D r Jean-Yves Chauve : «   Les skippers sont mes yeux et mes mains   » - Le Moniteur des Pharmacies n° 3150 du 10/11/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3150 du 10/11/2016
 
INTERVIEW

Vous avez la parole

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR RAPHAËL GODET 

C'est le toubib de la mer. Depuis 40 ans, Jean-Yves Chauve, médecin de profession et marin passionné, veille sur les skippers. Sur le Vendée Globe, dont le départ a été donné le dimanche 6   novembre, il sera joignable 24   heures sur 24 à l’écoute des petits bobos comme des gros. Et heureusement, Jean-Yves Chauve pourra compter sur les trousses à pharmacie concoctées par les officines.

Que trouve-t-on dans la trousse à pharmacie d’un skipper du Vendée Globe ?

Dr Jean-Yves Chauve :Chaque participant a reçu une liste de cent produits qu’il doit absolument avoir dans son bateau : des antalgiques, des morphiniques, des antibiotiques. Il y a aussi de nombreux produits liés aux traumatismes, comme des attelles, des bandes, des compresses… En fait, il faut imaginer un petit hôpital à bord.

Cela veut dire que chaque bateau a subi un contrôle ?

Dr J.-Y.C. : Non, je ne vais pas jusqu’à faire la police. En revanche, chaque marin me signe un document certifiant qu’il a bien tous les produits.

Où se fournissent les skippers ?

Dr J.-Y.C. : Dans la pharmacie de leur choix, l’organisation n’impose rien. En revanche, il arrive que des pharmaciens soient surpris quand ils se retrouvent avec la liste sous les yeux. Je les comprends, car l’ordonnance n’indique pas de maladie réelle, c’est simplement au cas où. Par exemple, on exige d’un côté un laxatif et de l’autre un médicament pour la constipation, avouez qu’il y a de quoi tiquer !

Qu’est-ce qui se passe si un skipper se retrouve en panne de médicaments en pleine mer ?

Dr J.-Y.C. : Dans ce cas, il a le droit de débarquer pour se ravitailler. C’est déjà arrivé. Normalement c’est une course sans escale, sauf quand il y a mise en danger de la vie du marin. Le défi sportif ne peut pas tout permettre.

Cela signifie donc que les marins sont formés aux premiers soins ?

Dr J.-Y.C. : Exactement. Avant chaque départ, ils suivent une formation médicale qui dure une vingtaine d’heures. On leur apprend à faire des points de suture par exemple. Ils doivent être autonomes. L’idée, c’est de prévenir au maximum les risques. C’est pour cela que j’enjoins les skippers à emporter un miroir, si l’on est amené à soigner une blessure au visage, comme recoudre sa langue, par exemple. Certains n’y pensaient pas, mais c’est indispensable. Cette formation permet de faire un état des lieux, de se rassurer. Le skipper doit apprendre un certain nombre de gestes salvateurs pour continuer la course.

En cas de souci à bord, qui décide du médicament à utiliser ?

Dr J.-Y.C. : Moi. Les skippers sont mes yeux et mes mains. Mes yeux pour me décrire leur pathologie, ce qu’ils ressentent. Mes mains pour réaliser les gestes qui soignent à ma place.

Concrètement, comment ça se passe ?

Dr J.-Y.C. : D’abord, il faut rassurer le skipper qui est loin, seul et souvent désemparé. Il faut lui dire que l’on va trouver une solution. Ensuite, on détermine la gravité du problème pour proposer la meilleure solution de soins. Avec la technologie d’aujourd’hui, c’est beaucoup plus facile : le navigateur se prend en photo et je peux voir en direct ce qui se passe.

Savez-vous déjà pour quelles raisons vous allez être sollicité sur ce Vendée Globe ?

Dr J.-Y.C. : Les maux de bouche, les soucis de dents sont les plus récurrents en mer. Il y a la classique inflammation de la gencive, la traditionnelle couronne qui saute, l’amalgame qui tombe, l’aphte qui apparaît avec la fatigue, la dent qui se casse en deux après un choc sur le bateau… Je n’ai jamais eu d’histoire de dents de sagesse, enfin pas encore ! 

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


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