Cahiers Formation du Moniteur
Ordonnance
Auteur(s) : CAHIER COORDONNÉ PAR NATHALIE BELIN ET ALEXANDRA BLANC, PHARMACIENNES, SOUS LA RESPONSABILITÉ DE FLORENCE BONTEMPS , DIRECTRICE SCIENTIFIQUE
RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE
POUR QUI ?
Jérémy, âgé de 1 an.PAR QUEL MÉDECIN ?
Un dermatologue de ville.L’ORDONNANCE EST-ELLE RECEVABLE ?
Oui.QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?
QUE SAVEZ-VOUS DU PATIENT ?
Jérémy est suivi pour une dermatite atopique depuis l'âge de 6 mois. Sa maman, qui a elle-même souffert d’eczéma petite, vient de temps en temps chercher Locapred et Dexeryl prescrits par le médecin généraliste. Malgré ce traitement, les lésions présentes sur les joues de Jérémy se sont étendues au front, et des plaques rouges sont progressivement apparues sur le haut de ses bras et sur ses cuisses. Le médecin généraliste a alors intensifié le traitement et a prescrit Nérisone sur les lésions du corps, en plus de Locapred, à poursuivre au niveau du visage. Parallèlement, il a proposé à Mme N. de prendre un rendez-vous avec un dermatologue.QUEL ÉTAIT LE MOTIF DE LA CONSULTATION ?
L'application de Nérisone et Locapred prescrits par le médecin généraliste depuis deux mois a permis une amélioration des lésions, mais pas leur disparition complète : des plaques rouges et rugueuses persistent au niveau des joues et des bras. Il était donc logique de prendre un avis dermatologique.QU’A DIT LE DERMATOLOGUE ?
Il a confirmé le diagnostic et a demandé à Mme N. de lui montrer comment elle appliquait les dermocorticoïdes. La maman de Jérémy a expliqué qu’elle préférait en mettre « le moins possible » et prendre rapidement le relais par l’émollient qu'elle trouvait « moins dangereux ».VÉRIFICATION DE L’HISTORIQUE DU PATIENT
Le mois dernier, Jérémy a utilisé un tube de Locapred et un tube de Nérisone.LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?
QUE COMPORTE LA PRESCRIPTION ?
Désonide (Locapred) et diflucortolone (Nérisone) : les dermocorticorticoïdes sont prescrits dans la dermatite atopique pour leur action anti-inflammatoire et antiprurigineuse. Ils sont classés selon leur niveau d’activité (voir pages 9 et 13). Locapred est un dermocorticoïde à activité modérée ; Nérisone, à activité forte.EST-ELLE CONFORME À LA STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE ?
Oui. Les dermocorticoïdes sont le traitement de référence des poussées de la dermatite atopique. Le choix du niveau d’activité de la molécule dépend notamment de l’âge et de la localisation des plaques. Les dermocorticoïdes d’activité modérée sont utilisés en première intention chez le nourrisson et l’enfant ; ceux d’activité forte conviennent en deuxième intention ou sur les lésions très inflammatoires du corps. La forme galénique est choisie en fonction de la localisation et de l’aspect des plaques. La forme crème, facile à étaler et la plus fréquemment utilisée, peut être appliquée sur tous les types de lésions.Y A-T-IL DES MÉDICAMENTS À MARGE THÉRAPEUTIQUE ÉTROITE ?
Non.Y A-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS POUR CE PATIENT ?
Non, Jérémy ne présente pas d’infections cutanées, ni de lésions ulcérées qui contre-indiqueraient l’utilisation des dermocorticoïdes.LES POSOLOGIES SONT-ELLES COHÉRENTES ?
Il est recommandé d’appliquer les dermocorticoïdes une fois par jour. Une application biquotidienne n’est pas associée à une meilleure efficacité et semble, de plus, compromettre l’observance.Y A-T-IL DES INTERACTIONS ?
Non.LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
Non.QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?
