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Enjeux
Auteur(s) : FRANÇOIS POUZAUD
Après quatre années consécutives de baisse de l’activité globale, la tendance s’inverse. Mais cette moyenne masque des situations disparates, avec des officines qui progressent de manière significative et une majorité de pharmacies qui continuent de décrocher. Selon les premières analyses réalisées par le cabinet Fiducial à partir de comptes de résultats de pharmacies sur les trois premiers trimestres de l’année 2016, 58 % des officines enregistrent une baisse de CA en moyenne de 4,48 % et 42 % une hausse moyenne de 3,77 %. « La fracture s’accentue entre les perdants et les gagnants, constate Philippe Becker, expert-comptable, directeur du département pharmacie de Fiducial. Les plus touchées sont les pharmacies rurales et de quartier en raison de leur forte sensibilité aux baisses de prix sur les médicaments remboursables. Une sensibilité liée à la prépondérance dans leur clientèle de patients chroniques. A l’inverse, les phar macies de centre commercial et de centre-ville, capables de diversifier leurs activités, sont plus protégées car elles profitent d’une clientèle de passage ».
L’évolution de l’activité à TVA 2,1% reste d’une grande morosité. Elle n’a plus progressé depuis 2010. Et depuis trois ans, les économies sur les médicaments sont plus tarifaires que jamais. « Nous sommes passés de 600 M€ de baisses de prix sur les médicaments en 2014 à 900 M€ sur 20015, 2016 et 2017 », rappelle Philippe Gaertner, président de la FSPF. De plus, la maîtrise médicalisée des volumes n’a jamais aussi bien fonctionné. Selon des données GERS (Groupement pour l'élaboration et la réalisation de statistiques), les volumes sur le remboursable n’ont progressé que de 0,4 % l’an dernier, alors que la population vieillit et la chronicité des pathologies lourdes augmente. « Sans maîtrise médicalisée, les unités auraient progressé de 4 à 5 % », indique-t-il. Par conséquent, les seuls leviers pour développer le CA de la pharmacie portent sur le hors réglementé et les services. Dans ce condiv, l’effet de taille sera déterminant pour capter la croissance et la différence continuera de s’accroître entre les plus petites officines qui ne disposent pas des capacités suffisantes pour s’adapter et les plus importantes qui ont plus de ressources pour se positionner sur une offre de conseils et de services.
« Cette croissance a été artificielle car liée à la sortie de nombreuses versions OTC du paracétamol, précise Philippe Gaertner. Cela a entraîné un basculement des achats de boîtes de paracétamol remboursables non prescrites vers ces formes non remboursables pour environ 17 millions d’unités [MU] ». Or, la progression du paracétamol non remboursable, liée à l’arrivée précoce et brutale des pathologies hivernales, est estimée à 1,5 MU. Sans ce phénomène de transfert des ventes pour 15,5 millions de boîtes (17 -1,5), le marché OTC, hors paracétamol, serait en baisse de 3,5 MU (15 – 12,5). D’ailleurs, le chiffre d’affaires sur le médicament non remboursable baisse de 0,2 %. Cette baisse s’explique aussi par la contreperformance des médicaments listés non remboursables, malgré une bonne fin d’année.
Sur les produits de la LPPR, la croissance s’alimente d’elle-même en raison d’une offre des fabricants de plus en plus étoffée chaque année, drainant la prescription médicale. Elle est toutefois moindre en 2016 (+ 3%) par rapport à 2015 (+ 4,8 %) en raison de l’application d’un plan d’économies plus rude mêlant baisses de remboursement et maîtrise des volumes.
En para, les efforts importants réalisés par les pharmaciens pour maîtriser l’évolution des prix et proposer une offre compétitive sur ce marché fortement concurrentiel, notamment au travers du développement de marques propres et sur internet, sont récompensés.
Mais le dynamisme de la parapharmacie, comme d’ailleurs celui des produits de la LPPR, porte sur une faible part de CA. Aussi, l’évolution des marges en valeur ne donne pas une grande latitude aux pharmaciens pour investir en confiance dans le développement de leur activité.
La marge du réseau n’est plus que 5,119 Mds€ en 2016 contre 5,286 Mds€ en 2014. En deux ans, elle a donc fondu de 167 M€, alors que l’impact des baisses de prix sur la rémunération sur le médicament remboursable est de 354 M€. La mise en place des honoraires de 0,80 € puis de 1 € a donc permis d’atténuer le choc sans l’amortir complètement. « Sans réforme, la baisse cumulée depuis le 1 er janvier 2015 aurait été de 258 M€ fin 2016, soit une baisse de 4,88 % », souligne Philippe Gaertner. Cela n’est donc pas satisfaisant. D’ou l’urgence de franchir une nouvelle étape dans la réforme des honoraires et d’augmenter leur valeur. L’idéal serait que la rémunération réglementée progresse à l’avenir pour compenser la progression mécanique des charges d’exploitation de l’officine et pouvoir investir dans l’outil de travail. C’est ce que demandent, en substance, les syndicats pharmaceutiques à Nicolas Revel, directeur général de l’Union nationale des caisses d'assurance maladie, à l’orée des négociations conventionnelles.
Les pharmaciens parviennent à sauver l’essentiel grâce à la bonne tenue des ventes sur la LPPR et la para, et surtout aux avantages liés à la dispensation des médicaments génériques (marge, remises, ROSP, coopérations commerciales même si elles ont nettement chuté avec l’instauration d’un plafonnement des remises à 40 %). La situation ne serait pas préoccupante si la profession avait la certitude que « la perfusion générique » soit maintenue dans l’avenir.
À RETENIR
BIEN COMPRENDRE CE QU’EST LA MARGE
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