Emmanuel Jeanteur (Carré de l’Optique) «   Entre optique et pharmacie, des synergies à valoriser   »

En quoi les pharmacies sont-elles légitimes sur le terrain de l’optique ?

E.J. Jusque dans les années cinquante, les pharmacies exerçaient également cette activité. L’opticien et le pharmacien sont deux professionnels de santé, ce qui explique notre choix de créer cette relation de partenariat reposant sur les nombreuses synergies à exploiter entre ces deux métiers. Tous deux vendent sur prescription, et proposent des solutions personnalisées accompagnées de conseils avant et après-vente. Enfin, la démarche s’inscrit parfaitement dans la logique de l’évolution du modèle officinal vers une diversification croissante de l’offre et une augmentation des surfaces.

Quel est l’intérêt financier pour le pharmacien d’investir dans cette activité ?

Il s’agit tout d’abord de proposer un service supplémentaire à sa patientèle. La démarche fait particulièrement sens dans les zones rurales et les gros bourgs, du fait de la faible densité d’opticiens. Ensuite, l’optique représente un apport de croissance bienvenu, avec des marges deux fois supérieures à celles de la pharmacie et d’importantes perspectives de développement, sachant que 70 % des Français sont corrigés et que le vieillissement de la population ne fait qu’accentuer cette tendance.

Y a-t-il des prérequis pour se lancer ?

En effet, certaines conditions doivent être réunies pour un partenariat « gagnant-gagnant ». Il faut ainsi disposer d’un flux minimum de clientèle d’environ 150 personnes par jour, et d’une surface disponible de l’ordre de 10 à 15 m² pour permettre l’installation du corner. Bien sûr, la motivation du titulaire et celle de l’équipe sont des facteurs indispensables. Mais au-delà, pour chaque projet, c’est une étude complète de faisabilité que nous menons avant toute prise de décision. Elle comporte une analyse géomarketing croisée avec les données du pharmacien et une prise en compte des possibilités architecturales d’intégration du Carré dans le parcours client. L’investissement à la charge du pharmacien varie entre 75 000 et 95 000 euros, comprenant les travaux d’aménagement, la salle de contrôle de vue équipée, le recrutement d’un opticien, la constitution d’un stock de montures, le matériel informatique…

Qu’apportez-vous aux pharmacies une fois le projet engagé ?

La phase de préparation est décisive et fait une grande part à la formation de l’opticien, des titulaires et des équipes, assurée par nos spécialistes. Après l’ouverture et tout au long du partenariat, nos responsables de secteur visitent régulièrement les officines pour les aider à développer et à faire connaître leur activité, à surmonter leurs difficultés et à mobiliser leurs équipes. La taille du réseau permet également un partage avec eux des bonnes idées. Bien au-delà de l’ouverture, l’accompagnement soutenu est un service dans lequel nous sommes très impliqués, car c’est un facteur important du développement du chiffre d’affaires.

Sur quel modèle économique repose le concept ?

Le modèle repose sur la mutualisation des charges du Carré avec celles de l’officine. Notre accompagnement est rémunéré via une redevance sur le CA du corner, de l’ordre de 6 %. Côté pharmacie, sachant qu’un équipement optique est renouvelé environ tous les trois ans, les premières années sont consacrées à la captation d’une patientèle. Le point mort est atteint en moyenne au bout d’un an et demi à deux ans, et à partir de là, les rendements sont très intéressants, en plus du gain d’image apporté par ce nouveau service.

Quelles sont les prochaines étapes de votre développement ?

Nous intégrons dans nos carrés des outils digitaux permettant d’offrir une offre élargie de montures aux clients et de présenter l’optique dans l’espace de la pharmacie. En parallèle, nous continuons à recruter de nouvelles officines pour compléter notre maillage du territoire. 