CONCERNANT LES DERMOCORTICOÏDES
Le traitement a déjà été prescrit, mais les modalités d’applications n’étant pas bien comprises par la maman, le pharmacien doit les repréciser en complétant, le cas échéant, celles déjà données par le dermatologue.UTILISATION
L’application se fait en couche fine mais suffisante pour recouvrir complètement la plaque et en débordant légèrement. Une application le soir après la douche, sur la peau encore humide peut être recommandée pour favoriser la pénétration des actifs.QUAND COMMENCER LE TRAITEMENT ?
Le soir même.QUE FAIRE EN CAS D’OUBLI ?
Le dermocorticoïde pourra être appliqué le lendemain matin. Néanmoins, pour une guérison plus rapide, recommander une bonne observance.LE PATIENT POURRA-T-IL JUGER DE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT ?
Oui. L’amélioration des lésions peut survenir dès le 2e ou 3e jour, mais peut parfois prendre beaucoup plus de temps selon la sévérité des symptômes.QUELS SONT LES PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES ?
Les effets indésirables sont locaux et rares aux doses recommandées : atrophie cutanée (rare chez l’enfant), télangiectasies, vergetures ; très rarement : hypertrichose, rosacée, acné. Ils dépendent de la puissance de la molécule, de la durée du traitement, de la surface traitée et sont favorisés par une occlusion.QUELS SONT CEUX GÉRABLES À L’OFFICINE ?
La plupart des effets indésirables sont réversibles.QUELS SIGNES NÉCESSITERAIENT D’APPELER LE MÉDECIN ?
Des signes d'une surinfection (lésions vésiculeuses…), que pourrait aggraver le dermo-corticoïde, imposent un avis médical.CONCERNANT L’ÉMOLLIENT
Mme N. vous indique qu’elle utilise déjà Dexeryl prescrit par le médecin généraliste, mais qu’il n’a pas l’air de bien convenir à Jérémy, car de temps en temps il pleure et refuse qu’elle lui en applique.CONSEILS COMPLÉMENTAIRES
En cas de récidive, il faut reprendre les applications du dermocorticoïde dès l’apparition des premiers signes (rougeurs, prurit) car un traitement précoce assure une guérison plus rapide : cette stratégie permet en effet de traiter plus efficacement les poussées d'eczéma et limite finalement les applications de dermocorticoïdes au long cours.
qu’en pensez-vous ?
La maman de Jérémy est surprise par l’arrêt brutal du dermocorticoïde indiqué par le dermatologue, une fois les plaques d’eczéma guéries. Le médecin généraliste lui avait dit, au contraire, qu’il fallait diminuer progressivement les applications. Ce qu’elle faisait dès l’amélioration obtenue.
Que lui répondre ?
1) Il est effectivement préférable de diminuer progressivement les applications, une fois l’amélioration obtenue.
2) Il faut appliquer le dermocorticoïde jusqu’à disparition des plaques rouges et du prurit sans diminution de la posologie.
Réponse : il n’y a pas d’intérêt à diminuer progressivement les applications car en pratique aucun effet rebond n’est observé. De plus, cette stratégie semble perturber l’observance (les patients ayant tendance à diminuer trop vite les applications, comme Mme N.) ce qui ne fait que prolonger la poussée. Il fallait donc choisir la deuxième proposition.
En revanche, si malgré une application correcte, les poussées, sur une même localisation, sont très rapprochées, le médecin peut proposer la mise en place d’un traitement d’entretien par dermocorticoïde d’activité forte, deux fois par semaine.
qu’en pensez-vous ?
Vous revoyez Mme N. trois semaines plus tard. Jérémy a la varicelle et sa maman vient chercher les soins locaux prescrits par le médecin. Elle vous explique qu’elle a consciencieusement appliqué les dermocorticoïdes et que cela va effectivement mieux, mais qu’il reste quelques plaques au niveau des joues. Quelle est votre réaction ?
