Faire mieux c’est possible - Le Moniteur des Pharmacies n° 3102 du 07/11/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3102 du 07/11/2015
 
GÉNÉRIQUES

L’événement

Auteur(s) : François Pouzaud

Les pharmaciens peuvent-ils hisser le taux de substitution au-delà des 85 %, comme le souhaite Nicolas Revel, directeur général de l’Assurance maladie ? Alors que s’ouvrent les négociations conventionnelles sur la rémunération sur objectifsde santé publique (ROSP), la profession n’y est pas opposée à condition qu’on lui en donne les moyens.

Nicolas Revel a annoncé la couleur : le nouveau dispositif de la ROSP doit permettre d’atteindre l’objectif national de substitution actuellement fixé à 85 %, voire de le dépasser (voir Le Moniteur n° 3099). Cet objectif pour 2016 est-il réaliste ? « Oui, sans hésitation », répond Gilles Bonnefond, président de l’USPO, si, visant les médecins, on arrive à recadrer les mentions « non substituable » (NS) et à appliquer le plan générique du ministère de la Santé. « Ce plan multiaction a mis le doigt sur les points de blocage qui portent sur les médecins de ville, les médecins hospitaliers et les patients. Sa mise en œuvre peut être extrêmement efficace pour emporter l’adhésion de tous », ajoute Gilles Bonnefond.

Mais faire sauter ces verrous ne sera pas suffisant pour faire décoller le taux de substitution qui « stagne » actuellement à 83,2 %. L’Assurance maladie compte demander aux pharmaciens des efforts supplémentaires via la nouvelle ROSP 2016 en cours de négociation. Sans un accord gagnant-gagnant, une implication plus forte de la profession sera difficile à obtenir. Nicolas Revel le sait. Aussi, rappelait-il le 15 octobre dernier, lors de la présentation des dépenses de médicaments par l’Assurance maladie, que la modulation de la rémunération pourrait être fonction des résultats obtenus sur la substitution par le pharmacien.

Les pharmaciens mis à contribution

La modulation de la rémunération ne semble faire aucun doute pour Philippe Besset, vice-président de la FSPF, qui pense que le nouveau dispositif incitera les pharmaciens à la substitution maximale: « Le pourcentage de réversion des économies qui sert à calculer la prime devrait être supérieur pour les pharmaciens qui atteignent un taux de substitution à 90 % et plus. Il pourrait être de l’ordre de 40 % ou 45 % au lieu des 35 % actuels. », révèle Philippe Besset. Cette piste a été évoquée lors de la réunion technique de septembre, tout comme la perception d’une indemnité pour le topage des mentions NS, une proposition de la CNAM vivement décriée par l’UNPF. « Faire de la délation n’arrangera pas les relations avec les médecins et ne s’inscrit pas dans des objectifs de santé publique », estime son vice-président, Eric Myon. Par ailleurs, ce syndicat n’est pas aussi optimiste que ses alter ego sur le dépassement du taux de 85 %. « Il est impossible d’aller au-delà, compte tenu d’un taux de NS proche de 10 %, les 5 % restants étant la marge de manœuvre du pharmacien pour donner le bon médicament au bon patient, le générique ne pouvant être délivré pour diverses raisons: intolérance au produit, mauvaise acceptabilité de la forme galénique, ruptures de stock, etc. », explique Eric Myon.

L’union sacrée avec les médecins

Pour éviter que cette négociation ne tourne à un jeu de dupes, il est nécessaire, au contraire, de resserrer les liens avec les médecins. « Il faut retrouver de la cohérence entre les conventions médicale et pharmaceutique et une solidarité entre nos professions pour rassurer les patients, demande Gilles Bonnefond, et, en complément, mener des actions auprès des éditeurs de logiciels pour qu’apparaisse automatiquement en haut de chaque ordonnance un encadré précisant que le pharmacien est autorisé à délivrer des génériques pour tous les médicaments substituables. Cela existe déjà dans un certain nombre d’hôpitaux. Il faut aussi une solidarité et une confiance retrouvées entre nos deux professions pour rassurer les patients. »

