LA SOLUTION DU SALARIÉ À TEMPS PARTAGÉ - Le Moniteur des Pharmacies n° 3119 du 12/03/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3119 du 12/03/2016
 
GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS

Entreprise

Auteur(s) : François Pouzaud

Le groupement d’employeurs est un concept gagnant-gagnant pour le titulaire et le salarié, adapté au contexte économique actuel de l’officine. Ses avantages méritent d’être mieux connus. Témoignages.

Le groupement d’employeurs obéit à un principe simple : « recruter des salariés et les mettre à disposition de ses adhérents », présente Alexandra Glais, directrice de Tisserent. Ce groupement d’employeurs, situé à Loudéac (Côtes-d’Armor), compte plus de 120 adhérents dont trois pharmacies qui se partagent un pharmacien adjoint en CDI à temps plein. Le temps partagé fonctionne également avec des secteurs d’activité différents, comme à Pontivy, dans le Morbihan, où un comptable salarié de Tisserent travaille à la fois pour une pharmacie et un restaurateur.

Une meilleure sécurité d’emploi pour les salariés

Dans une période de crise où la profession manque de visibilité, embaucher un nouveau temps complet peut s’avérer risqué. D’un autre côté, le titulaire peut nourrir des regrets de ne pas pouvoir fidéliser un collaborateur compétent au prédiv qu’il ne peut lui offrir un temps complet. Philippe Pasdeloup, titulaire à Bourges (Cher), a été confronté à ce dilemne. « J’avais une préparatrice fraîchement diplômée qui a été formée pendant deux ans dans mon officine, raconte-t-il. Au terme de sa formation initiale, je n’avais pas de poste à temps plein à pourvoir, mais je souhaitais la conserver dans mon effectif pour sa compétence en dermocosmétique et des besoins ponctuels de remplacement. »

Autour de Bourges, quatre autres pharmacies sont confrontées au même problème. D’où l’idée de créer, entre elles, un groupement d’employeurs. Pharmacentre a alors embauché la préparatrice à plein-temps, liée au groupement par un contrat de travail. « C’est un moyen efficace de fidéliser une main-d’œuvre, notamment en zone rurale », fait remarquer Alexandra Glais.

Les salariés y trouvent également leur compte. Outre l’assurance de travailler à temps plein, ils bénéficient d’une meilleure sécurité d’emploi en raison de la dimension collective du groupement tout en ayant un employeur unique. « C’est une bonne école pour un salarié en début de carrière, estime Patrick Hervé, titulaire adhérent d’un groupement d’employeurs (voir encadré ci-contre). Travailler dans plusieurs officines en même temps permet d’accroître son employabilité en capitalisant plus vite de l’expérience. »

Des prérequis et des concessions

Première condition : l’unité de lieu. « Les pharmacies qui recrutent un salarié à temps partagé doivent être proches géographiquement. Dans notre association, la plus lointaine se trouve à 20 kilomètres de Bourges. Il faut aussi que les titulaires de ces pharmacies aient une vision du métier équivalente et les mêmes méthodes de travail », explique Philippe Pasdeloup. Mais, pour employer le même salarié, Jean-Bernard Brotelande, pharmacien à Loudéac, estime que les pharmacies ne doivent pas être trop proches pour ne pas se faire concurrence. « Il est important aussi que les typologies de pharmacie et les équipes soient différentes, de sorte que les périodes de présence d’un salarié partagé ne se chevauchent pas, mais se complètent. » En pratique, cette situation idéale se rencontre rarement au moment d’établir le calendrier annuel de travail du salarié. « Il faut alors accepter de faire des concessions et d’employer le salarié à des périodes qui ne correspondent pas toujours aux besoins », met en garde Philippe Pasdeloup.

Autre condition de succès: le groupe d’employeurs doit s’astreindre à des règles de conduite morales, comme s’engager à conserver le salarié dans son effectif pendant au moins un an, respecter ses horaires de travail, ne pas le faire venir en dehors des créneaux horaires prévus et en le prévenant à la dernière minute. La communication avec le salarié et les autres employeurs est donc essentielle.

Structure à but non lucratif, le groupement d’employeurs doit avoir une gestion rigoureuse. « Notre budget de fonctionnement se situe a minima entre 1 000 et 2 000 € par an pour couvrir la gestion administrative, les impôts et les frais du cabinet comptable qui se charge des déclarations et des bulletins de salaire. Travailler à plus grande échelle supposerait de se doter d’un local et d’une secrétaire », explique Philippe Pasdeloup, dont le groupement d’employeurs n’a recruté que deux salariés. Le groupement doit aussi avoir une trésorerie équilibrée. « Il faut disposer en trésorerie l’équivalent, chaque mois, des salaires, charges sociales et frais de fonctionnement. » Les coûts sont lissés trimestriellement et proratisés entre les pharmacies.

Comment créer un groupement d’employeurs ?

Un groupement d’employeurs est constitué sous forme associative ou coopérative. Si tous les membres du groupement font partie de la même convention collective, une information écrite doit simplement être adressée à l’inspecteur du travail, au plus un mois après sa constitution. Les statuts, une copie de l’extrait de déclaration d’association parue au Journal officiel, la liste des membres du groupement et le nombre de salariés doivent être joints. Le plus difficile est de « faire vivre la structure et d’être en mesure de garantir en permanence un temps plein aux salariés employés par le groupement », avoue Philippe Pasdeloup, titulaire à Bourges (Cher) et cofondateur du groupement d’employeurs Pharmacentre.

Ce qu’ils en disent

Patrick Hervé et Jean-Bernard Brotelande, installés dans les Côtes-d’Armor, ont fait appel au groupement d’employeurs Tisserent. Installé à Plédran, Patrick Hervé emploie deux jours par semaine une pharmacienne expérimentée. « Cette solution est moins coûteuse que l’intérim et à peine plus chère qu’un emploi à temps partiel classique. C’est un véritable gain de temps car le groupement d’employeurs établit et gère le contrat de travail du salarié, sa formation et son activité. Chaque mois, j’ai simplement à lui adresser une feuille de présence et, en retour, je reçois une facture à acquitter. » La facture est établie au prorata du temps de travail du salarié dans chaque officine. Chaque membre s’acquitte du salaire, des charges sociales et des frais de gestion du groupement, lesquels sont réduits du fait du partage de la main-d’œuvre.

Jean-Bernard Brotelande, titulaire à Loudéac, expérimente lui aussi le temps partagé depuis 2013. « Avec une équipe plus fournie que celles de mes confrères de Plédran et Hénon, j’avais besoin d’un complément de main-d’œuvre pour les vacances scolaires, mais finalement j’emploie ce salarié une à deux journées par semaine. » Comme son confrère, Jean-Bernard Brotelande vante le confort de cette formule : « C’est le groupement d’employeurs qui prend à votre place le risque du CDI et d’un éventuel prud’homme en cas de contentieux avec le salarié. »

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