1) Il faut arrêter l’application des dermocorticoïdes pour le moment.
2) Le dermocorticoïde peut être poursuivi à condition de ne pas en mettre sur les boutons de varicelle.
Réponse : l’application de dermocorticoïdes est contre-indiquée en cas de dermatose virale, comme la varicelle, en raison du risque d’aggravation de la pathologie infectieuse. Il faut recommander à la maman de Jérémy d’interrompre provisoirement les applications jusqu’à guérison des boutons de varicelle. La bonne réponse est donc la première.
Syndrome cushingoïde
Ensemble de manifestations résultant d’un excès durable d’hormones à action glucocorticoïde ; les manifestations les plus caractéristiques sont la prise de poids et l’anomalie de répartition des graisses.
Eczéma nummulaire
Lésions rondes, inflammatoires, résistantes au traitement.
Erythro-dermie
Erythème généralisé, s’accompagnant d’une desquamation, d’un prurit, et d’une altération de l’état général.
Anamnèse
Exploration des antécédents du patient, grâce à l’interrogatoire.
Impéti- ginisation
Surinfection bactérienne (staphylocoques ou streptocoques) d’une lésion, qui prend un aspect d’impétigo (suintement puis croûtes jaunâtres).
Syndrome de Kaposi-Juliusberg
Se traduit par une aggravation brutale de la maladie avec apparition de lésions nécrotiques et hémorragiques, avec altération de l’état général mettant en jeu le pronostic vital (risque d’extension viscérale de l’infection).
LA DERMATITE ATOPIQUE EN 6 QUESTIONS
1 COMMENT SE MANIFESTE LA MALADIE ?
La lésion élémentaire classiquement observée au cours des poussées est une plaque érythémateuse, mal délimitée (à bords émiettés) qui évolue en quatre stades : érythémateux (placards rouges), vésiculeux (microvésicules imperceptibles à l’œil nu), suintant (rupture des vésicules, spontanément ou après grattage) et croûteux (desquamation puis guérison sans cicatrice). Lorsque l’eczéma se chronicise, le grattage entraîne un épaississement de la peau qui devient quadrillée et pigmentée : elle est dite « lichénifiée ».2 OÙ SIÈGENT LES LÉSIONS ?
Avant 2 ans : la maladie débute en général dans les premiers mois de vie avec une atteinte symétrique des convexités du visage. Le tronc et les membres peuvent être aussi touchés. Les lésions aiguës sont souvent très inflammatoires. La région du siège et le nez sont traditionnellement respectés. Des frottements contre les draps et des trémoussements attestent de la présence d’un prurit. La xérose, d’abord inexistante ou peu marquée, devient plus nette entre 1 et 2 ans.3 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?
Le diagnostic est clinique et s’appuie sur l’anamnèse, même si le patient n’a aucune lésion au cours de la consultation. Le prurit, critère obligatoire, doit être accompagné d’au moins trois des critères suivants : antécédents personnels d’eczéma des plis et/ou des joues chez les moins de 10 ans ; antécédents personnels d’asthme ou de rhinite allergique ou antécédents d’atopie chez les apparentés du premier degré pour les moins de 4 ans ; antécédents de xérose généralisée au cours de la dernière année ; eczéma des grands plis ou eczéma des joues, du front et des convexités des membres chez les moins de 4 ans ; début des signes cutanés avant 2 ans (critère utilisable chez les plus de 4 ans seulement).4 QUELS SONT LES FACTEURS DÉCLENCHANTS ?
Les agents qui initient, pérennisent ou aggravent l’eczéma sont nombreux, parfois controversés ou difficiles à identifier, mais toujours multiples chez un patient donné. Ils sont irritatifs (froid, vent, laine, stress, transpiration, détergents, matières synthétiques…), allergiques (allergènes cutanés, ingérés ou inhalés) ou infectieux (le staphylocoque doré colonise fréquemment l’atopique en dehors de toute impétiginisation des lésions, et serait responsable de certaines poussées ; des levures du genre Malassezia interviendraient dans les formes « tête et cou »).5 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?
