UN PHARMACIEN SUR QUATRE EN BURN-OUT - Le Moniteur des Pharmacies n° 3106 du 05/12/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3106 du 05/12/2015
 
SOUFFRANCE AU TRAVAIL

L’événement

Auteur(s) : Clémence Lamirand

Pas toujours reconnus dans leur rôle de professionnel de santé, angoissés par le manque de visibilité sur l’avenir des officines,les pharmaciens sontde bons candidats au burn-out. Comme le révèle une étude dévoilée le 3 décembre.

A ma connaissance, il n’y a pas d’étude sur le sujet », avoue Philippe Gaertner, président de la FSPF et du Centre national des professions de santé (CNPS). « Nous ne disposons pas de données », confirme Renaud Nadjahi, président de l’URPS Pharmaciens Ile-de-France. A croire que le burn-out ne concerne pas le pharmacien… Pourtant, dans le cadre du premier colloque national « Soigner les professionnels de santé vulnérables », organisé le 3 décembre par le CNPS et l’association Soins aux professionnels de santé (SPS), une enquête menée auprès de 1905 professionnels, dont 106 pharmaciens, révèle que 27 % des pharmaciens interrogés se disent en situation de burn-out ou à fort risque. Un pourcentage qui est identique à celui des autres professionnels de santé interrogés. De plus, 32 % ont déjà connu cette pathologie par le passé. Finalement, près d’un pharmacien sur deux, 46% exactement, a déclaré avoir déjà été confronté à cette maladie.

Le pharmacien trop souvent réduit à un rôle commercial

Comment interpréter ces premières données ? « Lorsque je me déplace dans les départements, je rencontre de plus en plus de pharmaciens en burn-out », souligne Philippe Gaertner. Cette maladie touche principalement les professions d’aide à la personne et donc particulièrement les professionnels de santé. « Le burn-out est en relation directe avec le métier, décrit Yves Léopold, médecin et vice-président de la caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF). Les personnes concernées s’investissent dans leur travail de manière excessive. Elles s’inquiètent, craignent les erreurs et leurs répercussions. » Finalement, « le pharmacien est un professionnel très exposé, lâche Eric Galam, médecin généraliste et coordonnateur de l’Association d’aide professionnelle aux médecins libéraux (AAPML). Il a une fonction soignante et voit le patient en première intention. Très accessible, il est confronté aux demandes du tout-venant. Il peut aussi se retrouver face à des personnes agressives, l’agressivité pouvant favoriser l’apparition d’un burn-out. » En plus du volet sanitaire, le métier du pharmacien présente un volet commercial, source là encore de stress et d’angoisse. Le manque de reconnaissance peut lui aussi être un poids et favoriser l’apparition d’un épuisement professionnel. « Le pharmacien est trop souvent enfermé dans un rôle peu valorisant qu’est celui de distributeur, confirme Renaud Nadjahi. Il devrait pourtant avoir un rôle d’accompagnement renforcé, notamment en cas de maladie chronique ou auprès des personnes âgées. » Craignant pour l’avenir de leur profession dans un condiv économique difficile, les pharmaciens sont donc une cible pour le burn-out. « Le manque de visibilité est source d’inquiétude et d’angoisse, tout comme les baisses importantes et durables des chiffres d’affaires ou le départ du dernier médecin dans une commune. Le pharmacien doit faire face à des éléments extérieurs qui peuvent avoir des répercussions importantes sur son entreprise et ses salariés », résume Philippe Gaertner.

Des données chiffrées qu’il faudra exploiter

Un état des lieux se révèle aujourd’hui nécessaire. « Les unions régionales des médecins libéraux ont fait beaucoup d’études sur le burn-out, rappelle Yves Leopold. C’est aux URPS de prendre la suite pour les autres soignants. Il est important d’avoir des données pour mettre en place une prévention adaptée et efficace. » Car avec des données fiables, « des outils adaptés aux problématiques spécifiques de ces soignants pourraient être proposés », indique Eric Galam. A condition que le pharmacien concerné par le burn-out reconnaisse qu’il est en difficulté. « Nous incitons les personnes qui en souffrent à se signaler auprès d’une ARS, souligne Philippe Gaertner. Il existe des possibilités d’actions. Les pharmaciens en difficulté ont parfois besoin d’un simple accompagnement pour passer un cap difficile. Ils doivent vraiment se faire recenser, et le faire le plus tôt possible, avant que les difficultés ne soient trop importantes. »

Des solutions adaptées et un numéro Vert

Au niveau de la prise en charge des personnes atteintes de surmenage, des structures pour les professionnels de santé ont vu le jour. L’enquête récemment réalisée pour le colloque du CNPS précise d’ailleurs que les soignants, dans leur très grande majorité, voudraient être soignés dans des centres réservés aux professionnels de santé, loin de leur clientèle et de leur environnement quotidien. Plusieurs centres ont été créés en France, sur des structures existantes, avec des équipes formées et des lits réservés aux soignants. « Comme c’est le métier qui rend malade, il faut une thérapie ciblée sur ce métier », explique Yves Leopold. « Mais nous devons aussi proposer des solutions au-delà des soins, comme des services d’aide juridique, estime Eric Henry, médecin généraliste et vice-président du CNPS. Il faut réfléchir à de nouveaux outils. »

Un numéro Vert a déjà été mis en place il y a dix ans par l’AAPML. Alors réservé aux médecins, le 08 26 00 45 80 est désormais ouvert à tous les professionnels de santé. Des psychologues cliniciens spécialisés dans la prise en charge des troubles psycho-sociaux répondent 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 aux appels. « Ce numéro ne résout pas tout. Mais la démarche permet de sortir du déni, les professionnels de santé ayant souvent du mal à demander de l’aide », conclut Eric Galam.

Un problème individuel, social et professionnel

Appelée syndrome d’épuisement professionnel, cette pathologie concerne toutes les professions en contact avecle public ou d’aideà la personne (professionnels de santé, assistantes sociales, enseignants, policiers…). En cas de burn-out, la personne se sent fatiguée, nerveuse, irritable et trouve moins d’intérêt à son travail. Développant une image très négatived’elle-même, elle peut souffrir d’insomnies ou de maux de tête. Ses collègues l’agacent, ses clients ou patients la fatiguent. Le burn-out, qui affecte souvent des personnes perfectionnistes, est composé de trois dimensions : l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation ou déshumanisation du patient et la baisse de l’accomplissement personnel (ou sentiment d’échec professionnel). Il résulte finalement d’un problème individuel, social et professionnel.

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