« Je voudrais quelque chose contre le mal de tête » - Le Moniteur des Pharmacies n° 3129 du 21/05/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3129 du 21/05/2016
 

Expertise

DIALOGUE

Auteur(s) : Alexandra Blanc

Les céphalées sont une plainte fréquente et la plupart du temps bénignes. Cependant, banaliser les symptômes et la prise d’antalgiques peut exposer à des conséquences graves. Pour bien conseiller, encore faut-il poser les bonnes questions.

1 Quel est le condiv ?

UNE FEMME DE 30 ANS : Je voudrais de l’ibuprofène, s’il vous plaît.

LE PHARMACIEN : C’est pour vous ?

– Oui, j’ai des maux de tête de temps en temps. L’ibuprofène marche bien.

– Pas de grossesse en cours ?

– Euh… si, mais c’est très récent.

Avant de délivrer un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) chez une femme en âge de procréer, toujours vérifier qu’elle n’est pas enceinte. Les AINS sont fœtotoxiques et augmenteraient le risque d’avortement spontané au premier trimestre de la grossesse. Ils sont contre-indiqués à partir du début du 6e mois de grossesse et à éviter dès le début de la grossesse, même de façon ponctuelle.

LA GRAND-MÈRE DE LOUISE, 7 ANS : Je voudrais de l’Aspégic pour ma petite-fille qui se plaint de maux de tête.

LE PHARMACIEN : A-t-elle de la fièvre ou d’autres symptômes ?

– Non, mais il y a un virus qui circule en ce moment dans sa classe.

L’aspirine est à proscrire en cas de virose, en particulier grippe et varicelle, surtout chez l’enfant et l’adolescent, en raison du risque de survenue de syndrome de Reye (atteinte hépatique et cérébrale potentiellement létale). Chez l’enfant, le paracétamol est à privilégier en première intention.

2 Prenez-vous souvent des antalgiques ?

CAROLINE M., 40 ANS : Je voudrais de la Prontalgine.

LE PHARMACIEN : Il me semble que vous en achetez souvent en ce moment…

– J’ai mal à la tête quasiment tous les jours !

– Depuis quand cela dure-t-il ?

– Au moins 6 mois.

S’assurer que les céphalées ne surviennent pas dans un condiv d’abus médicamenteux. La surconsommation d’antalgiques ou d’antimigraineux peut être à l’origine de céphalées chroniques quotidiennes. Un avis médical est nécessaire pour initier un sevrage et envisager une prise en charge adaptée des céphalées.

3 Quels sont vos symptômes ?

UNE FEMME DE 30 ANS : Bonjour, je voudrais quelque chose de fort contre le mal de tête.

LE PHARMACIEN : Vous souffrez beaucoup ?

– En ce moment ça va. Mais il m’arrive d’avoir des douleurs intenses, avec des nausées. Dans ces moments-là, je ne peux plus rien faire.

Il est important de repérer les signes d’une crise de migraine pour permettre une prise en charge spécifique adaptée (traitement des crises et traitement de fond).

UN HOMME DE 55 ANS : Ma femme se plaint d’un violent mal de tête. Vous n’auriez pas quelque chose de très effiace ? Elle n’a pas l’air bien.

LE PHARMACIEN : La douleur s’est-elle intensifiée progressivement ?

– Non, c’est arrivé très brutalement.

L’installation brutale (moins d’une minute) d’une céphalée sévère doit alerter. Ces céphalées dites en coup de tonnerre constituent une urgence diagnostique, souvent révélatrice d’une hémorragie méningée.

4 Prenez-vous des médicaments ?

UN HOMME DE 50 ANS POSE UNE BOÎTE D’IBUPROFÈNE SUR LE COMPTOIR :

LE PHARMACIEN : C’est pour vous ?

– Oui, j’ai un peu mal à la tête.

– Prenez-vous d’autres médicaments ?

– Je prends du captopril.

L’utilisation d’AINS est déconseillée chez les patients présentant un risque d’insuffisance rénale fonctionnelle, comme les patients traités par inhibiteur de l’enzyme de conversion (ici, captopril), ARA-II ou diurétiques et les sujets âgés.

MME DUPONT, 60 ANS : Je voudrais de l’aspirine pour mes maux de tête.

LE PHARMACIEN : Vous n’êtes pas sous anticoagulant ?