La maladie évolue par poussées qui alternent avec des périodes de rémission. Elle régresse souvent spontanément dans l’enfance, mais peut persister à l’âge adulte voire débuter à l’âge adulte.6 QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?
La surinfection des lésions constitue la principale complication : l’eczéma et le grattage conduisent à la suppression locale de la fonction barrière de la peau et créent un milieu favorable aux agents pathogènes, surtout des bactéries (impétiginisation des lésions) et des virus. La surinfection à Herpes simplex virus est à l’origine du syndrome de Kaposi-Juliusberg.
en chiffres
Prévalence en France : 15 à 20 % chez l’enfant ; 2 à 10 % chez l’adulte.
Incidence multipliée par 2 ou 3 ces 30 dernières années ; expliquée en partie par la théorie « hygiéniste » : la baisse de l’exposition aux agents infectieux entraînerait le dérèglement du système immunitaire.
Environ 30 % des nourrissons porteurs de dermatite atopique présentent un asthme à partir de deux ans.
Topographie des lésions de dermatite atopique
1 - Lésions des plis (coudes, cou, aisselles) chez un enfant.
2 - Lésions du visage et du cuir chevelu chez un nourrisson.
Physiopathologie de la dermatite atopique
La dermatite atopique est l’expression cutanée de l’atopie définie comme une prédisposition héréditaire du système immunitaire à privilégier des réactions d’hypersensibilité retardée, médiées par les immunoglobulines E (Ig E) vis-à-vis d’antigènes environnementaux.
Un premier contact avec l’allergène constitue la phase de sensibilisation asymptomatique, tandis que le second contact conduit à l’expression de l’eczéma.
La dermatite atopique résulte également d’anomalies épidermiques déterminées génétiquement : certains éléments protéiques (notamment la filaggrine, protéine-clé pour la fonction barrière de l’épiderme), lipidiques ou encore enzymatiques sont défectueux voire inexistants, de sorte que la peau devient plus fragile et poreuse, laissant s’échapper trop d’eau et pénétrer trop d’allergènes.
COMMENT TRAITER LA DERMATITE ATOPIQUE ?
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
Il n’existe pas de traitement définitif ou étiologique de la dermatite atopique. Le traitement de base est local et symptomatique et implique une prise en charge au long cours. La résolution de l’épisode inflammatoire soulage le patient et limite le risque de surinfection. Une fois la poussée traitée, le traitement de la xérose prévient le risque de rechutes.PRINCIPE
Au cours des poussées, les plaques d’eczéma sont traitées par des topiques anti-inflammatoires et notamment des dermocorticoïdes qui constituent le traitement de référence de la maladie.DERMOCORTICOÏDES
CRITÈRES DE CHOIX
Le choix du dermocorticoïde dépend de l’aspect et du siège des lésions, de la surface à traiter et de l’âge du patient.EN PRATIQUE
Une seule application par jour est recommandée, y compris en phase d’attaque pour améliorer l’observance.EN CAS D’ÉCHEC
L’adhésion au traitement et l’observance sont particulièrement difficiles à obtenir : coût des émollients, oublis, lassitude, manque de temps, corticophobie… Cette dernière constitue la principale source d’échecs thérapeutiques et doit être explorée devant toute persistance ou aggravation des lésions d’eczéma : l’éducation thérapeutique doit être renforcée et le traitement de première intention doit être repris.TACROLIMUS TOPIQUE
Il est indiqué à partir de 2 ans dans les poussées modérées à sévères en cas d’échec des dermocorticoïdes, ainsi qu’en traitement d’entretien chez des patients ayant des poussées d’eczéma fréquentes (au moins 4 par an). Il n’est pas remboursé chez l’enfant avant 16 ans. Selon la HAS, il peut être utilisé chez l'adulte et l'adolescent de plus de 16 ans en cas de dermatite atopique sévère après échec des dermocorticoïdes. En pratique, de nombreux experts considèrent qu’il présente un intérêt en cas de lésions du visage et des paupières, zones où l’on peut craindre des répercussions de la corticothérapie locale répétée et/ou prolongée (atrophie cutanée).TRAITEMENT SYSTÉMIQUE
