Le RSI sur la sellette - Le Moniteur des Pharmacies n° 3163 du 12/02/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3163 du 12/02/2017
 
CHEFS D’ENTREPRISE

Temps Forts

Enquête

Auteur(s) : CHLOÉ DEVIS 

Si le chantier sans fin de la réforme de la Sécurité sociale continue à faire couler beaucoup d’encre, celui du RSI n’en déchaîne pas moins des polémiques récurrentes. Certains candidats à la présidentielle envisagent même de l’abolir. Les pharmaciens pour la plupart affiliés à ce régime auraient-ils intérêt à en sortir ? Pas si sûr.

Un désastre », « un cauchemar », « une erreur »… autant de qualificatifs entendus ces dernières années dans la bouche d’acteurs économiques ou politiques à l’encontre du RSI, ou régime social des indépendants, également régulièrement visé par des manifestations de ses affiliés. Créé en 2006, le dispositif assure la couverture sociale des chefs d’entreprise indépendants, artisans et commerçants, dont les auto-entrepreneurs, et des professionnels libéraux en ce qui concerne le risque maladie/maternité. C’est en 2008 que se produit ce que la Cour des comptes a qualifié de « catastrophe industrielle » : la décision de confier à la seule URSSAF le recouvrement des cotisations des indépendants, jusqu’ici éclaté entre plusieurs caisses. Menée dans la précipitation, cette réforme est à l’origine d’un bug technique qui a généré des erreurs tous azimuts dans les dossiers des cotisants, affectant près de 100 000 personnes. Et l’onde de choc ne semble pas amortie : fin novembre encore, des travailleurs indépendants défilaient à Paris pour dénoncer des dysfonctionnements du système.

De quoi en faire un sujet incontournable de la campagne présidentielle. A gauche, Jean-Luc Mélenchon appelle à la suppression pure et simple du RSI, de même que Benoît Hamon ou Emmanuel Macron. Cette possibilité avait été envisagée par Manuel Valls lui-même lorsqu’il était locataire de Matignon, avant une volte-face. A droite, le candidat François Fillon, qui était Premier ministre lors de la mise en oeuvre du « guichet unique », taxe le RSI d’« échec » et propose de le remplacer par une caisse de protection des indépendants. Quant à Marine Le Pen, elle prône également la remise à plat du système qu’elle accuse d’ avoir « gravement contribué à la défaillance de nombreuses entreprises ». Autant de discours pointant les impasses d’un régime qui a pourtant évolué au rythme des projets de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), notamment pour faire face à partir de 2009 à l’arrivée des auto-entrepreneurs.

Au titre de leur exercice libéral, 26 000 pharmaciens titulaires sont affiliés au régime. Ont-ils eux-mêmes des raisons de se joindre au chœur des détracteurs, voire d’envisager des alternatives pour leur protection sociale ? « Les professions libérales ont conservé leur propre régime de retraite, à l’instar de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens », rappelle Henri Clavaud, directeur santé et médical du RSI des professions libérales. « Quant au recouvrement des cotisations maladie/maternité des libéraux, il reste actuellement réparti entre des mutuelles et assureurs conventionnés », précise-t-il.

Côté officines, RSI égal RAS

Philippe Gaertner, président de la FSPF, confirme : « Le fonctionnement du pôle professions libérales du RSI ne donne pas lieu à des plaintes particulières. D’un point de vue conventionnel, le sujet ne prête pas à débat à l’heure qu’il est ». Son homologue à l’USPO, Gilles Bonnefond, est toutefois moins amène : « Le niveau de cotisations des professions libérales est très élevé et la qualité du service n’est pas à la hdiv. La gestion éclatée du système demeure problématique. Alors que tous les régimes tendent à centraliser leur gestion, le nôtre doit également poursuivre ses efforts pour s’améliorer tout en faisant des économies de gestion ». Et d’insister : « Artisans, commerçants et professions libérales, nous sommes dans le même bateau ». Le projet d’une intégration plus poussée des professions libérales au régime en confiant le recouvrement de leurs cotisations d’assurance maladie-maternité aux URSSAF en fait néanmoins frémir certains. « Au vu des problèmes passés, cette inquiétude est compréhensible, mais nos décideurs en ont tiré les leçons et feront en sorte que cela ne se reproduise pas », tempère Henri Clavaud.