– Si, j’ai de l’Eliquis depuis 1 mois.

L’aspirine, comme tous les AINS, inhibe l’agrégation plaquettaire et expose donc à un risque d’hémorragie. Son association à des traitements anticoagulants (y compris les AOD) est donc fortement déconseillée.

UNE FEMME DE 45 ANS : J’ai mal à la tête, comme si mon cœur battait dans ma tête, et je ne me sens pas très bien. Qu’est-ce que je peux prendre ?

LE PHARMACIEN : Suivez-vous un traitement actuellement ?

– Oui, je prends de la venlafaxine.

Les céphalées pulsatiles peuvent être le signe d’une hypertension artérielle iatrogène. Il s’agit d’un effet indésirable fréquent de certains psychotropes comme la venlafaxine. Une consultation médicale est nécessaire.

L’ESSENTIEL

La céphalée est un symptôme subjectif dont les causes sont très variables. Les plus fréquentes sont dues à des céphalées de tension et à une migraine. Mais dans certains cas, les céphalées sont le symptôme d’une pathologie neurologique ou systémique. Elles peuvent être également d’origine iatrogène.

Les traitements

PARACÉTAMOL

• Pour qui ? Dès la naissance.

• Des effets indésirables ? Rares.

• Quand l’éviter ? En cas d’insuffisance hépatocellulaire et maladie hépatique décompensée.

• Des interactions ? Antivitamine K en cas de prise de paracétamol à la dose maximale (4 g/j) pendant au moins 4 jours.

ASPIRINE

• Pour qui ? Dès la naissance. En pratique, privilégier le paracétamol chez l’enfant en conseil.

• Des effets indésirables ? Risque d’hémorragies, ulcération gastrique, réaction d’hypersensibilité, asthme.

• Quand l’éviter ? Contre-indiqué en cas d’antécédent d’asthme sous AINS ou salicylés, d’ulcère gastroduodénal en évolution, de risque hémorragique, d’insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque sévère. Déconseillé en cas de virose.

• Principales interactions ? AINS, anticoagulants oraux, glucocorticoïdes, héparines (risque hémorragique) ; IEC, diurétiques et ARA II (risque d’insuffisance rénale).

• Grossesse et allaitement ? Contre-indiqué dès le début du 6e mois de grossesse. A éviter dès le début de la grossesse et pendant l’allaitement.

IBUPROFÈNE ET KÉTOPROFÈNE

• Pour qui ? Ibuprofène, à partir de 3mois. En pratique, privilégier le paracétamol chez l’enfant en conseil ; kétoprofène, chez l’adulte de plus de 15 ans en conseil.

• Des effets indésirables ? Gastralgie, ulcérations digestives, hémorragie, rash, œdème, insuffisance rénale.

• Quand les éviter ? Contre-indiqués en cas d’antécédent d’asthme sous AINS ou salicylés, d’hémorragie en évolution, d’antécédent d’hémorragie digestive sous AINS, d’ulcère peptique évolutif ou récent, d’insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque sévère et pour l’ibuprofène de lupus érythémateux disséminé. Déconseillés en cas de varicelle.

• Principales interactions ? Autres AINS, anticoagulants oraux, héparines (risque hémorragique) ; IEC, diurétiques et ARA II (risque d’insuffisance rénale).

• Grossesse et allaitement ? Contre-indiqués dès le début du 6e mois de grossesse. A éviter dès le début de la grossesse. Possible pendant l’allaitement (selon le Centre de référence des agents tératogènes).

CODÉINE

En association avec les autres antalgiques.

• Pour qui ? A partir de 15 ans.

• Des effets indésirables ?

Constipation, nausées, vomissements, somnolence, réactions cutanées allergiques, dépression respiratoire.

• Quand l’éviter ? Chez les métaboliseurs ultrarapides des substrats du CYP2D6 et en cas d’insuffisance respiratoire. Produit dopant.

• Des interactions ? Morphiniques, médicaments sédatifs et alcool.

• Grossesse et allaitement ?

Déconseillé chez la femme enceinte et contre-indiqué pendant l’allaitement.

MESURES HYGIÉNODIÉTÉTIQUES

Pour éviter les céphalées de tension, privilégier un repos régulier, une activité physique au moins 3 fois par semaine, une bonne hydratation, éviter la surconsommation de thé et de café, le stress et les situations d’hypoglycémie.

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