La ciclosporine a une AMM dans le traitement de la dermatite atopique sévère de l’adulte. Elle est parfois employée hors AMM chez l’enfant. Le traitement n’est que suspensif : il permet surtout de passer un cap inflammatoire avant de reprendre les traitements locaux seuls. D’autres immunosuppresseurs sont parfois utilisés hors AMM (méthotrexate, azathioprine, mycophénolate mofétil).TRAITEMENTS
DERMOCORTICOÏDES
Ils sont classés en fonction de leur puissance d’action, de la classe I (activité faible) à la classe IV (activité très forte), selon la classification internationale ; la classification française (AMM) étant en sens inverse. Le niveau d'activité du dermocorticoïde (DC) dépend de la molécule active elle-même, mais aussi de ses sels, de sa concentration et/ou de la nature des excipients (voir tableau p. 13).CHOIX DE LA GALÉNIQUE
Les formes crème peuvent être appliquées sur tous types de lésions ; elles sont bien adaptées aux plaques suintantes et aux plis. Les formes pommade, plus grasses, sont prescrites sur les plaques lichénifiées : leur effet occlusif augmente l’hydratation et la pénétration. Les formes émulsion (plus légères qu’une crème) sont adaptées aux régions pileuses et les lotions, au cuir chevelu.MODALITÉS D’APPLICATION
Les dermocorticoïdes s’appliquent une fois par jour, le soir après la toilette, de préférence lorsque la peau est encore un peu humide. L’application est poursuivie jusqu’à complète disparition des lésions, sans arrêt progressif (pas de risque d’effet rebond, contrairement à un traitement systémique).EFFETS INDÉSIRABLES
Locaux. Rares chez l’enfant et aux posologies usuelles : atrophie cutanée, télangiectasies, dépigmentation, retard de cicatrisation, voire vergetures, hypertrichose, aggravation d’une rosacée, acné, infections cutanées (essentiellement aggravation d’infections virales) ; exceptionnellement cataracte, glaucome en cas d’application sur les paupières. Ces effets indésirables s’observent principalement avec des dermocorticoïdes d’activité forte à très forte, en application prolongée et/ou sur de grandes étendues. Ils sont le plus souvent réversibles à l’arrêt du traitement.TACROLIMUS TOPIQUE
C’est un traitement de seconde intention qui n’induit pas d’atrophie cutanée, ce qui le fait parfois privilégier en cas d’atteinte du visage et/ou des paupières ou encore des plis axillaires et inguinaux.EFFETS INDÉSIRABLES
Très fréquents et bénins : sensation de chaleur voire de brûlure associée à un prurit intense régressant au bout de quelques jours, intolérance à l’alcool (rougeur du visage, irritations de la peau). L’exposition au soleil doit être réduite durant le traitement et nécessite une protection adaptée (vêtements couvrants, crème solaire très haute protection).LÉGISLATION
Prescription réservée aux dermatologues et aux pédiatres. Remboursement dans certains cas sur une ordonnance d'exception.CICLOSPORINE
La ciclosporine (Néoral) s’utilise dans la dermatite atopique chez l’adulte à la dose de 2,5 à 5 mg/kg/j (doses très inférieures à celles des patients greffés). L’efficacité s’obtient au bout d’un mois environ, l’effet maximal au bout de 3 à 4 mois. Durant le traitement (généralement 6 à 12 mois), les traitements locaux, dermocorticoïdes et émollients sont maintenus. Une surveillance régulière de la fonction rénale et de la pression artérielle est nécessaire durant le traitement ainsi que de la fonction hépatique.EFFETS INDÉSIRABLES