La nécessité d’un régime sur mesure

Reste que l’hypothèse de la fin du RSI n’est pas à écarter définitivement. « Il peut être très compliqué de faire perdurer un système qui ne réponde pas aux attentes des cotisants », renchérit Gilles Bonnefond. Sans toutefois prôner un retour dans le giron de la Sécurité sociale. La principale objection qui revient à ce sujet concerne la nécessité d’un régime adapté à des modes d’exercice spécifiques. Certes, il y a un précédent avec l’affiliation de médecins libéraux à la CNAMTS, mais la démarche a été entreprise « en contrepartie de l’exonération d’un certain nombre de charges sociales et sans pouvoir bénéficier des indemnités journalières », souligne Henri Clavaud. Certains pharmaciens peuvent aussi être tentés par une sortie du système à titre individuel. Mais à leurs risques et périls : l’affiliation au RSI reste légalement considérée comme obligatoire pour l’ensemble des travailleurs indépendants et libéraux. 

SORTIR DU RSI, UNE BONNE IDÉE ?

D’un point de vue statutaire, relèvent du régime général de la Sécurité sociale les pharmaciens assurant la gestion d’une pharmacie à usage intérieur d’un établissement hospitalier privé, et ceux qui exercent leur activité dans une situation de subordination vis-à-vis d’un employeur. Les autres doivent être obligatoirement affiliés au RSI, « à une exception », note Annie Cohen Wacrenier, avocate et dirigeante du cabinet ACW Conseil : « Les présidents de SELAS, assimilables à des salariés ». Reste que « la tendance est de privilégier leur affiliation au RSI car on estime qu’ils reçoivent une rémunération de travail en tant que titulaire plutôt qu’en tant que gérants de société », précise l’avocate. D’autant que « qui dit régime général dit cotisations sociales plus élevées pour une couverture à peu près équivalente », renchérit Henri Clavaud. Certains indépendants et libéraux, dans le sillage notamment du MLPS (Mouvement pour la liberté de la protection sociale), demandent leur radiation du régime duquel ils dépendent et se tournent vers des caisses étrangères. Dans le cas du RSI, ils « s’appuient sur l’argument qu’il s’agit d’une société privée, inscrite au registre du commerce et des sociétés, pour revendiquer la liberté du choix de leur protection sociale », explique Annie Cohen Wacrenier. Néanmoins, la justice étant systématiquement saisie par les organismes de sécurité sociale concernés, la bataille risque d’être longue et son issue incertaine. Dans l’intervalle, ceux qui seraient tentés par l’aventure doivent prendre leurs précautions en séquestrant le montant des cotisations dues sur un compte.

À RETENIR


•  A gauche, comme à droite, certains candidats à la présidentielle envisagent d’abolir le RSI.

•  Côté pharmaciens, pas d’anomalies majeures mais le système est jugé cher pour un service parfois aléatoire.

•  Tenté par une sortie à titre individuel ? L’affiliation reste légalement considérée comme obligatoire pour l’ensemble des travailleurs indépendants et libéraux.

LE RSI EN CHIFFRES*


•  2,8 M de cotisants dont 27 % de libéraux

•  15,8 Mds d’euros de cotisations encaissées (tous risques y compris cotisations famille et CSG-CRDS)

•  17,7 Mds d’euros de dépenses de prestations

•  Le taux de cotisation est d’environ 32 % du revenu brut contre 44 % pour un salarié.
*Source: L’Essentiel du RSI, 2015

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