », déclare Laurent Filoche, président de l’UDGPO. En fait, le contentieux résidait d’abord entre les deux parties, avec le blocage par Winpharma de l’envoi des données vers OffiSanté, un prestataire de groupements membres de l’UDGPO permettant l’analyse des ventes des officines. En janvier, Laurent Filoche explique que l’assignation n’a finalement pas été envoyée : OffiSanté n’est provisoirement plus bloqué puisque l’éditeur a prolongé son contrat avec le prestataire. Pour autant, le président de l’UDGPO maintient ses accusations. Il a entrepris des démarches auprès de la direction de la Sécurité sociale. D’où la réunion qui s’est tenue mi-février au ministère de la Santé, mais sans les éditeurs.
Que répondent ces derniers à cette mise en cause ? « Il n’y a pas dans nos contrats de licence de clause nous permettant d’exploiter ou de céder les données de la pharmacie à des tiers. Nous ne sommes pas revendeur de données », indique Bénédicte Dekeister, dirigeante de Winpharma. Et de sous-entendre que ce n’est pas forcément le cas de tous les éditeurs de logiciel. « Cela n’a pas de sens, réplique Denis Supplisson, vice-président de la FEIMA (Fédération des éditeurs d’informatique médicale et paramédicale ambulatoire). Pharmagest et les autres éditeurs peuvent être amenés à installer des extracteurs au sein des logiciels pour des statisticiens comme Pharmastat. Ces données sont envoyées à un tiers de confiance, comme Résopharma. Elles ne transitent pas par les éditeurs. Affirmer le contraire, c’est méconnaître le fonctionnement des extracteurs. » L’extracteur de données est en fait développé par l’éditeur selon un cahier des charges élaboré par le prestataire, par exemple un panéliste. Les données extraites sont transmises à un tiers de confiance, en charge de les anonymiser. Elles sont finalement envoyées au prestataire qui va les exploiter pour en tirer des statistiques pour les syndicats de pharmaciens, pour les groupements ou pour un autre client, comme un laboratoire ou une institution. Les pharmaciens peuvent également avoir un « feedback » pour leur permettre d’analyser leurs ventes. A priori, tout ce processus doit respecter la législation et la réglementation, et faire l’objet d’une déclaration à la CNIL. De fait, les éditeurs doivent avoir des « correspondants informatique et libertés ». Quant au stockage, il doit répondre aux normes : les éditeurs et les prestataires doivent être hébergeurs de données de santé agréés. Enfin, un contrat doit lier chaque partie. Par exemple, un contrat doit être passé entre Pharmastat et le pharmacien, un autre entre Pharmastat et l’éditeur de logiciel. Enfin, un autre doit être signé entre le panéliste et le tiers de confiance.
Malgré ces explications, tout n’est pas si transparent. Les conditions générales des contrats de certains éditeurs semblent ambiguës. Ainsi, des contrats stipulent que les données de la pharmacie peuvent être exploitées ou stockées à des fins statistiques, sans préciser quel est le client final de l’exploitation des données. « Il y a des conflits d’intérêts, sachant que des éditeurs font partie de groupes qui exploitent les données, et des intérêts financiers, poursuit Gilles Bonnefond. Pour leur part, les pharmaciens doivent se réapproprier leurs données, savoir ce que l’on en fait et pouvoir vraiment décider à qui ils les envoient.» D’où l’intérêt de la réunion du 14 février, qui doit aboutir à la mise en place de recommandations ou de « bonnes pratiques ». De son côté, l’UDGPO organise le 3 mars une réunion au cours de laquelle sont convoqués les principaux LGO (Pharmagest, Smart RX, Winpharma) afin qu’ils répondent aux questions sur l’extraction et l’utilisation des données des pharmaciens. Derrière les interrogations de la profession se pose la question de la rémunération des pharmaciens pour l’exploitation de leurs données. Si, pour le président de l’USPO, ce point n’est pas la priorité, il l’est pour l’UDGPO : « Pour l’instant, l’envoi des données permet au pharmacien d’avoir une remise de 7 euros sur son abonnement mensuel à Résopharma. En Allemagne, pour la même prestation, les officines allemandes perçoivent 4 000 euros par an… », conclut Laurent Filoche.
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