Beaucoup sont dose-dépendants donc relativement limités dans la dermatite atopique : néphrotoxicité, HTA, hirsutisme, hyperplasie gingivale, troubles digestifs, fatigue, céphalées, myalgies, tremblements, paresthésies, hépatotoxicité, hyperglycémie, perturbations biologiques (hyperlipidémie, hyperglycémie…), augmentation du risque infectieux. Augmentation potentielle du risque de lymphomes et autres cancers.INTERACTIONS
Elles sont nombreuses, car la ciclosporine est à la fois substrat et inhibiteur du CYP3A4 et de la glycoprotéine P (voir encadré page 10). Parmi les associations déconseillées : amiodarone, colchicine, diurétiques épargneurs de potassium, répaglinide, jus de pamplemousse, ritonavir, certains macrolides (ex. : clarithromycine, érythromycine) et antifongiques azolés (ex. : kétoconazole). L’association à des molécules comme la nifédipine ou la phénytoïne augmente le risque d’hyperplasie gingivale.LÉGISLATION
Prescription initiale hospitalière semestrielle.EMOLLIENTS
Outre les cosmétiques (gammes « peaux atopiques »), des formules remboursées peuvent être intéressantes pour les patients : l’association glycérol/vaseline/paraffine liquide ; le dispositif médical Atopiclair (remboursé à 60 % sur la base de la LPPR soit 2,04 €) ; des préparations magistrales (notamment le glycérolé d’amidon, apaisant et anti-prurigineux, mélangé à une base grasse) remboursables si l’ordonnance comporte la mention « prescription à but thérapeutique en l’absence de spécialités équivalentes disponibles ».AUTRES
Antihistaminiques. Le prurit ne semble que partiellement dû à l’histamine, d’où une efficacité relative et variable des anti-H1 d’un patient à un autre.PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES
Des essais cliniques ont récemment été mis en place afin de tester un anticorps monoclonal anti-IL31 appelé dupilumab. Celui-ci pourrait faire basculer la prise en charge des dermatites atopiques rebelles dans le champ des biothérapies.
CE QUI A CHANGÉ
• Dexeryl : déremboursement en juillet 2016 ; les génériques restent remboursés.
• Tacrolimus topique : dans un avis de 2013, la HAS considère que le tacrolimus n’a pas de place dans le traitement de la dermatite atopique de l’enfant (de moins de 16 ans), ni en traitement d’entretien chez l’enfant ou chez l’adulte (dans cette indication les applications sont bihebdomadaires et non quotidiennes).
vigilance !!!
Les contre-indications que le pharmacien doit connaître :
• Dermocorticoïdes : dermatoses infectieuses (varicelle, herpès…), lésions ulcérées, acné, rosacée.
A noter : certains RCP contre-indiquent l’application sur les paupières ou sous occlusion. En pratique, de telles applications sont toutefois prescrites, si nécessaire, sur de courtes périodes.
• Tacrolimus topique : enfant de moins de 2 ans.
Pointdevue
Dr Stéphanie Mallet, dermatologue à l’Hôpital de la Timone à Marseille
Chez un grand enfant, en entretien, un eczéma modéré nécessite 1 à 2 tubes par mois en moyenne
Faut-il s’inquiéter lorsqu’un patient a recours à un nombre élevé de tube de dermocorticoïdes ?
Il est impossible de donner une limite. C’est extrêmement variable selon l’âge, la corpulence, le type de peau, l’extension des lésions, leur localisation et le caractère suintant ou lichénifié. De plus, cette notion de limite entretient la corticophobie aussi bien chez le patient que chez les professionnels de santé. Demander au patient de compter ses tubes entre deux visites est davantage un critère indirect d’évaluation de la sévérité de l’atteinte pour le médecin. A titre indicatif, un grand enfant (6 à 7 ans en moyenne) atteint d’un eczéma modéré au long cours, utilise de un à deux tubes par mois en moyenne. En poussées, cela peut aller jusqu’à un tube par jour, ou même plus !