Un avis partagé par le Gemme, l’association des génériqueurs. « La participation et la collaboration de tous les professionnels de santé sont nécessaires pour assurer le développement du générique, il faut un système gagnant-gagnant entre médecins, pharmaciens et Assurance maladie, explique Catherine Bourrienne-Bautista, déléguée générale du Gemme. Cela passe notamment par la mise en place de ROSP globales et dynamiques pour les médecins prenant en compte l’ensemble des molécules du Répertoire et les nouveaux entrants dès la chute des brevets. »

Accentuer la pression sur les patients

De son côté, Christian Grenier, président de Federgy (syndicat des groupements de pharmacies), est plus sceptique. Il s’attend, après les élections professionnelles aux URPS en décembre, à un basculement d’une partie de la ROSP des pharmaciens vers celle des médecins pour que ces derniers prescrivent de manière assidue dans le Répertoire. « Les médecins ont toujours signé une convention en obtenant des contreparties », rappelle Christian Grenier. Selon lui, pour favoriser l’acceptation du générique par le patient, il faut faire comme aux Etats-Unis et au Canada : lier la baisse des cotisations d’assurance maladie avec l’engagement des assurés à prendre 100 % de génériques.

En revanche, l’initiative de la CPAM du Tarn de rendre la substitution automatique en restreignant le bénéfice du tiers payant est une solution qui rencontre l’hostilité des trois syndicats. « Il faut respecter la loi. Si l’Assurance maladie souhaite s’engager dans cette direction, il faudra préparer un nouveau div à soumettre au Parlement », juge Philippe Besset. Enfin, la profession attend beaucoup de la prochaine campagne du ministère de la Santé sur le générique en 2016. « Pour qu’elle soit efficace, elle doit s’inscrire dans la durée », considère Laëtitia Hible, présidente de Giphar. Parallèlement, l’Assurance maladie devrait envoyer des courriers aux assurés qui sont contre le générique, comme cela a été fait par le passé pour augmenter le taux de substitution sur l’oméprazole. »

REPÈRES

Novembre 2014

Signature de l’avenant 9 sur la ROSP 2015.

Octobre 2015

Le taux de substitution stagne à 83,2 %.

Novembre 2015

Négociation sur la ROSP 2016.

François Georgin, titulaire à Saint-Clément-de-Rivière (Hérault)

« On peut toujours faire mieux si on nous aide à faire notre travail, mais tant que les médecins qui s’opposent à la substitution ne seront pas sanctionnés, cela me paraît compliqué. Ils expliquent à leurs patients qu’ils ne peuvent plus inscrire la mention “non substituable” sur leurs ordonnances mais travaillent l’inconscient collectif en leur disant que le générique est différent du princeps. Il faut éduquer les patients pour lutter contre cette désinformation. »

David Salabert, titulaire à Montpellier (Hérault)

« C’est mission impossible d’aller au-delà. Je suis déjà à 87,6 % de substitution. Les 12 % restants correspondent pour 7 % aux prescriptions de NS et pour 5 % aux réfractaires absolus, parmi elles des personnes âgées, des gens ayant présenté des réactions d’intolérance aux génériques, etc. Augmenter d’un ou deux points la substitution ne fera faire que des économies de bout de chandelle.

La prochaine étape doit être plus de prescriptions médicales dans le Répertoire des génériques. »

Nathalie Bessard, titulaire à Saulieu (Côte-d’Or)

« Il est temps que le ministère de la Santé communique sur le générique pour faire cesser le buzz médiatique qui défile à la télé pour le dénigrer. Arrêtons aussi l’hypocrisie à l’hôpital où les patients hospitalisés sont soignés avec des génériques mais ont des ordonnances de sortie de médecins spécialistes avec la mention NS. A l’heure de l’interprofessionnalité, les médecins devraient faire preuve d’une plus grande solidarité pour préserver notre système de protection sociale. »

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