A qui s’adressent les « écoles de l’atopie »* ?
Pas seulement aux patients qui ont un eczéma sévère, mais à tous ceux (parents, enfants…) qui vivent mal la maladie : poussées affichantes, démangeaisons insomniantes, corticophobie, mamans qui culpabilisent, ados mal dans leur peau, ou encore, pour les enfants notamment : des ateliers « anti-grattage » ou « technique de crémage ».
Quel est l’intérêt des pansements humides ?
Cette technique est parfois proposée à l’hôpital avec, si besoin, l’application sous le pansement d’un dermocorticoïde en cas de lésions lichénifiées (peau très épaisse) : le but étant d’intensifier la chaleur et l’humidité locale pour augmenter la pénétration des dermocorticoïdes. Cela génère également un effet apaisant, et protège la peau des coups d’ongles.
* Liste non exhaustive des programmes d’éducation thérapeutique sur fondation-dermatite-atopique.org ou renseignement auprès des CHU.
CÉCILE, 26 ANS, TECHNICIENNE
LA DERMATITE ATOPIQUE VUE PAR LES PARENTS
IMPACT PSYCHOLOGIQUE
Les parents sont souvent las et culpabilisent. L’histoire de leur enfant est généralement typique : diagnostic posé par le généraliste ou le pédiatre ; consultations chez plusieurs dermatologues, « par manque d’efficacité des traitements » (liée à une mauvaise compréhension du maniement des corticoïdes le plus souvent), voire pour certains chez un allergologue pour des explorations multiples et pas toujours justifiées.IMPACT SUR LA VIE QUOTIDIENNE
Le prurit est notamment à l’origine de troubles du sommeil. De nombreux patients limitent leurs activités (baignades, sport…) par crainte d’aggravation des lésions.À DIRE AUX PATIENTS
A PROPOS DE LA PATHOLOGIE
Comprendre : la dermatite atopique est une pathologie chronique. Quelques applications de dermocorticoïdes ne suffisent pas à la faire disparaître. Toutefois, même s’il n’y a pas de règles, dans environ 80 % des cas, elle a disparu à l’adolescence.A PROPOS DU TRAITEMENT
Lutter contre la corticophobie : limiter la quantité ou la durée d’application du traitement est source d’échecs thérapeutiques. Il faut expliquer que traiter tôt et jusqu’à guérison complète permet de moins « consommer » de dermocorticoïde au long cours. Rassurer sur les effets indésirables qui sont rares, locaux et réversibles dans la grande majorité des cas. Pour les limiter, pas plus d’une application par jour et pas sur le visage ni sous occlusion (y compris couches) sans l’avis du médecin. A noter : l’occlusion est une aide thérapeutique dans certains cas (lésions lichénifiées…).
question de patient
Les probiotiques sont-ils utiles ? « Il n’y a pas actuellement de niveaux de preuve assez forts pour leur reconnaître une efficacité, même si certaines études chez la femme enceinte ou allaitante sont encourageantes. De même, homéopathie, phytothérapie et compléments alimentaires, acupuncture, hypnose ou encore ostéopathie restent des méthodes insuffisamment évaluées. »
question de paTIEnt
Que faire, il n’arrête pas de se gratter ? « Le grattage entretient les lésions, favorise l’épaississement de la peau et expose au risque de surinfection. Les écoles de l’atopie proposent des alternatives au grattage : hydratation cutanée suffisante, pulvérisations d’eau thermale froide (la mettre au réfrigérateur éventuellement) ou application de poches de froid avant l’émollient. »
EN SAVOIR PLUS
associationeczema.fr (Association française de l’eczéma)
Onglet Espace thématique/ Dermatologie : 2 brochures pour les patients élaborées en collaboration avec l’Association française de l’eczéma.
MÉMO-DÉLIVRANCE
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